--- Existe-t-il une 'Aqîda Hanafite, une 'Aqîda Shafi'ite, et une 'Aqida Hanbalite ? --- Est-il vrai que les Ahl us-Sunna wa-l-Jamâ'ah sont exclusivement aujourd'hui les adeptes des 4 écoles de Fiqh instituées (Hanafite, Malikite, Shafi'ite et Hanbalite) ?

Deux questions seront en fait traitées tout au long de cet article :

--- 1) Existe-t-il une 'Aqîda Hanafite, une 'Aqîda Shafi'ite, une 'Aqîda Hanbalite, comme il existe un Fiqh Hanafite, un Fiqh Malikite, un Fiqh Shafi'ite, un Fiqh Hanbalite ?

--- 2) Celui qui ne demeure pas, pour sa pratique, dans le cadre d'interprétation de l'une de ces 4 écoles de Fiqh, est-il hors Ahl us-Sunna wa-l-Jamâ'ah ?

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I) En fait, les points évoqués dans les textes de l'islam sont de 2 types :

les massâ'ïl i'tiqâdiyya (ou : khabariyya, ou : 'ilmiyya) : les points relatifs à des croyances pures ;

– et les massâ'ïl 'amaliyya : les points relatifs à des actions à réaliser, ou à des actions dont l'homme doit s'abstenir :
--- que ce soient des actions du coeur (autres que les croyances, telles que la sincérité, le grand amour - kamâl ul-hubb al-wâjib - dévolu à Dieu et à Lui Seul, etc.),
--- ou que ce soient des actions visibles (telles que la prière rituelle, le fait de rendre service  ses parents, etc.).

Comme exemples de massâ'ïl i'tiqâdiyya / khabariyya / 'ilmiyya, on peut citer : l'existence de Dieu, Son Unicité, la véracité de Muhammad (sur lui soit la paix) dans son affirmation d'être le dernier messager de Dieu, l'existence d'une vie après la mort, etc... Ce n'est pas qu'aucune action n'est requise par rapport à ces points, puisque le fait d'y croire constitue déjà une action (comme al-Bukhârî l'a écrit : "باب من قال: إن الإيمان هو العمل") ; c'est qu'il s'agit d'une action d'un type quelque peu particulier : seul le fait d'y croire est requis, et la question de "les mettre en pratique" ne se pose pas.

Différents sont les massâ'ïl 'amaliyya :
--- il s'agit de croire en la justesse de ces prescriptions (obligations ou interdictions) ;
--- et il s'agit de mettre ces prescriptions en pratique (quand il s'agit d'une obligation ou d'une recommandation) ; ou de se préserver de les commettre (quand il s'agit d'une interdiction ou d'un caractère déconseillé).
Comme exemples de ces genre de points, on peut citer : aimer concrètement Dieu plus que toute chose, accomplir les cinq prières, donner la zakât, se préserver de boire de l'alcool, pour une musulmane se couvrir, lorsqu'en présence d'hommes autres que son mari et ses proches parents, tout le corps sauf le visage, les mains et les pieds, etc.

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II) Ceci nous donne 3 choses :

Ceci nous donne les 3 choses suivantes :
- A) avoir les bonnes croyances pures : Dieu est Unique ; Muhammad (sur lui soit la paix) est Son dernier Messager ; les Anges et les démons existent ; il y a une vie après la mort ; il y aura une résurrection des corps puis un jugement ; etc. ;
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B) avoir les bonnes croyances liées aux actions : Telle action est obligatoire ; telle autre est recommandée ; telle autre est purement autorisée ; telle action est déconseillée ; et telle autre est interdite - Tel élément est licite, et tel autre est illicite - Telle façon de réaliser telle action est déterminée (mu'ayyan), par contre, telle autre n'est pas déterminée et tout autre moyen permettant de la réaliser est légal -
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C) agir concrètement selon ces bonnes croyances B : donc, concrètement, accomplir les bonnes actions et se préserver des mauvaises
...

Par exemple :

L'existence d'une vie après la mort : il s'agit d'y croire : il s'agit d'une croyance pure (A).

Les 5 prières quotidiennes :
--- il s'agit de croire que (B) ces 5 prières sont obligatoires et cette règle (l'obligation de ces 5 prières) est juste ('âdil) : cela constitue : une croyance liée à une action visible (B) ;
--- et il s'agit aussi d'accomplir concrètement (C) ces 5 prières : cela relève (d'après l'avis pertinent) de la perfection obligatoire de la foi, et cela constitue une action à accomplir concrètement : par son corps, sa langue et son cœur (vu qu'il est nécessaire d'être concentré pendant sa prière).

Les A constituent : les Ussûl.
Les C constituent : les Furû'.
Quant aux B, ils sont : les Ussûl qui sont liés aux Furû'. Ce sont eux qui constituent le contenu des ouvrages de Fiqh,que chaque musulman apprend et adopte.

Manger :
--- il s'agit de croire que (B) Dieu a rendu obligatoire le fait de s'alimenter suffisamment pour rester (avec Sa Permission) en vie, en bonne santé et disposant de force ;
--- il s'agit de croire que (B) tel aliment est illicite (par exemple le porc, et toute bête à sang chaud morte sans avoir été abattue de la façon voulue, etc.) ;
--- il s'agit également de croire que (B) utiliser sa main droite est la façon déterminée pour porter les aliments à sa bouche ;
--- et il s'agit d'agir (C) conformément à cela.

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III) La déviance (Dhalâl) consiste à s'écarter de la Sunna et de la Jamâ'ah. Or la déviance (Dhalâl) concerne les croyances (les Ussûl) : que ce soient les croyances pures (A) ou les croyances liées aux actions (B) :

Il est donc nécessaire, pour se préserver de la déviance, de se référer au cadre des Compagnons, de leurs élèves et des élèves de ceux-ci.

Ainsi, celui qui dit que le fait pour un homme d'avoir plusieurs épouses c'est en soi un injustice, celui là prononce une parole de déviance (qui va jusqu'au kufr akbar).

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Il faut ici noter que...

Donner un avis à propos d'une action visible ou du coeur ("Telle chose est obligatoire" / "Telle chose est licite" / "Telle chose est interdite"), cela consiste en une croyance (B), que l'on a et que l'on exprime de la sorte.

Faire une action avec une perception de culte (ta'abbud), cela consiste aussi, et systématiquement, en une croyance (B) que l'on a et que l'on exprime de la sorte : la croyance que cette action rapproche de Dieu.
Dès lors, si cette action est en réalité interdite (harâm), déconseillée (mak'rûh) ou purement autorisée (mubâh), en la faisant avec une perception de culte, on tombe dans l'innovation (bid'a).
Ainsi, celui qui célèbre de son plein gré le Mawlid un-Nabî (sallallâhu 'alayhi wa sallama) exprime qu'il a comme croyance que c'est là une action instituée (mashrû').

A la différence du fait de commettre une action interdite : cela n'exprime pas forcément que l'on pense que cette action est autorisée.

– A la différence, également, de faire une action, mais sans lui donner une perception de culte, mais plutôt par maslaha : cela ne fait pas forcément tomber dans la bid'a : Quelle est la différence entre "faire une action par "تعبّد"" et "faire une action par "مصلحة"" ?

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IV) Or certains frères et soeurs disent qu'aujourd'hui, les Ahl us-Sunna wa-l-Jamâ'ah sont exclusivement ceux qui adhèrent à l'une des 4 écoles instituées dans le Fiqh. Est-ce vrai ?

Non, car ce propos comporte 2 erreurs :
– l'une est que le fait de rester dans le cadre d'une de ces 4 écoles juridiques prévient de la dhalâl dans les croyances liées aux actions (B), mais pas de la dhalâl dans les croyances pures (A) ;
– l'autre est que ceux qui ne demeurent pas dans le cadre de l'une de ces 4 écoles n'en sont pas forcément dhullâl dans les croyances liées aux actions (B).

Explications...

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Certainement, le fait, pour un musulman, de rester, pour les croyances relatives aux actions (B), dans le cadre des normes d'une des 4 écoles instituées, cela garantit que, pour ces croyances là (B), il ne tombera pas dans le dhalâl :

En effet, car les erreurs qat'î qui peuvent exister dans chacune de ces 4 écoles ne sont pas plus que de niveau "ijtihâdî", et jamais de "dhalâl". De plus, ces erreurs qat'î ijtihâdî sont en très petit nombre.

Tous les autres points de divergences entre ces 4 écoles sont tels que la détermination de l'avis correct et de l'avis erroné ne peut y être faite qu'à un niveau zannî (et donc forcément ijtihâdî).

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Cependant, le fait, pour un musulman, de rester, pour les croyances relatives aux actions (B), dans le cadre des normes d'une des 4 écoles instituées, cela garantit-il également que, pour les croyances pures aussi (A), il ne tombera pas dans le dhalâl ?

La réponse est : Non.

En effet, il y a eu (et il y a toujours) :

– des musulmans qui sont Shafi'ites dans les Furû' (B), mais Mutazilites dans les Ussûl (A). Ainsi était Abu-l-Hassan al-Ash'arî jusqu'à l'âge de 40 ans, avant de revenir au Sunnisme : formé par son beau-père al-Jubâ'ï, il était mutazilite, tout en étant shafi'ite par tradition.

– d'autres qui sont Hanafites dans les Furû' (B), mais Mutazilites dans les Ussûl (A). Un personnage de ce genre assez connu est Bishr al-Marîssî (ou : al-Marrîssî), qui a étudié le Fiqh directement auprès de Abû Yûssuf mais qui par la suite est devenu Mutazilite. De même en est-il de Muhammad ibn Shujâ' : voici ce que adh-Dhahabî a écrit à son sujet : "قَالَ الذهبي فِي الميزان: ابن شجاع هذا كَانَ فقيه العراق فِي وقته، وكان حنفيًّا صاحب تصانيف. وكان من أصحاب بشر المريسي، وكان ينتقصُ الإمامين الشافعيّ وَأَحْمَد. وكان من وصيته التي كتبها عِنْدَ موته: "ولا يعطى من ثلثي إلا من قَالَ: القرآنُ مخلوق" (Al-La'âlî al-masnû'a, as-Suyûtî).

– etc.

Comment donc quelqu'un qui affirme ouvertement préférer dans les Ussûl (A) le credo Mutazilite aux croyances défendues par Ahmad ibn Hanbal (lors de la Fitna de l'I'tizâl avec Mamûn, al-Mu'tassim et al-Wâthiq), comment un musulman de ce genre serait-il déclaré : "dans la voie des Ahl us-Sunna wa-l-Jamâ'ah", au seul prétexte que dans les Furû' (B) il est Hanafite ?

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Cette distinction entre Ussûl (A) et Furû' (B) permet de comprendre par ailleurs qu'il n'existe pas (comme le croient trop de musulmans aujourd'hui) un credo hanbalite, un autre hanafite, etc.

Oui, il existe quelques divergences dans le credo entre Abû Hanîfa et les siens d'un côté, et les Ahl ul-Hadîth de l'autre (y compris par exemple ash-Shâfi'î). C'est le cas quant à savoir si les Actions sont partie constituante de la Foi, ou pas.

Cependant, il n'existe pas un credo hanafite institué,  à coté d'un credo hanbalite institué, à l'instar du fiqh hanafite et du fiqh hanbalite.

Bien sûr, beaucoup de grands ulémas postérieurs (muta'akkhirûn) qui furent Hanafites dans les Furû' (B) furent Maturidites dans les Ussûl (A) (comme par exemple at-Taftâzânî). Et c'est pourquoi parfois on trouve, sous la plume de ulémas, la divergence être relatée en ces termes : "Les Ash'arites ont dit ceci, alors que les Hanafites ont dit cela..." (.

Cependant, cela est par désignation par ce qui était alors courant dans le réel, et non pas par énonciation d'une essence.
Et, justement, les deux ne sont pas liés : Abû Mansûr al-Mâturîdî était Hanafite, mais Abû Hanîfa, Abû Yûssuf et Muhammad ibn ul-Hassan n'étaient pas Maturidites, eux. Ibn Abi-l-'Izz fut pour sa part Hanafite dans les Furû' (B) et Atharî dans les Ussûl (A).

De même, de nombreux grands ulémas postérieurs qui furent Shafi'ites dans les Furû' furent Acharites dans les Ussûl (A) (comme an-Nawawî et Ibn Hajar), mais les deux ne sont pas liés : Abu-l-Hassan al-Ash'arî fut Shafi'ite, mais ash-Shâfi'î ne fut pas Acharite, lui.
Adh-Dhahabî fut pour sa part Shafi'ite dans les Furû' (B) et Atharî dans les Ussûl (A).

Il existe de même certains grands ulémas postérieurs qui furent Hanbalites dans les Furû' (B) et Acharites (de tendance "Acharites antérieurs") dans les Ussûl (A). Comme Ibn 'Aqîl et Ibn ul-Jawzî, par exemple.

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Par ailleurs, le fait, pour un musulman, de ne pas rester, pour les croyances relatives aux actions, c'est-à-dire le Fiqh (B), dans le cadre d'une des 4 écoles instituées (tout en demeurant dans le cadre des normes enseignées par les Salaf Sâlih dans leur ensemble, et de ne tomber dans aucune erreur de niveau "dhalâl"), est-ce soi-même du dhalâl ?

En d'autres termes : "اللامَذْهَبِيَّة", est-ce du dhalâl : est-ce sortir du cadre des Ahl us-Sunna wa-l-Jamâ'ah ?
Le fait que al-Albânî, ou al-Qaradhawî, ne demeure pas dans le cadre de l'une des 4 écoles instituées, est-ce du dhalâl de leur part ?

Dans certaines régions du Monde on appelle les musulmans de ce type : des "غير متمذهب" ("Ghayr Mutamadh'hib").
En Inde, au Pakistan et au Bangladesh, on appelle les musulmans de ce type : des "غير مُقلِّد" ("Ghayr Muqallid") ; ou encore : des "أهلِ حديث" ("Ahl-é hadîth").

Alors, est-ce du dhalâl que de ne pas suivre, pour les Furû' (B), l'une des 4 écoles instituées ?

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Réponse générale de Cheikh Thânwî : Non.

Cheikh Thânwî dit : "Les Ahl us-sunna wa-l-jamâ'ah sont ceux qui, sur les croyances, sont sur la voie des Compagnons. La personne qui fait la mukhâlafa, sur des croyances ou sur des points faisant l'objet d'un ijmâ', des Salaf Sâlihîn ; ou bien dénigre les Salaf Sâlihîn :  celle-là est hors des Ahl us-sunna wa-l-jamâ'ah, et est inclus dans les Ahl ul-hawâ wa-l-bid'a" (Ijtihâd o taqlîd kâ âkhirî fayss'la, p. 117).
Et Cheikh Thânwî de relater qu'il y a eu, en Inde, certains Ghayr Muqallid ayant fait ce genre d'erreur contredisant formellement le ijmâ' : il y en a eu qui ont dit qu'un homme a le droit de faire, en même temps, plus de 4 nikâh : 19 exactement ! Par la formulation d'un pareil avis, de telles personnes contredisent un ijmâ' (Ibid., p. 116).

Mais, comme il l'a répondu à quelqu'un lui ayant demandé si les "Ghayr Mutamadh'hib" (ou "Ghayr Muqallid") sont inclus ou pas dans Ahl us-sunna wa-l-jamâ'ah : "(...) par le seul fait de faire la négation de la nécessité de suivre un seul mujtahid, les (Ghayr Muqallid) ne sortent pas des Ahl us-Sunna wa-l-jamâ'ah, car ce point a toujours fait l'objet d'avis divergents (mukhtalaf fîh) : en effet, certains Muhaddithûn aussi étaient d'avis que cela n'est pas obligatoire" (Ijtihâd o taqlîd kâ âkhirî fayss'la, pp. 116-117).

"Si un Ahl-é hadîth [c'est ainsi que les ulémas hanafites indiens appellent les Ghayr Mutamadh'hib] ne dit pas que suivre une école, cela est harâm, ne dit pas du mal et ne pense pas en mal des Grands, alors, khayr, [ne pas suivre un seul mujtahid] cela était aussi la position (maslak) de certains Salaf. En cela non plus je ne fais pas de dureté ("tanguî"). Par contre, c'est un autre débat que de savoir si mon cœur s'y retrouve ou pas" (Ijtihâd o taqlîd kâ âkhirî fayss'la, p. 116).

"En fait, ce nous dont avons le plus à nous plaindre par rapport aux Ghayr Muqallidûn, c'est qu'ils disent du mal de nos Aïmma *.
S'ils ne disent pas du mal (d'eux), alors nous n'avons pas beaucoup de débats à propos du fait de suivre (une des 4 écoles) ou de ne pas en suivre : c'est l'affaire ijtihâdî de chacun avec Dieu : qu'il contente Dieu par la voie de fait de suivre l'une des 4 écoles, ou par la voie de ne pas en suivre.
– Notre pensée ijtihâdî est que nous ne pouvons pas pratiquer le dîn sans suivre l'une des 4 écoles.
– Si quelqu'un a une pensée ijtihâdî que sans suivre (l'une des 4 écoles) aussi il peut y avoir pratique du dîn et Dieu peut être content (de lui), c'est son choix (ikhtiyâr), et nous n'allons pas nous prendre la tête avec lui.
Mais quelle est la raison pour laquelle eux se prennent la tête avec ceux qui suivent (une des 4 écoles) ? Plus encore, ils disent du mal de nos Aïmma !
Alors que nous ne disons pas du mal des leurs : au contraire, nous considérons les Muhaddithûn comme nos Imâm, nous leur témoignons du respect ('azmat), et ne considérons pas autorisé de mépriser qui que ce soit"
(Ijtihâd o taqlîd kâ âkhirî fayssla, p. 121).
(* C'est cette réalité historique qui a créé un fossé en Inde entre les Hanafites et les Ghayr mutamadh'hib : un bon nombre des seconds (mais Siddîq Hassan Khân Qannôjî n'était pas de ceux-là, lui) ont dénigré les ulémas hanafites, certains allant même jusqu'à dire que Abû Hanîfa ne connaissait que très peu de hadîths, ou encore que Abû Hanîfa donnait préférence à son avis personnel sur les paroles du Prophète, que Dieu le bénisse et le salue, qu'il connaissait.)

Un Ghayr Mutamadh'hib de la ville de Qannôj l'ayant invité à un repas chez lui, Cheikh Thânwî accepta. Arrivé à la maison de son hôte, suite à une petite discussion, le cheikh dit :
"Vu que je suis sur le point de manger votre sel, vous avez un droit sur moi, et c'est pourquoi je vais vous dire quelque chose pour votre bien. C'est que :
Ne pas suivre (l'une des 4 écoles), c'est une question dans laquelle il peut y avoir divergence (
گنجائش). Si vous le faites avec une bonne intention, nous n'avons pas beaucoup de débat sur le sujet. Cependant, il y a 2 choses que l'on trouve beaucoup chez (les gens comme) vous qui sont graves et constituent des péchés, faites attention à vous en préserver. L'une est de penser en mal ("
بد گماني"). L'autre est de dire du mal ("بد زبانی").
Votre pensée en mal
("بد گماني") est que vous pensez que dès que, à propos d'une question donnée, si le hadîth ne se trouve pas dans les 6 recueils les plus connus, il n'existe pas ! Alors que vous aussi savez que les hadîths ne se trouvent pas que dans ces 6 recueils, de même que tout hadîth se trouvant dans l'un de ces 6 recueils n'est pas forcément authentique.
Et votre propos de mal
("بد زبانی") est que vous prononcez des paroles déplacées à propos de très illustres A'ïmma."
Les gens présents reconnurent alors leurs erreurs et demandèrent pardon à Dieu (Majâliss-é hakîm ul-ummat, pp. 273-274).

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Shâh Waliyyullâh n'était pas un Ghayr Mutamadh'hib, c'était un Hanafite :

Simplement, lorsqu'il voyait que l'avis de l'école hanafite contredit un hadîth clair sans être appuyé par un autre hadîth ni un principe général extrait de plusieurs autres hadîths, il suivait le hadîth plutôt que l'avis de l'école (parfois on peut pourtant penser que l'avis de l'école n'est pas une khata' ijtihâdî qat'î mais que la question est seulement zanniyya, comme pour le troisième exemple qui va être cité).

Ainsi :
– à propos de savoir s'il est autorisé ou pas de boire, d'un alcool autre que celui du raisin et de la datte, une quantité qui n'enivre pas, il a clairement dit qu'il suivre le hadîth : "Ce dont une grande quantité enivre, alors une petite quantité est illicite" ;
mas'alat ul-mussarrât ;
nudb us-salât 'inda-l-khutba li-d-dâkhil fi-l-masjid.
(Voir pour ces 3 points Hujjat ullâh il-bâligha.)

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Cheikh Thânwî dit quant à lui :

"Le fondement du Dîn, c'est le Coran et les Hadîths. Le fait de suivre une école précise a cela même comme objectif : pratiquer avec facilité et sécurité le Coran et les Hadîths" (Ijtihâd-o-taqlîd kâ âkhirî fayssla, p. 46).

"(...) Le fait de suivre les Hadîths est l'objectif (maqsûd bi-dh-dhât), et Abû Hanîfa n'est qu'un moyen pour la compréhension (...)" (p. 45-46).

"Certains muta'assib ont, dans le fait de suivre les imams, une telle rigidité (jûmûd), que, face aux avis du imam, elles rejettent sans hésitation les hadîths authentiques non-contredits [par d'autres hadîths ou principes généraux extraits de versets ou de hadîths].
Mes cheveux se dressent face à une telle attitude. C'est une personne de ce genre qui a dit : "Qâla Qâla bisyâr ast, marâ Qâla Abû Hanîfa darkâr ast" ["Il peut y avoir beaucoup de "Qâla-r-Rassûl", moi c'est de "Qâla Abû Hanîfa" que j'ai besoin"]. Dans cette phrase combien de manque d'attention et de manque de respect y a-t-il vis-à-vis des hadîths prophétiques ! Que Dieu le Très Haut préserve d'une telle rigidité (jumûd) ! La façon de faire de ces personnes fait comprendre qu'elles considèrent Abû Hanîfa comme l'objectif (maqsûd bi-dh-dhât). Si quelqu'un décrit un tel suivi comme constituant "le fait d'associer (un ummatî) dans la nubuwwa", cela ne sera pas étonnant.

Mais il serait tout aussi erroné qu'en voyant l'état de quelques ignorants de ce genre, on accuse et soupçonne tous ceux qui suivent une école d'associer (un ummatî) dans la nubuwwa" (Ijtihâd-o-taqlîd kâ âkhirî fayss'la, p. 75).

"Certaines personnes ont, dans le fait de suivre une école, une telle exagération (ghuluww) qu'elles rejettent sans hésitation des versets et des hadîths en disant : "On ne connait pas ça !"
Cette façon est très dangereuse et mauvaise. Dans le Coran il y a un grave avertissement ; on dirait que sur ces gens se vérifie ce que dit ce verset : "Et lorsque nos versets sont récités devant eux, clairs, tu connais sur les visages des incroyants le changement ; peu s'en faudrait qu'ils s'attaquent à ceux qui récitent sur eux nos versets""
(p. 118).

"Cependant, si nous trouvons que le propos de Abû Hanîfa est contraire à un verset ou à un hadîth, à ce moment sans doute nous délaisserons cela." "Si l'avis de l'Imâm est fondé seulement sur le qiyâs et qu'un hadîth le contredisant est présent, l'avis de l'Imam est alors délaissé.
Cela s'est produit à propos de "Mâ askara kathîruhû, fa qalîluhû harâm" : l'Imâm (Abû Hanîfa) a déclaré autorisé la quantité qui n'enivre pas, alors que dans le hadîth il est dit explicitement le contraire ; ici nous délaissons l'avis de l'Imâm (Abû Hanîfa).
Cependant il faut pour cela une grande érudition (tabahhur). Il n'est pas aussi évident que cela de dire à propos d'une question qu'il n'y avait [chez tel mujtahid] à son sujet aucune preuve (dalîl) autre que l'analogie (qiyâs), car parfois il y a argumentation par 'ibârat un-nass, parfois par ishârat un-nass, et tout cela constitue de l'argumentation sur la base des hadîths.
Par contre, il n'y avait réellement rien d'autre qu'une analogie (qiyâs) allant à l'encontre de "Mâ askara kathîruhû, fa qalîluhû harâm". Quant aux propos (âthâr) de Compagnons [qui disent chose différente de ce hadîth], ils ne peuvent contrebalancer un hadîth"
(Ijtihâd-o-taqlîd kâ âkhirî fayss'la, pp. 77-78).

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Enfin, il ne faut pas se cantonner à parfaire ses croyances (A et B). Il faut également, dans le concret de sa vie, parfaire ses actions visibles (C) en les rendant conformes à ce que l'on croit à leur sujet (B) : il faut ainsi accomplir les actions nécessaires, et se préserver des actions interdites :

En effet, car les menaces (wa'îd) d'un châtiment temporaire concernent également le fait d'avoir concrètement délaissé sans excuse des actions obligatoires ou commis sans excuse des actions interdites.

Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

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