Question d'un coreligionaire : "Obéir à une loi qui déclare licite ce que Dieu a clairement déclaré illicite, n'est-ce pas un acte de shirk akbar, contredisant donc aslu tawhîd il-ulûhiyya ?

Question :

Des hommes, s'étant accordés le pouvoir absolu de légiférer, votent une loi qui déclare "interdite" une action qu'Allah a clairement déclarée "obligatoire" (c'est une action à propos du statut de laquelle il n'y a pas divergence d'interprétations entre les mujtahidûn : tous sont unanimes à dire qu'elle est obligatoire). Le musulman qui vit dans ce pays se met à renoncer à pratiquer cette action, pour se conformer à cette loi. N'a-t-il pas renié ce qu'Allah a dit, faisant la même chose qui est reprochée à des chrétiens dans le Coran (sourate at-Tawba, verset 31) ?

Même question pour une loi qui a été votée par des hommes, et qui déclare illicite une action qu'Allah n'a certes pas rendue obligatoire mais qu'Il a clairement décrétée licite. Le musulman qui vit dans ce pays s'abstient de faire cette action, uniquement parce que la loi du pays l'interdit. N'a-t-il pas renié ce qu'Allah a décrété, ayant mis autre qu'Allah au même niveau, ou même à une niveau supérieur, que celui d'Allah ?

La même question se pose à propos d'une loi qui a été votée par des hommes, et qui déclare licite une action qu'Allah a clairement déclaré illicite : le musulman qui vit dans ce pays se met à faire cette action, suivant en cela cette loi. N'a-t-il pas renié ce qu'Allah a décrété ?

Moi je pense que dans ces trois cas, ce musulman a obéi à un autre qu'Allah, ce qui est du kufr akbar.

Je pense que c'est comme le fait de se prosterner devant autre qu'Allah : c'est une action de kufr akbar, il n'y a pas à voir s'il a fait avec telle ou telle croyance.

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Réponse :

Les choses sont beaucoup plus nuancées que cela, frère en islam.

Tout d'abord, dans le domaine du 'afw, il est entièrement légitime (cela est même nécessaire) à l'autorité publique de légiférer, par maslaha.

A propos maintenant de tous les points au sujet desquels la Shar' de Dieu a tracé une loi et que l'Etat a promulgué une loi qui contredit cette loi :

---- Le musulman qui déclare licite ce que Dieu a clairement déclaré illicite, ou déclare illicite de façon absolue ce que Dieu a clairement déclaré licite (ou obligatoire), ou exprime que la règle applicable en telle circonstance est telle chose, différente de ce que Dieu a tracé de façon très claire, celui-là a dit là un propos de kufr akbar sans que cela dépende de la croyance qu'il dit avoir (s'il n'a pas dit cela suite à une contrainte reconnue comme telle). Ibn Taymiyya écrit : "والإنسان متى حلل الحرام المجمع عليه، أو حرم الحلال المجمع عليه، أو بدل الشرع المجمع عليه، كان كافرا مرتدا باتفاق الفقهاء" (MF 3/267 : le seul ijmâ' ne suffit en fait pas : il faut que cela fasse l'objet de ijmâ' et de tawâtur). (Il y a, rappelons-le, une différence entre "dire qu'Untel a dit un propos de kufr akbar", et "déclarer cet Untel kâfir bi-l-'ayn" : le premier n'implique pas automatiquement le second.)

---- Par contre, le musulman qui se conforme à une loi, décidée et promulguée par d'autres que lui, de l'un des types que vous avez décrits :
------ si c'est en croyance qu'il abandonne la loi d'Allah, se mettant, toujours en croyances, à adopter la teneur de la loi de l'un de ces trois types que des hommes ont ainsi votée : se mettant donc à considérer "mauvaise" l'action que Dieu a déclarée "obligatoire", ou "simplement licite" ; ou à considérer "bonne" l'action que Dieu a déclarée, Lui, "illicite" ; ou à considérer comme "devant se faire ainsi en telle circonstance" ce que Dieu a prévu que cela se déroule autrement pour cette circonstance-là ; lui fait du kufr akbar ;
------ par contre, si c'est seulement en actes que ce musulman se conforme à la teneur de cette loi votée par des hommes, cela ne suffit pas pour constituer un cas de kufr akbar. Ensuite :
-------- s'il n'y a pas de contrainte pour qu'il s'y conforme, ce musulman a, en se conformant à une loi de l'un des 3 types suscités, fait une kabîra ;
-------- et s'il y a contrainte (reconnue comme telle), alors, se conformer en actes seulement à cette loi, tout en continuant à désapprouver cet acte en son coeur, cela est un acte autorisé (sauf s'il s'agit de tuer un innocent : aucune contrainte n'autorise à faire ce geste, même en désapprouvant ce qu'on fait en son coeur). Le fait est que la Loi d'Allah elle-même prévoit l'exception des cas de contrainte reconnue comme telle (ik'râh) : nous en avons parlé, versets et hadîths à l'appui, dans un premier et dans un second articles.

--- Les deux cas que nous venons de voir évoquent une loi de Dieu qui est établie à un niveau tel que, en sus que son contenu fait l'objet d'un tel consensus, elle est très connue et répandue (ma'lûm min ad-dîn bi-dh-dharûra) : c'est ne plus adopter, en croyance, une loi divine de ce genre qui constitue du kufr akbar (cela a été évoqué dans un premier puis un second articles).

--- Différent est le cas d'une loi de Dieu dont le contenu fait l'objet d'un consensus (ijmâ') de la part des mujtahidûn, mais pas de tawâtur : ne pas adopter une telle loi en croyance est également interdit, mais ne constitue pas du kufr akbar.

--- Différent encore est le cas d'une loi de Dieu dont le contenu fait l'objet d'une divergence de niveau ijtihâdî : adopter l'un de ces avis autre que l'avis correct déterminé au niveau qat'î, cela est également interdit mais ne constitue pas du kufr akbar.

--- Et très différent est le cas d'une loi de Dieu dont le contenu fait l'objet d'une divergence de niveau ijtihâdî et qui a entraîné des avis entre lesquels déterminer l'avis correct n'est possible qu'à un niveau zannî : adopter l'un de ces avis parce qu'il correspond à la loi de l'Etat est à un niveau tolérable du point de vue de l'islam.

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Reconnaître l'Etat sous l'autorité duquel on vit, ainsi que sa légalité, cela est normal, et cela est même requis :

L'Etat est établi, nous en reconnaissons le caractère établi et la validité. J'entends par "Etat" : la res publica, "l'institution dotée de la personnalité morale de droit public qui exerce son autorité souveraine sur ce territoire et ses habitants" ; l'Etat est l'institutionnalisation du pouvoir ; c'est une organisation mais aussi une abstraction : on dit ainsi que "le gouvernement (des personnes physiques) changent, mais l'Etat demeure".

Le Prophète (sur lui soit la paix) a reconnu l'autorité publique des Quraysh Polythéistes sur la cité de La Mecque, puisqu'il a conclu avec eux un pacte à al-Hudaybiya, en l'an 6 de l'hégire. L'une des clauses de ce pacte était que (le prophète) Muhammad (sur lui soit la paix) devrait s'en retourner pour le moment, et aurait la possibilité de revenir un an plus tard pour accomplir le petit pèlerinage. Lorsqu'il revint effectivement à la date fixée, il respecta les clauses du traité, ainsi que la durée fixée pour son séjour dans la Ville par ces Polythéistes : 3 jours (les textes sont bien connus).
Le pacte revenait donc à reconnaître l'établissement et la légalité de leur autorité sur La Mecque.

Cela, alors même que le Coran avait déjà parlé de leur autorité en ces termes quant à la légitimité : "الْمَسْجِدِ الْحَرَامِ وَمَا كَانُواْ أَوْلِيَاءهُ إِنْ أَوْلِيَآؤُهُ إِلاَّ الْمُتَّقُونَ وَلَكِنَّ أَكْثَرَهُمْ لاَ يَعْلَمُونَ" : Coran 8/34).

Pour nous, il s'agit donc d'obéir aux lois des Etats sous lesquels nous vivons, et même, par considération de contrainte (ik'râh), de nous conformer aux lois de ces Etats qui nous obligent à faire ce que nous considérons interdit (mis à part le fait de tuer quelqu'un) ou de délaisser ce que nous considérons obligatoire. Oui, s'il n'est plus possible de vivre un minimum de règles de l'islam, nous devons émigrer pour aller là où nous pourrons les vivre.

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Le verset auquel vous faites allusion est le suivant :

"اتَّخَذُواْ أَحْبَارَهُمْ وَرُهْبَانَهُمْ أَرْبَابًا مِّن دُونِ اللّهِ وَالْمَسِيحَ ابْنَ مَرْيَمَ وَمَا أُمِرُواْ إِلاَّ لِيَعْبُدُواْ إِلَهًا وَاحِدًا لاَّ إِلَهَ إِلاَّ هُوَ سُبْحَانَهُ عَمَّا يُشْرِكُونَ" : "ils ont pris leurs érudits et leurs moines, ainsi que le Messie fils de Marie, comme des rabb en dehors de Dieu" (Coran 9/31). 'Adî ibn Hâtim, alors encore chrétien, fut intrigué par le contenu de ce verset : il n'avait pas le sentiment d'avoir divinisé certains des docteurs et des saints reconnus dans le christianisme. Il fit donc objection par rapport à ce verset au prophète Muhammad (sur lui la paix) : "حدثنا أبو كريب وابن وكيع قالا حدثنا مالك بن إسماعيل؛ وحدثنا أحمد بن إسحاق قال حدثنا أبو أحمد جميعا، عن عبد السلام بن حرب قال، حدثنا غطيف بن أعين، عن مصعب بن سعد، عن عدي بن حاتم قال: أتيت رسول الله صلى الله عليه وسلم وفي عنقي صليب من ذهب، فقال: "يا عدي، اطرح هذا الوثن من عنقك!" قال: فطرحته. وانتهيت إليه وهو يقرأ في "سورة براءة"، فقرأ هذه الآية: (اتخذوا أحبارهم ورهبانهم أربابا من دون الله). قال قلت: "يا رسول الله، إنا لسنا نعبدهم!" فقال: "أليس يحرمون ما أحل الله فتحرمونه، ويحلون ما حرم الله فتحلونه؟" قال: قلت: "بلى!" قال: "فتلك عبادتهم"!". L'objection qu'il fit fut la suivante : "Nous ne les divinisons pas !". Le Prophète lui répondit ceci : "N'y a-t-il pas que (lorsque) ils déclarent illicite ce que Dieu a déclaré licite, vous ne le considérez pas illicite, et (lorsque) ils déclarent licite ce que Dieu a déclaré illicite, vous le considérez licite ? Si ! – C'est là les diviniser" (rapporté par at-Tabarî dans son Tafsîr, n° 16332).
C'était là la façon qu'avaient ces chrétiens de faire la 'ibâda (= la ta'lîh) de docteurs de l'Eglise et de saints, d'où un shirk akbar fi-l-'ibâda, encore appelé shirk akbar fi-l-ulûhiyya : considérer qu'ils ont la faculté de légiférer de façon totalement absolue par rapport à Dieu.

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Maintenant, voici la preuve de la nuance que je vous ai exposée plus haut :

Ibn Taymiyya écrit :
"وهؤلاء الذين اتخذوا أحبارهم ورهبانهم أربابا حيث أطاعوهم في تحليل ما حرم الله وتحريم ما أحل الله: يكونون على وجهين:
أحدهما: أن يعلموا أنهم بدلوا دين الله فيتبعونهم على التبديل فيعتقدون تحليل ما حرم الله وتحريم ما أحل الله اتباعا لرؤسائهم، مع علمهم أنهم خالفوا دين الرسل؛ فهذا كفر؛ وقد جعله الله ورسوله شركا، وإن لم يكونوا يصلون لهم ويسجدون لهم؛ فكان من اتبع غيره في خلاف الدين مع علمه أنه خلاف الدين، واعتقد ما قاله ذلك دون ما قاله الله ورسوله، مشركا مثل هؤلاء.
و الثاني: أن يكون اعتقادهم وإيمانهم بتحريم الحرام وتحليل الحلال ثابتا، لكنهم أطاعوهم في معصية الله كما يفعل المسلم ما يفعله من المعاصي التي يعتقد أنها معاص؛ فهؤلاء لهم حكم أمثالهم من أهل الذنوب"

"Et ces gens là qui ont pris leurs savants et leurs moines comme divinités, étant donné qu'ils les ont suivis dans le fait de déclarer licite ce que Dieu a rendu illicite et de déclarer illicite ce que Dieu a rendu licite, [le font] selon deux manières
L'une est qu'ils savent que [ces savants et moines] ont changé le dîn de Dieu puis qu'ils les suivent en ce changement, ayant alors comme croyance ("ya'taqidun") que ce Dieu a décrété illicite est devenu licite et que ce que Dieu a décrété licite est devenu illicite, par fait de suivre leurs chefs, tout en sachant qu'ils ont contredit le dîn des Messagers. Ceci est du kufr. Et Dieu et Son Messager l'ont déclaré du shirk, même s'ils ne prient pas et ne se prosternent pas devant eux. Aussi, celui qui suit autrui dans ce qui contredit le dîn tout en sachant que ceci est contraire au dîn, et a comme croyance ("i'taqada") ce que [cet autrui] a dit et non ce que Dieu et Son Messager ont dit, celui-là est mushrik comme ceux-là.
La seconde est que leur croyance et leur foi soient établies quant au fait de considérer licite ce que [Dieu a décrété] licite et illicite ce que [Dieu a décrété] illicite, mais qu'ils suivent ces [prêtres et moines] dans l'(action de) désobéissance à Dieu, comme le musulman commet ce qu'il commet de péchés dont il a la croyance que ce sont des péchés. Ceux-là ont le statut de leurs semblables parmi les gens du péché (…)" (Majmû' ul-fatâwâ 7/70).
C'est donc seulement le premier de ces deux cas qui est concerné par le verset 9/31. Ceux qui sont dans le premier cas font la 'ibâda "kub'râ" (= ta'lîh) de ceux qu'ils se mettent à suivre dans la croyance en le caractère licite ou illicite d'une action, selon ce qu'ils ont légiféré.

Abû Bakr Ibn ul-'Arabî a écrit quant à lui chose voisine à propos du verset où Dieu dit : "وَإِنْ أَطَعْتُمُوهُمْ إِنَّكُمْ لَمُشْرِكُونَ" : "Et si vous leur obéissez [= aux polythéistes], alors vous êtes polythéistes" (Coran 6/121). A propos de quoi est-il question, dans ce verset, d'"obéir aux polythéistes" ? Al-Qurtubî écrit : "أي في تحليل الميتة" : "c'est-à-dire dans le fait de considérer halal la bête morte" (Tafsir ul-Qurtubî). C'est en effet de cela que ce passage coranique parle.
Ibn ul-Arabî explique bien ce en quoi ce "tahlîl" ("le fait de considérer halal" cette chose harâm à manger) consiste :
"قال ابن العربي: إنما يكون المؤمن بطاعة المشرك مشركا إذا أطاعه في الاعتقاد. فأما إذا أطاعه في الفعل وعقده سليم مستمر على التوحيد والتصديق، فهو عاص. فافهموه"
:
"Le croyant, par le fait d'obéir au polythéiste :
devient polythéiste seulement s'il lui obéit en croyance ;
– par contre, s'il lui obéit dans l'action alors que sa croyance est correcte, restant sur le tawhid et le tasdîq, alors il est pécheur.
Comprenez !"
(Ibid.).

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Pour ce qui est du parallèle que vous avez fait entre le fait d'obéir en acte à un autre que Dieu, et le fait de se prosterner en acte devant autre que Dieu :

Il faut en fait distinguer plusieurs cas...

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A) Si le musulman fait une telle action sans y être contraint (bi ghayri ik'râh), par ce qu'il pense être une maslaha :

--- A.A) Celui qui reconnaît la légitimité de cela par sa langue :

----- Celui qui dit dit qu'Untel mérite qu'on lui obéisse de façon absolue, bien qu'il n'y ait aucune contrainte ; ou celui qui dit qu'Untel a le droit de légiférer de façon absolue : c'est là un propos de kufr akbar.

----- Celui qui dit qu'Untel mérite qu'on se prosterne devant lui :
-------- d'après le premier groupe de ulémas que nous allons citer, c'est là systématiquement un propos de kufr akbar ;

-------- et d'après le second groupe de ulémas que nous allons citer,
----------- si on parle d'une prosternation de culte, alors c'est là un propos de kufr akbar ;
----------- par contre, si on parle d'une prosternation de respect, alors, vu que cela a été interdit par le Prophète, et est connu "interdit" par consensus des ulémas, dire que cela est autorisé est soit une parole de kufr akbar, soit une parole de dhalâl ;

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--- A.B) Celui qui ne dit rien par sa langue mais fait l'action :

----- Celui qui obéit à la loi déclarant licite ce que Dieu a déclaré illicite ou illicite ce qu'Il a décrété licite :
---------- s'il s'est conformé à cette loi en croyance, alors c'est là croyance de kufr akbar ;
---------- par contre, s'il s'y est conformé seulement en actes mais pas en croyance aussi, alors c'est là acte de fisq saghîr, c'est-à-dire une kabîra. Cela conformément aux écrits de Ibn Taymiyya et de Abû Bakr ibn ul-'Arabî cités plus haut. (S'il y a contrainte, on passe au cas B.)

----- Celui qui se prosterne devant un humain :
-------- il est certains ulémas (parmi lesquels certains hanafites, tels que as-Sarakhsî, Shâh Waliyyullâh, etc., et d'autres ulémas n'étant pas hanafites) qui disent qu'il a fait acte de kufr akbar, sans égard pour le sens qu'il dit avoir donné à cette prosternation en son coeur (est-ce une sujûd ut-ta'zîm il-mujarrad, ou est-ce une sujûd ul-'ibâda) (car dans la Shar' de Muhammad, sur lui soit la paix, toute prosternation est une mazinnat ut-ta'lîh) ;
-------- et il est d'autres ulémas (parmi lesquels adh-Dhahabî, ash-Shawkânî, az-Zayla'î, Ibn Nujaym etc.) qui disent que cela dépend du sens qu'il donne dans son coeur à cette action :
---------- s'il lui donne un sens de culte, alors cela constitue du kufr akbar ;
---------- par contre, s'il lui donne un sens de simple respect (ta'zîm mujarrad), alors cela constitue une kabîra (car ayant été interdite par le Prophète).

Dès lors :
-------- D'après l'avis du premier groupe de ulémas, il y a une différence entre les deux actions : se prosterner en acte devant autre que Dieu est acte de kufr akbar ; tandis qu'obéir en acte à la loi énoncée par un autre que Dieu et contredisant formellement celle énoncée par Dieu dépend de l'intention.

-------- Et d'après l'avis du second groupe de ulémas, dans le cas de la prosternation devant un homme vivant comme dans le cas de l'obéissance à une loi contredisant celle de Dieu, tout dépend de la signification que, en son for intérieur, la personne donne à l'action qu'il fait.
Cependant, cette divergence tient au sujet de se prosterner devant un homme vivant. Par contre, pour ce qui est de se prosterner devant une tombe, cela est systématiquement acte de kufr akbar (d'après l'avis qui semble alors pertinent).
De même
, cette divergence tient au sujet de se prosterner devant la statue d'un homme auquel les gens ne rendent pas de culte. Par contre, pour ce qui est de se prosterner devant la statue d'un homme ou d'un être à qui les gens rendent le culte, cela est systématiquement acte de kufr akbar.
(Nous avons détaillé cela dans notre article : Se prosterner devant autre que Dieu, est-ce systématiquement un acte de Kufr Akbar.)

Dès lors :
- se prosterner en acte devant la statue de quelqu'un à qui le culte est rendu par des hommes est systématiquement acte de kufr akbar ;
- tandis qu'obéir en acte à la loi énoncée par un autre que Dieu et contredisant formellement celle énoncée par Dieu, cela peut être acte de kabîra, comme cela peut être acte de kufr akbar : tout dépend de l'intention.

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B) Et si le musulman subit une contrainte reconnue "valable" par rapport à l'action en question (laquelle action est en soi interdite), et fait alors cette action seulement par son corps ou par sa langue tout en la détestant et en la désapprouvant de son coeur :

Faire cette action ainsi est alors autorisé (au moins jâ'ïz).

----- Celui qui obéit à quelqu'un le contraignant (par menace) à faire une action que Dieu a clairement interdite (action autre que celle de tuer un innocent), par exemple à boire de l'alcool : faire cette action par  son corps est alors autorisé, à condition qu'on continue à la considérer interdite en son coeur.

----- Celui qui se prosterne devant une idole, ou devant un être, et ce parce que quelqu'un exerce sur lui une contrainte à le faire (par menace de mort ou de blessure grave) : faire cette action de son corps est alors autorisé, à condition qu'on continue à la considérer interdite en son coeur.

Sur ce point il n'y a ainsi pas de différence entre ces deux actions (si ce n'est que chez certains mujtahidûn, le niveau de contrainte à partir duquel on peut faire la seconde action est plus élevé que le niveau de contrainte à partir duquel on peut faire la première action).

Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

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