Iblîs, le djinn qui s'est rebellé contre un ordre de Dieu relatif à l'homme

Une objection :

"Vous avez écrit que tout mu'min est aussi muslim [cliquez ici]. Or c'est ce que je croyais aussi.
Mais maintenant je sais que même si on n'est pas muslim, on peut être mu'min. La preuve en est que Iblîs est mu'min : il croit en l'unicité de Dieu ; il croit en l'existence des anges (il était avec eux d'ailleurs) ; il croit au jour du jugement dernier (d'ailleurs il a dit à Dieu de lui accorder un délai jusqu'au jugement dernier) ; etc. Mais il n'est pas muslim, car il ne s'est pas soumis à l'ordre de Dieu de se prosterner devant Adam."

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Réponse :

Ce que vous dites est complètement erroné.

Iblîs a bien fait du kufr akbar, cela est dit dans des versets du Coran (nous allons les citer plus bas). Même s'il croit en les choses que vous avez mentionnées (dont le fait que Dieu est le Seul Rabb), Iblîs est kâfir bi kufrin akbar, et n'est absolument pas mu'min.
Il ne suffit pas de croire (iltizâm) en l'existence de Dieu, en le fait que c'est Lui Seul qui gère l'univers et de savoir (ma'rifa) qu'Il est Unique dans son caractère divin pour avoir Asl ul-îmân.
"فإن اعترف العبد أن الله ربه وخالقه، وأنه مفتقر إليه محتاج إليه، عرف العبودية المتعلقة بربوبية الله. وهذا العبد يسأل ربه فيتضرع إليه ويتوكل عليه؛ لكن قد يطيع أمره، وقد يعصيه، وقد يعبده مع ذلك وقد يعبد الشيطان والأصنام. ومثل هذه العبودية لا تفرق بين أهل الجنة والنار ولا يصير بها الرجل مؤمنا. كما قال تعالى: {وما يؤمن أكثرهم بالله إلا وهم مشركون} فإن المشركين كانوا يقرون أن الله خالقهم ورازقهم وهم يعبدون غيره قال تعالى: {ولئن سألتهم من خلق السماوات والأرض ليقولن الله} وقال تعالى: {قل لمن الأرض ومن فيها إن كنتم تعلمون} {سيقولون لله قل أفلا تذكرون} إلى قوله: {قل فأنى تسحرون}. وكثير ممن يتكلم في الحقيقة ويشهدها يشهد هذه الحقيقة وهي "الحقيقة الكونية" التي يشترك فيها وفي شهودها ومعرفتها المؤمن والكافر والبر والفاجر. وإبليس معترف بهذه الحقيقة؛ وأهل النار. قال إبليس: {رب فأنظرني إلى يوم يبعثون} وقال: {رب بما أغويتني لأزينن لهم في الأرض ولأغوينهم أجمعين} وقال: {فبعزتك لأغوينهم أجمعين} وقال: {أرأيتك هذا الذي كرمت علي} وأمثال هذا من الخطاب الذي يقر فيه بأن الله ربه وخالقه وخالق غيره" (MF 10/156).

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Iblîs, le djinn qui est devenu kâfir parce qu'il s'est révolté contre un ordre de Dieu, et ce parce que le Choix divin ne s'est pas porté sur lui :

Lorsque Dieu dit à l'assemblée des anges de se prosterner devant Adam, les anges le firent, mais Iblîs, un djinn qui était lui aussi présent dans l'assemblée (il y était arrivé à force de faire l'adoration de Dieu), s'y refusa. "وَإِذْ قُلْنَا لِلْمَلَائِكَةِ اسْجُدُوا لِآدَمَ فَسَجَدُوا إِلَّا إِبْلِيسَ كَانَ مِنَ الْجِنِّ فَفَسَقَ عَنْ أَمْرِ رَبِّهِ" : "Et lorsque Nous dîmes aux Anges : "Prosternez-vous devant Adam". Ils se prosternèrent, excepté Iblîs, qui était des djinns. Il se révolta alors contre l'ordre de Dieu…" (Coran 18/50).
(Voir aussi Coran 2/34 ; 7/11 ; 15/30-31 ; 17/61 ; 38/71-74.)

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Dieu lui demanda la raison pour laquelle il n'avait pas obéi à Son ordre de se prosterner :

"قَالَ يَا إِبْلِيسُ مَا لَكَ أَلاَّ تَكُونَ مَعَ السَّاجِدِينَ" : "(Dieu) dit : "Iblîs, qu'as-tu à n'avoir pas été avec ceux qui se prosternent ?" (Coran 15/32) /
"قَالَ مَا مَنَعَكَ أَلاَّ تَسْجُدَ إِذْ أَمَرْتُكَ" : "Qu'est-ce qui t'a empêché de te prosterner lorsque Je te l'ai ordonné ?" (Coran 7/12) /
"قَالَ يَا إِبْلِيسُ مَا مَنَعَكَ أَن تَسْجُدَ لِمَا خَلَقْتُ بِيَدَيَّ أَسْتَكْبَرْتَ أَمْ كُنتَ مِنَ الْعَالِينَ" : "O Iblîs, qu'est-ce qui t'a empêché de te prosterner devant ce que J'ai créé de Mes deux Mains ? T'es-tu enorgueilli, ou bien (t'estimais-tu) (déjà auparavant) du nombre des élevés ?" (Coran 38/75).

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Iblîs Lui fit cette réponse : 

"قَالَ لَمْ أَكُن لِّأَسْجُدَ لِبَشَرٍ خَلَقْتَهُ مِن صَلْصَالٍ مِّنْ حَمَإٍ مَّسْنُونٍ" : "Je n'avais pas à me prosterner devant un humain que Tu as créé à partir d'une boue malodorante" (Coran 15/33).
Et il argumenta en disant : "قَالَ أَنَاْ خَيْرٌ مِّنْهُ خَلَقْتَنِي مِن نَّارٍ وَخَلَقْتَهُ مِن طِينٍ" : "Je suis meilleur que lui ; Tu m'as créé à partir de feu, et Tu l'as créé à partir de boue" (Coran 7/12, Coran 38/76).

C'est-à-dire :
"Je suis meilleur que Adam, car créé de feu alors que lui a été créé de boue.
Or celui qui est meilleur n'a pas à se prosterner devant celui qui est moindre que lui.
Donc je n'avais pas à me prosterner devant Adam.
Ton ordre, ô Dieu, est donc déplacé !"

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Par ces mots, Iblîs est devenu kâfir :

"فَسَجَدُواْ إِلاَّ إِبْلِيسَ أَبَى وَاسْتَكْبَرَ وَكَانَ مِنَ الْكَافِرِينَ" : "Sauf Iblîs : il a refusé et s'est enorgueilli ; et il devint du nombre des kâfir" (Coran 2/34 : "kâna" a ici le sens de "sâra" : Tafsîr ul-Qurtubî) / "إِلَّا إِبْلِيسَ اسْتَكْبَرَ وَكَانَ مِنْ الْكَافِرِينَ" : "Sauf Iblîs : il s'est enorgueilli ; et il devint du nombre des kâfir" (Coran 38/74).

Or qui est kâfir ne peut pas être mu'min, c'est évident.

Iblîs n'a certes pas renié l'existence ni la toute-puissance de Dieu ; mais Il a contesté le bien-fondé de l'un de Ses ordres, qu'il savait être l'un de Ses ordres, s'adressant à lui aussi ; Il n'a pas seulement délaissé la mise en pratique de l'Ordre, il en a contesté le bien-fondé. Cela a fait de lui un kâfir, donc un non-mu'min.

Même si Iblîs croit en certaines choses, cela n'est pas suffisant pour qu'elles constituent le minimum de foi nécessaire ; contestant le bien-fondé de l'Ordre de Dieu, il perdit le Asl ul-Îmân même : il tomba dans le "kufr ul-juhûd ma'a-s-tîqân in-nafs" / "kufr ul-ibâ' bi-l-istikbâr" (cliquez ici et ici).

(Toute personne qui refuse de se soumettre, sur le plan de la raison même, au dernier message de Dieu alors même que celui-ci lui est parvenu, celle-là n'est pas seulement ghayr-muslim, mais aussi ghayr-mu'min, c'est-à-dire n'a pas asl ul-îmân et est kâfir.
De même, toute personne qui adhère à ce message mais refuse de se soumettre, sur le plan de la raison même, à un ordre qui est de façon évidente, dharûratan, su pour faire partie de ce message, celui-là adopte ainsi une posture de kufr akbar.)

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Cet ordre de Dieu, donné aux créatures présentes – la majorité d'entre celles-ci étant des anges –, de faire une prosternation de respect devant Adam, revenait en fait à exprimer sa reconnaissance de la valeur que Dieu a accordée à Adam par rapport aux autres créatures : la nomination à la fonction de "khalîfatullâh fi-l-ardh". Dieu dit ainsi : "Et lorsque ton Seigneur dit aux Anges : "Je vais placer sur la terre un khalîfa" : "وَإِذْ قَالَ رَبُّكَ لِلْمَلاَئِكَةِ إِنِّي جَاعِلٌ فِي الأَرْضِ خَلِيفَةً" (Coran 2/30) : les anges comprirent que Dieu parlait là non pas de de Adam seulement mais de l'homme en général, puisqu'ils questionnèrent Dieu au sujet du fait qu'Il mettrait donc qui ferait le mal et répandrait le sang sur terre : "قَالُواْ أَتَجْعَلُ فِيهَا مَن يُفْسِدُ فِيهَا وَيَسْفِكُ الدِّمَاء وَنَحْنُ نُسَبِّحُ بِحَمْدِكَ وَنُقَدِّسُ لَكَ" (Coran 2/30).

Cette prosternation demandée aux anges (et au djinn Iblîs, qui était parvenu à force d'adoration parmi eux) devant Adam n'était pas une action de culte ('ibâda), cela est certain. Elle consistait :
soit en une simple salutation (tahiyya) de leur part, eux les meilleures créatures de Dieu, vis-à-vis de l'homme (c'est l'avis de Ibn Hazm) ;
soit en l'expression de leur reconnaissance de la supériorité de Adam, comme meilleure créature de Dieu, par rapport à eux (c'est l'avis de certains autres ulémas).

Par ailleurs : Quand donc cet ordre de se prosterner fut-il donné aux anges : avant l'enseignement des noms à Adam, ou après ?

Il y a divergence sur ce point
:
--- selon l'avis A (ash-Shawkânî y adhère), l'enseignement des noms à Adam eut lieu avant l'ordre donné aux anges de se prosterner ;
--- alors que selon les avis B.A et B.B, cet enseignement eut lieu après cet ordre.

Par ailleurs :
--- selon les avis A et B.A, l'annonce que Adam serait khalîfa (de Dieu) sur Terre fut faite avant l'ordre de se prosterner, et Iblîs était donc présent à ce moment-là.

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Quand Iblîs s'est révolté contre l'ordre de Dieu de se prosterner, ce n'est pas parce que cet ordre l'opprimait, ou que, de façon générale, il faisait l'objet d'une oppression de la part de Dieu qui l'empêchait de vivre ses droits naturels.
C'est parce qu'il s'était enflé d'orgueil, qu'il fut donc jaloux quand il apprit que Dieu avait décidé de donner à un autre que lui cette grande faveur, et qu'il exprima donc cette jalousie (elle-même un refus du décret de Dieu) par un rejet de l'ordre de Dieu relatif à cet autre que Lui.

S'il a désobéi à Dieu et s'est rebellé contre Son ordre au sujet de l'homme, ce n'est donc pas que, comme dans le mythe grec de Prométhée (cliquez ici), Iblîs aurait voulu donner à l'homme des droits qui lui étaient injustement refusés par le divin ; c'est, tout au contraire, qu'il a refusé que la faveur de Dieu aille à l'homme au lieu de lui.

En fait Iblîs avait réussi à se persuader que la nomination à cette fonction ne pouvait revenir qu'à lui ; lui qui était meilleur que Adam parce que bien né, créé à partir du feu quand Adam ne l'était qu'à partir de boue malodorante, et parce qu'ayant réussi, par son seul mérite, à une proximité de Dieu qui était conséquente.
Il oubliait qu'on doit adorer Dieu en considérant cela non pas comme un mérite personnel mais comme une faveur accordée par Dieu de se rapprocher de Lui. Il est aisé de dire à tout-va qu'on n'est rien, que Dieu décide de tout, mais c'est lorsqu'on est confronté au don, par Dieu, d'une plus grande faveur à quelqu'un d'autre que soi, que sa sincérité vis-à-vis de Dieu et son humilité sont mises à l'épreuve que la réalité va apparaître : accepte-t-on la décision de Dieu en faveur d'autrui, ou souhaite-t-on que cet autrui perde cette faveur et qu'elle revienne à nous, l'élu de Dieu... Que Dieu nous préserve tous de suivre le modèle de Iblîs.

C'est sa contestation de la nomination de Adam qui a amené Iblîs à refuser l'ordre de Dieu de faire une prosternation de respect devant Adam.

L'argumentation que Iblîs exposa devant Dieu peut être synthétisée ainsi :
"Tu m'as créé de feu, et lui de boue. Or le feu est meilleur que la boue. Et ce qui est meilleur qu'une chose ne s'incline pas devant elle.
Je n'avais donc pas à m'incliner devant cet humain ! Par rapport à la réalité de ce que Tu as Toi-même créé (Takwîn), Ton ordre (Tashrî') est donc totalement déplacé.
Et moi je n'obéis pas à des ordres de Toi qui sont déplacés. Aurais-Tu oublié la place que moi j'ai ?"

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Ayant renié l'ordre de Dieu, Iblîs s'entendit signifier par Dieu son rejet de la Proximité :

"Descends du [Ciel *], car tu n'as pas à t'y enorgueillir. Sors, tu es d'entre les humiliés" : "قَالَ فَاهْبِطْ مِنْهَا فَمَا يَكُونُ لَكَ أَن تَتَكَبَّرَ فِيهَا فَاخْرُجْ إِنَّكَ مِنَ الصَّاغِرِينَ" (Coran 7/13) /
"Sors du [Ciel *], car tu es rejeté. Et sur toi est Ma malédiction jusqu'au jour du Compte" : "قَالَ فَاخْرُجْ مِنْهَا فَإِنَّكَ رَجِيمٌ وَإِنَّ عَلَيْكَ لَعْنَتِي إِلَى يَوْمِ الدِّينِ" (Coran 38/77-78) / "قَالَ فَاخْرُجْ مِنْهَا فَإِنَّكَ رَجِيمٌ وَإِنَّ عَلَيْكَ اللَّعْنَةَ إِلَى يَوْمِ الدِّينِ" (Coran 15/34-35).

* C'est ainsi que al-Qurtubî (Tafsîr ul-Qurtubî tome 7 p. 173), de même que Cheikh Thânwî (Bayân ul-qur'ân tome 4 p. 4) - parmi d'autres - ont commenté le pronom "".

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Iblîs a alors demandé la permission (takwînî) de vivre jusqu'à la fin du monde :

"Mon Seigneur, donne-moi alors un délai jusqu'au jour où ils seront ressuscités" : "قَالَ أَنظِرْنِي إِلَى يَوْمِ يُبْعَثُونَ" (Coran 7/14) / "قَالَ رَبِّ فَأَنظِرْنِي إِلَى يَوْمِ يُبْعَثُونَ" (Coran 15/36 ; 38/79).

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Dieu lui accorda ce délai :

"Tu seras de ceux à qui est donné le délai jusqu'au jour du Moment connu" : "قَالَ إِنَّكَ مِنَ المُنظَرِينَ" (Coran 7/15) / "قَالَ فَإِنَّكَ مِنَ الْمُنظَرِينَ إِلَى يَومِ الْوَقْتِ الْمَعْلُومِ" (Coran 15/37-38 ; 38/80-81).

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Ayant obtenu la faculté de rester vivant jusqu'au jour de la fin du monde, Iblîs affirma alors qu'il allait chercher à égarer Adam et sa descendance :

"قَالَ فَبِعِزَّتِكَ لَأُغْوِيَنَّهُمْ أَجْمَعِينَ إِلَّا عِبَادَكَ مِنْهُمُ الْمُخْلَصِينَ" : "Eh bien, par Ta Puissance, je les égarerai tous, sauf parmi eux Tes serviteurs choisis" (Coran 38/82-83) /
"قَالَ رَبِّ بِمَآ أَغْوَيْتَنِي لأُزَيِّنَنَّ لَهُمْ فِي الأَرْضِ وَلأُغْوِيَنَّهُمْ أَجْمَعِينَ إِلاَّ عِبَادَكَ مِنْهُمُ الْمُخْلَصِينَ" : "Mon Seigneur, à cause du fait que Tu m'as égaré, j'enjoliverai pour eux (la vie) sur Terre et les égarerai tous, sauf parmi eux Tes serviteurs choisis"
(15/39-40) /
"قَالَ فَبِمَا أَغْوَيْتَنِي لأَقْعُدَنَّ لَهُمْ صِرَاطَكَ الْمُسْتَقِيمَ ثُمَّ لآتِيَنَّهُم مِّن بَيْنِ أَيْدِيهِمْ وَمِنْ خَلْفِهِمْ وَعَنْ أَيْمَانِهِمْ وَعَن شَمَآئِلِهِمْ وَلاَ تَجِدُ أَكْثَرَهُمْ شَاكِرِينَ" :
"Eh bien, à cause du fait que Tu m'as égaré, je m'assoirai pour eux sur le droit chemin puis je viendrai à eux de devant eux, de derrière eux, de leur droite et de leur gauche. Et Tu ne trouveras (alors) pas la plupart d'entre eux reconnaissants (envers Toi)"
(Coran 7/16-17) /
"قَالَ أَرَأَيْتَكَ هَذَا الَّذِي كَرَّمْتَ عَلَيَّ لَئِنْ أَخَّرْتَنِ إِلَى يَوْمِ الْقِيَامَةِ لأَحْتَنِكَنَّ ذُرِّيَّتَهُ إَلاَّ قَلِيلاً" : "Vois-Tu celui que Tu as honoré par rapport à moi, si Tu me donnes [ainsi] un délai jusqu'au jour de la résurrection, je détournerai sa descendance, sauf un petit nombre" (Coran 17/62) / 
"وَقَالَ لَأَتَّخِذَنَّ مِنْ عِبَادِكَ نَصِيبًا مَّفْرُوضًا وَلأُضِلَّنَّهُمْ وَلأُمَنِّيَنَّهُمْ وَلآمُرَنَّهُمْ فَلَيُبَتِّكُنَّ آذَانَ الأَنْعَامِ وَلآمُرَنَّهُمْ فَلَيُغَيِّرُنَّ خَلْقَ اللّهِ" : "Je prendrai assurément une part fixée parmi Tes serviteurs. Et je les égarerai. Et je leur ferai espérer. Et je leur ordonnerai alors ils couperont les oreilles des bestiaux. Et je leur ordonnerai alors ils modifieront la création de (Toi) Dieu" (Coran 4/118-119).
(Se préserver de la participation du Diable dans les différents actes que l'on fait, cela passe par le fait de prononcer le Nom de Dieu avant de commencer chacun de ces actes.)

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Après lui avoir alors réitéré l'ordre de sortir du lieu où il avait jusqu'alors accès, Dieu lui a accordé la possibilité, au niveau existentiel (takwînî), de faire ce qu'il a annoncé qu'il va faire :

"قَالَ اذْهَبْ فَمَن تَبِعَكَ مِنْهُمْ فَإِنَّ جَهَنَّمَ جَزَآؤُكُمْ جَزَاء مَّوْفُورًا وَاسْتَفْزِزْ مَنِ اسْتَطَعْتَ مِنْهُمْ بِصَوْتِكَ وَأَجْلِبْ عَلَيْهِم بِخَيْلِكَ وَرَجِلِكَ وَشَارِكْهُمْ فِي الأَمْوَالِ وَالأَوْلادِ وَعِدْهُمْ وَمَا يَعِدُهُمُ الشَّيْطَانُ إِلاَّ غُرُورًا إِنَّ عِبَادِي لَيْسَ لَكَ عَلَيْهِمْ سُلْطَانٌ" : "Pars ! Quiconque d'entre eux te suivra donc, la Géhenne sera votre rétribution, rétribution pleine ! Incite ceux d'entre eux que tu peux par ta voix, rassemble contre eux ta cavalerie et ton infanterie ; participe dans leurs biens et leurs enfants ; et fais-leur des promesses (le Diable ne leur fait de promesse qu'en tromperie). Mes serviteurs, tu n'auras aucun pouvoir sur eux" (17/64-65) /
"قَالَ اخْرُجْ مِنْهَا مَذْؤُومًا مَّدْحُورًا لَّمَن تَبِعَكَ مِنْهُمْ لأَمْلأنَّ جَهَنَّمَ مِنكُمْ أَجْمَعِينَ" : "Sors de ce (lieu), blâmé et rejeté ! Celui qui te suivra parmi eux, J'emplirai la Géhenne de vous [= toi et eux]" (Coran 7/18) /
"قَالَ هَذَا صِرَاطٌ عَلَيَّ مُسْتَقِيمٌ إِنَّ عِبَادِي لَيْسَ لَكَ عَلَيْهِمْ سُلْطَانٌ إِلاَّ مَنِ اتَّبَعَكَ مِنَ الْغَاوِينَ وَإِنَّ جَهَنَّمَ لَمَوْعِدُهُمْ أَجْمَعِينَ لَهَا سَبْعَةُ أَبْوَابٍ لِّكُلِّ بَابٍ مِّنْهُمْ جُزْءٌ مَّقْسُومٌ" : "Voici une voie qui mène à Moi, droite. Mes serviteurs, tu n'auras aucun pouvoir sur eux ; (tu n'auras d'influence) que sur celui qui te suivra [= se laissera aller à te suivre] parmi les égarés. Et la Géhenne sera leur rendez-vous à tous. Elle a sept niveaux ; pour chaque niveau, sa part déterminée parmi eux" (Coran 15/41-44) /
"قَالَ فَالْحَقُّ وَالْحَقَّ أَقُولُ لَأَمْلَأَنَّ جَهَنَّمَ مِنكَ وَمِمَّن تَبِعَكَ مِنْهُمْ أَجْمَعِينَ" : "Eh bien, (voici) la vérité – et c'est (toujours) la vérité que Je dis – : J'emplirai la Géhenne de toi et de tous ceux d'entre eux qui t'auront suivi" (Coran 38/84-85).

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Depuis, Iblîs essaie d'amener le maximum d'humains à renier Dieu et à se tourner complètement vers autre que Lui (ta'tîl akbar, ou shirk akbar), et, si ce n'est pas possible, au moins à Lui désobéir dans leurs actes (ma'siya). Il désire de la sorte être la cause de l'entraînement du maximum d'humains avec lui dans la Géhenne (éternelle, ou au moins temporaire) : car s'il y a été promis, c'est à cause de son refus, motivé par son orgueil, sa jalousie et son manque de sincérité dans l'adoration qu'il rendait à Dieu ; cependant, ces défauts qu'il avait ne se sont manifestés que lors de la promotion de l'homme ; devenu dès lors indirectement et involontairement la cause de la chute de Iblîs, l'homme est la créature que celui-ci déteste le plus et dont il veut à tout prix la perte. "Le Diable est pour vous un ennemi, considérez-le donc comme un ennemi. Il ne fait qu'inviter (ceux qui veulent bien être) ses partisans, afin qu'ils soient parmi les gens de la Fournaise" (Coran 35/5-6). Iblîs essaie d'entraîner également les êtres de son espèce, les djinns, à renier Dieu.

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Pourquoi Dieu a-t-il accordé à Iblîs la possibilité de chercher à égarer les djinns et les humains, alors qu'Il déteste que des djinns ou des humains s'égarent ?

Parce qu'Il veut mettre à l'épreuve les djinns et les humains. Dès lors, tandis que Lui, Dieu, appelle au Bien et à la Réussite, Iblîs va - suite à son propre choix et la promesse que de lui-même il a faite devant Dieu - faire le travail d'appeler au Mal et à l'Echec.

Si Dieu a donc donné à Iblîs la possibilité (takwînî) qu'il appelle les hommes au mal, c'est dans la mesure où cela permet (sur le plan takwînî) que les humains, qui sont de par leur nature même sujets à la tentation, connaissent l'appel vers ce qui est mal, et qu'ils fassent donc le choix.

Cependant, Dieu Lui-même appelle les humains et les djinns au Bien. Il a par ailleurs créé avec l'humain un ange qui l'invite à faire le bien, de même qu'un démon qui l'incite à faire le mal (hadîth rapporté par Muslim, 2814 ; voir aussi le hadîth rapporté par at-Tirmidhî, 2988).
Il a, enfin, suscité des messagers humains chargés de rappeler à leur semblables le droit chemin ; mais, parallèlement, Il a suscité (sur le plan takwînî) des "démons humains" (Coran 6/112) chargés de contrer leur message en les contredisant et en appelant au mal.

Tout ceci permet la mise à l'épreuve de l'homme sur terre.

"يَا أَيُّهَا النَّاسُ إِنَّ وَعْدَ اللَّهِ حَقٌّ فَلَا تَغُرَّنَّكُمُ الْحَيَاةُ الدُّنْيَا وَلَا يَغُرَّنَّكُم بِاللَّهِ الْغَرُورُ إِنَّ الشَّيْطَانَ لَكُمْ عَدُوٌّ فَاتَّخِذُوهُ عَدُوًّا إِنَّمَا يَدْعُو حِزْبَهُ لِيَكُونُوا مِنْ أَصْحَابِ السَّعِيرِ" : "O les humains, la promesse de Dieu est vérité. Que la vie présente ne vous trompe donc pas. Et que le Trompeur ne vous trompe pas au sujet de Dieu. Le Diable est pour vous un ennemi, considérez-le donc comme un ennemi. Il ne fait qu'inviter (ceux qui veulent ben être) ses partisans, afin qu'ils soient parmi les gens de la Fournaise" (Coran 35/5-6).

"الشَّيْطَانُ يَعِدُكُمُ الْفَقْرَ وَيَأْمُرُكُم بِالْفَحْشَاء. وَاللّهُ يَعِدُكُم مَّغْفِرَةً مِّنْهُ وَفَضْلاً وَاللّهُ وَاسِعٌ عَلِيمٌ" : "Le Diable vous promet que vous allez devenir pauvres (si vous faites l'aumône) et vous dit de faire les actions mauvaises. Et Dieu vous promet pardon de Sa part et faveur" (Coran 2/268).
"وَمَن يَتَّخِذِ الشَّيْطَانَ وَلِيًّا مِّن دُونِ اللّهِ فَقَدْ خَسِرَ خُسْرَانًا مُّبِينًا يَعِدُهُمْ وَيُمَنِّيهِمْ وَمَا يَعِدُهُمُ الشَّيْطَانُ إِلاَّ غُرُورًا" : "Et quiconque prend le Diable comme allié au lieu de Dieu, celui-là sera perdu d'une perdition évidente. (Le Diable) leur fait des promesses et leur donne de faux espoirs. Le Diable ne fait que leur faire des promesses trompeuses"
(Coran 4/119-120).
"أُوْلَئِكَ حِزْبُ الشَّيْطَانِ أَلَا إِنَّ حِزْبَ الشَّيْطَانِ هُمُ الْخَاسِرُونَ" : "Ceux-là sont le groupe du Dibale. Ecoutez, le groupe du Diable seront, eux, ceux qui sont perdants" (Coran 58/19). Un peu plus loin : "أُوْلَئِكَ حِزْبُ اللَّهِ أَلَا إِنَّ حِزْبَ اللَّهِ هُمُ الْمُفْلِحُونَ" : "Ceux-là sont le groupe de Dieu. Ecoutez, le groupe de Dieu seront, eux, ceux qui réussissent" (Coran 58/22).

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Iblîs a-t-il ou pas le pouvoir d'influencer les humains par ses suggestions ?

Dans un verset il est dit que, une fois dans la Géhenne, Iblîs dira à ceux qui l'auront suivi qu'il n'avait sur eux aucun sultân (pouvoir) si ce n'est d'inviter : "(Mais) je n'avais aucun pouvoir sur vous, si ce n'est que je vous ai invités" : "وَقَالَ الشَّيْطَانُ لَمَّا قُضِيَ الأَمْرُ إِنَّ اللّهَ وَعَدَكُمْ وَعْدَ الْحَقِّ وَوَعَدتُّكُمْ فَأَخْلَفْتُكُمْ وَمَا كَانَ لِيَ عَلَيْكُم مِّن سُلْطَانٍ إِلاَّ أَن دَعَوْتُكُمْ فَاسْتَجَبْتُمْ لِي فَلاَ تَلُومُونِي وَلُومُواْ أَنفُسَكُم مَّا أَنَاْ بِمُصْرِخِكُمْ وَمَا أَنتُمْ بِمُصْرِخِيَّ إِنِّي كَفَرْتُ بِمَآ أَشْرَكْتُمُونِ مِن قَبْلُ" (Coran 14/22).

Pourtant, dans un autre verset il est dit que Iblîs n'a pas de sultân (pouvoir) sur "ceux qui ont apporté foi et s'en remettent à Dieu", et que "son sultân n'est que sur ceux qui le prennent comme allié et sont associateurs (de) lui (à Dieu)" : "فَإِذَا قَرَأْتَ الْقُرْآنَ فَاسْتَعِذْ بِاللّهِ مِنَ الشَّيْطَانِ الرَّجِيمِ إِنَّهُ لَيْسَ لَهُ سُلْطَانٌ عَلَى الَّذِينَ آمَنُواْ وَعَلَى رَبِّهِمْ يَتَوَكَّلُونَ. إِنَّمَا سُلْطَانُهُ عَلَى الَّذِينَ يَتَوَلَّوْنَهُ وَالَّذِينَ هُم بِهِ مُشْرِكُونَ" (Coran 16/99-100). De même, dans un des versets que nous avions cités plus haut, Dieu nous relate avoir dit à Iblîs : "Mes serviteurs (proches), tu n'auras aucun sultân sur eux ; (tu n'auras de sultân) que sur celui qui te suivra [= se laissera aller à te suivre] parmi les égarés" : "قَالَ هَذَا صِرَاطٌ عَلَيَّ مُسْتَقِيمٌ إِنَّ عِبَادِي لَيْسَ لَكَ عَلَيْهِمْ سُلْطَانٌ إِلاَّ مَنِ اتَّبَعَكَ مِنَ الْغَاوِينَ وَإِنَّ جَهَنَّمَ لَمَوْعِدُهُمْ أَجْمَعِينَ لَهَا سَبْعَةُ أَبْوَابٍ لِّكُلِّ بَابٍ مِّنْهُمْ جُزْءٌ مَّقْسُومٌ" (Coran 15/42).

Alors : Iblîs a-t-il un pouvoir sur les hommes ou pas ?

En fait ce même mot, "pouvoir", "sultân", a deux sens différents dans chacun de ces deux passages coraniques :
– en Coran 14/22, il désigne le pouvoir de contraindre, d'amener quelqu'un à faire quelque chose contre son gré ;
– alors en Coran 15/42 et 16/99-100, il désigne le pouvoir d'influencer.

L'ensemble de ces passages coraniques veulent dire que les suggestions de Iblîs ne peuvent jamais aller jusqu'à amener quelqu'un à faire quelque chose contre son gré, car le Démon ne fait que suggérer, inviter, et enjoliver le mal. Cependant, ces suggestions ont beaucoup plus d'effet sur celui qui le prend comme allié que sur celui qui prend Dieu comme allié : le premier est familier avec lui et sa façon de penser et de présenter les choses, contrairement au second.

Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

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