Hypothèse quant à la période où eut lieu l'Exode, avec Moïse (عليه السلام)

Dans de nombreux passages, le Coran parle de l'Exode, de cet événement pendant lequel Moïse (sur lui la paix) mena son peuple hors d'Egypte, où ils étaient persécutés.

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Où eut lieu l'ouverture des flots, par la Permission de Dieu, pour Moïse et les fils d'Israël
?

– Bucaille a comme hypothèse que l'ouverture des flots aurait eu lieu quelque peu au nord par rapport au golfe de Suez, quelque part entre les anciens lacs Amers et ce golfe. Divers éléments laissent à penser qu'à l'époque, il existait entre ces lacs et la mer Rouge "une communication, précaire sans doute, intermittente peut-être, suivant les niveaux moyens de la mer" (Moïse et Pharaon, p. 192). Si nous citons ici cet avis de Bucaille quant au lieu où l'ouverture des flots eut lieu, c'est tout en désapprouvant totalement sa tentative d'explication rationaliste de l'événement (lequel ne demeurerait alors plus un "signe", un "miracle" accordé par Dieu à Moïse).

– Abu-l-Hassan 'Alî an-Nadwî a pour sa part écrit que l'ouverture a eu lieu dans la mer Rouge (Qassas un-nabiyyîn, 3/87). J'avais personnellement entendu dire plus précisément que l'ouverture a pu avoir eu lieu dans le golfe de Suez, ce bras qui sépare la terre égyptienne de la côte orientale de la péninsule dite "du Sinaï" (rappelons que le nom "Suez" est à l'origine celui d'une ville de la région, et que c'est ensuite d'après ce nom que le canal percé par Ferdinand de Lesseps fut nommé).

Mais l'avis qui semble le plus pertinent est celui de ces chercheurs contemporains qui disent que l'ouverture a eu lieu dans le golfe d'Aqaba, face à la plage de Nuwaybi' / Nuwayba' (نُوَيْبِع), sur la côte orientale de la Péninsule dite "du Sinaï" : de cette plage on voit la côte occidentale de l'Arabie. L'armée de Pharaon avait poursuivi les fils d'Israël menés par Moïse jusque là, puis, ayant vu ces derniers franchir la langue de sable découverte, s'y est ensuite elle aussi engagée ; la mer ayant peu après repris son écoulement naturel, elle les engloutit dans ses flots. Les fils d'Israël étaient parvenus jusqu'à la côte d'en face, sur le sol d'Arabie (c'est là une partie de la région qui s'appelle en arabe : "Shâm", الشام).
C'est en Arabie que se situerait donc le lieu de l'épisode suivant : "وَجَاوَزْنَا بِبَنِي إِسْرَائِيلَ الْبَحْرَ فَأَتَوْا عَلَى قَوْمٍ يَعْكُفُونَ عَلَى أَصْنَامٍ لَهُمْ قَالُوا يَا مُوسَى اجْعَلْ لَنَا إِلَهًا كَمَا لَهُمْ آلِهَةٌ قَالَ إِنَّكُمْ قَوْمٌ تَجْهَلُونَ إِنَّ هَؤُلَاءِ مُتَبَّرٌ مَا هُمْ فِيهِ وَبَاطِلٌ مَا كَانُوا يَعْمَلُونَ قَالَ أَغَيْرَ اللَّهِ أَبْغِيكُمْ إِلَهًا وَهُوَ فَضَّلَكُمْ عَلَى الْعَالَمِينَ" (Coran 7/138-140). Ici, Dieu nous raconte que, après qu'Il leur ait fait franchir la mer, alors qu'ils passaient près d'un peuple idolâtre, [certains des] fils d'Israël demandèrent au prophète Moïse (sur lui soit la paix) : "Donne-nous une divinité comme eux ont des divinités". Moïse leur répondit : "Vous êtes des gens qui ignorez ! Ces gens, est caduc ce dans quoi ils se trouvent, et est vain ce qu'ils faisaient", avant d'ajouter : "Autre que Dieu chercherai-je pour vous comme divinité, alors qu'Il vous a donné préférence sur le monde entier ?" (Coran 7/138-139) (il y a eu ici un cas d'ignorance de ce qu'implique "Lâ ilâha illallâh" ; cependant, ces personnes n'ont pas alors pratiqué l'action de shirk akbar vis-à-vis de Dieu, elles ont seulement demandé à Moïse de la leur rendre possible, exprimant alors leur ignorance quant à ce que signifie le monothéisme.)
Et c'est en Arabie (dans la région de Madian) que se situerait le Sinaï, le mont sur lequel Moïse (عليه السلام) reçut les Tables de la Loi : le Mont serait un des monts de la chaîne montagneuse Jabal al-Lawz : le Jabal Maqlâ (https://jabalmaqla.com).

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Et quand cet événement se déroula-t-il ?

Nous allons voir ci-après deux hypothèses sur le sujet...

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I) Ce que l'on sait aujourd'hui :

Rappels préalables :

Après le Moyen Empire (de 2160 à 1785 environ, avant J.-C.), et profitant apparemment de la faiblesse des XIIIè et XIVè dynasties, les "Hyksos", des mystérieux "rois bergers", sémites, s'infiltrent dans le pays et y occupent des postes élevés, supplantant ainsi les indigènes dans la direction de l'Egypte.
Bientôt, à partir de – 1730, le roi d'Egypte lui-même est hyksos. Les rois indigènes, pendant ce temps, se replient sur la Haute-Egypte, à Thèbes, et ils deviennent des simples vassaux des Hyksos. Les Hyksos constituent la XVè dynastie, alors que les rois indigènes, repliés à Thèbes et devenus leurs vassaux, forment la XVIIè dynastie (– 1680 à 1570). (Quant à la XVIè, les spécialistes divergent à son sujet : selon certains d'entre eux, c'étaient d'autres asiatiques, mais ils étaient vassaux des Hyksos, et administraient des territoires différents de ceux des Hyksos.)
Cet état des choses (dit : "Deuxième Période intermédiaire") dure jusqu'en – 1570, quand les rois thébains se révoltent, emploient contre les Hyksos les armes que ces derniers avaient apportées en Egypte – bronze et chevaux – et qui leur avaient jusqu'à présent assuré la suprématie, et les renversent. C'est en
C'est alors, avec la XVIIIè dynastie, le Nouvel Empire (– 1570 à – 1085 avant J.-C.) qui débute.

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La XVIIIè dynastie (de 1570 à – 1315) est constituée des souverains suivants :
--- Ahmôsis Ier (1570 à – 1546 selon la chronologie de Redford) ;
--- Amenhotep Ier ;
--- Thoutmôsis Ier ;
--- Thoutmôsis II ;
--- Hatchepsout ;
--- Thoutmôsis III (règne seul : de – 1490 à – 1452) ;
--- Amenhotep II (de – 1452 à – 1419) ;
--- Thoutmôsis IV (de – 1419 à – 1410) ;
--- Amenhotep III ;
--- Amenhotep IV / Akhenaton ;
--- Ânkh-Khéperourê ou Smenkhkarê ;
--- Toutânkhaton / Toutânkhamon ;
--- Aÿ ;
--- Horemheb (– 1343 à – 1315 selon la chronologie de Redford).

La XIXè dynastie (de – 1315 à – 1200) est pour sa part formée des souverains suivants :
--- Ramsès Ier (anciennement vizir de Horemheb) (– 1315 à – 1314 selon Redford) ;
--- Séthi Ier ;
--- Ramsès II (– 1304 à – 1237) ;
--- Mérenptah / Mineptah (– 1237 à – 1226) ;
--- Amenmes ;
--- Séthi II ;
--- Siptah ;
--- Taousert (régente) (– 1209 à – 1201 selon la chronologie de Redford).

La difficulté est que différentes datations des règnes de chacun de ces souverains égyptiens coexistent entre les spécialistes ; à quoi s'ajoutent des divergences entre ces derniers quant à la durée du règne de certains de ces souverains.

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II) Les indices dont on dispose aujourd'hui :

1) Un premier indice, d'origine biblique : la mention, dans le texte biblique, du nom de Ramsès en tant que ville, et de la proximité de l'époque de son édification avec la naissance de Moïse :

On lit dans la Torah : "Il [= le peuple des fils d'Israël] bâtit pour le Pharaon des villes-entrepôts, Pitôm et Ramsès" (Exode 1/11).

On trouve aussi : "Pi-ramsès" ou "Pi-ramesses". "Pi" pouvant être "l'équivalent du hiéroglyphe Per signifiant "domaine" ou "maison"" (Moïse et Pharaon, Maurice Bucaille, p. 104), "Pi-ramsès" signifie : "domaine de Ramsès".

Historiquement parlant, ce fut Ramsès II qui fit bâtir la ville de Pi-ramsès (Sethi Ier y avait fait élever un palais). Or Ramsès II a régné de – 1304 à – 1237 (d'après la chronologie de Redford) (ou encore : de – 1301 à – 1235 d'après la chronologie de Drioton et Vandier / – 1290 à – 1224 d'après celle de Rowton).

On trouve aussi dans la Torah : "Les fils d'Israël partirent de Ramsès en direction de Soukkot" (Exode, 12/37).

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2) Un second indice, lui aussi d'origine biblique : la construction du Temple à Jérusalem a débuté quelques 480 ans / 440 ans après l'Exode :

Le règne de Salomon (sur lui soit la paix) est conventionnellement daté comme ayant débuté vers 972 avant J.-C. / 970 avant J.-C. et avoir duré jusqu'en - 930 (pour un total de 40 années d'après la Bible).
L'existence d'un roi nommé Salomon n'est pour le moment pas attestée par une source autre que la Bible et le Coran.
Néanmoins, la Bible mentionne que 5 ans après le décès de Salomon, le roi d'Egypte Sheshong Ier attaqua l'Etat de Juda (1er Livre des Rois 14/25-26). Or ce fait est attesté par l'inscription sur un bas-relief à Karnak, avec la liste de cités de Canaan ainsi conquises. Or encore, Sheshong Ier régna de - 943 à - 922. La victoire de Sheshong Ier sur Juda est datée conventionnellement de : - 925.

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– Or la version massorétique du Livre des Rois dit que la construction du Temple de Jérusalem eut lieu la 4ème année du règne de Salomon (1er Livre des Rois 6/1), et qu'elle débuta sous Salomon 480 ans après l'Exode (1er Livre des Rois 6/1).

– La construction du Temple aurait donc débuté quelques années après 970 avant J.-C..

– Pour obtenir la date de l'Exode, il faut donc en retrancher 480 : on obtient : – 970 – 480 = – 1450, ce qui serait la date approximative de l'Exode.

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Cependant, la version de la Septante dit pour sa part que la construction du Temple a débuté 440 ans après l'Exode (3ème Livre des Rois, 6/1).

– Ceci donne alors, comme date approximative de l'Exode : – 970 – 440 = – 1410.

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– 3) Un indice archéologique : la stèle de l'an V de Mineptah (– 1237 à – 1226) :

Il existe une stèle de l'époque pharaonique, la stèle de Mineptah, découverte en 1895 par Petrie, dans laquelle mention explicite est faite d'Israël. Cette stèle est un élément archéologique qui a suscité un engouement bien compréhensible, puisqu'elle comporte la mention du nom "Israël" en caractères hiéroglyphiques et constitue ainsi une trace non biblique du fait que les Egyptiens connaissaient bien Israël.

Comme nous l'avons vu plus haut, Mineptah est un pharaon du XIIIème siècle avant J.-C. ; c'est lui qui succéda à Ramsès II. Mineptah a régné de – 1237 à – 1226 (chronologie de Redford).

La stèle mentionne les victoires de Mineptah sur plusieurs peuples ; on y lit entre autres les lignes suivantes :

"Canaan est purgé de tout ce qui y avait de mauvais
Ascalon est conquise, on tient Géser
Yenoam est réduite à ne plus exister
Israël est anéanti, il n'a plus de céréales"

"Canaan", "Ascalon", sont des noms de lieux. Et "Israël", que désigne-t-il ici : un peuple ? une terre ?

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III) Hypothèse basse : l'Exode a eu lieu sous la XIXème dynastie ; et plus précisément encore : au XIIIème siècle avant J. C. :

Cette hypothèse se fonde principalement sur la lettre du 1er indice suscité, et interprète le 3ème indice de façon à le faire concorder avec lui (c'est par contre la lettre du 2ème indice qui pose le plus problème avec cette hypothèse).
En vertu du 1er indice, l'Exode ne peut pas avoir eu lieu avant le pharaon Ramsès II, puisqu'il est dit dans la Genèse que, avant l'Exode, le peuple d'Israël bâtissait Pi-ramsès.

Voici donc ce qui laisse à penser qu'à l'époque de l'édification de Pi-ramsès, les fils d'Israël seraient encore en Egypte.

L'édification de Pi-ramsès a eu lieu sur le site nommé aujourd'hui Qantir. Ce site Qantir se trouve près de l'ancienne Avaris, cité royale sous sous les XIVè, XVè, XVIè , XVIIè et XVIIIè dynasties : les vestiges de Avaris ont été retrouvés dans le lieu nommé aujourd'hui : "تلّ الضبع", Tell ad-Dab'a.

Pourquoi le pharaon de l'époque a-t-il choisi ce site pour édifier une cité fortifiée susceptible de servir aussi de capitale ?
Bucaille avance 3 raisons :
– Ramsès Ier n'était pas de sang royal mais était originaire de la région orientale du delta du Nil ;
– celui qui fut Sethi Ier avait été prêtre de la divinité Seth ; or un site était dédié à celle-ci dans la région ;
– la ville était une ville fortifiée ("polis okura", dit la Septante), et son édification sur ce site devait permettre de protéger les marches du pays du côté de l'Est (Moïse et Pharaon, pp. 110-111).

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Quant au second indice, cette hypothèse en dit que la chronologie relatée dans le Livre des Rois n'est pas entièrement fiable. Bucaille écrit : "D'où provient cette estimation de ces 480 années ? Les commentateurs de la Traduction Œcuménique nous renseignent ainsi : "Cette date est le résultat d'un calcul savant (et tardif) qui fait intervenir le nombre des prêtres en fonction depuis Aaron jusqu'à Sadoq en le multipliant par 40 (durée traditionnelle d'une génération)"" (Moïse et Pharaon, p. 230).

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Et que dire du 3ème indice : Qu'implique la présence du nom "Israël" sur cette stèle ?

Maurice Bucaille relève que, dans le cas des autres noms propres mentionnés sur la stèle, les noms sont tous "pourvus de deux caractères hiéroglyphiques qui ne se prononcent pas", qui sont appelés "déterminatifs", et qui, ici, "indiquent qu'il s'agit de terres étrangères". Or, après le nom "Israil", on "trouve le déterminatif "étranger" mais le déterminatif "terre" est absent" ; "à sa place figure le caractère représentant un homme et une femme assis, en dessous desquels on trouve les trois barres verticales qui indiquent le pluriel : ainsi est définie, sans le moindre doute, une collectivité d'hommes et de femmes" (Moïse et Pharaon, pp. 152-153). De plus, souligne Bucaille, le texte de la stèle "n'exprime pas : "Il n'a plus de céréales" mais : "Il n'a plus ses céréales"" ; or, "dans l'égyptien ancien, le possessif s'accorde en genre non pas avec l'objet possédé [comme c'est le cas en français] mais avec le possesseur [comme c'est le cas par exemple en arabe]" ; et, ici, "c'est un possessif masculin" ; or, "dans la langue des hiéroglyphes, une collectivité humaine est du genre masculin, alors qu'une terre, un pays, est du genre féminin" (Ibid. p. 154).

Bucaille en déduit que le terme "Israil" figurant sur la stèle de Mineptah n'y désigne pas une terre mais une collectivité humaine.

Bucaille poursuit en disant que le terme traduit par "céréales" possède en fait "plusieurs sens : "céréales", "semence", ou encore "semence de postérité", selon le déterminatif placé après le mot. Malheureusement, "aucun des déterminatifs spécifiques qui imposeraient un sens ou un autre n'accompagne le mot dans la stèle" (Moïse et Pharaon, p. 155).
Dès lors, fait-il remarquer, "ne serait-il pas logique de suggérer que la stèle a voulu dire ceci : "La collectivité d'Israël est anéantie ; elle n'a plus sa semence" ? Doit-on y voir un anéantissement par confiscation des grains pour l'ensemencement, c'est-à-dire une mesure concernant l'agriculture ? Doit-on considérer qu'il s'agit d'une mesure intéressant la postérité propre du peuple d'Israël, que l'on pourrait rapprocher de ce que la Bible relate : l'ordre donné par le Pharaon de tuer tous les nouveaux-nés mâles ? Je serais porté à le croire avec Mme Emily Stein, du département d'égyptologie de l'Université hébraïque de Jérusalem…" (Ibid. pp. 155-156).

D'après cette interprétation, les fils d'Israël seraient encore en Egypte sous Mineptah : l'Exode n'aurait pas encore eu lieu, et il ne se serait donc pas produit sous Ramsès II.

La stèle ferait allusion à la mise a exécution de l'ordre que Pharaon donna de massacrer les nouveaux-nés israélites mâles. Or, d'après le Coran, dans le récit lié à Moïse, cet ordre fut donné par le pharaon en 2 fois : une fois avant la naissance de Moïse (cf. Coran 27/4), et une autre fois après le retour de Moïse en Egypte (cf. Coran 7/127). Si on retient l'hypothèse selon laquelle Ramsès II fut le pharaon de la naissance de Moïse et Mineptah fut le pharaon de l'Exode, Mineptah donna le second – et pas le premier – ordre de tuer les nouveaux-nés.
– Il se peut alors que la stèle de Mineptah ait fait allusion à ce second ordre seulement.
– Mais il se peut aussi que la stèle de l'an V ait fait allusion au résultat des deux ordres à la fois : elle pourrait signifier que, déjà amoindris par le massacre des nouveaux-nés ordonné par Ramsès II, les fils d'Israël le devenaient encore plus à cause de l'ordre de même nature que Mineptah donna.

La stèle de Mineptah date de l'an 5 du règne de Mineptah, qui en compte – comme nous l'avons déjà dit – 10 ou 20. Après le nouvel ordre du massacre des nouveaux-nés par Pharaon, Moïse enjoint aux fils d'Israël la patience (Coran 7/127). A un moment donné, il demande à Dieu de détruire Pharaon, invocation que Dieu lui dit avoir exaucée [mais qu'Il fera réaliser en son temps] (cf. Coran 10/88-89). Il y aussi le temps des plaies d'Egypte ; et c'est à un moment où celles-ci auront déjà eu lieu que l'Exode se produira (Coran 7/130-136).
D'après le texte coranique, il y a donc un certain temps qui s'écoule entre le second ordre du massacre des nouveaux-nés et l'Exode.

Il est dès lors possible qu'au moment où la stèle a été gravée, Mineptah avait déjà émis l'ordre du second massacre des nouveaux-nés des fils d'Israël, mais n'imaginait évidemment pas qu'il perdrait la vie quelques années plus tard en poursuivant ces mêmes israélites.

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Le pharaon Mineptah en question :

La durée de son règne :

Bucaille écrit à propos de ce pharaon : "En raison de l'absence totale de documents sur la fin du règne de ce pharaon, il est impossible de savoir quelle fut sa durée et quelle fut la situation réelle du pays dans les derniers temps. Il aurait régné au minimum dix ans, peut-être vingt. Les égyptologues en discutent toujours : son règne aurait pu se prolonger jusqu'aux toutes dernières années du XIIIè siècle avant J.-C." (Moïse et Pharaon, pp. 147-148).

Il écrit également : "(…) on sait que Ramsès II régna 77 ans (soit de 1301 à 1235 selon la chronologie de Drioton et Vandier, ou de 1290 à 1224 selon celle de Rowton). Pour Mineptah, son successeur, les égyptologues ne peuvent fournir de durée précise, mais elle est au moins de 10 ans, puisque la dixième année de son règne est attestée par des documents, comme le souligne le R. P. de Vaux. Manethon lui donne 20 ans de règne. Drioton et Vandier donnent, pour Mineptah, deux possibilités : soit un règne de 10 ans de 1234 à 1224, soit, à la suite de Rowton, un règne de 20 ans, de 1224 à 1204" (La Bible, le Coran et la science, p. 235).

Comme nous l'avons déjà évoqué plus haut, selon la chronologie de Redford :
--- Ramsès II a régné de – 1304 à – 1237 ;
--- Mineptah de – 1237 à – 1226.

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La succession de Mineptah :

Bucaille écrit : "Une bonne vingtaine d'années de l'histoire de l'Egypte à partir des dernières du règne de Mineptah se sont passées dans un chaos certain. Une incontestable crise de succession surviendra à sa mort : un certain Amenmès prend le pouvoir dans des conditions de trouble évident, marqué probablement par des assassinats. C'est la fin de la XIXè dynastie, la transition avec la XXè est tout à fait obscure et ce jusqu'à l'avènement de Ramsès III qui redressera alors la situation fort compromise de l'Egypte. Mais, entre Mineptah et Ramsès III, le pays aura vécu au milieu de convulsions très graves" (Moïse et Pharaon, p. 148). Or, selon les textes biblique et coranique, le pharaon de l'Exode meurt alors qu'il est partir à la poursuite des émigrants (respectivement Exode 14/28 - Psaumes 136/15, et Coran 26/61-66).

Ces 2 points :
– a) la présence des fils d'Israël en Egypte sous Mineptah,
– b) et l'attestation historique d'un chaos ayant suivi la mort de Mineptah,
ont conduit Bucaille à émettre comme possibilité que ce soit Mineptah qui ait été le pharaon de l'Exode.
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Bucaille a trouvé dans l'examen médical de la momie de ce pharaon un indice supplémentaire (c) allant dans le même sens.

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L'examen médical de la momie de Mineptah :

La momie de Mineptah a pu être examinée par Bucaille. Il écrit : "les poumons – sur lesquels on m'a souvent interrogé (Y avait-il des signes de noyade ?) – avaient été enlevés par les embaumeurs et placés hors de la momie dans des vases canopes jamais retrouvés" (Moïse et Pharaon, p. 214).
Par contre, poursuit Bucaille : "Ce qui nous frappa au plus haut point, mes collaborateurs médecins légistes et moi-même, ce fut l'existence de trois pertes de substance décelées sur le corps qui semblèrent a priori être la conséquence de lésions survenues du vivant du sujet, hypothèse vérifiée par des radiographies prises avec des films extrêmement sensibles" (Ibid. p. 214). "L'origine traumatique était certaine pour la perte de substance de la région lombaire droite" (Ibid. p. 215). "C'est encore à un traumatisme très violent que devait être due une lacune de la voûte du crâne du côté droit dont les dimensions extrêmes étaient de 37 sur 23 millimètres ; les caractéristiques anatomiques de cette lacune, que j'ai détaillées dans des publications diverses, ont conduit les spécialistes de médecine légale à diagnostiquer une lésion survenue du vivant du sujet, un enfoncement crânien avec lésion du cerveau sous-jacent, cause de mort très rapide sinon instantanée. Les radiographies ne montrant aucun éclatement à distance autour de toutes ces lésions ne pouvaient suggérer que leur survenue du vivant du sujet, alors que les chocs subis par la momie auraient été à l'origine de ruptures des tissus momifiés voisins. Ces conclusions soumises en avril 1976 à la Société française de médecine légale ne soulevèrent aucune objection" (Ibid. p. 215).

D'après le Coran, le Pharaon qui trouva la mort en poursuivant les fils d'Israël mourut submergé par le flot : le texte coranique dit : "فَأَغْرَقْنَاهُمْ فِي الْيَمِّ", "Nous les noyâmes dans le flot" (Coran 7/136). Mais le texte coranique dit aussi : "فَأَخَذْنَاهُ وَجُنُودَهُ فَنَبَذْنَاهُمْ فِي الْيَمِّ" : "Nous les prîmes, lui et son armée, et les jetâmes dans le flot" (Coran 28/40 ; 51/40), ce qui peut signifier que Pharaon et son armée furent également l'objet de violents chocs dans les mouvements des flots.

Le texte biblique dit quant à lui : "Dieu jette chars et cavaliers dans la mer" (Exode 15/4). Bucaille écrit : "Les mots employés pour signifier ici "jeter avec force" – yarah en hébreu, riptô, verbe grec du texte de la Septante – sont tout à fait explicites de cette action" (Moïse et Pharaon, pp. 205-206).

Par contre, et conformément à ce qu'il avait déjà déduit de la stèle de Mineptah, Bucaille a trouvé dans l'examen de la momie de Ramsès II des indices selon lesquels il est peu probable que ce soit lui le pharaon de l'Exode : il était très âgé et malade quand il mourut ; or quand on sait que le pharaon de l'Exode mourut en poursuivant Moïse et les siens, on voit mal ce pharaon si malade poursuivre des hommes (Ibid. p. 132).

Ceci conduit à penser que Mineptah pourrait être le pharaon de l'Exode, celui qui mourut dans les flots en poursuivant Moïse et les siens.

Bucaille écrit que le premier égyptologue ayant émis cette hypothèse fut l'Allemand Lepsius (Ibid. p. 208), qui la soutint "dès 1849" (p. 157).
Se rangèrent à son avis : de Rougé en 1867 (p. 212), Chabas en 1873 (Ibid.), Virey en 1900 (Ibid.), P. Groff en 1902, et Petrie (Ibid., p. 157), qui l'adopta en 1911 (Ibid., p. 212).

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Si Mineptah est le Pharaon de l'Exode, quel peut être le Pharaon de la naissance de Moïse ?

Précisons que d'après le texte de la Bible, c'est à l'âge de 80 ans que Moïse se rend devant le pharaon pour lui demander de libérer les fils d'Israël (cf. Exode 7/7), et rappelons que, comme nous l'avons déjà vu, Sethi Ier régna 14 ans, Ramsès II un peu plus de 77 ans, et Mineptah, fils du précédent, 10 ans au minimum, peut-être 20 ans (cf. Moïse et Pharaon, p. 120).

– Selon un premier avis, le pharaon de la naissance est aussi Mineptah :

Dans ce cas, ce serait sous le règne de Mineptah que Moïse serait né et qu'il aurait vécu l'Exode. La donnée biblique selon laquelle Moïse était alors âgé de 80 ans serait alors à considérer comme étant purement emphatique… Cet avis ne soulèverait pas d'objection par rapport au fait que l'on sait que Moïse est né dans le temps ayant suivi l'édification de Pi-Ramsès (puisque celle-ci a été complétée sous Ramsès II, prédécesseur de Mineptah). La stèle de Mineptah ne causerait pas non plus de problème (puisqu'on pourrait alors penser qu'elle fait bien allusion à l'ordre, donné par le pharaon de la naissance, de massacrer des enfants israélites). Par contre le problème vient du fait que le règne de Mineptah est de l'ordre de 10 ou 20 ans (nous l'avons vu plus haut). Or il est établi que Moïse a passé au moins 8 ans à Madian (Coran 28/29). Il est alors impossible que, durant tout au plus une vingtaine d'années, un homme soit né, soit devenu adulte et, après l'être devenu (Coran 28/14), ait vécu un exil de 8 ans (Coran 28/28-29).

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Le second avis est que si c'est sous Mineptah qu'eut lieu l'Exode, c'est sous Ramsès II que naquit Moïse :

Cet avis revient à dire que Moïse aurait vécu à l'époque d'au moins deux pharaons : celui qui a vu Moïse être recueilli lorsque encore nourrisson fut différent de celui à qui Moïse adressa sa demande. Si on retient la donnée biblique des 80 ans de Moïse quand il s'adresse à Pharaon, alors, sachant qu'aucun pharaon du XIIIè siècle n'a régné pendant 8 décennies, cela implique que Moïse ait vécu à l'époque d'au moins deux pharaons. Bucaille rappelle aussi que la Bible dit encore que ceux qui cherchaient à faire mourir Moïse moururent eux-mêmes durant l'exil du prophète à Madian (Exode 2/23). Il y a alors deux possibilités...

----- Soit Moïse est né sous Sethi Ier, a connu le règne de Ramsès II et est retourné en Egypte sous Mineptah. C'est l'hypothèse à laquelle va la préférence de Bucaille dans son ouvrage Moïse et Pharaon (pp. 145-146). Bucaille appréhende telle quelle la donnée biblique de l'âge de Moïse quand il s'adresse à Pharaon. Cette hypothèse n'implique pas nécessairement que ce soit bien Sethi Ier qui ait recueilli Moïse du flot : il se peut qu'à cette époque il avait déjà associé son fils Ramsès au pouvoir et que ce soit celui-ci qui ait été désigné comme "le pharaon devant qui Moïse fut recueilli".

----- Soit Moïse est né sous Ramsès II, dont l'épouse fut celle qui le recueillit ; et c'est également sous son règne qu'il s'exila à Madian ; puis Moïse est retourné en Egypte, pour se retrouver face à Mineptah (Ramsès II étant mort entre-temps). C'est ce que Bucaille avait proposé dans son livre La Bible, le Coran et la science (p. 235).

Le 'âlim indien as-Syohârwî a, dans son ouvrage Qassas ul-qur'ân (qu'il termina de rédiger en 1941), cité et approuvé les conclusions d'un homme qu'il a présenté comme un égyptologue égyptien, Ahmad Yûssuf Effendi, qui a écrit :
"Il est dit dans la Torah que le Pharaon qui était l'ennemi des fils d'Israël et les a contraints à de durs travaux, les a employés à la construction de deux villes : Ramsès et Pitoum.
L'archéologie a révélé l'existence de ces deux villes : un écrit nous apprend que l'une s'appelait "Pertoum" ou "Pitoum" ; traduit, cela donne : "domaine de la divinité Toum" [ou "Atoum"] ; l'autre se nommait "Per-Ramsès", dont la traduction est : "domaine de Ramsès". (…) Là où se trouve Qantir – ou, d'après l'antique langue de l'Egypte : "Khant Nefer" –, là se trouvait Pi-ramsès. Ramsès II a fait construire cette ville afin qu'elle serve de fort dans cette région du littoral égyptien. Pitoum avait le même objectif.
Les gravures retrouvées sur les ruines des murailles témoignent que ces villes avaient pour vocation de servir de forts – et non comme le dit la Torah de servir d'entrepôts.
Tout ceci signifie que le pharaon qui a persécuté les fils d'Israël peut avoir été Ramsès II. Il s'agit d'un souverain de la XIXè dynastie. Moïse serait né à son époque et aurait été élevé chez lui. (…). Ramsès II était alors très âgé et avait, de son vivant même, associé à son pouvoir son fils Mineptah. Il s'agit, parmi ses quelques cent cinquante enfants, de son treizième fils.
Mineptah serait le pharaon à qui Moïse et Aaron ont adressé leur prédication et demandé de laisser partir les fils d'Israël ; ce serait à son époque que les fils d'Israël ont connu l'Exode, et ce serait lui qui est mort noyé dans le flot. Etant donné qu'il avait vu Moïse être élevé chez les siens, il lui a reproché, lorsque le prophète lui a adressé l'invitation à se soumettre à Dieu, ce que le Coran a ainsi relaté : "Ne t'avons-nous pas élevé chez nous enfant, et tu as passé des années de ta vie parmi nous" (Coran 26/18). Il est dit dans la Torah que le pharaon [de la naissance] mourut avant qu'ait eu lieu l'Exode : il s'agirait de Ramsès II, père de Mineptah"
(Qassas ul-qur'ân 1/362-363).

Précisons ici que si la conclusion de Ahmad Yûssuf Effendi est la même que celle de Bucaille, son interprétation de la stèle de Mineptah est, pour sa part, différente de celle du docteur.

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IV) Hypothèse haute : l'Exode a eu lieu sous la XVIIIème dynastie, au XVème siècle avant J. C. :

Cette hypothèse-ci s'appuie principalement sur le 2nd indice suscité (le passage du Livre des Rois), et interprète le 3ème selon l'interprétation qui va dans le même sens (c'est par contre la lettre du 1er indice qui pose problème avec cette hypothèse.

Selon ce 2nd indice, en effet, c'est au XVème siècle que l'Exode a eu lieu :
- soit en – 1450 si on retient la version du texte massorétique ;
- soit en – 1410 si on retient la version du texte de la Septante (voir plus haut).

-
Quant au 3ème indice (la stèle qui date de Mineptah, du XIIIè siècle avant J.- C.), elle est à comprendre tout simplement comme signifiant que :

au moment où, sous Mineptah, cette stèle est gravée, les fils d'Israël sont déjà à Canaan : l'Exode a donc déjà eu lieu.

En effet,
--- soit le nom "Israël" y désigne une terre, celle de Canaan.
--- soit le nom "Israël" y désigne un peuple, mais la mention, dans la stèle, à la fois de "Canaan" et de "Israël" lie ces deux ensemble : au moment où la stèle est gravée, le peuple d'Israël est déjà établi à Canaan, et c'est de lui que la stèle dit : "Canaan est purgé de tout ce qui y avait de mauvais (…) Israël est anéanti, il n'a plus de céréales".

La stèle indique que l'Egypte de Mineptah a procédé à une attaque contre les fils d'Israël établis en Canaan.
L'Exode aura donc déjà eu lieu à l'époque de Mineptah.

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C'est cependant la lettre du 1er indice qui pose ici problème : "Il [= le peuple des fils d'Israël] bâtit pour le Pharaon des villes-entrepôts, Pitôm et Pi-ramsès" (Exode 1/11) et ce eu égard au fait d'une part que ce fut Ramsès II qui fit bâtir Pi-Ramsès, et d'autre part qu'il a régné surtout au XIIIè siècle avant J. -C. : de – 1304 à – 1237 (d'après la chronologie de Redford).

Comment peut-on dire que les fils d'Israël auraient quitté l'Egypte depuis le XVè siècle avant J.-C., sachant qu'ici il est dit qu'ils ont participé à la construction de Pi-Ramsès, qui ne s'est faite qu'au XIIIè siècle avant J.-C. ?

Mais en fait Pi-ramsès n'était pas une ville-entrepôt.

Par contre, Avaris était une cité-entrepôt (ou plutôt, d'après Ahmad Yûssuf Effendi, une cité-forte, comme nous l'avons vu) ; et elle était la cité royale sous les XIVè, XVè (hyksos), XVIè (peut-être vassale des hyksos), XVIIè et XVIIIè dynasties.

En fait c'est non pas de la cité Pi-ramsès mais de la cité d'Avaris qu'il s'agissait, et...

... c'est soit à son agrandissement, soit à sa rénovation que les fils d'Israël furent contraints de participer, sous la XVIIIè dynastie.

Or, plus tard, lors de la XIXè dynastie, Ramsès II fit bâtir une cité, Pi-ramsès, tout près du lieu (un peu plus au nord) où, auparavant, la cité-entrepôt d'Avaris se trouvait. Et Pi-ramsès deviendra la capitale égyptienne sous les XIXè et XXè dynasties.

Le lieu où se situait Avaris s'appelle aujourd'hui : "تلّ الضبع", Tell ad-Dab'a. Et le lieu où se situait Pi-Ramsès s'appelle actuellement : Qantir, et se trouve tout près. On peut voir la représentation de ces deux sites sur la carte suivante :

L’attribut alt de cette image est vide, son nom de fichier est Avaris-Qantir.png.
(Cette carte a été réalisée par l'auteur de la recherche qui figure à cette adresse : https://steemit.com/exodus/@harlotscurse/succoth-station-no-2.)

La cité d'Avaris se trouvait dans la région de Goshèn (où les fils d'Israël s'installèrent sous le prophète Joseph), et la branche dite pélusiaque du Nil longeait cette cité.
On peut en voir la localisation sur une carte réalisée et présentée par David Rohl

C'est la proximité géographique entre "Avaris" et "Pi-ramsès" qui explique qu'un scribe a désigné la cité de "Avaris" par le nom : "Pi-ramsès".

Dès lors, 3 possibilités se présentent à nous :
--- Soit l'ensemble du passage sus-cité de la Torah a été écrit bien après les événements qu'il relate (l'esclavage des fils d'Israël en Egypte) : il a été écrit à un moment postérieur à la vie de Ramsès II.
--- Soit ce passage a été écrit bien avant l'époque de Ramsès, et il s'y trouvait mention de la cité "Avaris" ; cependant, un ou des scribe(s) postérieur(s) y a(ont) opéré une modification : il(s) a(ont) remplacé le nom qui y figurait "Avaris" par le nom : "Pi-ramsès" ; l'intention de ce(s) scribe(s) étant de faire connaître au lecteur le lieu voulu en employant ce que le lecteur connaissait car de son époque.
--- Soit (quelle que soit la date où il a été écrit : avant l'époque de Ramsès, ou après lui), le passage originel ne comportait pas le nom de ces deux villes (Pitôm et Pi-ramsès), et leur mention fut seulement (au moment où elle fut réalisée) une annotation (faite par un scribe) de bas de page, destinée à mieux faire comprendre au lecteur postérieur de quelles cités il s'agissait. Seulement, lorsque ce que Max Dimont appelle "la fusion des différents documents" eut lieu, la note finit par être insérée dans le texte originel.

-

Selon cette hypothèse haute, qui donc fut le pharaon de l'Exode ?

L'archéologue Steven Collins (USA) propose qu'il s'est agi de Thoutmôsis IV : la fin du règne de ce dernier a été suivie d'une période de déclin de l'Egypte sur le plan régional (fin de citation).


Selon la chronologie de Redford
:

--- Ahmosis I régna de – 1569 à – 1545 ;
--- Amenhotep I régna de – 1545 à – 1525 ; il n'avait pas d'héritier mâle, aussi son successeur dut se marier avec sa fille (Ahmès) ;
--- Thoutmôsis I régna de – 1525 à – 1516 (selon l'un des avis quant à la durée de son règne : 9 années) ; fut un homme militaire ; père de Hatcheptout par la grande épouse royale ; père de son successeur par une épouse secondaire ;
--- Thoutmôsis II (mari de sa demi-soeur Hatcheptout) : régna de – 1516 à – 1504 (d'après un avis concernant la durée de son règne ; soit 12 années) ; père de son successeur par une épouse secondaire ;
--- Thoutmôsis III connut un règne en 2 parties :
------ d'abord ce fut la régence de Hatcheptout (dont il est le beau-fils) (vu qu'il n'a pas 5 ans quand il devient souverain) ; c'est elle qui, de facto, sera la dirigeante de – 1504 à – 1490 (soit 22 années) ;
------ ensuite, Hatcheptout étant décédée (dans des circonstances inconnues), Thoutmôsis III régna seul de – 1490 à – 1452 (soit 38 années) ;
--- Amenhotep II : de – 1452 à – 1419 (soit 33 années) ;
--- Thoutmôsis IV : de – 1419 à – 1410 (soit 9 années).

Cette date approximative du décès de Thoutmôsis IV, d'après la chronologie de Redford, rejoint la date approximative de l'Exode d'après le calcul fait à partir de la version de la Septante : la construction du Temple ayant débuté 440 ans après l'Exode (3ème Livre des Rois, 6/1), et ce début de construction ayant eu lieu vers – 970, nous avons de nouveau : – 1410 environ (comme nous l'avions vu plus haut).

-
D'après le texte de la Torah
:

--- Moïse avait 80 ans quand il parla à Pharaon, après être retourné en Egypte (Exode, 7/7) ;
--- Et il a vécu en tout 120 ans (Deutéronome, 34/7).

D'après le texte du Coran
 :

--- Moïse est resté seulement 8 ou 10 ans au service de son beau-père madianite (Coran 28/29). Cela signifierait-il que :
----- il a émigré à Madian âgé de 70 ans (pour en revenir âgé de 80 ans) ( "فكان من مولد موسى إلى أن أخرج ببني إسرائيل من مصر ثمانون سنة. ثم سار إلى التيه بعد أن مضى وعبر البحر ، وكان مقامهم هنالك إلى أن خرجوا مع يوشع بن نون أربعين سنة، فكان ما بين مولد موسى إلى وفاته مائة وعشرين سنة" : Al-Kâmil fi-t-ta'rîkh, Ibn ul-Athîr) ?
----- ou qu'il y a émigré âgé de 40 ans (pour en revenir âgé de 50 ans), pour mourir à l'âge non pas de 120 ans mais de 90 ans ?
----- ou encore qu'il y a émigré âgé de 30 ans (pour en revenir âgé de 40 ans) et, plus tard, mourir à l'âge de 80 ans ("والاستواء: أربعون سنة. وقال بعضهم: يكون ذلك في ثلاثين سنة" : Tafsîr ut-Tabarî) ?

La Torah dit que le Pharaon de la naissance de Moïse mourut quand ce dernier était en exil à Madian (Exode 2/23) ; plus loin, on lit même : "Va, retourne en Égypte, car tous ceux qui en voulaient à ta vie sont morts" (Exode 4/19). Comme l'a relaté as-Seoharwî d'un égyptologue musulman (déjà cité plus haut), le Coran n'évoque rien de tel, mais cela ne contredit pas non plus ce que le Coran dit. Ibn ul-Athîr aussi a cité cette éventualité : "فلما نودي موسى، أُعلِم أن قابوسٌ فرعونُ مصر مات؛ وقام أخوه الوليد بن مصعب مكانه - وكان عمره طويلا، وكان أعتى من قابوس وأفجر -؛ وأُمِر أن يأتيه هو وهارون بالرسالة" (Al-Kâmil fi-t-ta'rîkh). Dans le verset coranique qui relate que, lorsque Moïse demande à Pharaon de libérer les fils d'Israël, celui-ci lui dit : "Ne t'avions-nous pas éduqué parmi nous en tant qu'enfant ? Et tu as fait ton acte que tu as fait en étant du nombre des ingrats !" : "قَالَ أَلَمْ نُرَبِّكَ فِينَا وَلِيدًا وَلَبِثْتَ فِينَا مِنْ عُمُرِكَ سِنِينَ وَفَعَلْتَ فَعْلَتَكَ الَّتِي فَعَلْتَ وَأَنتَ مِنَ الْكَافِرِينَ" (Coran 26/18-19), le "parmi nous" désignerait alors : "chez les nôtres", vu que le Pharaon d'alors évoquait là son parent.

Si l'Exode s'est réellement produit en – 1410, et si Moïse avait alors vraiment 80 ans, alors :
--- Moïse serait né en – 1490 ; c'est alors à peu près le début du règne véritable de Thoutmôsis III.

-

Les datations des règnes des souverains égyptiens ne sont pas toujours certaines, écrivent des spécialistes ; or, parmi les dates les plus précoces du règne de Amenhotep II, on trouve : - 1454 à - 1419 (selon Redford) / - 1453 à - 1419 (selon Wente) / - 1439 à - 1413 (selon Parker) / - 1438 à - 1412 (selon Hornung) / - 1436 à - 1413 (selon Gardiner) (source : wikipedia.fr).
Toujours à retenir cette date de – 1410 pour l'Exode,
il se peut également que ce soit Amenhotep II qui ait été le Pharaon de l'Exode (source : persée.fr) : c'est aussi l'avis de Bruce Gore (lequel pense que Moïse est né sous le règne de Thoutmôsis I, et que c'est la fille de ce dernier - Hatcheptout - qui recueillit le bébé dans le flot). 

-

Et si cette fois on retient la date de – 1450 pour l'Exode, il est possible que le Pharaon qui mourut dans les flots fut Thoutmosis III (il est décédé justement en – 1452 / – 1450 d'après les datations de respectivement Redford / Wente et van Siclen) ; c'est l'avis exposé sur le site bible.ca. Ce pharaon fut un grand guerrier et un grand conquérant (plus d'une quinzaine de campagnes militaires).
Dans ce cas :
--- si Moïse avait vraiment 80 ans lors de l'Exode, alors : il serait né vers
: – 1530 ; c'est alors le règne de Amenhotep Ier (– 1545 à – 1525 - Redford - / – 1551 à – 1524 - Wente -), ou de son successeur Thoutmôsis I ;
--- par contre, si Moïse avait seulement 40 ans lors de l'Exode (voir plus haut), alors il serait né vers : – 1490 ; c'est alors le début du règne véritable de Thoutmôsis III.

Et, toujours à retenir cette date de – 1450 pour l'Exode, il se peut aussi que ce soit Amenhotep II, ou même Thoutmôsis IV, qui ait été le Pharaon de l'Exode (comme nous l'avons dit, les datations des règnes des souverains égyptiens ne sont pas toujours certaines).

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Il est à noter que le Coran dit que, tandis que Moïse, alors bébé venant d'être recueilli du flot (peut-être par la fille de Pharaon, selon l'un des commentaires existant : Tafsîr ut-Tabarî, Zâd ul-massîr), ce fut la femme de Pharaon qui intercéda auprès de Pharaon pour qu'il ne soit pas tué : "فَالْتَقَطَهُ آلُ فِرْعَوْنَ لِيَكُونَ لَهُمْ عَدُوًّا وَحَزَنًا إِنَّ فِرْعَوْنَ وَهَامَانَ وَجُنُودَهُمَا كَانُوا خَاطِئِينَ وَقَالَتِ امْرَأَتُ فِرْعَوْنَ قُرَّتُ عَيْنٍ لِّي وَلَكَ لَا تَقْتُلُوهُ عَسَى أَن يَنفَعَنَا أَوْ نَتَّخِذَهُ وَلَدًا وَهُمْ لَا يَشْعُرُونَ" (Coran 28/8-9). Et le Coran cite comme exemple de femme croyante : la femme de Pharaon : "وَضَرَبَ اللَّهُ مَثَلًا لِّلَّذِينَ آمَنُوا اِمْرَأَةَ فِرْعَوْنَ إِذْ قَالَتْ رَبِّ ابْنِ لِي عِندَكَ بَيْتًا فِي الْجَنَّةِ وَنَجِّنِي مِن فِرْعَوْنَ وَعَمَلِهِ وَنَجِّنِي مِنَ الْقَوْمِ الظَّالِمِينَ وَمَرْيَمَ ابْنَتَ عِمْرَانَ الَّتِي أَحْصَنَتْ فَرْجَهَا فَنَفَخْنَا فِيهِ مِن رُّوحِنَا وَصَدَّقَتْ بِكَلِمَاتِ رَبِّهَا وَكُتُبِهِ وَكَانَتْ مِنَ الْقَانِتِينَ" (Coran 66/11-12).
Or la Sunna dit qu'elle s'appelait : "Âssiah" : "عن أبي موسى رضي الله عنه، قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "كمل من الرجال كثير، ولم يكمل من النساء: إلا آسية امرأة فرعون، ومريم بنت عمران، وإن فضل عائشة على النساء كفضل الثريد على سائر الطعام" (al-Bukhârî, 3230).

Or encore, il est relaté que Thoutmôsis III avait, parmi ses épouses, une femme (n'étant - selon certains - pas la Grande Epouse Royale) qui s'appelait : "Satiâh" / "Aah-Sat".

Cela ressemble beaucoup au nom donné dans la Sunna : "Âssiah".
Est-ce réellement le même nom ? Y aurait-il là un indice supplémentaire ?
Si "
Oui", alors : Thoutmôsis III, l'époux de Âssiah, a-t-il été :
--- le pharaon qui mourut dans les flots suite à l'Exode (le pharaon de la naissance lui ayant été antérieur) ?
--- ou bien le pharaon sous le règne duquel Moïse fut recueilli (et ce car le Coran dit que la femme de pharaon intercéda en sa faveur) (tandis que le pharaon qui mourut dans les flots lui fut postérieur : peut-être Thoutmôsis IV) ?
--- ou bien encore le pharaon de la naissance comme celui qui mourut dans les flots ?

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Il est également à noter que Thoutmôsis III a eu un fils qui mourut avant lui : Amenemhat ; il l'avait eu soit de Satiâh, soit de Néférourê fille de Hatcheptout (les spécialistes sont indécis sur ce point).
Ce fils était-il le premier-né de Pharaon, étant mort comme moururent tous les premiers-nés des Egyptiens, juste avant que Moïse et les fils d'Israël soient autorisés à quitter l'Egypte, comme la Torah le dit ?
Ce fut en tous cas son autre fils qui succéda à Thoutmôsis III : Amenhotep II.

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V) Récapitulatif :

– D'après une hypothèse basse :
----- ce serait sous Ramsès II que Moïse naquit, et sous son règne qu'il émigra à Madian ;
----- et ce serait sous le règne de son fils Mineptah qu'il retourna en Egypte. Ce serait ce pharaon Mineptah auquel Moïse demanda de laisser partir les fils d'Israël. Ce serait sous son règne qu'eut lieu l'Exode. Ce serait lui, enfin, qui mourut dans les flots en poursuivant Moïse et son peuple.

D'après une hypothèse plus haute :
----- ce serait sous le règne de Thoutmôsis III (avis avancé sur bible.ca), de Amenhotep II (avis de Bruce Gore, et avis avancé sur persée.fr) ou de Thoutmôsis IV (avis de Steven Collins), que Moïse retourna en Egypte. Ce serait l'un de ces 3 pharaons auquel Moïse demanda de laisser partir les fils d'Israël. Ce serait sous son règne qu'eut lieu l'Exode. Ce serait, enfin, l'un de ces 3 pharaons qui mourut dans les flots en poursuivant Moïse et son peuple ;
----- quant au pharaon sous le règne duquel Moïse naquit, et sous le règne duquel il émigra à Madian, ce serait un pharaon étant antérieur à celui retenu pour l'Exode : soit Amenhotep Ier, soit Thoutmôsis I, soit Thoutmôsis III.

Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

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