1) La femme peut-elle se marier sans la présence / le consentement de son père ? 2) Le père peut-il marier sa fille sans le consentement de celle-ci ?

Question :

Est-ce que le mariage d'une femme est valide si elle n'a pas averti sa famille de son mariage ? Ou bien doit-il y avoir obligatoirement un membre de la famille s'il n'y a aucune opposition de la part de celle ci au sujet du mariage ?

-

Réponse :

-

I) Il y a 2 aspects à cette question :

A) La jeune femme peut-elle se marier sans que ce soit son walî qui célèbre le mariage / donne procuration à quelqu'un pour célébrer le mariage ? ou sans avoir obtenu, au moins, le consentement de son walî ?

B) Le père peut-il marier sa fille sans son consentement ? voire même contre son agrément ?

-

II) En fait il existe sur le sujet les hadîths suivants :

Les termes "Bikr" et "Thayyib" (qui seront vus ci-après) signifient respectivement :
--- "femme n'ayant jamais connu de mari auparavant" (chez Abu Hanîfa) / "femme vierge" (chez les Shafi'ites) ;
--- et : "femme ayant auparavant déjà connu un mari, mais étant à présent veuve ou divorcée" (chez Abû Hanîfa) / "femme n'étant plus vierge parce qu'ayant déjà eu des relations intimes" (chez les Shafi'ites).

1) "عن أبي هريرة، عن النبي صلى الله عليه وسلم، قال: لا تنكح البكر حتى تستأذن، ولا الثيب حتى تستأمر. فقيل: يا رسول الله، كيف إذنها؟ قال: إذا سكتت" : "La Bikr ne sera pas mariée tant qu'on ne lui aura pas demandé son autorisation, ni la Thayyib tant qu'on ne l'aura pas consultée" (al-Bukhârî, 6567) ;
--- Une autre version se lit ainsi : "عن أبي هريرة، أن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال: لا تنكح الأيم حتى تستأمر، ولا تنكح البكر حتى تستأذن. قالوا: يا رسول الله، وكيف إذنها؟ قال: أن تسكت" (al-Bukhârî, 4843, 6569, Muslim 1419 ) ;
1') "عن عائشة رضي الله عنها، قالت: قلت: يا رسول الله، يستأمر النساء في أبضاعهن؟ قال: نعم. قلت: فإن البكر تستأمر فتستحيي فتسكت؟ قال: سكاتها إذنها" : Aïcha demanda au Prophète (sur lui soit la paix) : "Messager de Dieu, consultera-t-on les femmes au sujet de leur mariage ?" Il répondit : "Oui. - La Bikr est consultée, (mais) elle a alors de la pudeur [= réserve], et reste silencieuse ! - Son silence constitue son autorisation" (al-Bukhârî, 6547, Muslim, 1420).

2) "عن خنساء بنت خذام الأنصارية أن أباها زوجها وهى ثيب، فكرهت ذلك، فأتت النبى صلى الله عليه وسلم، فرد نكاحها" : "Khansâ' bint Khidhâm al-ansâriyya vint se plaindre au Prophète (sur lui soit la paix) que son père l'avait mariée contre son gré, alors qu'elle était Thayyib. Le Prophète annula alors son mariage" (al-Bukhârî, 4845, Abû Dâoûd, 2101) ;

3) "عن ابن عباس أن جارية بكرا أتت النبى صلى الله عليه وسلم فذكرت أن أباها زوجها وهى كارهة؛ فخيرها النبى صلى الله عليه وسلم" : "Une Bikr vint trouver le Prophète (sur lui soit la paix) et dit que son père l'avait mariée contre son gré. Le Prophète lui donna alors le choix" (Abû Dâoûd, 2096) : l'authenticité de ce hadîth fait débat.
--- "عن عائشة أن فتاة دخلت عليها فقالت إن أبى زوجنى ابن أخيه ليرفع بى خسيسته وأنا كارهة. قالت: اجلسى حتى يأتى النبى صلى الله عليه وسلم. فجاء رسول الله صلى الله عليه وسلم فأخبرته، فأرسل إلى أبيها فدعاه فجعل الأمر إليها. فقالت: يا رسول الله قد أجزت ما صنع أبى، ولكن أردت أن أعلم أللنساء من الأمر شىء" (an-Nassâ'ï, 3217).

4) "عن أبي موسى قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: لا نكاح إلا بولي" : "Pas de mariage sans Walî" (at-Tirmidhî, 1101, Abû Dâoûd, 2085) : l'authenticité de ce hadîth fait débat (voir par exemple Fat'h ul-bârî 9/230).

5) "عن عائشة، أن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال: أيما امرأة نكحت بغير إذن وليها فنكاحها باطل، فنكاحها باطل، فنكاحها باطل، فإن دخل بها فلها المهر بما استحل من فرجها، فإن اشتجروا فالسلطان ولي من لا ولي له" : "Toute femme s'étant mariée sans le consentement de son Walî, son mariage est invalide, son mariage est invalide, son mariage est invalide..." (at-Tirmidhî, 1102, Abû Dâoûd, 2083) : l'authenticité de ce hadîth fait débat.

6) "عن الحسن، أن معقل بن يسار كانت أخته تحت رجل، فطلقها ثم خلى عنها. حتى انقضت عدتها، ثم خطبها. فحمي معقل من ذلك أنفا، فقال: "خلى عنها وهو يقدر عليها، ثم يخطبها!" فحال بينه وبينها. فأنزل الله: {وإذا طلقتم النساء فبلغن أجلهن فلا تعضلوهن} إلى آخر الآية. فدعاه رسول الله صلى الله عليه وسلم فقرأ عليه. فترك الحمية واستقاد لأمر الله" (al-Bukhârî, 5021). "عن الحسن، عن معقل بن يسار أنه زوج أخته رجلا من المسلمين على عهد رسول الله صلى الله عليه وسلم. فكانت عنده ما كانت. ثم طلقها تطليقة. لم يراجعها، حتى انقضت العدة، فهويها وهويته، ثم خطبها مع الخطاب. فقال له: "يا لكع، أكرمتك بها وزوجتكها فطلقتها! والله لا ترجع إليك أبدا آخر ما عليك!" قال: فعلم الله حاجته إليها، وحاجتها إلى بعلها. فأنزل الله تبارك وتعالى: {وإذا طلقتم النساء فبلغن أجلهن} إلى قوله {وأنتم لا تعلمون}. فلما سمعها معقل قال: "سمعا لربي وطاعة"؛ ثم دعاه فقال: "أزوجك وأكرمك" (at-Tirmidhî, 2981).
Ma'qil ibn Yassâr avait marié sa sœur à un homme. Après un moment de vie commune, cet homme répudia cette femme. Ce fut lorsque le délai ('idda) se fut écoulé que tous deux voulurent se remettre ensemble. L'homme vint alors demander à Ma'qîl la main de sa sœur. Ma'qil se fâcha alors et refusa que sa sœur se marie de nouveau avec cet homme. Dieu fit alors descendre le verset : "Lorsque vous [ô Epoux] répudiez les femmes, et qu'elles parviennent à leur délai, alors [ô Awliyâ'] ne les empêchez pas de se marier (de nouveau) avec leur époux (précédents) s'ils sont d'accord, selon la bienséance." Ma'qil se conforma alors à ce que Dieu dit, et les maria tous deux (al-Bukhârî, at-Tirmidhî).

7) "عن ابن عباس، أن النبي صلى الله عليه وسلم قال: الثيب أحق بنفسها من وليها، والبكر تستأمر، وإذنها سكوتها" : "La Thayyib a plus droit sur elle-même que son Walî. Et la Bikr sera consultée ; et l'autorisation de sa part sera son silence" (Muslim, 1421).
--- Dans une autre version : "عن ابن عباس، قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: الأيم أحق بنفسها من وليها والبكر تستأذن في نفسها، وإذنها صماتها" (Muslim, at-Tirmidhî, 1108, Abû Dâoûd, 2098).

-

III) Les mujtahidûn ont eu différentes façons d'appréhender l'ensemble de ces hadîths :

Déjà, ce qui est quasi-unanime chez les ulémas, c'est que la femme qui est Thayyib bâligha, son père ne peut pas la marier contre son gré (Fat'h ul-bârî 9/240, Al-Mughnî 9/209), et cela conformément aux hadîths 1 et 2.

C'est à propos de la Bikr bâligha qu'il y a divergence...

– Le mujtahid dont la posture offre une plus grande prérogative au père est ash-Shâfi'î :
--- si une femme (fût-elle une veuve ou une divorcée) se marie elle-même (et non pas que ce soit son Walî, ou celui à qui ce Walî a donné procuration pour la marier, qui l'ait mariée), son mariage est invalide ;
--- et si le père ou le grand-père a marié la jeune femme (Bikr Bâligha) sans le consentement de celle-ci, ce mariage est valide (quoiqu'il soit ghayr awlâ de faire ainsi, car il est recommandé d'obtenir le consentement de la jeune fille). (D'après l'avis shâfi'ite, de même que l'un des deux avis de Ahmad, c'est lorsque le père a marié sa fille avec un homme kufu' (au moins de même niveau qu'elle) que le mariage forcé est valide ; car si l'homme n'est pas kufu', alors le mariage forcé est invalide (Tahrîr ul-massâlik, p. 362 ; Al-Mughnî 9/203).)

– Et le mujtahid dont la posture offre une plus grande prérogative à la femme est Abû Hanîfa :
--- un Walî ne peut pas marier la jeune femme (Bikr bâligha) sans le consentement de celle-ci ; s'il le fait, le mariage soit est invalide, soit demeure suspendu à l'accord de la jeune femme (je ne sais pas pour ce point précis) ;
--- et la femme peut contracter elle-même un mariage ; de plus, si une jeune femme (une Bikr bâligha) s'est mariée sans l'accord de son Walî, son mariage est valide quoiqu'il soit mak'rûh de faire ainsi (cependant, si le Walî prouve que le mari n'est pas kufu' pour la demoiselle - n'est pas du même niveau qu'elle -, il peut faire annuler le mariage par un juge).

-

IV) Quand on parle du Walî : s'agit-il pour la femme d'avoir simplement le consentement de ce Walî ? ou bien faut-il que ce soit ce Walî lui-même qui la marie ?

d'après Mâlik, ash-Shâfi'î et Ahmad, pour qu'une femme se marie avec l'homme qu'elle est d'accord d'épouser, il faut que ce soit son Walî en personne qui procède à ce mariage, ou bien qu'il donne procuration (tawkîl) à un autre homme pour le faire. La femme qui va se marier ne peut donc pas, d'elle-même, se marier d'après eux. Elle ne peut pas, non plus, désigner d'elle-même (même si elle a obtenu le consentement de son Walî pour se marier avec tel homme) quelqu'un qui va la marier (sauf si elle n'a pas de Walî vivant).

– d'après Abû Thawr, il n'est pas nécessaire que ce soit son Walî qui marie la femme : ce qui importe c'est que la femme ait obtenu le consentement de son Walî avant de se marier ;

Muhammad ibn ul-Hassan et al-Awzâ'î sont d'un avis proche de celui de Abû Thawr, à cette nuance près que, selon eux, si elle s'est mariée toute seule et qu'ensuite, son Walî l'a appris et a exprimé son accord, le mariage est valide aussi. Si par contre son Walî exprime alors son désaccord, le mariage n'est pas valide. Ces deux ulémas sont d'avis que la validité du mariage fait sans consentement reste "suspendue" à cet accord : si celui-ci est obtenu, le mariage est valide, sinon il ne l'est pas ;

selon Abû Hanîfa, si la femme se marie sans avoir obtenu l'accord de son walî, elle a fait quelque chose de déconseillé, mais le mariage est valide. Cependant, elle doit se souvenir que son Walî possède le droit de dénoncer ce mariage (et d'obtenir son annulation par le juge) s'il prouve que le mari n'est pas du même niveau que sa parente ('adam ul-kafâ'ah). Le walî peut donc, se basant sur certains critères reconnus par l'islam, dire : "Cet homme ne convient pas à ma fille, et je m'oppose au mariage" (découvrez quels sont les critères reconnus à ce sujet en lisant le "Cinquième point" dans mon article Quels sont les critères pour choisir son(sa) conjoint(e) ?).

Wahba az-Zuhaylî écrit que l'avis de Abû Thawr représente une position centriste (Al-Fiqh al-islâmî wa adillatuh, p. 6574). C'est donc le consentement du walî que la femme doit obtenir, d'après cet avis. Cela n'est pas motivé par l'idée que la femme serait "une incapable" ou "une perpétuelle mineure", mais par la volonté d'éviter à la femme de se laisser induire en erreur par des hommes charmants mais escrocs (cela arrive malheureusement plus souvent qu'on ne pourrait le penser), qui sont maîtres dans l'art de séduire de jeunes personnes naïves pour disparaître ensuite et les abandonner à leur sort après avoir profité d'elles.

Le mariage religieux n'est pas un sacrement en islam, mais un contrat d'un type particulier. Il s'agit de : "عقد يفيد ملكَ استمتاع الرجل بالمرأة وحِلَّ استمتاع المرأة بالرجل" (Al-Fiqh ul-islâmi wa adillatuh, p. 6513) ; "والمقصود بالاستمتاع هو البضع أصالة، والبقية تبعًا".

-

V) Voici les Raisonnements détaillés que différents Mujtahidûn ont eus :

Voici comment Abû Hanîfa lit les hadîths suscités :

Il appréhende d'abord : les hadîths 1 ("لا تنكح البكر حتى تستأذن، ولا الثيب حتى تستأمر" : "La Bikr ne sera pas mariée tant qu'on ne lui a pas demandé son autorisation, ni la Thayyib tant qu'on ne l'a pas consultée"), 2 et 3 (il considère ce dernier : authentique), et en déduit une première règle générale : Aucune femme, qu'elle soit Bikr bâligha ou Thayyib bâligha, ne peut être mariée sans son consentement.

Par ailleurs, le zâhir du verset est inconditionnel : la femme se marie, montre la littéralité du Coran : "فَإِن طَلَّقَهَا فَلاَ تَحِلُّ لَهُ مِن بَعْدُ حَتَّىَ تَنكِحَ زَوْجًا غَيْرَهُ" : "jusqu'à ce qu'elle se marie avec un mari autre que (celui qui avait divorcé d'elle)" (Coran 2/203).
Et c'est à la lumière du zâhir de ce verset coranique que les hadîths suivants sont interprétés :
--- le hadîth 4, Abû Hanîfa le considère "non-authentique", et/ou, de toute façon, comme se rapportant à une simple recommandation : "Pas de mariage sans walî" signifie selon lui : "Le mariage fait sans walî n'est pas un bon mariage, même s'il peut rester valide" ;
--- Idem pour le hadîth 5 : il est soit non-authentique, soit à comprendre comme taghlîz : "bâtil" veut dire : "mauvais", mais pas : "nul" ;
--- le hadîth 6 ne contredit rien de tout cela : l'homme a bien agi en demandant la main de celle qu'il voulait épouser au Walî de celle-ci, puisque cela est de toutes façons recommandé. Mais cela n'en établit pas le caractère obligatoire.

C'est là la seconde règle générale : Il est recommandé à toute femme (Thayyib bâligha ou Bikr bâligha) d'obtenir l'autorisation de son Walî avant de se marier. Mais cela n'est pas une obligation. C'est seulement au cas où il peut prouver que le mari n'est pas kufu' pour sa fille (n'est pas du même niveau qu'elle) que le père peut faire annuler le mariage contracté par sa fille sans son autorisation.

-
Et voici comment ash-Shâfi'î (ainsi que Mâlik d'après l'avis mash'hûr) lisent ces hadîths :

Ils appréhendent d'abord le hadîth 4 ("لا نكاح إلا بولي" : "Pas de mariage sans Walî") ainsi que le hadîth 5 ("Toute femme s'étant mariée sans le consentement de son Walî, son mariage est invalide...") et en déduit une première règle générale : Aucune femme (qu'elle soit Bikr ou Thayyib) ne peut se marier sans son walî. Le hadîth 6 le montre d'ailleurs bien : même la Thayyib divorcée, c'est son Walî qui la mariera.

Le hadîth 7 ("La Thayyib a plus droit sur elle-même que son tuteur (en a sur elle). Et la Bikr sera consultée") ils en déduisent, par sens a contrario (maf'hûm ul-mukhâlafa), ou par parallélisme (muqâbala), que la Bikr, elle, n'a pas plus de droit sur elle que son tuteur en a. Puis ils lisent le tout à la lumière de sa première règle générale. Ils se demandent alors quel est ce droit que la Thayyib possède sur elle-même plus que son Walî, et que la Bikr n'a pas ?
--- Cela ne peut pas être la nécessité que ce soit le tuteur qui la marie, puisque la règle générale (extraite du hadîth 5) est qu'aucune femme ne peut se marier sans son tuteur : ni Bikr, ni même Thayyib !
--- Le point de différence entre Bikr et Thayyib évoqué dans ce hadîth 7 doit donc être autre chose ; il ne peut être que : la possibilité, pour la femme, de refuser la proposition de son tuteur : la Thayyib a le droit de refuser la proposition que son tuteur lui fait, mais la Bikr non, puisque c'est la Thayyib qui a plus droit sur elle-même que son tuteur, et pas la Bikr.

C'est là la seconde règle générale, déduite du hadîth 7 (lui-même compris à la lumière de la première règle générale) : la Thayyib a le droit de refuser la proposition que son tuteur lui fait, mais la Bikr non.

Et c'est à la lumière de cette seconde règle générale que ash-Shâfi'î et Mâlik lisent le hadîth 1 ainsi que la seconde partie du hadîth 7 : lorsque le hadîth dit de demander à la Bikr son autorisation, cela ne peut donc induire qu'une simple recommandation, et pas une obligation (contrairement à la Thayyib : demander à cette dernière son consentement est une obligation).

----- Quant au hadîth 2, il ne parle que d'une Thayyib : c'est elle dont le mariage a été annulé parce que fait sans son consentement. Et ash-Shâfi'î et Mâlik ne font pas l'analogie de la Bikr à ce sujet, vu la déduction qu'ils ont faite du hadîth 7 (et que nous venons de citer).

----- Quant au hadîth 3 (qui montre le Prophète accorder à une Bikr le droit de refuser le mariage imposé par son père), ash-Shâfi'î et Mâlik le considèrent "non-authentique".

-
Voici comment Ahmad (selon un des deux avis relatés de lui), al-Bukhârî, at-Tirmidhî et Ibn Taymiyya lisent ces hadîths :

Ils appréhendent les hadîths 1 et 2 et en déduisent une première règle générale : Aucune femme, qu'elle soit Bikr bâligha ou Thayyib bâligha, ne peut être mariée sans son consentement.

Mais ils considèrent en même temps le hadîth 4 : "Pas de mariage sans walî" en le comprenant comme signifiant : "Le mariage fait sans walî n'est pas valide". Et ils en déduisent une seconde règle générale : Aucune femme (qu'elle soit Bikr ou Thayyib) ne peut se marier sans son Walî. Et du hadîth 5 ils déduisent la même chose.
Le hadîth 6 semble confirmer cela, puisque la sœur de Ma'qil était Thayyib et qu'on voit Ma'qil exercer ce qui semble bien être son droit : il l'empêche de se remarier avec son ex-mari.

--- At-Tirmidhî écrit : "وفي هذا الحديث دلالة على أنه لا يجوز النكاح بغير ولي؛ لأن أخت معقل بن يسار كانت ثيبا؛ فلو كان الأمر إليها دون وليها لزوجت نفسها ولم تحتج إلى وليها معقل بن يسار. وإنما خاطب الله في هذه الآية الأولياء فقال: {لا تعضلوهن أن ينكحن أزواجهن}. ففي هذه الآية دلالة على أن الأمر إلى الأولياء في التزويج مع رضاهن" (at-Tirmidhî, commentaire de 2981).
--- L'avis de al-Bukhârî se lit ainsi : "باب من قال: لا نكاح إلا بولي" (Al-Jâmi' us-sahîh, kitâb un-nikâh, bâb n° 37) ; "باب لا ينكح الأب وغيره البكر والثيب إلا برضاها", et : "باب إذا زوج ابنته وهى كارهة فنكاحه مردود" (bâb n° 42 et bâb n° 43).
--- Et celui de Ibn Taymiyya est visible in MF 32/102 (à propos du walî) et MF 32/22-28 (à propos du consentement de la bikr). Sur ce dernier point, il cite également un dalîl ussûlî, et un dalîl 'aqlî : "Quant au fait de la marier alors qu'elle n'est pas d'accord, cela contredit les règles générales shar'î et les raisonnements. Dieu n'a pas autorisé le Walî à la forcer à vendre ou à louer (ce qui lui appartient), il faut son accord ; (son Walî n'a pas non plus le droit de) la forcer à absorber un aliment ou une boisson qu'elle ne veut pas, ni à porter un vêtement qu'elle ne veut pas. Comment pourrait-il donc la forcer à avoir des relations intimes avec qui elle ne veut pas en avoir, et à vivre avec qui elle ne veut pas vivre ? Dieu a suscité entre les époux de l'amour et de la miséricorde (Coran 30/21). Dès lors, si le mariage naît sur la base de l'aversion de l'épouse pour le mari, quels amour et miséricorde y aura-t-il ?" : "وأما تزويجها مع كراهتها للنكاح: فهذا مخالف للأصول والعقول. والله لم يسوغ لوليها أن يكرهها على بيع أو إجارة إلا بإذنها ولا على طعام أو شراب أو لباس لا تريده. فكيف يكرهها على مباضعة من تكره مباضعته، ومعاشرة من تكره معاشرته؟ والله قد جعل بين الزوجين مودة ورحمة؛ فإذا كان لا يحصل إلا مع بغضها له ونفورها عنه، فأي مودة ورحمة في ذلك؟" (MF 32/25).
Ibn ul-Qayyim a écrit des propos voisins (Zâd ul-ma'âd, 5/96-98).

Pour ce qui est de la différence que le hadîth 1 induit entre Bikr et Thayyib ("لا تنكح البكر حتى تستأذن، ولا الثيب حتى تستأمر"), Ibn Taymiyya l'explique en les termes suivants : "وأما المفهوم: فالنبي صلى الله عليه وسلم فرق بين البكر والثيب، كما قال في الحديث الآخر: "لا تنكح البكر حتى تستأذن ولا الثيب حتى تستأمر": فذكر في هذه لفظ "الإذن" وفي هذه لفظ "الأمر". وجعل إذن هذه الصمات، كما أن إذن تلك النطق. فهذان هما الفرقان اللذان فرق بهما النبي صلى الله عليه وسلم بين البكر والثيب؛ لم يفرق بينهما في الإجبار وعدم الإجبار. وذلك لأن البكر لما كانت تستحي أن تتكلم في أمر نكاحها، لم تخطب إلى نفسها، بل تخطب إلى وليها، ووليها يستأذنها فتأذن له، لا تأمره ابتداء، بل تأذن له إذا استأذنها، وإذنها صماتها. وأما الثيب فقد زال عنها حياء البكر فتتكلم بالنكاح، فتخطب إلى نفسها، وتأمر الولي أن يزوجها؛ فهي آمرة له، وعليه أن يعطيها فيزوجها من الكفء إذا أمرته بذلك. فالولي مأمور من جهة الثيب، ومستأذن للبكر. فهذا هو الذي دل عليه كلام النبي صلى الله عليه وسلم" (MF 32/24-25). Pour ma part, je pencherais davantage vers le fait que le "idhn" renvoie au "sumât", et le "amr" au "nutq". Car le hadîth ne se lit pas : "tasta'mir" mais : "tusta'mar" : c'était donc bien le Walî qui recevait la demande en mariage dans le cas de la Thayyib aussi. C'est bien ce qui s'est passé au sujet de Hafsa (que Dieu l'agrée) : bien qu'elle était veuve, c'est à Omar ibn ul-Khattâb (que Dieu l'agrée) que le Prophète (sur lui soit la paix) demanda sa main.

Par contre, pour ce qui est de la différence que le hadîth 7 induit entre la Thayyib et la Bikr, lui qui dit que la Thayyib a plus de droit que son tuteur, je ne sais pas comment ces mujtahidûn l'expliquent...

-
Voici comment Dâoûd az-Zâhirî lit ces hadîths :

Il appréhende d'abord les hadîths 1 et 2 et en déduit une première règle générale : Aucune femme, qu'elle soit Bikr bâligha ou Thayyib bâligha, ne peut être mariée sans son Walî (Al-Muhallâ, 9/39, 44).

Le hadîth 7 : "La Thayyib a plus droit sur elle-même que son tuteur (en a sur elle). Et la Bikr sera consultée", il en déduit, par sens a contrario (maf'hûm ul-mukhâlafa), ou par parallélisme (muqâbala), que la Bikr, elle, n'a pas plus de droit sur elle que son tuteur en a. Puis il lit ce tout à la lumière de sa règle générale première ("Aucune femme, qu'elle soit Bikr bâligha ou Thayyib bâligha, ne peut être mariée sans son Walî") ; Daoûd se demande alors quel est ce droit que la Thayyib possède plus que son tuteur, mais pas la Bikr ?

--- Et il répond que c'est la nécessité que son Walî soit parmi ses 'Assaba !
"La Thayyib a plus de droit sur elle que son tuteur en a" veut donc dire que la Thayyib n'a pas l'obligation que ce soit son Walî (père ou autre) qui la marie, ni que celui-ci ait donné son consentement. Et que par contre, la Bikr a l'obligation que ce soit son Walî qui la marie (ce Walî devant par ailleurs donner son accord à ce mariage pour qu'il soit valide).

--- Le hadîth 4 : "Pas de mariage sans Walî", Dâoûd en déduit que la Thayyib a elle aussi besoin d'un Walî pour célébrer son nikâh : mais ce peut être n'importe quel musulman, et pas forcément son Walî parmi ses 'Assaba : c'est ce qui fait la différence entre la Bikr et la Thayyib (Al-Muhallâ, 9/33).

--- Le hadîth 5 ("أيما امرأة نكحت بغير إذن وليها فنكاحها باطل، فنكاحها باطل، فنكاحها باطل" : "Toute femme s'étant mariée sans le consentement de son Walî, son mariage est invalide...") peut être compris ainsi d'après l'avis de Dâoûd : "son Walî" peut être : "le Walî qu'elle s'est choisie".

Cependant, c'est ce qui va amener Ibn Hazm à ne pas être d'accord avec Dâoûd (nous le verrons plus bas).

Ibn Hazm relate l'avis de Dâoûd en ces termes : "قال أبو سليمان: أما البكر فلا يزوجها إلا وليها. وأما الثيب فتولي أمرها من شاءت من المسلمين ويزوجها، وليس للولي في ذلك اعتراض" (Al-Muhallâ, 9/33). Et, un peu plus loin : "وأما قول أبي سليمان فإنما عول على الخبر الثابت عن رسول الله صلى الله عليه وسلم من قوله: "البكر يستأذنها أبوها، والثيب أحق بنفسها من وليها" (Al-Muhallâ, 9/35).

--- Quant au hadîth 6, il prouve seulement que l'homme a demandé la main de celle qu'il voulait épouser au Walî de celle-ci. Cependant, cela n'était, dans ce cas, pas une obligation. Et le Coran est venu dire que le Walî a l'interdiction d'empêcher sa Mawliyya de se marier avec un homme du moment que cela est convenable, et que le Walî qui empêche sa Mawliyya pour une raison non reconnue par la Shar', celui-là est fautif sur le plan moral.

La seconde règle est donc la suivante :
--- Aucune Bikr ne peut se marier sans son Walî ;
---
Par contre, la Thayyib n'a pas cette obligation : elle a besoin, pour se marier, d'un Walî, mais ce dernier peut être n'importe lequel d'entre les musulmans ; et son Walî parmi les 'Assaba n'a pas droit à l'objection.

-
– Voisine (de celle de Dâoûd) est la synthèse faite par Ibn Hazm :

Ibn Hazm a repris toute l'argumentation de Dâoûd.

Il n'y a qu'un point sur lequel il n'est pas d'accord avec lui : Ibn Hazm pense que l'avis de Dâoûd ne tient pas compte, ou pas suffisamment compte, du hadîth 5 : "أيما امرأة نكحت بغير إذن وليها فنكاحها باطل، فنكاحها باطل، فنكاحها باطل" : "Toute femme s'étant mariée sans le consentement de son walî, son mariage est invalide...". Ibn Hazm dit que ce hadîth induit que c'est toute femme, qu'elle soit Bikr ou Thayyib, qui a l'obligation que ce soit son Walî qui la marie : même pour la Thayyib ce ne peut donc pas être n'importe quel musulman qui sera son Walî (comme le pense Dâoûd), mais ce doit être son Walî déterminé, parmi les 'Assaba. Il écrit : "ولا يحل للمرأة نكاح - ثيبا كانت أو بكرا - إلا بإذن وليها" (Al-Muhallâ, 9/25, mas'ala n° 1825).

Cependant, en vertu du hadîth 7 ("La Thayyib a plus droit sur elle-même que son tuteur (en a sur elle)"), le Walî de la Thayyib ne peut pas s'opposer au choix qu'elle a fait, contrairement au choix que la Bikr fait. Ibn Hazm écrit : "وإذا بلغت البكر والثيب، لم يجز للأب ولا لغيره أن يزوجها إلا بإذنها؛ فإن وقع فهو مفسوخ أبدا. فأما الثيب فتنكح من شاءت، وإن كره الأب. وأما البكر فلا يجوز لها نكاح إلا باجتماع إذنها وإذن أبيها" (Al-Muhallâ, 9/38, mas'ala n° 1826).

En fait, chez Ibn Hazm, cette différence entre Bikr et Thayyib est la suivante :
--- la Thayyib ne peut se marier qu'avec le consentement de son Walî. Mais si son Walî s'oppose au choix de sa Mawliyya, alors ce sera l'autorité (Sultân) qui la mariera avec l'homme de son choix, malgré l'opposition du Walî : "وأما قول أبي سليمان فإنما عول على الخبر الثابت عن رسول الله صلى الله عليه وسلم من قوله: "البكر يستأذنها أبوها والثيب أحق بنفسها من وليها". قال أبو محمد: وهذا لو لم يأت غيرُه، لكان كما قال أبو سليمان! لكن قوله عليه الصلاة والسلام "أيما امرأة نكحت بغير إذن وليها فنكاحها باطل": عموم لكل امرأة ثيب أو بكر. وبيان هذا القول أن معنى قوله عليه الصلاة والسلام "والثيب أحق بنفسها من وليها": أنه لا ينفذ فيها أمره بغير إذنها، ولا تنكح إلا من شاءت؛ فإذا أرادت النكاح لم يجز لها إلا بإذن وليها؛ فإن أبى أنكحهما السلطان على رغم أنف الولي الآبي" (Al-Muhallâ 9/36) ;
--- pour ce qui est de la Bikr, elle ne pourra elle non plus se marier qu'avec le consentement de son Walî : celui-ci ne peut pas lui imposer son choix, mais elle non plus ne peut pas choisir son mari contre le gré de son Walî, et ne peut alors pas avoir recours à l'autorité (Sultân) pour la marier ("فأما الثيب فتنكح من شاءت، وإن كره الأب. وأما البكر فلا يجوز لها نكاح إلا باجتماع إذنها وإذن أبيها" (Al-Muhallâ, 9/38, mas'ala n° 1826). Il peut donc arriver que la Bikr refuse la proposition de son Walî, comme il peut arriver que le Walî mette son veto au choix de sa Mawliyya Bikr. A ce moment elle ne peut pas avoir recours au Sultân.

Or cette tentative de synthèse de Ibn Hazm pose le même problème que celui qu'il reprochait à Dâoûd : le hadîth 5, qui accorde le recours à l'autorité (Sultân) en cas de litige entre Walî et Mawliyya ("فإن اشتجروا: فالسلطان ولي من لا ولي له") commence bien par les termes : "أيما امرأة" : "toute femme", ce dont la lettre englobe toute femme. Or Ibn Hazm n'accorde ce recours qu'à la Thayyib, et pas à la Bikr.

-
Voici ce que je propose humblement :

--- Par rapport à la première question (A) ("Le Walî peut-il marier sa mawliyya sans le consentement de celle-ci ?"), je suis de l'école hanafite.
Ibn Taymiyya a bien synthétisé la problématique : "Quant au fait de la marier alors qu'elle n'est pas d'accord, cela contredit les règles générales shar'î et les raisonnements. Dieu n'a pas autorisé le Walî à la forcer à vendre ou à louer (ce qui lui appartient), il faut son accord ; (son Walî n'a pas non plus le droit de) la forcer à absorber un aliment ou une boisson qu'elle ne veut pas, ni à porter un vêtement qu'elle ne veut pas. Comment pourrait-il donc la forcer à avoir des relations intimes avec qui elle ne veut pas en avoir, et à vivre avec qui elle ne veut pas vivre ? Dieu a suscité entre les époux de l'amour et de la miséricorde (Coran 30/21). Dès lors, si le mariage naît sur la base de l'aversion de l'épouse pour le mari, quels amour et miséricorde y aura-t-il ?" : "وأما تزويجها مع كراهتها للنكاح: فهذا مخالف للأصول والعقول. والله لم يسوغ لوليها أن يكرهها على بيع أو إجارة إلا بإذنها ولا على طعام أو شراب أو لباس لا تريده. فكيف يكرهها على مباضعة من تكره مباضعته، ومعاشرة من تكره معاشرته؟ والله قد جعل بين الزوجين مودة ورحمة؛ فإذا كان لا يحصل إلا مع بغضها له ونفورها عنه، فأي مودة ورحمة في ذلك؟" (MF 32/25).

--- Et par rapport à la seconde question (B) ("La Mawliyya peut-elle se marier sans son Walî ?"), serait-il possible que la synthèse soit comme suit :
--- Aucune Bikr ne peut se marier sans avoir obtenu le consentement de son Walî ;
--- Par contre, la Thayyib n'a pas cette obligation : pour sa part, elle peut se marier sans avoir obtenu le consentement de son Walî...

-

VI) Quelques précisions supplémentaires :

Comment fera la femme qui désire se marier avec quelqu'un, mais dont le Walî refuse absolument de la marier avec cet homme et de donner son accord pour ce mariage ?

Le droit musulman lui donne dans ce cas une possibilité supplémentaire : elle portera le cas devant l'autorité musulmane (sultân ou qâdhî), et celle-ci examinera les faits : s'il s'avère que les raisons qui poussent le Walî à refuser de donner son accord sont valables, elle donnera raison à celui-ci. Mais si les raisons sont infondées et /ou injustes, l'autorité mariera elle-même cette femme, en vertu de la partie du hadîth 5 : "فإن اشتجروا: فالسلطان ولي من لا ولي له" (at-Tirmidhî, 1102, Abû Dâoûd, 2083).

-
Qui est le Walî d'une femme ?

Il y a un ordre à respecter en la matière :
- c'est d'abord le père (sauf d'après Mâlik),
- sinon, s'il est mort ou, s'il est impossible de le joindre, c'est le grand-père paternel,
- sinon c'est l'arrière grand-père paternel,
- sinon : le frère de même père et de même mère,
- sinon : le frère de même père,
- etc.

-
Le père devrait aussi consulter la mère avant de donner son accord au mariage de sa fille, ou de ne pas le donner :

Le Prophète (sur lui soit la paix) a demandé à un Ansarite la main de sa fille, pour l'un de ses Compagnons nommé Julaybîb. Cet Ansarite lui répondit : "Je consulte au préalable sa mère. - Eh bien d'accord", lui dit le Prophète : rapporté par Ibn Hibbân, cité dans Tahrîr ul-mar'a).

Il y a aussi cet autre hadîth : "عن ابن عمر، قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: آمروا النساء في بناتهن" (Abû Dâoûd, 2095, dha'îf d'après al-Albânî).

-
Comment fera la femme convertie à l'islam, qui n'a pas de walî dans sa parenté ?

Si elle se trouve dans un pays musulman, ce sera le juge musulman (qâdhî) - ou celui que celui-ci désignera - qui la mariera.

Et si elle se trouve dans un pays non musulman, elle demandera à un musulman qui est suffisamment au courant des règles islamiques, honnête et digne de confiance, d'être son walî (cf. Fiqh us-sunna, as-sayyid Sâbiq, tome 2 p. 409).

Enfin, il ne faut pas oublier qu'il faut également, pour que le mariage soit valable, qu'il y ait au moins deux témoins hommes (ou un témoin homme et deux témoins femmes d'après l'école hanafite) qui assistent à la célébration du mariage. Le Prophète (sur lui la paix) a dit : "Pas de mariage sans walî et sans qu'il y ait deux témoins valables" (rapporté par ad-Dâraqutnî). Chez Mâlik il faut i'lânun-nikâh avant la khalwa.

-
La question du consentement du Walî demeure une question où li-l-ikhtilâfi massâgh :

Un mariage a été célébré par des tierces sans walî, et sa validité fait donc l'objet de contestation de la part par exemple du père de la fille, alors : si l'affaire a été portée devant lui, un juge peut déclarer invalide un tel mariage (parce qu'il est de l'avis de l'invalidité du mariage fait sans walî) : le mariage est alors annulé, et un autre juge ne peut pas casser ce jugement et déclarer ce mariage de nouveau valide.

Par contre, si le juge a déclaré valide un tel mariage parce que l'affaire a été portée devant lui (et ce, parce qu'il est de l'avis de la validité d'un mariage fait sans walî), alors ce mariage reste valide, car il s'agit d'une question sur laquelle li-l-ikhtilâfi massâgh. De même, si c'est un juge (qâdhî) qui a célébré lui-même le mariage d'un homme et d'une femme dont le walî n'était pas présent : ce mariage est alors valide.
Et dans ces deux derniers cas, un autre juge ne peut alors pas casser le premier jugement, ni déclarer invalide le mariage célébré précédemment par un autre juge ("لأنها مسألة مختلف فيها، ويسوغ فيها الاجتهاد، فلم يجز نقض الحكم له (كما لو حكم بالشفعة للجار)؛ وهذا النص متأول، وفي صحته كلام، وقد عارضه ظواهر" : Al-Mughnî 9/140-143) (voir également : Al-Mughnî 13/531-534).

-
Par contre, si c'est un mariage conclu en suivant un avis complètement erroné (khata' qat'î), alors, même si un juge l'a célébré, ou l'a déclaré valide, un autre juge peut, et doit, casser un tel jugement.
La personne elle-même, si elle sait que l'avis selon lequel le mariage avait été célébré est complètement erroné, a le devoir moral de ne pas considérer ce mariage valide.

Lire notre article : Le qadhâ du qâdhî a-t-il un caractère contraignant pour toute la communauté musulmane, ou bien seulement pour les affaires précises qu'il traite ?

Lire aussi : Quand il y a divergence d'interprétations ou d'avis entre les mujtahidûn, l'avis qui est juste (swawâb) peut-il toujours être distingué de façon qat'î ?

Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

Print Friendly, PDF & Email