En l'an 5 du prophétat (an - 8 de l'hégire), alors qu'il est en butte à une oppression de la part des Mecquois, le Prophète (sur lui la paix) demande à ses disciples d'émigrer : "Il y a en Abyssinie un roi auprès de qui personne ne subit d'oppression. Si vous émigriez dans ce pays jusqu'à ce que Dieu vous facilite les choses (ici) ?" : "عن أم سلمة زوج النبي صلى الله عليه وآله وسلم أنها قالت: "لما ضاقت علينا مكة وأوذي أصحاب رسول الله صلى الله عليه وآله وسلم وفتنوا، ورأوا ما يصيبهم من البلاء والفتنة في دينهم، وأن رسول الله صلى الله عليه وآله وسلم لا يستطيع دفع ذلك عنهم - وكان رسول الله صلى الله عليه وآله وسلم في منعة من قومه ومن عمه، لا يصل إليه شيء مما يكره مما ينال أصحابه -، فقال لهم رسول الله صلى الله عليه وآله وسلم: "إن بأرض الحبشة ملكا لا يظلم أحد عنده. فالحقوا ببلاده حتى يجعل الله لكم فرجا ومخرجا مما أنتم فيه". فخرجنا إليها أرسالا حتى اجتمعنا بها، فنزلنا بخير دار وإلى خير جار، أمِنَّا على ديننا، ولم نخش منه ظلما. فلما رأت قريش أنا قد أصبنا دارا وأمنا اجتمعوا على أن يبعثوا إليه فينا فيخرجنا من بلاده، وليردنا عليهم، فبعثوا عمرو بن العاص وعبد الله بن أبي ربيعة فجمعوا له هدايا ولبطارقته" (al-Bayhaqî dans Dalâ'ïl un-nubuwwa : Silsilat ul-ahâdîth is-sahîha, 3190). Environ 15 musulmans (dont 4 femmes) (nous désignerons leur groupe par la lettre "B") embarquent alors de Jeddah, port de la Mer Rouge, pour l'Abyssinie voisine (cela se passe en rajab de l'an 5 : FB 7/237 ; ZM 3/23).
Les autres musulmans ("A") demeurent auprès du Prophète à la Mecque.
Les Quraysh envoient bientôt deux émissaires essayer de monter le Négus contre leurs compatriotes musulmans, pour qu'il les renvoie à la Mecque. Cependant, le Négus, ayant entendu les deux parties, déboute les deux émissaires, qui rentrent bredouilles (ZM 3/28-29).
Les musulmans installés en Abyssinie recevront bientôt une fausse nouvelle disant que les Mecquois se sont adoucis vis-à-vis de l'islam. Cette fausse nouvelle est due à la prosternation de notables qurayshites entendant la récitation d'un verset du Coran (FB 7/211).
Suite à cette (fausse) nouvelle :
– certains des émigrés demeurent quand même en Abyssinie ("B.A") ;
– d'autres rentrent en Arabie (BN 3/76) (il s'agit du groupe que nous appellerons "B.B").
Ceux qui rentrent d'Abyssinie au pays ("B.B") apprennent très rapidement que la rumeur était fausse et que les choses ont, au contraire, empiré pour les musulmans :
-- certains d'entre eux ("B.B.A") retournent immédiatement en Abyssinie, sans entrer à la Mecque (ZM 3/24) ;
-- d'autres ("B.B.B") entrent quand même à la Mecque.
Parmi ceux qui sont alors entrés à la Mecque ("B.B.B") :
--- il en est ("B.B.B.A") qui y demeurent très peu de temps et qui reprennent rapidement le chemin de l'Abyssinie (BN 3/76) ;
--- et il en est ("B.B.B.B") qui demeurent à La Mecque, du moins pour le moment.
-
Ensuite a lieu la seconde émigration vers l'Abyssinie (Fat'h ul-bârî 7/238).
Y participent :
- des musulmans qui n'avaient pas émigré la première fois mais étaient demeurés à la Mecque (et que l'on peut désigner comme étant : "A.B") ;
- des musulmans qui avaient émigré en Abyssinie mais étaient retournés ensuite à La Mecque ("B.B.B.B"). Je ne sais cependant pas (لا أدري) si tous les musulmans de ce groupe "B.B.B.B" participeront à la seconde émigration, ou si seulement certains parmi eux le feront (ceux-ci formeraient alors "B.B.B.B.B", tandis que ceux d'entre eux qui resteraient à la Mecque seraient les "B.B.B.B.A").
'Uthmân ibn 'Affân fait partie de ceux qui ont participé aux deux émigrations vers l'Abyssinie (Tahdhîb ul-asmâ' wa-l-lughât, an-Nawawî) : c'est pourquoi 'Ubaydullâh ibn 'Adî pourquoi lui dit : "et tu as fait les deux premières émigrations", et 'Uthmân le confirma : "إن الله قد بعث محمدا صلى الله عليه وسلم بالحق، وأنزل عليه الكتاب، وكنت ممن استجاب لله ورسوله صلى الله عليه وسلم، وآمنت بما بعث به محمد صلى الله عليه وسلم، وهاجرت الهجرتين الأوليين، كما قلت؛ وصحبت رسول الله وبايعته، والله ما عصيته ولا غششته حتى توفاه الله" (al-Bukhârî, 3659), "عن عبد الرحمن بن سابط قالوا : لما قدم أصحاب النبي صلى الله عليه وسلم مكة من الهجرة الأولى، اشتد عليهم قومهم وسطت بهم عشائرهم، ولقوا منهم أذى شديدا. فأذن لهم رسول الله صلى الله عليه وسلم في الخروج إلى أرض الحبشة مرة ثانية، فكانت خرجتهم الآخرة أعظمها مشقة، ولقوا من قريش تعنيفا شديدا، ونالوهم بالأذى، واشتد عليهم ما بلغهم عن النجاشي من حسن جواره لهم. فقال عثمان بن عفان: "يا رسول الله، فهجرتنا الأولى وهذه الآخرة إلى النجاشي، ولست معنا؟"، فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "أنتم مهاجرون إلى الله وإليّ. لكم هاتان الهجرتان جميعا"، قال عثمان: "فحسبنا يا رسول الله". وكان عدة من خرج في هذه الهجرة من الرجال ثلاثة وثمانين رجلا، ومن النساء إحدى عشرة امرأة قرشية، وسبع غرائب. فأقام المهاجرون بأرض الحبشة عند النجاشي بأحسن جوار. فلما سمعوا بمهاجر رسول الله صلى الله عليه وسلم إلى المدينة، رجع منهم ثلاثة وثلاثون رجلا ومن النساء ثماني نسوة، فمات منهم رجلان بمكة، وحبس بمكة سبعة نفر، وشهد بدرا منهم أربعة وعشرون رجلا" (At-Tabaqât, Ibn Sa'd).
-
Quand eurent lieu ce retour des émigrés depuis l'Abyssinie ? Et quand eut lieu la seconde émigration pour l'Abyssinie ?
– La prosternation des Polycultistes de La Mecque eut en ramadan de l'an 5 d'après al-Wâqidî (FB 7/210). Les émigrés en Abyssinie retournèrent en Arabie en shawwâl de l'an 5 (Ar-Rahîq ul-makhtûm).
Et la seconde émigration pour l'Abyssinie eut lieu en l'an 5, d'après al-Wâqidî (cf. Tafsîr ul-Qurtubî, 13/340).
– Pour Ibn Hazm, par contre, le retour en Arabie eut lieu après la fin du boycott (Jawâmi' us-sîrat in-nabawiyya, pp. 42-43). Et il ne semble pas parler d'une seconde émigration pour l'Abyssinie : ceux qui rentrèrent en Arabie y demeurant jusqu'à émigrer à Médine, dit-il, exceptés quelques-uns, qui furent emprisonnés à La Mecque ou y moururent (Ibid., p. 43).
– De ce que Ibn Hajar a écrit, il ressort que la seconde émigration pour l'Abyssinie eut lieu après le début du boycott : "قوله: "فلما ابتلي المسلمون": أي بأذى المشركين لما حصروا بني هاشم والمطلب في شعب أبي طالب، وأذن النبي صلى الله عليه وسلم لأصحابه في الهجرة إلى الحبشة، كما تقدم بيانه. قوله: "خرج أبو بكر مهاجرا نحو أرض الحبشة": أي ليلحق بمن سبقه إليها من المسلمين" (FB 7/289). Or le boycott débuta en muharram de l'an 7, dit Ibn Hajar (FB 7/241). Il est alors possible que (différemment de ce que al-Wâqidî dit) ce soit plus tard qu'en l'an 5 que le premier retour des émigrés eut lieu.
-
Après cette seconde émigration, il y a donc :
- des musulmans se trouvant à la Mecque (A.A) (et peut-être B.B.B.B.A, comme nous l'avons vu) ;
- et des musulmans se trouvant en Abyssinie (B.A ; B.B.A ; B.B.B.A ; B.B.B.B.B ; A.B (ces derniers sont ceux qui n'ont participé qu'à la seconde émigration, et pas à la première).
Quand on dit que les musulmans de la seconde émigration pour l'Abyssinie sont au nombre de 83 hommes, parle-t-on :
--- de l'ensemble des musulmans se trouvant en Abyssinie ?
--- ou bien seulement de ceux qui effectuent le second voyage, soit les A.B et les B.B.B.B.B ?
Je ne sais pas (لا أدري).
-
Les musulmans émigrés en Abyssinie :
En l'an 14 du prophétat (début de l'ère hégirienne), le Prophète dit aux musulmans de La Mecque d'émigrer à Médine. Aïcha raconte que "la plupart des musulmans émigrés en Abyssinie" retournent alors en Arabie pour se rendre à Médine : "فقال النبي صلى الله عليه وسلم للمسلمين: "إني أريت دار هجرتكم، ذات نخل بين لابتين" - وهما الحرتان -؛ فهاجر من هاجر قبل المدينة؛ ورجع عامة من كان هاجر بأرض الحبشة إلى المدينة. وتجهز أبو بكر قبل المدينة، فقال له رسول الله صلى الله عليه وسلم: "على رسلك، فإني أرجو أن يؤذن لي"، فقال أبو بكر: "وهل ترجو ذلك بأبي أنت؟" قال: "نعم" (al-Bukhârî, n° 3692 ; voir aussi Fat'h ul-bârî 7/292).
Un groupe de ces musulmans émigrés au pays du Négus, dont Ja'far ibn Abî Tâlib lui-même, demeurent en Abyssinie ; ils ne quitteront celle-ci pour l'Arabie que bien plus tard. Abû Mûssâ al-Ash'arî raconte : "Nous avions appris la nouvelle de la sortie du Prophète quand nous habitions le Yémen. Nous émigrâmes et partîmes alors, deux de mes frères et moi, dans un groupe de 52 personnes des miens. Nous partîmes sur un bateau. Notre bateau nous déposa auprès du Négus en Abyssinie. Nous rencontrâmes là-bas Ja'far ibn Abî Talib et ses compagnons. Ja'far nous dit : "Le Prophète nous a envoyés ici et nous a dit d'y demeurer. Restez donc avec nous." Nous restâmes donc avec lui". Abû Mûssâ al-Asha'rî poursuit : "Nous restâmes donc avec lui jusqu'au moment où nous partîmes tous ensemble. Nous rencontrâmes le Prophète quand il conquit Khaybar..." : "عن أبي موسى رضي الله عنه، قال: بلغنا مخرج النبي صلى الله عليه وسلم ونحن باليمن، فخرجنا مهاجرين إليه، أنا وأخوان لي أنا أصغرهم، أحدهما أبو بردة، والآخر أبو رهم - إما قال: في بضع، وإما قال: في ثلاثة وخمسين، أو اثنين وخمسين رجلا من قومي -، فركبنا سفينة. فألقتنا سفينتنا إلى النجاشي بالحبشة، ووافقنا جعفر بن أبي طالب وأصحابه عنده، فقال جعفر: "إن رسول الله صلى الله عليه وسلم بعثنا هاهنا، وأمرنا بالإقامة، فأقيموا معنا"، فأقمنا معه. حتى قدمنا جميعا، فوافقنا النبي صلى الله عليه وسلم حين افتتح خيبر" (al-Bukhârî, n° 2967). Ce fut le Prophète qui envoya 'Amr ibn Umayya auprès du Négus pour lui demander s'il pouvait faire retourner ses Compagnons qui se trouvaient à ses côtés ; et c'est à ce moment qu'ils rentrèrent (Fat'h ul-bârî 7/607). Ils arrivèrent auprès du Prophète au moment de la victoire sur Khaybar, comme l'a dit Abû Mûssâ. Or Khaybar a eu lieu au début de l'an 7 après l'hégire, donc bien après l'émigration du Prophète à Médine.
Qu'est-ce que Abû Mûssâ voulait-il dire quand il parlait de "la sortie du Prophète" ?
- Soit il s'agit de "sa déclaration d'être prophète de Dieu" (FB 7/238, 606). Dans ce cas :
-- soit Abû Mûssâ a appris cela assez rapidement après qu'elle s'est produite [par exemple en l'an 5 du prophétat], et il a quitté le Yémen dès qu'il l'a appris, son intention était de rejoindre un port du Hedjaz pour rejoindre ensuite le Prophète à la Mecque ; simplement le bateau, pris dans une tempête (FB 7/239), a dû accoster sur la côte opposée, en Afrique ; y ayant rencontré Ja'far et les autres musulmans, celui-ci lui a dit de rester avec eux (comme il l'a relaté) ; il est alors demeuré de nombreuses années en Abyssinie (près de 10 ans) ;
-- soit Abû Mûssâ a appris cela longtemps après que le Prophète l'ait déclaré [par exemple en l'an 12 du prophétat] ; et il a alors pris le bateau, s'est retrouvé au Yémen, où il est resté seulement quelque temps ;
-
- Soit il s'agit de "l'émigration du Prophète à Médine" (FB 7/238). Dans ce cas :
-- il se peut que ce soit bien avant que Abû Mûssâ ait entendu parler de la déclaration faite par Muhammad d'être prophète, et qu'il se soit alors rapidement converti à l'islam, mais soit resté dans son pays et ait attendu que le Prophète émigre de la Mecque pour le rejoindre (FB 7/606).
Par ailleurs :
-- soit il a appris la nouvelle de l'émigration peu de temps après qu'elle s'est déroulée, et il a alors immédiatement pris le bateau pour le rejoindre ; arrivé sans le vouloir en Abyssinie, il y a rencontré Ja'far, qui lui a dit de rester avec eux (comme il l'a relaté) ; il est alors demeuré en Abyssinie près de 6 années ;
-- soit il a appris la nouvelle de l'émigration longtemps après que le Prophète ait émigré ; et il a alors pris le bateau, s'est retrouvé au Yémen, où il est resté seulement quelque temps.
On trouve, chez certains chroniqueurs, le nom de Abû Mûssa parmi ceux qui ont quitté la Mecque pour l'Abyssinie (FB 7/237). Comment comprendre cela quand on voit ici que Abû Mûssa dit au contraire que c'est suite à son départ du Yémen qu'il s'est retrouvé en Abyssinie ?
- Soit ce qui est relaté par al-Bukhârî n'est qu'une partie de son histoire : en fait il avait quitté le Yémen, s'est rendu à la Mecque, puis, de La Mecque, a émigré en Abyssinie. Puis il est reparti auprès des siens au Yémen. Puis il a entendu parler de l'émigration du Prophète à Médine, a alors pris le bateau, etc. (FB 7/237-238) ;
- Soit le chroniqueur voulait seulement parler des musulmans qui étaient présents en Abyssinie. Abû Mûssâ était lui aussi en Abyssinie, mais lui n'y était pas allé depuis la Mecque.
En tous cas Abû Mûssa al-Ash'arî fait partie des musulmans qui furent en Abyssinie et qui rentrèrent à Médine en l'an 7 de l'hégire.
-
C'est donc par trois groupes que les Compagnons sont rentrés définitivement d'Abyssinie :
– Il y eut un groupe qui rentra à la Mecque alors que le Prophète y habitait encore et n'avait pas encore émigré à Médine, et ils demeurèrent donc à La Mecque jusqu'à émigrer plus tard à Médine ("B.B.B.B.A"), tout comme les Compagnons qui purent émigrer à Médine parmi ceux qui n'avaient jamais émigré en Abyssinie ("A").
– Il y eut, d'après Ibn Sa'd (Zâd ul-ma'âd 3/26), un second groupe, composé de 41 personnes, qui retourna en Arabie quand ils surent que le Prophète avait émigré à Médine. Parmi eux :
-- certains furent retenus contre leur gré à la Mecque et ne purent pas émigrer à Médine immédiatement ;
-- 32 d'entre eux purent rejoindre le Prophète à Médine (parmi ces 32 personnes, 24 devaient plus tard participer à Badr).
– Il y eut, enfin, un troisième groupe qui, sous la direction de Ja'far, ne rentrèrent que l'année de Khaybar, c'est-à-dire 6 années après l'émigration à Médine. D'après Ibn Is'hâq, ce furent 16 des personnes ayant quitté la Mecque pour l'Abyssinie qui retournèrent à cette occasion avec Ja'far (Fat'h ul-bârî 7/607).
Même si on tient compte du nombre des Compagnons qui sont morts au pays du Négus, on ne trouve cependant pas le compte des 80 personnes de la seconde émigration pour la Corne d'Afrique. Peut-être que le second groupe était un peu plus important, numériquement, que ce que Ibn Sa'd a trouvé : Aïcha a parlé de "la plupart de ceux qui avaient émigré en Abyssinie"…
-
Le cas de Ibn Mas'ûd : a-t-il fait partie de la première vague d'émigrés en Abyssinie ? de la seconde vague ? des deux à la fois ?
Ce qui est prouvé c'est que :
- d'une part Ibn Mas'ûd a, lui aussi, émigré en Abyssinie ; Ibn Mas'ûd a ainsi raconté qu'au début de l'islam il était autorisé, pendant la prière rituelle, de parler, pour répondre par exemple à une salutation, mais qu'après son retour d'Abyssinie, alors qu'une fois il salua le Prophète occupé à prier, celui-ci ne lui répondit pas ; ayant terminé sa prière, le Prophète lui expliqua que la permission de parler pendant la prière, à laquelle il était habitué, avait été abrogée par Dieu : "عن عبد الله رضي الله عنه، قال: كنا نسلم على النبي صلى الله عليه وسلم وهو في الصلاة، فيرد علينا. فلما رجعنا من عند النجاشي سلمنا عليه، فلم يرد علينا، وقال: "إن في الصلاة شغلا" (al-Bukhârî, 1141, Muslim, 538) ; "عن عبد الله، قال: كنا نسلم في الصلاة ونأمر بحاجتنا. فقدمت على رسول الله صلى الله عليه وسلم وهو يصلي، فسلمت عليه، فلم يرد علي السلام، فأخذني ما قدم وما حدث. فلما قضى رسول الله صلى الله عليه وسلم الصلاة قال: "إن الله يحدث من أمره ما يشاء، وإن الله جل وعز قد أحدث من أمره أن لا تكلموا في الصلاة"، فرد علي السلام" (Abû Dâoûd, 924) ;
- d'autre part il a participé à la bataille de Badr (puisque c'est lui qui trouva Abû Jahl mourant après la bataille : al-Bukhârî, 3745).
La question qui se pose ici est de savoir si Ibn Mas'ûd :
– faisait partie de la première vague des émigrants pour l'Abyssinie, partie en l'an 5 du prophétat (possibilité 1, retenue par al-Wâqidî et Ibn Sa'd : Fat'h ul-bârî 7/237) ;
– ou faisait partie de la seconde vague, partie en l'an 7 du prophétat (possibilité 2, retenue par Ibn Is'hâq : Fat'h ul-bârî 7/237).
– S'il faisait partie de la seconde vague uniquement (possibilité 2), alors il n'est forcément rentré d'Abyssinie en Arabie qu'une seule fois.
– Par contre, s'il faisait partie de la première vague (possibilité 1), alors il y a ensuite deux autres possibilités :
–--- 1.a) soit il a fait partie uniquement de cette première vague vers l'Abyssinie, et pas de la seconde. Dans ce cas il n'est retourné d'Abyssinie en Arabie qu'une seule fois. Et il y a alors deux options :
------- 1.a.a) soit il est retourné d'Abyssinie suite à la rumeur de l'adoucissement des Mecquois et est ensuite demeuré à la Mecque ("B.B.B"), puis n'est plus reparti en Abyssinie ("B.B.B.B.A") ;
------- 1.a.b) soit il n'est pas du tout retourné d'Abyssinie suite à la rumeur de l'adoucissement des Mecquois et est demeuré au pays du Négus ("B.A"), puis, quand il a entendu que le Prophète avait émigré à Médine, il est revenu en Arabie ;
–--- 1.b) soit il a émigré deux fois pour l'Abyssinie : il a fait partie la première vague comme de la seconde. Dans ce cas il est retourné en Arabie deux fois : il est retourné de l'Abyssinie à la Mecque en l'an 5, suite à la rumeur ; puis il est reparti en Abyssinie avec les gens de la seconde vague ("B.B.B.B.B") ; enfin, plus tard il est revenu en Arabie quand il a entendu que le Prophète avait émigré à Médine.
A part le cas 1.a.a, dans tous les autres cas, il y a encore deux possibilités quant au retour définitif de Ibn Mas'ûd en Arabie :
– soit il est passé d'abord par la Mecque avant de se rendre à Médine ;
– soit il est allé directement à Médine, sans passer par la Mecque.
-
Laquelle, ou lesquelles, de ces possibilités retenir ?
Nous avons pour cela quatre indices à évoquer...
- Un premier indice est que, comme nous l'avons vu plus haut, Ibn Mas'ûd a raconté qu'au début de l'islam il était autorisé, pendant la prière rituelle, de parler, pour répondre par exemple à une salutation, mais : "Lorsque nous retournâmes d'auprès le Négus, nous lui adressâmes la salutation, et, alors, il ne nous répondit pas." Après son retour d'Abyssinie, alors qu'une fois il salua le Prophète occupé à prier, celui-ci, une fois sa prière terminée, lui expliqua que la permission de parler pendant la prière, à laquelle il était habitué, avait été abrogée par Dieu : "عن عبد الله رضي الله عنه، قال: كنا نسلم على النبي صلى الله عليه وسلم وهو في الصلاة، فيرد علينا. فلما رجعنا من عند النجاشي سلمنا عليه، فلم يرد علينا، وقال: "إن في الصلاة شغلا" (al-Bukhârî, 1141, Muslim, 538) ; "عن عبد الله، قال: كنا نسلم في الصلاة ونأمر بحاجتنا. فقدمت على رسول الله صلى الله عليه وسلم وهو يصلي، فسلمت عليه، فلم يرد علي السلام، فأخذني ما قدم وما حدث. فلما قضى رسول الله صلى الله عليه وسلم الصلاة قال: "إن الله يحدث من أمره ما يشاء، وإن الله جل وعز قد أحدث من أمره أن لا تكلموا في الصلاة"، فرد علي السلام" (Abû Dâoûd, 924) :
Deux questions se posent ici :
--- L'abrogation de pouvoir parler (par nécessité, hâja), pendant la prière rituelle, a-t-elle été abrogée quand le Prophète était encore à La Mecque ? ou après qu'il eut émigré à Médine ?
--- Quand cette discussion entre Prophète et Ibn Mas'ûd eut-elle eu lieu : avant l'hégire, à la Mecque ? ou bien après l'hégire, à Médine ?
– Ibn Hibbân pense que cette abrogation eut lieu à Mecque, et cette discussion entre le Prophète et Ibn Mas'ûd a eu lieu à la Mecque, avant l'hégire (Fat'h ul-bârî 3/97).
Cet avis se marie avec toutes les possibilités plus haut évoquées :
--- 2 ou 1.a.b (un seul retour de Ibn Mas'ûd en Arabie, mais Ibn Mas'ûd s'est rendu d'abord à la Mecque avant de se rendre à Médine) ;
--- 1.b (deux retours, et alors soit la discussion a eu lieu après le premier retour, soit elle a eu lieu après le second retour mais Ibn Mas'ûd s'est rendu d'abord à la Mecque avant de se rendre à Médine, et il a rencontré le Prophète à La Mecque) (si on retient cette double émigration-retour de Ibn Mas'ûd, alors c'est l'avis de Abu-t-Tîb at-Tabarî que de dire que la discussion entre le Prophète et Ibn Mas'ûd peut avoir eu lieu à la Mecque, après son premier retour en Arabie : Fat'h ul-bârî 3/97) ;
--- 1.a.a (Ibn Mas'ûd est rentré suite à la fausse rumeur, et est ensuite demeuré à la Mecque, jusqu'à émigrer à Médine quand le Prophète dit aux musulmans présents à La Mecque d'y émigrer).
– Ibn Hajar et d'autres ulémas sont quant à eux d'avis que cette abrogation eut lieu à Médine, et que cette discussion eut lieu à Médine.
Ce second avis se marie quant à lui avec trois des possibilités plus haut évoquées :
--- 2 ou 1.a.b : un seul retour de Ibn Mas'ûd en Arabie, et cela, que celui-ci se soit d'abord rendu à la Mecque avant de se rendre à Médine, ou pas ;
--- 1.b : deux retours, et cela, que Ibn Mas'ûd se soit rendu d'abord à la Mecque avant de se rendre à Médine, ou se soit rendu directement à Médine.
Par contre, cet avis ne peut pas se marier avec l'option 1.a.a, puisqu'il ne serait alors plus correct de dire à la fois que la discussion eut lieu à Médine et qu'elle eut lieu "après le retour" de Ibn Mas'ûd d'Abyssinie.
-
- Un second indice est une autre parole de Ibn Mas'ûd : "Nous n'avons cessé d'avoir une force depuis que Omar s'est converti à l'islam" : "عن قيس بن أبي حازم، عن عبد الله بن مسعود رضي الله عنه، قال: "ما زلنا أعزة منذ أسلم عمر" (al-Bukhârî 3650, 3481) :
Ce propos de Ibn Mas'ûd montre qu'il était présent quand Omar s'est converti à l'islam à la Mecque et dans les temps qui ont suivi cette conversion. En quelle année du prophétat Omar s'est-il donc converti à l'islam à la Mecque ?
Pour le savoir il faut se référer à ce que dit son fils Abdullâh, racontant que des gens, ayant appris la récente conversion de Omar, s'étaient massés devant chez eux, pour faire du mal à celui-ci, mais un notable qurayshite survint qui déclara lui avoir accordé sa protection. Abdullâh ibn Omar dit qu'à ce moment il était "un garçon" ("ghulâm") et qu'il questionna alors des personnes au sujet du notable : "Qui est-ce ?" et s'entendit répondre : "C'est al-As ibn Wâ'ïl" : "عن: عمرو بن دينار قال: قال عبد الله بن عمر رضي الله عنهما: "لما أسلم عمر اجتمع الناس عند داره، وقالوا: "صبا عمر!"، وأنا غلام، فوق ظهر بيتي. فجاء رجل عليه قباء من ديباج، فقال: "قد صبا عمر، فما ذاك؟ فأنا له جار". قال: "فرأيت الناس تصدعوا عنه، فقلت: "من هذا؟" قالوا: "العاص بن وائل" (al-Bukharî 3652). Dans une autre version il est dit que Abdullâh était alors âgé de 5 ans (Fat'h ul-bârî 7/224).
Plus tard, à Uhud Abdullâh ibn Omar sera âgé de 14 ans (al-Bukhârî 3871). En fait son âge était alors de plus de 13 ans et moins de 14 ans, comme l'a démontré al-Bayhaqî (Fat'h ul-bârî 7/491). Et Uhud s'est produit en l'an 3 de l'hégire, soit 16 années après le prophétat. Abdullâh est donc né en l'an 2 du prophétat (Fat'h ul-bârî 7/224).
Si au moment de la conversion de son père Omar, il avait 5 ans, cela signifie que la conversion de Omar a eu lieu en l'an 6 ou 7 du prophétat, comme l'écrit Ibn Hajar (Fat'h ul-bârî 7/224). Ibn Kathîr propose pour sa part une date légèrement plus ultérieure (BN 3/94).
-
- Un troisième indice est que Ibn Mas'ûd était présent à La Mecque quand 7 personnes parmi les Quraysh se mirent d'accord à jeter le placenta d'une chamelle sur le dos du Prophète pendant qu'il était en prosternation, chose que 'Uqba ibn Abî Mu'ayt mit à exécution ; ce fut alors Fâtima la fille du Prophète qui vint enlever cette saleté du dos de son père : "فانبعث أشقى القوم فأخذه. فلما سجد النبي صلى الله عليه وسلم، وضعه بين كتفيه". قال: "فاستضحكوا، وجعل بعضهم يميل على بعض. وأنا قائم أنظر، لو كانت لي منعة طرحته عن ظهر رسول الله صلى الله عليه وسلم. والنبي صلى الله عليه وسلم ساجد ما يرفع رأسه. حتى انطلق إنسان فأخبر فاطمة، فجاءت وهي جويرية، فطرحته عنه، ثم أقبلت عليهم تشتمهم" (al-Bukhârî, Muslim) :
"عن عبد الله بن مسعود أن النبي صلى الله عليه وسلم كان يصلي عند البيت، وأبو جهل وأصحاب له جلوس، إذ قال بعضهم لبعض: "أيكم يجيء بسلى جزور بني فلان، فيضعه على ظهر محمد إذا سجد؟" فانبعث أشقى القوم فجاء به، فنظر، حتى سجد النبي صلى الله عليه وسلم، وضعه على ظهره بين كتفيه، وأنا أنظر لا أغني شيئا، لو كان لي منعة". قال: "فجعلوا يضحكون ويحيل بعضهم على بعض، ورسول الله صلى الله عليه وسلم ساجد لا يرفع رأسه. حتى جاءته فاطمة، فطرحت عن ظهره. فرفع رسول الله صلى الله عليه وسلم رأسه ثم قال: "اللهم عليك بقريش" ثلاث مرات" (al-Bukhârî, 237) ; "عن ابن مسعود، قال: بينما رسول الله صلى الله عليه وسلم يصلي عند البيت، وأبو جهل وأصحاب له جلوس، وقد نحرت جزور بالأمس، فقال أبو جهل: "أيكم يقوم إلى سلا جزور بني فلان، فيأخذه فيضعه في كتفي محمد إذا سجد؟" فانبعث أشقى القوم فأخذه. فلما سجد النبي صلى الله عليه وسلم، وضعه بين كتفيه". قال: "فاستضحكوا، وجعل بعضهم يميل على بعض. وأنا قائم أنظر، لو كانت لي منعة طرحته عن ظهر رسول الله صلى الله عليه وسلم. والنبي صلى الله عليه وسلم ساجد ما يرفع رأسه. حتى انطلق إنسان فأخبر فاطمة، فجاءت وهي جويرية، فطرحته عنه، ثم أقبلت عليهم تشتمهم. فلما قضى النبي صلى الله عليه وسلم صلاته، رفع صوته، ثم دعا عليهم" (Muslim, 1794/107) ; "فلما سجد رسول الله صلى الله عليه وسلم وضعه بين كتفيه. وثبت النبي صلى الله عليه وسلم ساجدا. فضحكوا حتى مال بعضهم إلى بعض من الضحك. فانطلق منطلق إلى فاطمة عليها السلام - وهي جويرية -، فأقبلت تسعى. وثبت النبي صلى الله عليه وسلم ساجدا حتى ألقته عنه. وأقبلت عليهم تسبهم" (al-Bukhârî, 498).
Or Fâtima est né environ un an avant le début du prophétat : "ولدت فاطمة في الإسلام؛ وقيل: قبل البعثة. وتزوجها علي رضي الله عنه بعد بدر في السنة الثانية" (FB). "قال ابن السراج: سمعت عبد الله بن محمد بن سليمان بن جعفر الهاشمي يقول: ولدت فاطمة رضي الله عنها سنة إحدى وأربعين من مولد النبي صلى الله عليه وسلم، وأنكح رسول الله صلى الله عليه وسلم فاطمة علي بن أبي طالب بعد وقعة أحد. وقيل: إنه تزوجها بعد أن ابتنى رسول الله صلى الله عليه وسلم بعائشة بأربعة أشهر ونصف، وبنى بها بعد تزويجه إياها بتسعة أشهر ونصف، وكان سنها يوم تزويجها خمس عشرة سنة وخمسة أشهر ونصفا، وكانت سن علي إحدى وعشرين سنة وخمسة أشهر" (Al-Isti'âb). "ونقل أبو عمر عن عبيد اللَّه بن محمد بن سليمان بن جعفر الهاشمي أنها ولدت سنة إحدى وأربعين من مولد النبيّ صلى الله عليه وآله وسلم. وكان مولدها قبل البعثة بقليل نحو سنة أو أكثر، وهي أسنّ من عائشة بنحو خمس سنين، وتزوّجها عليّ أوائل المحرم سنة اثنتين بعد عائشة بأربعة أشهر، وقيل غير ذلك. وانقطع نسل رسول اللَّه صلّى اللَّه عليه وآله وسلّم إلا من فاطمة" (Al-Issâba).
– Ibn Kathîr pense qu'il est probable que cet événement se soit passé après le décès de Abû Tâlib (BN 3/154). Si c'est le cas, alors cela se marie seulement avec l'option 1.a.a, et ne se marie avec aucune des deux options 1.b et 2 ; car, de l'an 10 à l'an 14, Ibn Mas'ûd est sensé être en Abyssinie, et pas à La Mecque.
– Sinon, si on retient l'option 1.b, elle implique que cet événement s'est produit vers l'an 6 du prophétat : en cette année-là, Ibn Mas'ûd est à La Mecque (entre ses deux émigrations pour l'Abyssinie), et Fâtima est âgée de 7 ans. Mais ce fut avant le décès de Abû Tâlib.
– Et si on retient l'option 2, elle implique que cet événement s'est produit : entre l'an 3 du prophétat (date du début des problèmes que les Mecquois causent au Prophète) et la fin de l'an 6 (juste avant la seconde vague d'émigration pour l'Abyssinie) : durant ce laps de temps, Ibn Mas'ûd n'a pas encore quitté La Mecque pour l'Abyssinie, et Fâtima est âgée d'entre 4 et 7 ans ("juwayriya", dit la narration). Abû Tâlib est alors encore vivant.
'Umâra ibn ul-Walîd faisait partie des 7 hommes impliqués dans cet incident (FB 1/457).
Or, sachant que ce 'Umâra avait été envoyé par les Mecquois, avec 'Amr ibn ul-'Âs, pour essayer de monter le Négus contre les Compagnons réfugiés en Abyssinie (BN, 3/79, 3/87) ('Umâra étant celui qui a accompagné 'Amr lors de la première tentative des Mecquois - d'après les auteurs qui disent qu'il y en eut deux, et que Abdullâh ibn Abî Rabî'a fit plutôt partie de la seconde tentative, laquelle eut lieu après Badr : BN 3/88 -) ; et si c'était très peu de temps après la première émigration en Abyssinie (en l'an 5 du prophétat) que cette première tentative de monter le Négus eut lieu ; et sachant que 'Umâra n'est ensuite plus revenu en Arabie, étant resté en Abyssinie à cause d'un ensorcellement subi là-bas (BN 3/80, 3/88 ; FB 1/457) : cela étaye l'idée que cet événement impliquant 'Umâra et ses 6 amis à La Mecque eut lieu au plus tard en l'an 5 du prophétat (donc bien avant le décès de Abû Tâlib).
-
- Un quatrième indice est que Ibn Mas'ûd était en compagnie du Prophète (sur lui soit la paix) lorsqu'eut lieu le Shaqq ul-Qamar : "عن إبراهيم، عن أبي معمر، عن عبد الله رضي الله عنه، قال: انشق القمر ونحن مع النبي صلى الله عليه وسلم بمنى؛ فقال: "اشهدوا". وذهبت فرقة نحو الجبل" (al-Bukhârî, 3656, Muslim, 2800/44) :
– Ibn Hajar a daté cet événement de : environ 5 années avant l'hégire ("كان بمكة قبل الهجرة بنحو خمس سنين" : Fat'h ul-bârî, 6/771), soit vers l'an 8 du prophétat. Ce propos de Ibn Hajar repose peut-être sur cette parole attribuée à Ibn Abbâs : "قال ابن عباس: كان بين نزول هذه الآية* وبين بدر سبع سنين" (Tafsîr ul-Qurtubî, 17/146) (* "سَيُهْزَمُ الْجَمْعُ وَيُوَلُّونَ الدُّبُرَ").
Cette date se marie seulement avec l'option 1.a.a ; elle ne se marie avec aucune des deux options 1.b et 2 ; car si Ibn Mas'ûd a fait partie de la seconde vague d'émigration pour l'Abyssinie, et si celle-ci a bien eu lieu en l'an 7 du prophétat, alors : en l'an 8 Ibn Mas'ûd n'est pas sensé être à La Mecque, mais en Arabie.
– Y aurait-il un spécialiste ancien qui a dit que l'événement du Shaqq ul-Qamar a eu lieu avant l'an 7 du prophétat ?
Si Oui, cela correspondrait mieux avec d'autres dates encore : en effet, le boycott ayant duré de muharram de l'an 7 du prophétat jusqu'à l'an 10, on voit mal les Polycultistes mecquois venir, pendant ce boycott, demander au Prophète de réaliser un signe, comme cela est relaté au sujet de Shaqq ul-Qamar : "عن قتادة، عن أنس بن مالك رضي الله عنه أن أهل مكة سألوا رسول الله صلى الله عليه وسلم أن يريهم آية. فأراهم القمر شقتين، حتى رأوا حراء بينهما" (al-Bukhârî, 3655, Muslim, 2802).
-
Tout cela nous permet de passer en revue les différentes possibilités plus haut évoquées à propos de Ibn Mas'ûd...
Nous avions dit que :
– possibilité 1) soit il a fait partie de la première vague d'émigrés en Abyssinie (possibilité retenue par al-Wâqidî et Ibn Sa'd).
Dans ce cas il y a ensuite deux autres possibilités :
–------------- 1.a) soit il a fait partie de seulement cette première vague vers l'Abyssinie, et pas de la seconde. Dans ce cas il n'est retourné d'Abyssinie en Arabie qu'une seule fois. Et il y a alors deux options :
–--------------- 1.a.a) soit il est retourné d'Abyssinie suite à la rumeur du radoucissement des Mecquois, puis est demeuré à la Mecque ("B.B.B"), et n'est plus reparti en Abyssinie ("B.B.B.B.A") ;
–--------------- 1.a.b) soit il n'est pas du tout retourné d'Abyssinie suite à la rumeur de l'adoucissement des Mecquois, et est demeuré au pays du Négus ("B.A") ; puis, quand il a entendu que le Prophète avait émigré à Médine, il est revenu en Arabie ;
–------------- 1.b) soit il a fait partie des deux vagues d'émigration en Abyssinie : la première comme la seconde. Dans ce cas il est retourné en Arabie deux fois : il est retourné de l'Abyssinie à la Mecque suite à la rumeur ; puis il est reparti en Abyssinie avec les gens de la seconde vague ("B.B.B.B.B") ; enfin, plus tard, quand il a entendu que le Prophète avait émigré à Médine, il est revenu en Arabie pour se rendre à Médine :
– possibilité 2) soit Ibn Mas'ûd a fait partie de seulement la seconde vague d'émigrés en Abyssinie (possibilité retenue par Ibn Is'hâq) ; et, dans ce cas il n'est forcément rentré d'Abyssinie en Arabie qu'une seule fois.
-
L'option 1.a.b est à délaisser, car si Ibn Mas'ûd avait fait partie de seulement la première vague d'immigrés en Abyssinie (survenue en l'an 5 du prophétat) puis n'était rentré d'Abyssinie que pour se rendre à Médine, il n'aurait pas pu être témoin du renforcement des musulmans par la conversion de Omar (survenue en l'an 6 ou 7 du prophétat).
L'option 1.a.a pose problème dans la mesure où une parole de Zayd ibn Arqam montre que lui aussi a connu la période où il était permis de parler pendant la prière ainsi que l'abrogation de cette permission : "عن أبي عمرو الشيباني، قال: قال لي زيد بن أرقم: "إن كنا لنتكلم في الصلاة على عهد النبي صلى الله عليه وسلم يكلم أحدنا صاحبه بحاجته، حتى نزلت: {حافظوا على الصلوات والصلاة الوسطى، وقوموا لله قانتين}. فأمرنا بالسكوت" (al-Bukhârî 1142, Muslim 539). "عن أبي عمرو الشيباني، عن زيد بن أرقم، قال: "كنا نتكلم خلف رسول الله صلى الله عليه وسلم في الصلاة، يكلم الرجل منا صاحبه إلى جنبه، حتى نزلت: {وقوموا لله قانتين}، فأمرنا بالسكوت ونهينا عن الكلام" (at-Tirmidhî, 405 ; Abû Dâoûd, 949). Or Zayd est un médinois, et s'il a connu la période où il était encore autorisé de parler durant la prière, cela signifie que l'abrogation n'avait pas encore eu lieu au moment où le Prophète s'est installé à Médine ; ce n'est donc pas à la Mecque et avant l'émigration que le Prophète aurait pu parler de cette abrogation à Ibn Mas'ûd (Fat'h ul-bârî 3/97).
La seule infime possibilité serait que Ibn Mas'ûd soit retourné à la Mecque avant que le Prophète émigre à Médine, l'y ait rencontré, puis ait émigré à Médine, et que ce soit plus tard, à Médine, que l'abrogation eut lieu et que le Prophète lui en parle ; mais, alors, Ibn Mas'ûd aurait dit : "Puis, après notre émigration à Médine, un jour, nous lui adressâmes la salutation pendant qu'il priait, mais il ne nous répondit alors pas". Il n'aurait pas dit : "Puis, lorsque nous retournâmes d'auprès du Négus, nous lui adressâmes la salutation pendant qu'il priait, mais il ne nous répondit alors pas".
-
- Restent donc 2 possibilités :
- possibilité 1.b : Ibn Mas'ûd a émigré deux fois pour l'Abyssinie : il a fait partie de la première vague comme de la seconde. En effet, après avoir émigré une première fois en Abyssinie, il est rentré à la Mecque suite à la fausse nouvelle. Il y a séjourné quelque temps, puis est reparti en Abyssinie. Et c'est au moment où il se trouvait à la Mecque entre ses deux émigrations en Abyssinie qu'il a été témoin du renforcement des musulmans par la conversion de Omar. Plus tard, après que le Prophète ait émigré à Médine, il est retourné en Arabie. C'est alors, "suite à son retour d'Abyssinie", que, à Médine, il a entendu le Prophète lui dire que l'autorisation de parler pendant la prière avait été abrogée ;
- possibilité 2 : Ibn Mas'ûd a fait partie de seulement la seconde vague d'émigrés en Abyssinie ; il a donc vu le renforcement des musulmans par la conversion de Omar avant d'émigrer pour le pays du Négus. Le Shaqq ul-Qamar a eu lieu avant l'an 7 du prophétat, et c'est ainsi qu'Ibn Mas'ûd y a été présent. Puis il a émigré en Abyssinie. Plus tard, après que le Prophète ait émigré à Médine, il est retourné en Arabie. Et c'est à Médine, "suite à son retour d'Abyssinie", qu'il a entendu le Prophète lui dire que l'autorisation de parler pendant la prière avait été abrogée.
-
Ibn Hajar a :
– en Fat'h ul-bârî 3/96, retenu la possibilité 1.b : "وكان ابن مسعود مع الفريقين".
– mais en Fat'h ul-bârî 7/239, retenu la possibilité 2 : "وظهر بما تقدم من أسماء أهل الهجرة الأولى إلى الحبشة وهم من زعم أن ابن مسعود كان منهم. وإنما كان من أهل الهجرة الثانية".
-
Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).
Wa sallallâhu 'alâ âkhiri anbiyâ'ïhî, wa radhiya 'an sahâbatihî ajma'în.