Je veux me convertir à l'islam ; comment faire ?

Question :

Bonjour. Je suis sur le point de me convertir à l'islam. J'aimerais savoir que doit faire une personne, homme ou femme, pour se convertir à l'islam et pour que cela soit valable. J'aimerais aussi savoir si je dois me faire circoncire. Je voudrais enfin vous dire que j'ai une certaine appréhension liée au fait que je ne connais grand-chose de l'islam et que je risque donc, après ma conversion, de commettre sans m'en rendre compte une erreur par manque de savoir sur les règles éthiques, morales et sociales de l'islam. Mon appréhension concerne les autres musulmans : comment vont-ils me percevoir ? Voilà une de mes craintes : d'être jugé par les musulmans et musulmanes.

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Réponse :

Avant de répondre à vos questions, je voudrais rappeler quelques points importants :

L'islam n'est pas "la religion des arabes". L'islam est un message universel de foi et de justice, une conception de l'univers et de la vie sur terre, une volonté de rechercher un accord complet avec ce que Dieu agrée (sens de "soumission", en arabe : "islam"), un ensemble de croyances, de valeurs, de principes et de règles, auquel n'importe quel être humain peut adhérer.
Que l'on soit typé comme un oriental ou comme un africain à la peau sombre, que l'on soit blond aux yeux bleus ou jaune aux cheveux noirs de jais… Que l'on soit un bédouin du désert ou un cadre informatique travaillant dans un gratte-ciel, que l'on soit navigateur voguant sur les eaux bleues ou ouvrier gagnant sa vie à la sueur de son front et à la force de ses bras… que l'on soit d'Orient ou d'Occident… Que l'on soit né dans une famille musulmane ou que l'on choisisse de se convertir à l'islam par conviction profonde et intime, après avoir été adepte d'une autre religion ou après avoir été athée… Que l'on soit homme ou femme… Que l'on soit d'âge mûr, âgé ou jeune… L'islam accueille toutes celles et tous ceux qui choisissent de plein gré d'adhérer à son message. Et tous ces gens deviennent musulmanes et musulmans au même titre que celles et ceux qui l'étaient déjà avant eux.
"O les hommes, Nous vous avons créés à partir d'un seul homme et d'une seule femme, et Nous avons fait de vous des nations et des tribus pour que vous vous entre-connaissiez. Le plus noble d'entre vous, auprès de Dieu, est le plus pieux d'entre vous. Dieu est Omniscient, Informé" (Coran 49/13). "Et parmi Ses Signes : Il vous a créés de terre, puis vous voilà des hommes se dispersant [dans le monde]. Et parmi Ses Signes : Il a créé pour vous, de vous-mêmes, des épouses pour que vous viviez la tranquillité auprès d'elles et Il a mis entre vous de l'amour et de la tendresse. Il y a en cela des signes pour ceux qui réfléchissent. Et parmi Ses Signes : la création des cieux et de la terre, et la diversité de vos langues et de vos couleurs. Il y a cela des signes pour ceux qui savent" (Coran 30/20-22).

Aucune contrainte ne peut être exercée sur un non-musulman pour le convertir à l'islam. Le Coran dit : "Pas de contrainte en religion : la vérité s'est distinguée de l'erreur" (Coran 2/256).

Au niveau des croyances ainsi que des règles essentielles, il n'y a pas de différences de règles de l'islam par rapport aux différences de contextes dans lesquels vivent les musulmans. En revanche, pour ce qui ne relève pas de ces choses-là, une adaptation de certaines règles par rapport au contexte ('urf) est possible. (Lire à ce sujet mon article Peut-on prendre en compte le contexte ?).
A cela il faut ajouter que l'islam n'enseigne pas les modalités temporelles, que les sources musulmanes se contentent à ce sujet de fournir des règles et non des formes définitives, et que la règle fondamentale à ce sujet est la permission. (Lire à ce sujet mes articles Le concept du religieux en islam - Le raisonnement à partir des références).

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La conversion d'une femme ou d'un homme à l'islam :

Il s'agirait plutôt d'une "re-conversion à l'islam", puisque, comme l'a dit le Prophète (sur lui la paix), chacun et chacune naissent en étant pré-disposés (fit'ra) à l'aspiration et à la soumission à Dieu, ce qui est le sens de "islam".

En islam, il n'y a pas de représentant de Dieu sur terre. De même, il n'y a pas de baptême comme c'est le cas dans le catholicisme. Pour se convertir à l'islam, il suffit d'accepter qu'il n'y a aucune divinité en dehors de Dieu et que Muhammad (sur lui la paix) est le Dernier Messager de Dieu.

Il est bon que des musulmanes et musulmans qui sont présents dans le lieu que l'on habite sachent que l'on s'est reconverti à l'islam. Cela parce que les musulmans forment une grande communauté (qui n'est basée ni sur la race ni sur la couleur de la peau mais sur l'acceptation d'une même conception du sens de la vie et sur le partage de valeurs communes), et le Prophète (sur lui la paix) a souvent rappelé qu'il faut rester attaché à la communauté (al-jamâ'ah) (ce d'autant plus qu'il n'y a pas de clergé en islam). Cela est d'ailleurs utile pour maintes occasions : en cas de décès, par exemple, les frères et sœurs pourront prendre les mesures nécessaires pour que la prière funéraire soit accomplie.

Je voudrais rappeler ici les trois points suivants :

L'acceptation des deux points mentionnés ci-dessus revient à accepter des choses plus globales, comme :
- vouloir sincèrement adorer Dieu et se soumettre à ce que Dieu veut,
- croire comme véridiques et justes toutes les paroles de Dieu (le Coran) et tout ce que Muhammad, Son dernier Messager, a montré comme voie (ses actes, ses paroles et approbations).

"Croire en quelque chose", ce n'est pas seulement "connaître l'existence de cette chose", c'est "connaître, reconnaître l'existence de cette chose, et adhérer à ce que cela représente".

Celui ou celle qui se convertit doit le faire sincèrement (pour Dieu) et non pas pour rechercher un avantage matériel ou social (quel qu'il soit). Les musulmans et musulmanes n'ont aucune possibilité ni aucun droit de dire d'une personne qu'elle s'est convertie pour obtenir un avantage social. Mais Dieu, Lui, sait ce que recèlent les cœurs et Il demandera des comptes à chacun et à chacune le jour du jugement.

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Dans les faits, voici comment se passe la conversion à l'islam :

La personne prononce la formule "Je témoigne qu'il n'y a aucune divinité en dehors de Dieu et que Muhammad est le messager de Dieu". Le mieux est qu'elle le fasse devant d'autres personnes, puisqu'il s'agit d'un témoignage.

Ca y est, on est musulman(e).

Il y a aussi une autre formule que l'on peut également dire et qui est extraite d'une parole du Prophète (sur lui la paix) : "Je crois en Dieu, en l'existence des anges, en les Livres de Dieu, en Ses messagers, au Jour dernier, et au Destin (que le bien et le mal ont été prédestinés par Dieu)."

Il est bon d'informer des musulmans et musulmanes de sa conversion à l'islam.

A partir de ce moment, on apprendra peu à peu non seulement les actes du culte, mais aussi les règles éthiques, morales et sociales que l'islam offre aux femmes et aux hommes. Cela se fera peu à peu. Il ne faut pas s'angoisser dès le premier instant.

Le jour où l'on se convertit, il est mieux de prendre un bain complet (dans certains cas cela peut également être obligatoire), de se débarrasser de la pilosité qui se trouve sous les aisselles et sur le pubis (comme les musulmans et les musulmanes le font tout au long de leur vie).

Certains organismes et instituts délivrent des "certificats d'appartenance à la religion musulmane", certificats établis devant le témoignage, par la personne, de la formule de foi. Ces certificats ne servent pas à prouver aux yeux des autres musulmans sa conversion à l'islam, mais seulement à l'accomplissement du pèlerinage à La Mecque (les autorités saoudiennes demandant souvent, pour des raisons évidentes d'administration, ce genre de certificats).

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L'homme qui se convertit à l'islam doit-il se faire circoncire ?

Ce qui est certain c'est que la validité de la conversion ne repose pas sur la circoncision : même au cas où quelqu'un s'est converti mais ne s'est ensuite pas fait circoncire, sa conversion est en soi valable. La seule question qui se pose est de savoir si se faire circoncire est obligatoire ou pas, et si le fait de ne pas s'être fait circoncire après s'être converti constitue donc un péché ou pas. D'après ash-Shâfi'î et Ahmad, la circoncision est effectivement obligatoire, tandis que d'après Abû Hanîfa elle est fortement recommandée (Al-Fiqh al-islâmî wa adillatuh, p. 461 et p. 2752). Ash-Shawkânî a donné préférence à l'avis disant que ce n'est pas obligatoire (Nayl al-awtâr, tome 1 p. 135). Je partage le second avis. Il y a certes un Hadîth qui rapporte du Prophète (sur lui la paix) qu'il a dit : "Celui qui se convertit, qu'il se fasse circoncire", mais ash-Shawkânî a écrit qu'aucun Hadîth indiquant le caractère obligatoire de la circoncision n'est authentique (Nayl al-awtâr, tome 1 p. 135). Même ceux des savants qui pensent que c'est obligatoire disent qu'au cas où, à cause de l'âge, il n'est pas bon pour quelqu'un de se faire circoncire (selon avis médical), alors il ne le fera pas (Fat'h ul-bârî, tome 10 p. 419).

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Concernant l'appréhension que vous évoquez :

Elle n'a absolument pas lieu d'être. Soyez serein(e).

1- Il est vrai que l'islam dit que chaque musulman ou musulmane qui voit un acte mauvais se commettre doit rappeler à celui qui le commet ses devoirs vis-à-vis de Dieu. Mais le Prophète (sur lui la paix) a aussi enseigné la progressivité dans le rappel, ce qui est valable pour les musulmans en général, mais aussi et surtout pour ceux qui viennent de se convertir à l'islam. Le Prophète (sur lui la paix) avait envoyé Mu'âdh au Yémen vers la fin de sa vie, alors que la plupart des obligations et des interdictions de l'islam étaient déjà révélées. Or, il lui avait bien recommandé d'être progressif lorsqu'il informerait ceux qui se convertiraient à l'islam des obligations leur incombant : "Tu vas te rendre auprès de Gens du Livre. Que la première chose à laquelle tu les invites soit l’adoration de Dieu. Lorsqu’ils connaîtront Dieu, informe-les que Dieu a rendu obligatoires cinq prières dans la journée et la nuit. Et lorsqu’ils feront cela, informe-les que Dieu a rendu obligatoire sur eux une aumône qui sera prise de leurs riches et donnée à leurs pauvres…" (al-Bukhârî et Muslim). Lisez à ce sujet l'article suivant : Comprendre les priorités et la progressivité. Les musulmans et musulmanes doivent donc se souvenir de cet enseignement du Prophète (sur lui la paix) et ne pas vouloir tout rappeler (ce qui est fondamental / obligatoire, comme ce qui est secondaire / purement facultatif) à celui ou à celle qui vient de se convertir.

2- Et s'il s'agit de quelque chose de nécessaire qu'il faut rappeler, les musulmans et musulmanes doivent également se souvenir que le Prophète a enseigné dans ce cas la douceur. Surtout vis-à-vis de celui ou celle qui vient d'embrasser l'islam et qui ne sait pas grand-chose de ses règles, pour qui il faut avoir beaucoup de compréhension.
Mu'âwiya ibn ul-Hakam raconte ainsi une expérience vécue auprès du Prophète alors qu'il était un converti de fraîche date : "Pendant que j'accomplissais la prière sous la direction du Prophète, quelqu'un éternua. Je dis alors : "Que Dieu te fasse miséricorde !" [formule que l'on dit en pareille circonstances, mais pas pendant la prière]. Les gens me regardèrent alors avec étonnement. Je leur dis : "Eh bien, qu'avez-vous à me regarder ainsi ?" Ils se mirent alors à tapoter de leurs mains sur leurs cuisses. Lorsque je vis qu'ils me demandaient ainsi d'observer le silence, je me tus. Lorsque le Prophète termina sa prière… Mes parents peuvent être témoins du fait que je n'ai jamais vu quelqu'un, ni avant lui ni après lui, enseigner d'une meilleure façon que lui. Par Dieu, il ne me blâma pas, il ne me frappa pas, il ne me dit rien de mal. Il me dit : "Dans cette prière, il ne convient pas qu'il y ait quelque chose relevant des paroles des gens. Cette prière n'est que proclamation de la pureté de Dieu, proclamation de la grandeur de Dieu, et récitation du Coran." Je lui dis : "O Messager de Dieu, il n'y a pas longtemps que j'ai quitté l'état de non-croyance, et Dieu nous a donné l'islam. Mais il y a parmi nous des gens qui se rendent auprès de devins." "Eh bien, ne te rends pas auprès d'eux" me dit-il … " (Muslim, n° 537).
Un autre Compagnon du Prophète raconte : "Nous étions en train de parler de quelque chose. Il n'y avait pas longtemps que je m'étais converti à l'islam, et je dis [par habitude, pour appuyer mon propos] : "Par Al-Lât et Al-'Uzzâ [deux idoles de l'Arabie pré-islamique]". Les autres Compagnons du Prophète présents me dirent : "Quelle horrible parole as-tu dite là ! Rends-toi auprès du Prophète et informe-le de ce que tu as dit, car nous pensons que tu es peut-être devenu incroyant." Je me rendis auprès du Prophète et lui racontai ce qui s'était passé. Il me dit : "Dis trois fois : "Il n'y a aucune divinité en dehors de Dieu, qui est Unique et n'a pas d'associé", demande trois fois à Dieu de te protéger contre le démon, souffle sur ta gauche trois fois, et ne redis plus cela" (an-Nassaï, n° 3776). Le Prophète avait compris qu'il n'avait pas fait ce serment par apostasie, mais simplement parce que l'habitude n'avait pas encore disparu de chez lui.
C'est à ce genre de fait, tout à fait prévisible et involontaire de la part de personnes qui viennent de se convertir que se rapporte, d'après Ibn Hajar, cette autre parole du Prophète : "Celui qui fait un serment et a dit "Par al-Lât et al-'Uzzâ", qu'il dise (aussitôt) : "Il n'y a aucune divinité en dehors de Dieu". Et celui qui a dit "Viens jouer à un jeu de hasard", qu'il donne une aumône" (al-Bukhârî, n° 4579, Muslim, n° 1647). Les Arabes d'avant l'islam étaient friands des jeux de hasard avec mise d'argent, et si un musulman fraîchement converti disait par réflexe, sans réfléchir, à un ami : "Viens jouer à un jeu de hasard", il devait bien sûr se retenir et donner lui-même une aumône à un pauvre pour changer ses habitudes.

3- Enfin, il faut savoir qu'en islam, les musulmans et musulmanes rappellent, ils ne jugent pas. Le Jugement pour les croyances et les actes se fera par Dieu, le jour du jugement. Il est vrai que, dans un pays musulman, – comme dans tous les pays du monde –, des juges (qadhî / hâkim) existent dans des tribunaux qui rendent des jugements juridiques face à une infraction constatée de la loi du pays. Mais ce n'est pas de ce jugement-là que je parle. Je parle du jugement qui consisterait à dire : "Toi tu iras en enfer", ou "Toi tu es un mauvais musulman", etc. : ce genre de jugement est réservé à Dieu.

Alors, ne vous tracassez pas.

Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

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