Dans le Coran et la Sunna, le nom pluriel précédé de l'article défini "Al-" induit normalement une généralité absolue, mais parfois une généralité seulement relative : "Les hommes" (النَّاس) ; "Les polythéistes" (الْمُشْرِكُونَ) ; "Les juifs" (الْيَهُود) ; "Les chrétiens" (النَّصَارَى) (III - 1/2)

Avant d'exposer le détail de cela, voici quelques exemples où cela apparaît de façon très évidente :

– Faisant les éloges des Compagnons, à qui une ou quelques personnes étaient venues dire, après la bataille de Uhud, que les Quraysh s'étaient rassemblés pour les combattre, mais qui restèrent sereins et n'hésitèrent pas à monter au front malgré leur récente défaite, Dieu dit : "Ceux à qui les hommes ont dit : "Les hommes se sont rassemblés pour vous [combattre], craignez-les donc." (Ceci) les a augmentés en foi, et ils ont dit : "Dieu nous suffit, et quel bon Garant !"" (الَّذِينَ قَالَ لَهُمُ النَّاسُ: إِنَّ النَّاسَ قَدْ جَمَعُواْ لَكُمْ فَاخْشَوْهُمْ فَزَادَهُمْ إِيمَاناً وَقَالُواْ حَسْبُنَا اللّهُ وَنِعْمَ الْوَكِيلُ) (Coran 3/173). Ce ne sont pas tous les hommes qui s'étaient alors rassemblés pour combattre les Compagnons. Et ce ne sont pas non plus tous les hommes qui étaient venus leur apporter la nouvelle.

"Et lorsque les anges dirent à Marie : "O Marie, Dieu t'a choisie, t'a purifiée et t'a choisie par rapport à toute l'humanité" (وَإِذْ قَالَتِ الْمَلاَئِكَةُ: يَا مَرْيَمُ إِنَّ اللّهَ اصْطَفَاكِ وَطَهَّرَكِ وَاصْطَفَاكِ عَلَى نِسَاء الْعَالَمِينَ) (Coran 3/42). Ce ne sont pas tous les anges qui sont venus dire cela à Marie.

– Abdullâh ibn Omar, que Dieu l'agrée, relate que "les juifs se sont rendus auprès du Prophète, que Dieu le bénisse et le salue…" (عَنْ عَبْدِ اللَّهِ بْنِ عُمَرَ رضى الله عنهما أَنَّ الْيَهُودَ جَاءُوا إِلَى النَّبِىِّ صلى الله عليه وسلم) (rapporté par al-Bukhârî, 1264). Ce ne sont pas tous les juifs, ni même tous les juifs de Médine, qui s'étaient alors rendus auprès du Prophète pour lui exposer l'affaire qui les concernait, mais seulement un groupe parmi eux.

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Dans ces 3 exemples, il s'est agi de : "العام الذي أريد به الخصوص" : "un terme générique ne désignant que quelques individus".

Il existe aussi un cas différent bien que voisin : "le terme générique désignant tous ses individus, mais duquel un petit nombre fait l'objet de particularisation (= d'une exception)" : "العام المخصوص منه البعض" ; et cette particularisation (takhsîs) a été faite sur la base soit du bon sens, soit de l'observation de la réalité, soit du recoupement avec un autre texte ("فقد فرغنا بمعونة الله من ذكر المخصصات المتصلة. وهذا شروع في المخصصات المنفصلة؛ وقد حصروها في ثلاثة أقسام: العقل، والحس، والدليل السمعي" : Irshâd ul-fuhûl, p. 515).

"المسألة الموفية ثلاثين: في الفرق بين العام المخصوص والعام الذي أريد به الخصوص. قال الشيخ أبو حامد في "تعليقه" في كتاب البيع: والفرق بينهما أن الذي أريد به الخصوص: ما كان المراد أقل، وما ليس بمراد هو الأكثر. وقال أبو علي بن أبي هريرة: العام المخصوص: المراد به هو الأكثر، وما ليس بمراد هو الأقل. قال: ويفترقان أن العام الذي أريد به الخصوص: لا يصح الاحتجاج بظاهره؛ والعام المخصوص: يصح الاحتجاج بظاهره اعتبارا بالأكثر" (Irshâd ul-fuhûl, p. 474).

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I) L'article "Al-" (أل) (équivalent arabe des articles "le / la / les / l'") est de plusieurs types :

Il y a tout d'abord 2 grands types :

1) "اللام الجنسية" : l'article défini, placé devant un nom donné, induit une généralité quant à ce que ce nom véhicule : "L'homme est un roseau pensant" : il ne s'agit pas ici d'un homme particulier, mais de l'homme dans son ensemble (jins).

2) "اللام العهدية" : c'est l'équivalent du "représentant anaphorique" en français : l'article défini "le/la/les", ajouté au nom, induit une particularité : le nom correspond alors à un représenté (l'antécédent) précis, déjà connu de l'interlocuteur : "Un rossignol s'était posé sur l'arbre de mon jardin. Alors que je vaquais à mon travail, j'entendis le rossignol chanter" ; c'est-à-dire : "j'entendis ce rossignol dont j'ai déjà parlé : celui qui s'était posé sur l'arbre du jardin". Dans le Coran on lit de même : "إِنَّا أَرْسَلْنَا إِلَيْكُمْ رَسُولًا شَاهِدًا عَلَيْكُمْ كَمَا أَرْسَلْنَا إِلَى فِرْعَوْنَ رَسُولًا فَعَصَى فِرْعَوْنُ الرَّسُولَ فَأَخَذْنَاهُ أَخْذًا وَبِيلًا" : "Comme Nous avions envoyé à Pharaon un messager. Pharaon désobéit alors au messager [= à ce messager venant d'être évoqué]" (Coran 73/15-16).

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Ensuite, chacun de ces 2 grands types possède plusieurs sous-types...

1) "اللام الجنسية" : l'article défini, placé devant un nom donné, désigne le genre du concept que ce nom véhicule.
Les sous-types suivants se ramifient de ce type 1 :
--- 1.1) l'article défini, placé devant un nom, désigne la totalité des individus que ce nom représente (الاستغراقية) ;
--- 1.2) l'article défini, placé devant un nom, désigne la généralité des individus que ce nom représente (الطبيعية) ;
--- 1.3) l'article défini, placé devant un nom, désigne quelques individus parmi l'ensemble de ceux que ce nom représente (للجنس).

Détail de ces 3 sous-types :

--- 1.1) "اللام الاستغراقية" : l'article défini détermine alors le nom qu'il qualifie, et induit l'application du procès à chaque individu auquel ce nom s'applique. Exemple de ce type d'article défini : "وَخُلِقَ الإِنسَانُ ضَعِيفًا" : "L'homme a été créé faible" (Coran 4/28) : c'est-à-dire l'homme en tant que tel, soit : "chaque homme" ; ou "les hommes ont été créés faibles". Ici, Dieu parle de l'espèce humaine de façon générale, mais c'est la raison qui se représente l'homme en tant qu'espèce de sorte qu'elle est capable d'appréhender qu'un prédicat lui est ainsi attribué. Sinon, dans le monde réel, il n'existe que des individus hommes, et pas une espèce appréhendée en tant que tout. "ليس في الخارج إنسان مشترك كلي يشترك فيه هذا وهذا، بل كل إنسان يختص بذاته وصفاته، لا يشاركه غيره في شيء مما قام به قط. وإذا قيل: الإنسانية مشتركة أو الحيوانية، فالمراد أن في هذا حيوانية وإنسانية تشابه ما في هذا من الحيوانية والإنسانية، ويشتركان في مسمى الإنسانية والحيوانية، وذلك المسمى إذا أخذ مشتركا كليا لم يكن إلا في الذهن. وهو تارة يوجد مطلقا بشرط الإطلاق، فلا يكون إلا في الذهن عند عامة العقلاء، إلا من أثبت المثل الأفلاطونية في الخارج. وتارة يوجد مطلقا لا بشرط الإطلاق بحيث يتناول المعينات، وهذا قد يقال: إنه موجود في الخارج، وهو موجود في الخارج معينا مقيدا مخصوصا. فيقال: هذا الإنسان، وهذا الحيوان، وهذا الفرس، وأما وجوده في الخارج مع كونه مشتركا في الخارج فهذا باطل. ولهذا كان من المعروف عندهم أن الكليات ثابتة في الأذهان لا في الأعيان. ومن قال: "إن الكلي الطبيعي موجود في الخارج" فمعناه الصحيح أن ما هو كلي إذا كان في الذهن يوجد في الخارج، لكن لا يوجد في الخارج كليا" : MS 3/177) (العلم - Ce que l'homme ne peut pas savoir - Ce qu'il peut savoir - Ce qu'il doit savoir - De quels outils dispose-t-il pour le savoir ?).
Lorsque le nom qu'il détermine est au singulier (muf'rad), ce type de "al-" peut être remplacé par "kullu" ("tout" / "chaque"), suivi du même nom à l'indéfini (nakira). Et lorsque le nom qu'il détermine est au pluriel (jam'), ce type de "al-" peut être remplacé par "jamî'" ("tous"), suivi du même nom, cette fois défini (ma'rifa).

--- 1.2) "اللام الطبيعية" : l'article défini placé devant le nom signifie alors que le procès s'applique à l'ensemble des individus représentés par ce nom, cependant, cela ne se vérifie pas par rapport à chacun de ces individus, mais seulement à la généralité d'entre eux ; des exceptions à la règle normale existent donc. Exemple de ce type d'article : "المرأة أشدّ انعطافًا من الرجل""La femme est plus émotive que l'homme" ; c'est-à-dire : En général les choses sont ainsi, même si certains individus "femmes" sont moins émotifs que la plupart des individus "hommes", et que certains individus "hommes" sont plus émotifs que la plupart des individus "femmes" ;

--- 1.3) "اللام للجنس" : l'article défini, placé devant un nom, désigne des individus parmi l'ensemble de ceux que ce nom représente : le procès concerne certains individus, parmi tous ceux que le nom représente. Exemple : "وَقَالَتِ الْيَهُودُ: عُزَيْرٌ ابْنُ اللّهِ" : "Et les juifs ont dit : "'Uzayr est le fils de Dieu"" (Coran 9/30). C'est-à-dire : "Et des juifs ont dit : "'Uzayr est le fils de Dieu"". Le nom doté de ce type d'article défini, on peut le faire précéder  de "مِن" et le faire suivre de "مَن", que suit le verbe.

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2) "اللام العهدية" : c'est l'équivalent du "représentant anaphorique" en français : l'article défini "le/la/les", ajouté au nom, renvoie à un représenté (l'antécédent), déjà connu de l'interlocuteur.
Plusieurs sous-types se ramifient de ce type 2, selon que :
--- 2.1) l'antécédent a été mentionné explicitement dans le texte (العهد الذكري) ;
--- 2.2) l'antécédent n'a pas été mentionné dans le texte, mais il est connu de l'interlocuteur car présent physiquement dans le contexte d'énonciation (العهد الحضوري) ;
--- 2.3) l'antécédent n'a pas été mentionné dans le texte, mais il est connu de l'interlocuteur car présent à l'esprit de celui-ci (العهد الذهني).

Détail de ces sous-types :

--- 2.1) "العهد الذكري" : c'est le cas le plus simple à comprendre : le verset suscité relève de ce cas de figure : "إِنَّا أَرْسَلْنَا إِلَيْكُمْ رَسُولًا شَاهِدًا عَلَيْكُمْ كَمَا أَرْسَلْنَا إِلَى فِرْعَوْنَ رَسُولًا فَعَصَى فِرْعَوْنُ الرَّسُولَ فَأَخَذْنَاهُ أَخْذًا وَبِيلًا" : "Comme Nous avions envoyé à Pharaon un messager. Pharaon désobéit alors au messager" (Coran 73/15-16) ; "le messager" mentionné au verset 73/16 est celui qui vient d'être explicitement mentionné dans le texte, au verset 73/15.

--- 2.2) "العهد الحضوري" : Deux personnes sont assises quand l'une d'elles prend la parole pour dire seulement : "As-tu vu l'homme ?" De quel homme s'agit-il ? Il s'agit de l'homme qui passait devant ces deux personnes au moment où elles parlaient : cet homme était physiquement présent devant elles, et l'une d'elles a pu donc employer à son propos l'article défini, bien qu'aucune mention de cet homme n'ait été faite dans leurs paroles avant cela.

--- 2.3) "العهد الذهني" : "Le roi arrive !", crie Zayd à l'attention de 'Amr. De quel roi s'agit-il ? Il s'agit du roi du pays dans lequel le locuteur et l'interlocuteur résident : eux savent bien que quand ils parlent du roi, il ne s'agit pas de celui du pays voisin mais bien de celui de leur pays.

(Cf. Jâmi' ud-durus il-'arabiyya, 1/147-148. Sauf le 1.3.)

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Et qu'en est-il du "Al-" qui induit la perfection (اللام للكمال) ?
Ce qui en français correspond à par exemple : "Lui c'est LE physicien", c'est-à-dire : "le physicien par excellence".
On trouve ainsi tant de hadîths où ce "Lâm" est présent, comme par exemple : "المسلم من سلم المسلمون من لسانه ويده، والمهاجر من هجر ما نهى الله عنه" (Al-Bukhârî, 10, Muslim, 40) ; "قيل: الألف واللام فيه للكمال، نحو زيد الرجل أي الكامل في الرجولية" (FB 1/75). "أتدرون ما المفلس؟" قالوا: المفلس فينا من لا درهم له ولا متاع. فقال: "إن المفلس من أمتي يأتي يوم القيامة بصلاة، وصيام، وزكاة، ويأتي قد شتم هذا، وقذف هذا، وأكل مال هذا، وسفك دم هذا، وضرب هذا، فيعطى هذا من حسناته، وهذا من حسناته، فإن فنيت حسناته قبل أن يقضى ما عليه أخذ من خطاياهم فطرحت عليه، ثم طرح في النار" (Muslim, 2581).
Ce "اللام للكمال" relève-t-il du type "الاستغراقية", ou bien du type "العهدية" ? Je ne sais pas (لا أدري).

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Tout ce que nous venons de dire concerne l'article défini "Al-" se trouvant avant des noms au singulier (muf'rad) comme des noms un pluriel (jam').
Cependant, dans l'article présent, nous ne citerons que des cas de figure où il se trouve avant des noms au pluriel.

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II) Quelle est la règle normale ?

Dans le Coran et la Sunna :

la règle normale est que "Al-", devant le nom "Nâs" ("hommes"), "Yahûd" ("juifs") ou "Nassârâ" ("chrétiens"), est du type 1.1 (الاستغراقية) et désigne bien la totalité des individus que chacun de ces noms représente ;

cependant :
--- d'autres fois le "Al-", devant un nom pluriel, est de type 1.2 (الطبيعية) : il désigne alors la majorité des individus que ce nom réprésente ;
--- d'autres fois encore il est de type 1.3 (للجنس) : il ne désigne alors que certains des individus que ce nom représente ;
--- d'autres fois encore il est du type 2.1 (العهد الذكري), ou encore du type 2.2 (العهد الحضوري) ou 2.3 (العهد الذهني) : il ne désigne alors que quelques individus précis, parmi tous ceux que ce nom représente.

Dans ces 4 derniers cas (1.32.1 2.2 ; 2.3), ce nom pluriel, précédé de cet article déterminé, n'est pas à traduire par : "les hommes", mais par :  "des hommes", ou : "ces hommes précis".

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III) La même chose est valable pour la périphrase introduite par le terme "الَّذِينَ" : "ceux qui…" :

Il s'agit, en grammaire arabe, d'un ism ul-mawsûl, au pluriel masculin.
Ce terme est suivi par une phrase, jumla, qui constitue sa sila.
Dans par exemple : "الَّذِينَ قَالُوَاْ إِنَّا نَصَارَى" : "ceux qui ont dit : "Nous sommes chrétiens"" (Coran 5/82), la sila est : "قَالُوَاْ إِنَّا نَصَارَى".

En grammaire française, on parle de locution relative, avec le pronom démonstratif pluriel "ceux", suivi du pronom relatif "qui" : cette locution est suivie d'un verbe.

Cette formule aussi induit normalement une généralité absolue, mais parfois une généralité relative (des exemples suivront plus bas).

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IV) Des exemples concrets :

- A) La généralité du nom représentant un pluriel et précédé de l'article défini est absolue (de type 1.1) (الاستغراقية) :

Dieu relate cette invocation que des hommes lui font et qu'Il agrée : "رَبَّنَا إِنَّكَ جَامِعُ النَّاسِ لِيَوْمٍ لاَّ رَيْبَ فِيهِ" : "Seigneur, Tu es Celui qui rassemblera les hommes un jour à propos duquel il n'y a aucun doute" (Coran 3/9).
Il s'agit bien évidemment ici de tous les hommes. L'article défini précédent le terme "nâs", "hommes", est bien de type 1.1 (الاستغراقية), conformément à la norme.

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- B) La généralité est seulement relative : le propos concerne la généralité, et non pas la totalité, des individus que représente le nom collectif déterminé ("Les hommes") ou la périphrase débutant par "Ceux qui…" (il s'agit donc du type 1.2) (الطبيعية) :

– Dieu dit : "وَلَتَجِدَنَّ أَقْرَبَهُمْ مَّوَدَّةً لِّلَّذِينَ آمَنُواْ: الَّذِينَ قَالُوَاْ إِنَّا نَصَارَى" : "Et tu trouveras être les plus proches parmi les (hommes) en affection pour ceux qui ont foi [= les musulmans] : ceux qui disent : "nous sommes chrétiens"" (Coran 5/82). Dieu a employé dans le Coran tantôt le nom "les chrétiens", tantôt la formule : "Ceux qui disent : "nous sommes chrétiens"". La raison de cette formule est que, bien qu'Il a employé le nom "chrétiens", Il a voulu souligner que ce n'est pas Lui qui leur a donné ce nom, mais eux-mêmes. En tous cas, ici Il dit que les chrétiens sont ceux qui sont les plus proches en affection pour les musulmans.

Ibn Taymiyya écrit : "Quant aux chrétiens, il n'y a pas, dans la religion qu'ils professent, d'inimitié ni de détestation pour ceux qui sont ennemis de Dieu, qui combattent Dieu et Son Messager et qui font des efforts pour répandre le mal sur Terre. Comment auraient-ils alors de l'inimitié et de la détestation pour ceux qui ont la foi et sont du juste milieu, qui suivent la forme de religion de Abraham et croient en tous les livres (révélés) et tous les prophètes [= les musulmans] ?
(Cependant), il n'y a pas en ce (passage coranique) d'éloge des chrétiens disant qu'ils ont foi en Dieu. Il ne leur y a pas non plus été promis qu'ils seront sauvés du châtiment et mériteront la récompense. Il y est seulement dit qu'ils sont les plus proches en affection"
(Al-Jawâb us-sahîh 2/47).

Un peu plus loin Ibn Taymiyya écrit : "Puis Dieu – Elevé – a dit : "Et lorsqu'ils entendent ce qui a été descendu sur le Messager, tu vois leurs yeux ruisseler de larmes à cause du fait qu'ils ont reconnu la vérité" [Coran 5/83]. Ceux-là, ce sont (effectivement) ceux dont (Dieu) a fait les éloges qu'ils ont la foi et leur a promis la récompense de l'au-delà. (Mais) même si le pronom renvoie à ceux qui ont été mentionnés précédemment, ce qui y est désigné est : le genre (جنس) de ceux qui ont été mentionnés précédemment, et non pas chacun d'eux" (Ibid. 1/47-48).

Si les chrétiens sont plus proches en affection vis-à-vis des musulmans que ne le sont les gens d'autres religions vis-à-vis des musulmans, cela ne veut pas dire que chacun des chrétiens soit ainsi. Les Croisades il y a de cela plusieurs siècles, et la "croisade" de G. W. Bush plus récemment, en sont la preuve.

En fait ce verset parle des chrétiens en général. Il veut dire : en général les chrétiens sont ainsi. Cela n'empêche pas qu'à toute époque il puisse y avoir des individus, voire des régions entières, qui font exception à cette règle générale. Il peut même arriver qu'il y ait une époque elle-même qui fasse exception à cette règle par rapport à toutes les autres époques, la majorité des chrétiens existant sur Terre étant alors en inimitié avec les musulmans.

Même alors, lorsqu'ils ont à faire face à un groupe qui a de l'inimitié pour eux, voici ce qu'il est demandé aux musulmans : "Et que l'inimitié d'un groupe ne vous conduise pas à ne pas être justes. Soyez justes, cela est plus proche de la piété. Et craignez Dieu, Dieu est informé de ce que vous faites" (Coran 5/8).

En tous cas, voilà un cas où l'article défini est de type (type 1.2) (الطبيعية), et ne désigne donc pas la totalité mais la généralité.

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- C) L'article "Al-" employé devant un nom collectif n'induit pas de généralité, mais désigne seulement une partie des individus que ce nom représente (le "Al-" est alors de type 1.3) (للجنس) :

– Dieu dit : "وَقَالَتِ الْيَهُودُ: عُزَيْرٌ ابْنُ اللّهِ" : "Et les juifs ont dit : "Uzayr est le fils de Dieu"" (Coran 9/30).

Al-Qurtubî a écrit, en commentaire de ce verset : "Ceci est une formule qui a été dite de façon générale (mais) dont le sens est particulier. Car ce ne sont pas tous les juifs qui ont dit cela (هذا لفظ خرج على العموم و معناه الخصوص، لأن ليس كل اليهود قالوا ذلك). Cela est comparable à Son (autre) parole, Elevé soit-Il : "Ceux à qui les hommes ont dit" [Coran 3/173] : ce ne sont pas tous les hommes qui ont dit cela" (Tafsîr ul-Qurtubî, tome 8 p. 116).

Ibn Taymiyya écrit : "Il est donc impossible que tous les hommes aient dit à tous les hommes : "Tous les hommes se sont rassemblés contre vous". Comparable à cela est la parole de (Dieu) Elevé : "Et les juifs ont dit : "'Uzayr est le fils de Dieu"" ; c'est-à-dire : "(du) groupe (جنس) des juifs (il en est qui) ont dit cela", et non que tout juif dit cela" (Al-Jawâb us-sahîh 2/48).

Ar-Râzî, ayant cité deux commentaires selon lesquels il s'agit d'un petit nombre de juifs qui disaient cela, écrit : "Ceux qui professaient cette (croyance) religieuse étaient certains juifs. Dieu a attribué ce propos "aux juifs" conformément à l'habitude de [la langue des] Arabes, qui est d'appliquer le nom du groupe pour l'un (d'eux). On dit ainsi : "فلان يركب الخيول" ("Untel monte les chevaux") alors qu'il n'est probablement monté que sur un cheval ; et : "فلان يجالس السلاطين" ("Untel s'assoit dans la compagnie des rois") alors qu'il ne fréquente probablement qu'un roi" (Tafsîr ur-Râzî).
Selon cette explication de ar-Râzî, l'emploi du pluriel précédé de l'article défini ne s'explique plus par la nature de cet article, mais par la fréquence de ce genre d'emploi dans la langue arabe.

Un hadîth dit que le jour du jugement, "les juifs seront appelés et on leur demandera : "Qui adoriez-vous ?" Ils diront : "Nous adorions 'Uzayr, fils de Dieu"" (فَيُدْعَى الْيَهُودُ فَيُقَالُ لَهُمْ: مَنْ كُنْتُمْ تَعْبُدُونَ قَالُوا: كُنَّا نَعْبُدُ عُزَيْرَ ابْنَ اللَّهِ) (al-Bukhârî, 4305, Muslim, 183). Ibn Hajar écrit en commentaire : "Il y a ici une objection, car ceux qui sont ainsi sont certains juifs (seulement), alors que la plupart d'entre eux réfutent cela. Il est possible de répondre à cela que ce propos s'adresse spécifiquement à ceux qui étaient ainsi" (Fat'h ul-bârî 11/547). Ailleurs il écrit : "Tout comme ont disparu [parmi les juifs] ceux dont Dieu a informé d'eux qu'ils disaient que 'Uzayr est le fils de Dieu" (Ibid., 7/345).

Ici, on a connu la relativité du sens de l'article défini par l'observation de la réalité extérieure (al-haqîqa al-khârija / al-hiss).

Il faut donc traduire le verset ainsi : "Et des juifs ont dit : "Uzayr est le fils de Dieu"" (Coran 9/30).

L'article présent dans ce verset peut, cependant, tout aussi bien relever du type 'ahdiyya (type 2, qui sera présenté ci-après) : certains juifs précis, à Médine, avaient dit cela (cet avis est également mentionné dans les ouvrages de Tafsîr). Le verset est alors à traduire ainsi : "Et ces juifs-là ont dit : "Uzayr est le fils de Dieu"" (Coran 9/30).

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- D) L'article "Al-" employé devant un nom collectif n'induit pas de généralité, mais désigne seulement certains des individus que ce nom représente, individus qui sont connus (le "Al-" est donc de type 2) (العهدية) :

- D.A) et on a connu la relativité du sens de cet article "Al-" par le simple bon sens (al-'aql) :

"عَنْ عَبْدِ اللَّهِ بْنِ عُمَرَ رضى الله عنهما أَنَّ الْيَهُودَ جَاءُوا إِلَى النَّبِىِّ صلى الله عليه وسلم" : Abdullâh ibn Omar relate que "les juifs se sont rendus auprès du Prophète…" (rapporté par al-Bukhârî, 1264 ; un autre événement est introduit par la même formule et est rapporté par Abû Dâoûd, 2819). S'agit-il de tous les juifs, qui se seraient rendus auprès du Prophète ? Non, bien sûr.
S'agit-il alors de tous les juifs de la ville de Médine, qui se seraient rendus auprès du Prophète ? Même pas. Il s'agissait seulement d'un groupe de juifs. Pourtant on lit : "les juifs se sont rendus auprès du Prophète…".
En fait il faut traduire ce hadîth ainsi : "des juifs se sont rendus auprès du Prophète...".

– Dieu dit :  "الَّذِينَ قَالَ لَهُمُ النَّاسُ: إِنَّ النَّاسَ قَدْ جَمَعُواْ لَكُمْ فَاخْشَوْهُمْ فَزَادَهُمْ إِيمَاناً وَقَالُواْ حَسْبُنَا اللّهُ وَنِعْمَ الْوَكِيلُ" "Ceux à qui les hommes ont dit : "Les hommes se sont rassemblés pour vous [combattre], craignez-les donc." (Ceci) les a augmentés en foi, et ils ont dit : "Dieu nous suffit. Et quel bon Garant !"" (Coran 3/173). Dieu ici fait les éloges des Compagnons du Prophète qui, après avoir subi une défaite à Uhud, se sont mobilisés lorsqu'ils ont appris que les Quraysh s'étaient de nouveau réunis pour les combattre (soit à Hamra' ul-assad, soit à Badr une nouvelle fois).
Commentant ce verset 3/173, Ibn Taymiyya écrit : "La généralité est ici impossible. Car celui qui a dit [cela aux Compagnons] fait (lui-même) partie des hommes. Ceux à qui cela a été dit [= les Compagnons] font (eux aussi) partie des hommes. Et ceux au sujet de qui ce propos a été dit [= les Quraysh] fait (lui aussi) partie des hommes. Il est donc impossible que tous les hommes aient dit à tous les hommes : "Tous les hommes se sont rassemblés contre vous". Comparable à cela est la parole de (Dieu) Elevé : "Et les juifs ont dit : "'Uzayr est le fils de Dieu"" [Coran 9/30]" (Al-Jawâb us-sahîh 2/48).
Il faut donc traduire le verset ainsi : "Ceux à qui des hommes ont dit : "Des hommes se sont rassemblés pour vous [combattre], craignez-les donc." (Ceci) les a augmentés en foi, et ils ont dit : "Dieu nous suffit. Et quel bon Garant !"" (Coran 3/173).

– Dieu nous raconte : "وَإِذْ قَالَتِ الْمَلاَئِكَةُ: يَا مَرْيَمُ إِنَّ اللّهَ اصْطَفَاكِ وَطَهَّرَكِ وَاصْطَفَاكِ عَلَى نِسَاء الْعَالَمِين" : "Et lorsque les anges dirent à Marie : "O Marie, Dieu t'a choisie, t'a purifiée et t'a choisie par rapport à toute l'humanité" (3/42) :
Il est évident que tous les anges ne sont pas venus dire cela à Marie.
- D'après un avis, il s'agit de l'ange Gabriel uniquement (conformément aux versets 19/16-22, qui parlent, pour le même épisode, du seul Gabriel, la formule "les anges" du verset 3/42 constituant donc seulement un "pluriel de grandeur").
- D'après un autre avis, il s'agit de l'ange Gabriel plus quelques autres anges.
Mais en tous cas il ne s'agit pas de tous les anges : tous les anges ne se sont pas rendus auprès de Marie pour lui dire ce qui est relaté.

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- D.B) et on a connu la relativité du sens de cet article "Al-" en se référant au contexte d'énonciation du texte (sabab un-nuzûl, sabab ul-wurûd) :

– Dieu dit : "فَإِذَا انسَلَخَ الأَشْهُرُ الْحُرُمُ فَاقْتُلُواْ الْمُشْرِكِينَ حَيْثُ وَجَدتُّمُوهُمْ وَخُذُوهُمْ وَاحْصُرُوهُمْ وَاقْعُدُواْ لَهُمْ كُلَّ مَرْصَدٍ" : "Lorsque les mois d'interdiction seront écoulés, tuez les Polythéistes où que vous les trouviez, attrapez-les, cernez-les et guettez-les dans toute embuscade" (Coran 9/5). Il ne s'agit pas de tous les Polythéistes, qu'il faudrait tuer dès que les mois d'interdiction seront écoulés, mais seulement des Polythéistes du Hedjaz ou de la Péninsule arabique. Par ailleurs, le verset 1 parle explicitement de ces Polythéistes : "Désaveu de la part de Dieu et de Son Messager vis-à-vis de ceux des Polythéistes avec lesquels vous aviez conclu un pacte" (Coran 9/1) : il s'agit donc de l'article défini de type 2.1 (العهد الذكري). Par ailleurs encore, il s'agissait des Polythéistes qui refusaient de quitter cette région après l'an 9 de l'hégire. Nous avons démontré cela de façon détaillée dans un autre article : Les versets demandant de tuer les polythéistes : couper des textes de leur contexte ?.

– Le Prophète (sur lui soit la paix) a dit : "أُمِرْتُ أَنْ أُقَاتِلَ النَّاسَ حَتَّى يَشْهَدُوا أَنْ لاَ إِلَهَ إِلاَّ اللَّهُ وَيُؤْمِنُوا بِى وَبِمَا جِئْتُ بِهِ" : "Il m'a été ordonné de combattre les hommes jusqu'à ce qu'ils témoignent qu'il n'est de divinité que Dieu et qu'ils croient en moi [en tant que prophète de Dieu] et en ce que j'ai apporté..." (Muslim, n° 21).
Pourtant il ne s'agit pas de tous les hommes, mais seulement des Polythéistes de l'Arabie (ou bien du Hedjaz). Nous l'avons démontré de façon détaillée dans un autre article : Le Prophète (sur lui soit la paix) a-t-il dit qu'il lui a été demandé de combattre les hommes jusqu'à ce qu'ils se convertissent à l'islam ?. L'article défini est ici de type 2.2 (العهد الحضوري).

– Dieu dit : "وَقَالَتِ الْيَهُودُ وَالنَّصَارَى: نَحْنُ أَبْنَاء اللّهِ وَأَحِبَّاؤُهُ. قُلْ: فَلِمَ يُعَذِّبُكُم بِذُنُوبِكُم بَلْ أَنتُم بَشَرٌ مِّمَّنْ خَلَقَ" : "Et les juifs et les chrétiens ont dit : "Nous sommes les fils de Dieu et Ses bien-aimés". Dis : "Pourquoi, alors, vous châtie-t-Il pour vos péchés ? Vous êtes plutôt des humains parmi (tous) ceux qu'Il a créés"" (Coran 5/18).
At-Tabarî a écrit en toutes lettres qu'il ne s'agit pas de tous les juifs et de tous les chrétiens mais de quelques-uns parmi eux, qui avaient affirmé cela. Il écrit : "Ceci est une information de la part de Dieu au sujet d'un groupe de juifs et de chrétiens qu'ils avaient tenu ce propos. Et il a été rapporté de Ibn Abbâs les noms des juifs qui avaient dit cela" (suit la relation jusqu'à Ibn Abbâs, qui cite 3 juifs venus voir le Prophète et lui dire cela) (Tafsîr ut-Tabarî, commentaire de ce verset).
Il s'agit dès lors de traduire ce verset ainsi : "Et des juifs et des chrétiens ont dit : "Nous sommes les fils de Dieu et Ses bien-aimés". Dis : "Pourquoi vous châtie-t-Il donc pour vos péchés ? Vous êtes plutôt des humains parmi (tous) ceux qu'Il a créés"" (Coran 5/18).

– Dieu dit : "وَقَالَتِ الْيَهُودُ: يَدُ اللّهِ مَغْلُولَةٌ غُلَّتْ أَيْدِيهِمْ وَلُعِنُواْ بِمَا قَالُواْ" : "Les juifs ont dit : "La Main de Dieu est liée". Que leurs mains soient liées et qu'ils soient éloignés de la miséricorde pour ce qu'ils ont dit !" (Coran 5/64).
Or c'étai(en)t seulement 1 – ou 2 – juifs de Médine qui avai(en)t dit cela : Pinhas de Banû Qaynuqâ' – et aussi, d'après d'autres avis, de Nabbâsh ibn Qays – (voir Tafsîr ut-Tabarî et Tafsîr ur-Râzî). La raison de ce propos de leur part est qu'ils subissaient alors quelques difficultés financières, et ils dirent alors que Dieu était devenu regardant à la dépense (voir les ouvrages de Tafsîr). Or plaisanter de la sorte au sujet de Dieu est chose grave. Ce qui nous intéresse ici est que, malgré le libellé apparent de ce verset, c'étaient seulement 2 personnes qui avaient tenu ce propos.
Il s'agit donc de traduire le verset ainsi : "Des juifs ont dit : "La Main de Dieu est liée". Que leurs mains soient liées et qu'ils soient éloignés de la miséricorde pour ce qu'ils ont dit !" (Coran 5/64).

– Dieu dit : "لَّقَدْ سَمِعَ اللّهُ قَوْلَ الَّذِينَ قَالُواْ: إِنَّ اللّهَ فَقِيرٌ وَنَحْنُ أَغْنِيَاء" : "Dieu a entendu la parole de ceux qui ont dit : "Dieu est pauvre et nous sommes riches !"" (Coran 3/181). Il s'agit, ici aussi, de quelques juifs de Médine seulement : Pinhas, ou Huyyay ibn Akhtab (cf. Tafsîr ut-Tabarî ; Bayân ul-qur'ân) ; ayant entendu le verset : "Qui est celui qui prêtera à Dieu un bon prêt, (Dieu) le lui rendant ensuite au multiple ?" (Coran), ils tournèrent en dérision cette formule métaphorique de "prêter à Dieu", s'exclamant : "Dieu est donc bien pauvre, et nous riches, pour qu'Il demande de Lui accorder un prêt !" (cf. Tafsîr ut-Tabarî ; Bayân ul-qur'ân). Ces juifs n'avaient bien évidemment pas comme croyance au sujet de Dieu qu'Il est pauvre (Tafsîr ul-Qurtubî, Bayân ul-qur'ân), et ce verset ne leur reproche pas d'avoir pareille croyance ; il leur reproche de s'être moqués de la formulation divine "Qui est celui qui prêtera à Dieu un bon prêt, (Dieu) le lui rendant ensuite au multiple ?". Le fait est que ne pas croire en le Coran comme étant la parole de Dieu, cela constitue déjà du kufr akbar, mais se moquer de cela est plus grave encore (Bayân ul-qur'ân).

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- D.C) et on a connu la relativité du sens de cet article "Al-" par recoupement avec un autre texte du Coran ou de la Sunna :

– Dieu dit : "إِنَّ الَّذِينَ آمَنُواْ وَالَّذِينَ هَادُواْ وَالنَّصَارَى وَالصَّابِئِينَ مَنْ آمَنَ بِاللَّهِ وَالْيَوْمِ الآخِرِ وَعَمِلَ صَالِحاً فَلَهُمْ أَجْرُهُمْ عِندَ رَبِّهِمْ وَلاَ خَوْفٌ عَلَيْهِمْ وَلاَ هُمْ يَحْزَنُونَ" : "Ceux qui ont apporté Foi [= les Musulmans], ceux qui se sont judaïsés, les Chrétiens, les Sabéens : ceux [d'entre eux] qui auront cru en Dieu et au jour dernier et auront fait le bien, ceux-là auront leur récompense auprès de leur Seigneur, et il n'y aura crainte sur eux, ni ils ne seront attristés" (Coran 2/62 ; en Coran 5/69 on lit quelque chose de très voisin).
Il ne s'agit bien évidemment pas de tous les Juifs, de tous les Chrétiens et de tous les Sabéens, mais uniquement de ceux qui adhéraient à ces religions avant qu'elles aient été abrogées par le message divin suivant, et, dans le cas des chrétiens, de ceux qui n'adhéraient pas aux croyances de l'Incarnation, de la Trinité etc. Nous l'avons démontré dans un autre article : Les juifs et les chrétiens d'aujourd'hui sont-ils des mu'min ou des kâfir ?.
L'article défini est ici de type 2.3 (العهد الذهني).

– Dieu dit : "إِنَّ الَّذِينَ كَفَرُواْ سَوَاءٌ عَلَيْهِمْ أَأَنذَرْتَهُمْ أَمْ لَمْ تُنذِرْهُمْ لاَ يُؤْمِنُونَ خَتَمَ اللّهُ عَلَى قُلُوبِهمْ وَعَلَى سَمْعِهِمْ وَعَلَى أَبْصَارِهِمْ غِشَاوَةٌ وَلَهُمْ عَذَابٌ عظِيمٌ" : "Ceux qui ne croient pas, il est égal que tu les avertisses [= prêches] ou que tu ne les avertisses pas : ils ne croiront pas. Dieu a scellé leur cœur et leur ouïe, et sur leur vue se trouve un bandeau. Et ils auront un châtiment énorme" (Coran 2/6-7). "إِنَّ الَّذِينَ لَا يُؤْمِنُونَ بِالْآخِرَةِ زَيَّنَّا لَهُمْ أَعْمَالَهُمْ فَهُمْ يَعْمَهُونَ" : "Ceux qui ne croient pas en l'au-delà, Nous avons rendu leurs actions belles pour eux, aussi ils s'aveuglent" (Coran 27/4).
Est-il question, dans ces deux versets, de la totalité de "ceux qui ne croient pas" ? Evidemment non, puisque parmi tous ceux qui ne croyaient pas au début, certains ont ensuite accepté l'islam suite à la prédication du Prophète, notamment Omar ibn ul-Khattâb.
En fait, dans ces deux versets, Dieu évoque seulement : "certains de ceux qui ne croient pas" : il s'agit de ceux qui sont inscrits tels dans ce que Dieu sait d'eux (fî 'ilm illâh).
"إن الذين كفروا سواء عليهم أأنذرتهم أم لم تنذرهم لا يؤمنون} (...) قال شيخنا علي بن عبيد الله: هذه الآية وردت بلفظ العموم، والمراد بها الخصوص، لأنها آذنت بأن الكافر حين إنذاره لا يؤمن، وقد آمن كثير من الكفار عند إنذارهم، ولو كانت على ظاهرها في العموم، لكان خبر الله لهم خلاف مخبره، ولذلك وجب نقلها إلى الخصوص" (Zâd ul-massîr).
"والتعريف في {الذين كفروا} يجوز أن يكون للعهد وأن يراد بهم ناس بأعيانهم كأبى لهب وأبى جهل والوليد بن المغيرة وأضرابهم، وأن يكون للجنس متناولا كل من صمم على كفره تصميما لا يرعوى بعده، [كهؤلاء] وغيرهم، ودل على تناوله للمصرين الحديث عنهم باستواء الإنذار وتركه عليهم" (Al-Kashshâf).

– Dieu dit : "وَإِذَا ضَرَبْتُمْ فِي الأَرْضِ فَلَيْسَ عَلَيْكُمْ جُنَاحٌ أَن تَقْصُرُواْ مِنَ الصَّلاَةِ إِنْ خِفْتُمْ أَن يَفْتِنَكُمُ الَّذِينَ كَفَرُواْ إِنَّ الْكَافِرِينَ كَانُواْ لَكُمْ عَدُوًّا مُّبِينًا" : "Et lorsque vous voyagez sur la Terre, il n'y a pas de mal à ce que vous raccourcissiez quelques prières, si vous craignez que ceux qui mécroient vous attaquent ; les incroyants sont pour vous un ennemi évident" (Coran 4/101).
Tous les incroyants doivent-ils être considérés par les musulmans comme étant, vis-à-vis d'eux, des ennemis déclarés, susceptibles de les attaquer ?
Bien sûr que non, puisque d'autres passages parlent de "groupe entre vous et lequel il y a un pacte" : "قَوْمٍ بَيْنَكُمْ وَبَيْنَهُم مِّيثَاقٌ" (Coran 4/90 ; 4/92 ; 8/72).
D'ailleurs certains commentateurs ont fait valoir que l'avant-dernière phrase de ce verset 4/101 a été formulée eu égard à ce qui était le plus courant pour le Prophète et ses Compagnons à ce moment-là : ils avaient à craindre des attaques.
"والضرب في الأرض: السفر، والجناح: الإثم، والقصر: النقص، والفتنة: القتل. وفي القصر قولان: أحدهما: أنه القصر من عدد الركعات. والثاني: أنه القصر من حدودها. وظاهر الآية يدل على أن القصر لا يجوز إلا عند الخوف. وليس الأمر كذلك، وإنما نزلت الآية على غالب أسفار رسول الله صلى الله عليه وسلم، وأكثرها لم يخل عن خوف العدو" (Zâd ul-massîr).
"إِنْ خِفْتُمْ أَنْ يَفْتِنَكُمُ الَّذِينَ كَفَرُوا إِنَّ الْكافِرِينَ كانُوا لَكُمْ عَدُوًّا مُبِيناً} شريطة باعتبار الغالب في ذلك الوقت، ولذلك لم يعتبر مفهومها" (Tafsîr ul-Baydhâwî).
"وإذا ضربتم} سافرتم {في الأرض فليس عليكم جناح} في {أن تقصروا من الصلاة} بأن تردوها من أربع إلى اثنتين {إن خفتم أن يفتنكم} أي ينالكم بمكروه {الذين كفروا} بيان للواقع إذ ذاك فلا مفهوم له" (Tafsîr ul-Jalâlayn).
"المسألة السادسة: زعم داود وأهل الظاهر أن جواز القصر مخصوص بحال الخوف. واحتجوا بأنه تعالى أثبت هذا الحكم مشروطا بالخوف، وهو قوله فليس عليكم جناح أن تقصروا من الصلاة إن خفتم أن يفتنكم الذين كفروا والمشروط بالشيء عدم عند عدم ذلك الشرط، فوجب أن لا يحصل جواز القصر عند الأمن. قالوا: ولا يجوز رفع هذا الشرط بخبر من أخبار الآحاد، لأنه يقتضي نسخ القرآن بخبر الواحد وأنه لا يجوز. ولقد صعب هذا الكلام على قوله ذكروا فيه وجوها متكلفة في الآية ليتخلصوا عن هذا الكلام.
وعندي أنه ليس في هذا غموض، وذلك لأنا بينا في تفسير قوله تعالى: {إن تجتنبوا كبائر ما تنهون عنه} أن كلمة "إن" وكلمة "إذا" يفيدان أن عند حصول الشرط يحصل المشروط، ولا يفيدان أن عند عدم الشرط يلزم عدم المشروط؛ واستدللنا على صحة هذا الكلام بآيات كثيرة؛ وإذا ثبت هذا فنقول: قوله تعالى: {إن خفتم} يقتضي أن عند حصول الخوف تحصل الرخصة، ولا يقتضي أن عند عدم الخوف لا تحصل الرخصة؛ وإذا كان كذلك كانت الآية ساكتة عن حال الأمن بالنفي وبالإثبات، وإثبات الرخصة حال الأمن بخبر الواحد يكون إثباتا لحكم سكت عنه القرآن بخبر الواحد، وذلك غير ممتنع، إنما الممتنع إثبات الحكم بخبر الواحد على خلاف ما دل عليه القرآن، ونحن لا نقول به.
فإن قيل: فعلى هذا لما كان هذا الحكم ثابتا حال الأمن وحال الخوف، فما الفائدة في تقييده بحال الخوف؟
قلنا: إن الآية نزلت في غالب أسفار النبي صلى الله عليه وسلم، وأكثرها لم يخل عن خوف العدو، فذكر الله هذا الشرط من حيث إنه هو الأغلب في الوقوع، ومن الناس من أجاب عنه بأن القصر المذكور في الآية المراد منه الاكتفاء بالإيماء والإشارة بدلا عن الركوع والسجود، وذلك هو الصلاة حال شدة الخوف، ولا شك أن هذه الصلاة مخصوصة بحال الخوف، فإن وقت الأمن لا يجوز الإتيان بهذه الصلاة، ولا تكون محرمة ولا صحيحة، والله أعلم" (Tafsîr ur-Râzî).

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- D.D) et on a connu la relativité du sens de cette particule "Alladhîna" par le fait d'avoir attribué un pivot (ta'lîl) au propos qui s'applique au thème que cette particule qualifie :

– Dieu dit : "فَإِذَا لَقِيتُمُ الَّذِينَ كَفَرُوا فَضَرْبَ الرِّقَابِ حَتَّى إِذَا أَثْخَنْتُمُوهُمْ فَشُدُّوا الْوَثَاقَ فَإِمَّا مَنًّا بَعْدُ وَإِمَّا فِدَاءً حَتَّى تَضَعَ الْحَرْبُ أَوْزَارَهَا" : "Alors, lorsque vous rencontrerez ceux qui ont mécru, tuez-les. Jusqu'à ce que, lorsque vous les aurez affaiblis, alors attachez-les. Ensuite, soit faveur, soit rançon. Jusqu'à ce que la guerre dépose ses fardeaux" (Coran 47/4).
Il ne s'agit bien évidemment pas de "tous ceux qui sont kâfir", mais uniquement de ceux qui sont à la fois : kâfir, harbî, muqâtil, et l'impératif de les tuer s'applique uniquement sur le champ de bataille. Ces qualificatifs supplémentaires, auxquels le propos ici énoncé s'applique, ont été spécifiés dans la Sunna : lire notre article : Lors d'un conflit armé, il n'est pas autorisé de viser des non-combattants.
At-Tabarî écrit ainsi : "يقول (تعالى ذكره) لفريق الإيمان به وبرسوله: (فَإِذا لَقِيتُمُ الَّذِينَ كَفَرُوا) بالله ورسوله من أهل الحرب، فاضربوا رقابهم" (Tafsîr ut-Tabarî).

Wallâhu A'lam
(Dieu sait mieux).

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