Connaissez-vous Dieu ?

"Connaître Dieu", est-ce possible ?

Oui, cela est possible.

Mais il faut au préalable déterminer le sens que l'on donne à cette formule...

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1) "Connaître Dieu" dans le sens de "connaître la réalité (kun'h) de Dieu" :

Cela est inaccessible à l'être humain. Dieu a dit Lui-même : "Et ils ne Le cernent pas en savoir" (Coran 20/110).

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2) "Connaître Dieu" en connaissant à Son sujet certains éléments : par exemple qu'Il est Unique dans le caractère divin ; et qu'Il a tel et tel autres Attributs (par exemple qu'Il est Généreux ; qu'Il est Puissant ; qu'Il entre parfois en Courroux ; qu'Il a deux Mains ; qu'Il a créé l'homme pour un objectif précis ; qu'Il envoie des messagers auprès des hommes pour dire à ceux-ci ce qu'Il veut d'eux ; etc.) :

Ceci est accessible à l'être humain.

Cependant, il y a alors deux possibilités :

–--- 2.1) Soit l'homme établit ces éléments sur la base de sa raison pure, ou sur la base de traditions qui ne viennent pas de Dieu, ou encore sur la base d'expériences spirituelles :

Ceci est une démarche erronée.

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–-- 2.2) Soit l'homme appréhende ces éléments tels que Dieu les a communiqués Lui-Même à son intention par le biais de Ses Messagers, éléments qui lui sont parvenus de ces Messagers de façon authentique ; l'homme cherche donc à connaître Dieu tel que Celui-ci S'est fait connaître à lui :

Ceci est la démarche correcte.

Ensuite

––--- 2.2.1) Il est des hommes qui prennent seulement connaissance de ces éléments, en tant qu'éléments présents dans les textes de l'islam, mais sans reconnaître (i'tirâf) qu'ils sont vrais, ou en le reconnaissant mais sans adhérer (iltizâm) à ces éléments :

Ils ont alors certes acquis une certaine "connaissance de Dieu", mais il ne s'agit pas de "connaître Dieu" au sens où la Sunna emploie cette formule (la preuve sera présentée dans le point qui suit).

––--- 2.2.2) Et il est des hommes qui prennent connaissance de ces éléments, reconnaissent qu'ils sont vrais, et y adhèrent (iltizâm) :

Il s'agit de ceux qui adhèrent à la voie que Dieu agrée. Par le fait de connaître, de reconnaître, et d'adhérer à l'idée que Dieu est Unique dans Sa Providence (rubûbiyya) et Son caractère divin (ulûhiyya), ils "connaissent Dieu" au minimum (asl).

Al-Bukhârî et Muslim ont ainsi rapporté, sur la relation de Ibn Abbâs, que le prophète Muhammad (sur lui soit la paix) avait dit ainsi à son compagnon Mu'âdh lorsqu'il l'envoyait au Yémen : "Tu te rends auprès de gens parmi les Gens du Livre. Que la première chose à laquelle tu les invites soit qu'ils proclament l'unicité de Dieu [= que Dieu est seule divinité]. Lorsqu'ils connaîtront cela, informe-les que Dieu leur a prescrit, pendant leurs journées et leurs nuit, cinq prières. Lorsqu'ils auront accompli les prières, informe-les que Dieu a rendu obligatoire sur eux l'aumône par rapport à leurs biens, laquelle sera prise de leurs riches et retournée à leurs pauvres..." (al-Bukhârî, 6937).
Selon une autre version, ce furent les termes suivants que le Prophète prononça : "Tu te rends auprès de gens parmi les Gens du Livre. Que la première chose à laquelle tu les invites soit qu'ils adorent Dieu. Lorsqu'ils connaîtront Dieu, informe-les que..." (al-Bukhârî, 1389).
Selon une autre version encore : "Tu vas te rendre auprès de gens parmi les Gens du Livre. Lorsque tu arriveras auprès d'eux, invite-les à ce qu'ils témoignent qu'il n'y a de divinité que Dieu et que Muhammad est le Messager de Dieu. S'ils te suivent en cela, informe-les que..." (al-Bukhârî 4090).
"Adorer Dieu"
, mentionné dans la seconde version, cela consiste au minimum à adhérer à la croyance de l'Attribut d'Unicité de Dieu dans le caractère divin (wahdâniyyat ullâh), donc au monothéisme (tawhîd ul-ulûhiyya) [et bien sûr à adhérer aussi à la voie agréée par Dieu, qui est celle communiquée par Dieu par le biais du plus récent Messager] (cliquez ici pour en savoir plus). On voit donc qu'adhérer au monothéisme (tawhîd), cela a été décrit comme le fait de "connaître Dieu". (Il faut cependant noter que si les mots que le Prophète a alors prononcés sont relatés différemment dans les différentes versions de ce hadîth, il ne s'agit en fait que d'une seule et même parole, prononcée à un même moment ; il est donc possible, écrit Ibn Hajar, que ces termes légèrement différents aient pour origine les différences de relations des transmetteurs, riwâya bi-l-ma'nâ : voir Fat'h ul-bârî 13/433-434.)

"Connaître Dieu" en adhérant à l'idée qu'Il existe et qu'Il est Seul à être divin, tout en reconnaissant aussi le caractère de messager de tous ses prophètes, cela constitue le premier pas, la base minimale (asl), dans le fait de "connaître Dieu".

Il s'agit ensuite de compléter (tendre vers la kamâl) cette connaissance de Dieu…

–––--- 2.2.2.1) Il s'agit (après avoir acquis cette connaissance de Dieu minimale) de continuer à découvrir ce que Dieu a dit au sujet de Ses propres Noms (Asmâ'), Attributs (Sifât), Faits (Af'âl), ainsi que ce que Dieu a dit (Kalimât) de façon générale, et ce qu'Il aime et ce qu'Il n'aime pas comme croyances, pensées et actions de la part des hommes (car connaître un être passe aussi par le fait de connaître ce qu'il a dit, ainsi que ce qu'il aime et ce qu'il n'aime pas) ; tout cela tel qu'Il l'a présenté dans Sa Parole et tel que le dernier de Ses Messagers l'a présenté dans ses propos, ses gestes et ses approbations.

––--- 2.2.2.2) Mais il s'agit aussi de s'efforcer de mettre son intérieur et son extérieur en adéquation avec cette connaissance détaillée que sa raison a ainsi acquise par rapport à Dieu, au travers des dires présents dans le Coran et la Sunna.

Ibn ul-Qayyim écrit ainsi : "Connaître Dieu est de deux types.
Il y a la connaissance [de Lui] par reconnaissance (iqrâr) ; c'est celle que partagent tous [ceux qui ont apporté foi] : le pieux et celui qui ne l'est pas, l'obéissant et le désobéissant [en actes]
[il s'agit de 2.2.2, et peut-être même de 2.2.2.1 aussi].
Et [puis] il y a la connaissance [de Lui] qui entraîne la pudeur par rapport à Lui, l'amour de Lui, la relation du cœur avec Lui, l'envie de Le rencontrer, la crainte par rapport à Lui, la sérénité ("uns") par Lui, le fait de se détourner des créatures [pour se tourner] vers Lui ; cela c'est la connaissance [de Lui] qui est particulière, qui a cours dans le langage du qawm [= les soufis orthodoxes]. (…) Celui de toute la création qui Le connaît le plus [= le prophète Muhammad, sur lui soit la paix] a dit : "Je ne peux cerner une éloge à Ton sujet ; Tu es selon les Eloges que Tu as faites de Toi-même" [Muslim 879, et d'autres] ; et il a informé que le Très Pur lui inspirera, le jour de la résurrection, parmi Ses louanges, ce qu'il ne connaît pas maintenant [al-Bukhârî 7072]" (Al-Fawâ'ïd, fasl 96).

Ibn ul-Qayyim écrit encore : "Cette connaissance a deux portes.
La première porte est la réflexion au sujet de tous les versets (âyât) du Coran, et la compréhension particulière que l'on tient de Dieu et de Son Messager (que Dieu prie sur lui et le protège).
La seconde porte est la réflexion au sujet des signes visibles (âyât) de Dieu, et au sujet de Sa Sagesse à leur sujet, de Sa Puissance, de Sa Bonté, de Sa Bienfaisance, de Sa Justice et du fait qu'Il S'occupe de Sa création avec équité"
(Al-Fawâ'ïd, fasl 96).

Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

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