Les Signes (الآيات) que Dieu a mis en nous (في الأنفُس) et autour de nous (في الآفاق) ; et les Signes qu'Il a révélés à notre intention et que nous entendons (السمعيّة)

Un "signe" est dit : "آية" : "âyah", ce qui signifie : "علامة" : "'alâmah".
Ces deux termes sont donc synonymes.

Un signe est un "دالّ", "dâll", un signifiant.

Au signe correspond donc un "مدلول", "madlûl", un signifié.

Voici l'emploi de ce terme "آية" où on voit bien son sens littéral de "signe", "preuve" : "وَقَالَ لَهُمْ نَبِيُّهُمْ إِنَّ اللّهَ قَدْ بَعَثَ لَكُمْ طَالُوتَ مَلِكًا قَالُوَاْ أَنَّى يَكُونُ لَهُ الْمُلْكُ عَلَيْنَا وَنَحْنُ أَحَقُّ بِالْمُلْكِ مِنْهُ وَلَمْ يُؤْتَ سَعَةً مِّنَ الْمَالِ قَالَ إِنَّ اللّهَ اصْطَفَاهُ عَلَيْكُمْ وَزَادَهُ بَسْطَةً فِي الْعِلْمِ وَالْجِسْمِ وَاللّهُ يُؤْتِي مُلْكَهُ مَن يَشَاء وَاللّهُ وَاسِعٌ عَلِيمٌ وَقَالَ لَهُمْ نِبِيُّهُمْ إِنَّ آيَةَ مُلْكِهِ أَن يَأْتِيَكُمُ التَّابُوتُ فِيهِ سَكِينَةٌ مِّن رَّبِّكُمْ وَبَقِيَّةٌ مِّمَّا تَرَكَ آلُ مُوسَى وَآلُ هَارُونَ تَحْمِلُهُ الْمَلآئِكَةُ إِنَّ فِي ذَلِكَ لآيَةً لَّكُمْ إِن كُنتُم مُّؤْمِنِينَ" A propos de Saül, suscité roi par Dieu pour les fils d'Israël, le prophète de l'époque (Samuel) dit à son peuple : "Le signe de sa royauté est que l'Arche viendra à vous - dans laquelle se trouve une sérénité, de la part de votre Seigneur, et un restant, de ce que Moïse et Aaron ont laissé - que les Anges porteront. Il y a en cela un signe pour vous, si vous êtes croyants" (Coran 2/247-248). Il s'agit du signe que c'est Dieu qui agrée (ridhâ) que ce soit Saül le roi : "قوله تعالى: وَقالَ لَهُمْ نَبِيُّهُمْ إِنَّ آيَةَ مُلْكِهِ، الآية: العلامة، فمعناه: علامة تمليك الله إياه أَنْ يَأْتِيَكُمُ التَّابُوتُ" (Zâd ul-massîr) : le signe de cela est qu'Il confère de la bénédiction à sa royauté, au point que l'Arche va retourner : "يقول نبيهم لهم: إن علامة بركة ملك طالوت عليكم أن يرد الله عليكم التابوت الذي كان أخذ منكم" (Tafsîr Ibn Kathîr).

Le "Âyah" se rapporte aussi bien aux idées simples (tassawwurât) qu'aux propos (tasdîqât).

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Dans le Coran, pour désigner "le signe", on trouve le terme : "آية", "Âyah" ; et pour désigner "la preuve", on trouve les termes : "آية", "Âyah" ; "بَيِّنَة", "Bayyina" ; "بُرْهَان", "Bur'hân" :

Le "آية" est :
- "شيء دالّ" : une chose qui est "dâll" (signifiant) ;
- "على شيء آخر - وهو المدلول" : (signifiant) du "madlûl" (sens, signifié) ;
- "من شخص" : et ce, de la part de celui qui a conféré à cette chose cette dalâla, signification ;
- "لـ / إلى شخص آخر - وهو المستدِلّ" : à destination du "mustadill", celui à qui la signification est adressée et qui doit être capable de faire istidlâl", en comprendre ce sens.

Parfois dans le Coran il est dit également que le signe se trouve "في ذلك الشيء" : "en cette chose".

Ainsi :
Marie et Jésus sont un signe pour les gens du monde entier : "وَالَّتِي أَحْصَنَتْ فَرْجَهَا فَنَفَخْنَا فِيهَا مِن رُّوحِنَا وَجَعَلْنَاهَا وَابْنَهَا آيَةً لِّلْعَالَمِينَ" (Coran 21/91).

"اسْلُكْ يَدَكَ فِي جَيْبِكَ تَخْرُجْ بَيْضَاء مِنْ غَيْرِ سُوءٍ وَاضْمُمْ إِلَيْكَ جَنَاحَكَ مِنَ الرَّهْبِ فَذَانِكَ بُرْهَانَانِ مِن رَّبِّكَ إِلَى فِرْعَوْنَ وَمَلَئِهِ" : Dieu dit à Moïse au sujet des deux miracles avec lesquels Il le suscitait et le dépêchait auprès de Pharaon : "Voilà deux preuves (bur'hân) de la part de Ton Seigneur à destination de Pharaon et de sa cour" (Coran 28/32).
Il est à noter que ces deux miracles sont, dans cet autre verset, présentés comme des "âyah" : "قَالَ أَلْقِهَا يَا مُوسَى فَأَلْقَاهَا فَإِذَا هِيَ حَيَّةٌ تَسْعَى قَالَ خُذْهَا وَلَا تَخَفْ سَنُعِيدُهَا سِيرَتَهَا الْأُولَى. وَاضْمُمْ يَدَكَ إِلَى جَنَاحِكَ تَخْرُجْ بَيْضَاء مِنْ غَيْرِ سُوءٍ آيَةً أُخْرَى لِنُرِيَكَ مِنْ آيَاتِنَا الْكُبْرَى" (Coran 20/19-23).

"إِنَّ فِي خَلْقِ السَّمَاوَاتِ وَالأَرْضِ وَاخْتِلاَفِ اللَّيْلِ وَالنَّهَارِ لآيَاتٍ لِّأُوْلِي الألْبَابِ الَّذِينَ يَذْكُرُونَ اللّهَ قِيَامًا وَقُعُودًا وَعَلَىَ جُنُوبِهِمْ وَيَتَفَكَّرُونَ فِي خَلْقِ السَّمَاوَاتِ وَالأَرْضِ رَبَّنَا مَا خَلَقْتَ هَذا بَاطِلاً سُبْحَانَكَ فَقِنَا عَذَابَ النَّارِ" : "Il y a, dans la création des cieux et de la Terre et dans l'alternance de la nuit et du jour, certes des signes pour les gens doués d'intelligence : ceux qui pensent à Dieu debout, assis et allongés et réfléchissent à la création des cieux et de la terre (et disent : ) "Seigneur, Tu n'as pas créé tout cela en vain..."" (Coran 3/190-191).

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Etymologie du terme "Âyah" (آية) :

Le terme a pour racine :

--- soit "أ ي ي" :
----- et soit le terme est alors un dérivé de "أَيّ", qui signifie "lequel", car le signe permet de distinguer tel individu de tel autre (Muf'radât ur-Râghib) ;
----- soit le terme est alors un dérivé de "تأيّيْ", qui signifie "s'établir", car ce qui indique quelque chose (son "signe") est forcément quelque chose qui est établi (Muf'radât ur-Râghib) ;

--- soit "أ و ي", qui signifie elle aussi : "s'établir", "prendre refuge à" (Muf'radât ur-Râghib).

C'est d'ailleurs en vertu de ces deux derniers sens étymologiques qu'une haute construction se dit "âyah" (puisque s'établissant à la vue de tous) ; on le voit au verset suivant, qui relate ce que Hûd dit à son peuple : "أَتَبْنُونَ بِكُلِّ رِيعٍ آيَةً تَعْبَثُونَ" (Coran 26/128) (Muf'radât ur-Râghib).

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Le terme a pour schème :

--- soit "فَاعِلَة" (An-Nihâya fî gharîb il-hadîth wa-l-athar, 1/95) : c'est l'avis de al-Kissâ'ï (Tafsîr Ibn Kathîr, Al-Muqaddima) ;

--- soit "فَعَلَة" (Al-Furûq al-lughawiyya, p. 70 ; An-Nihâya fî gharîb il-hadîth wa-l-athar, 1/95) : c'est l'avis de Sîbawayh (Tafsîr Ibn Kathîr, Al-Muqaddima) ;

--- soit "فَعْلَة" (Muf'radât ur-Râghib) ;

et a ensuite connu une modification lui ayant conféré la forme qu'on lui connaît.

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Les différents Signes (= Signifiants) ont des Signifiés différents :

Des signes de l'innocence du prophète Joseph (sur lui soit la paix) :
"ثُمَّ بَدَا لَهُم مِّن بَعْدِ مَا رَأَوُا الْآيَاتِ لَيَسْجُنُنَّهُ حَتَّىٰ حِينٍ" : "Puis il leur apparut approprié après qu'ils aient vu les signes – qu'ils devraient assurément l'emprisonner pendant un moment" (Coran 12/35). "أي علامات براءة يوسف - من قد القميص من دبر، وشهادة الشاهد، وحز الأيدي، وقلة صبرهن عن لقاء يوسف" (Tafsîr ul-Qurtubî).

Un signe, à l'adresse du prophète Zacharie de Abba (sur lui soit la paix), que son épouse était devenue enceinte, conformément à l'annonce qui lui avait été faite précédemment : "قَالَ رَبِّ اجْعَلْ لِي آيَةً قَالَ آيَتُكَ أَلَّا تُكَلِّمَ النَّاسَ ثَلَاثَةَ أَيَّامٍ إِلَّا رَمْزًا وَاذْكُرْ رَبَّكَ كَثِيرًا وَسَبِّحْ بِالْعَشِيِّ وَالْإِبْكَارِ" : "Il dit : "Seigneur, accorde-moi un signe." Il dit : "Ton signe est que tu ne parleras pas aux hommes pendant 3 jours, si ce n'est par geste"" (Coran 3/41) ; "قَالَ رَبِّ اجْعَل لِّي آيَةً قَالَ آيَتُكَ أَلَّا تُكَلِّمَ النَّاسَ ثَلَاثَ لَيَالٍ سَوِيًّا فَخَرَجَ عَلَىٰ قَوْمِهِ مِنَ الْمِحْرَابِ فَأَوْحَىٰ إِلَيْهِمْ أَن سَبِّحُوا بُكْرَةً وَعَشِيًّا" (Coran 19/10-11). "قوله تعالى: {رب اجعل لي آية} أي: علامة على وجود الحمل. وفي علة سؤاله آية قولان: أحدهما: (...). والثاني: أنه إنما سأل الآية على وجود الحمل ليبادر بالشكر وليتعجل السرور، لأن شأن الحمل لا يتحقق بأوله، فجعل الله آية وجود الحمل حبس لسانه ثلاثة أيام. (...). وجمهور العلماء على أنه إنما اعتقل لسانه آية على وجود الحمل. وقال قتادة والربيع بن أنس: (...)" (Zâd ul-massîr). "أي: علامة أعلم بها وقت حمل امرأتي، فأزيد في العبادة شكرا لك" (Tafsîr ul-Baghawî).

Un signe que la Kaaba a été bâtie par Abraham : le Maqâmu Ibrâhîm :
"إِنَّ أَوَّلَ بَيْتٍ وُضِعَ لِلنَّاسِ لَلَّذِي بِبَكَّةَ مُبَارَكًا وَهُدًى لِّلْعَالَمِينَ فِيهِ آيَاتٌ بَيِّنَاتٌ مَّقَامُ إِبْرَاهِيمَ وَمَن دَخَلَهُ كَانَ آمِنًا" : "La première maison qui ait été instituée pour les hommes [pour y adorer Dieu] est celle qui se trouve à Bakka, bénie et orientant les hommes du monde. En [ce Haram] se trouvent des signes évidents : le lieu où Abraham se tint debout ; et celui qui entre dans le (Haram) est en sécurité" (Coran 3/96-97) : "وقوله: {فيه آيات بينات} أي: دلالات ظاهرة أنه من بناء إبراهيم، وأن الله تعالى عظمه وشرفه" (Tafsîr Ibn Kathîr) ; "وقال ابن جرير: في الكلام إضمار، تقديره: منهن مقام إبراهيم. قال المفسرون: الآيات فيه كثيرة، منها مقام إبراهيم، ومنها: أمن من دخله، ومنها: امتناع الطير من العلو عليه، واستشفاء المريض منها به، وتعجيل العقوبة لمن انتهك حرمته، وإهلاك أصحاب الفيل لما قصدوا إخرابه، إلى غير ذلك" (Zâd ul-massîr).

Un signe que le Coran est un livre qui avait été annoncé dans les Livres antérieurs :
"وَإِنَّهُ لَفِي زُبُرِ الْأَوَّلِينَ أَوَلَمْ يَكُن لَّهُمْ آيَةً أَن يَعْلَمَهُ عُلَمَاء بَنِي إِسْرَائِيلَ" : "Et il se trouve (annoncé) dans les livres des premiers. N'est-ce pas un signe pour eux, que les savants des fils d'Israël le connaissent ?" (Coran 26/196-197).

Des Signes de la Toute-Puissance de Dieu :
"وَمِنْ آيَاتِهِ خَلْقُ السَّمَاوَاتِ وَالْأَرْضِ وَمَا بَثَّ فِيهِمَا مِنْ دَابَّةٍ وَهُوَ عَلَى جَمْعِهِمْ إِذَا يَشَاءُ قَدِيرٌ" : "Et parmi Ses Signes il y la création des cieux et de la Terre et ce qu'Il y a disséminé d'animaux. Et Il est capable, lorsqu'Il le voudra, de rassembler les (hommes et djinns)" (Coran 42/29) : "ومن آياته} الدالة على عظمته وقدرته العظيمة وسلطانه القاهر" (Tafsîr Ibn Kathîr).

Et bien d'autres choses encore...

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Pour ce qui est des Signes suscités par Dieu, ils sont de plusieurs types, selon le niveau d'"évidence de leur signification" :

Il existe en effet :
1) les Signes de niveau "ordinaire" ;
2) les Signes de niveau "extra-ordinaire" (au sens littéral du terme : "qui sortent de l'ordinaire").

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1) Les Signes de niveau "ordinaire" :

--- 1.1) Les Signes "ordinaires" qui sont placés dans le for intérieur de l'homme :

"وَفِي الْأَرْضِ آيَاتٌ لِّلْمُوقِنِينَ وَفِي أَنفُسِكُمْ أَفَلَا تُبْصِرُونَ" : "Et sur la Terre il est des signes pour ceux qui [choisissent de se laisser être] convaincus, ainsi qu'en vous-mêmes. Ne voyez-vous donc pas ?" (Coran 51/20-21). L'un des commentaires est que ces signes qui se trouvent en l'homme ne sont pas, ici, le fonctionnement harmonieux de son corps, mais ce que son cœur contient : "وقال قتادة: المعنى من سار في الأرض رأى آيات وعبرا؛ ومن تفكر في نفسه علم أنه خلق ليعبد الله" (Tafsîr ul-Qurtubî).

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--- 1.2) Les Signes "ordinaires" qui sont placés à l'extérieur de l'homme, et qu'il observe de ses yeux et analyse par sa raison :

"وَفِي الْأَرْضِ آيَاتٌ لِّلْمُوقِنِينَ وَفِي أَنفُسِكُمْ أَفَلَا تُبْصِرُونَ" : "Et sur la Terre il est des signes pour ceux qui [choisissent de se laisser être] convaincus, ainsi qu'en vous-mêmes. Ne voyez-vous donc pas ?" (Coran 51/20-21). Les Signes présents sur Terre sont extérieurs à l'homme.
"إِنَّ فِي خَلْقِ السَّمَاوَاتِ وَالأَرْضِ وَاخْتِلاَفِ اللَّيْلِ وَالنَّهَارِ لآيَاتٍ لِّأُوْلِي الألْبَابِ الَّذِينَ يَذْكُرُونَ اللّهَ قِيَامًا وَقُعُودًا وَعَلَىَ جُنُوبِهِمْ وَيَتَفَكَّرُونَ فِي خَلْقِ السَّمَاوَاتِ وَالأَرْضِ رَبَّنَا مَا خَلَقْتَ هَذا بَاطِلاً سُبْحَانَكَ فَقِنَا عَذَابَ النَّارِ" : "Il y a, dans la création des cieux et de la Terre et dans l'alternance de la nuit et du jour, certes des signes pour les gens doués d'intelligence : ceux qui pensent à Dieu debout, assis et allongés et réfléchissent à la création des cieux et de la terre (et disent : ) "Seigneur, Tu n'as pas créé tout cela en vain..."" (Coran 3/190-191).

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2) Les Signes de niveau "extra-ordinaire" :

Ils sont de deux sous-types : 2.1 et 2.2.
--- 2.1) Les Signes qui sont "extra-ordinaires" (ou : "exceptionnels"), sans être "suprêmes" :

Ils sont eux-mêmes de trois sous-catégories : 2.1.1, 2.1.2.A et 2.1.2.B...

----- 2.1.1) Le Signe "extra-ordinaire intérieur" consistant en le Ilm udh-Dharûra apparaissant dans le for intérieur :

C'est ce type de Signe qui a eu lieu avec Jokébed (la mère de Moïse), la conduisant à croire "vrai" le message intérieur qu'elle reçut, et qui lui dit de placer son bébé dans une corbeille et d'abandonner celle-ci dans le flot.
C'est encore ce type de Signe qui a eu lieu avec Marie (la mère de Jésus), l'amenant à croire que l'homme étant apparu devant elle était réellement - comme il le prétendait - un ange corporalisé.

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----- 2.1.2) Les Signes "extra-ordinaires extérieurs :

"وَقَالُوا لَوْلَا أُنزِلَ عَلَيْهِ آيَاتٌ مِّن رَّبِّهِ قُلْ إِنَّمَا الْآيَاتُ عِندَ اللَّهِ وَإِنَّمَا أَنَا نَذِيرٌ مُّبِينٌ. أَوَلَمْ يَكْفِهِمْ أَنَّا أَنزَلْنَا عَلَيْكَ الْكِتَابَ يُتْلَى عَلَيْهِمْ إِنَّ فِي ذَلِكَ لَرَحْمَةً وَذِكْرَى لِقَوْمٍ يُؤْمِنُونَ" (Coran 29/50-51).
"وَقَالُوا لَوْلَا يَأْتِينَا بِآيَةٍ مِّن رَّبِّهِ. أَوَلَمْ تَأْتِهِم بَيِّنَةُ مَا فِي الصُّحُفِ الْأُولَى" (Coran 20/133).

------- 2.1.2.A) Les Signes "extra-ordinaires extérieurs, et qui, étant paroles, sont audibles et compréhensibles" (cela correspond au type A cité plus bas) :

"فَاتَّقُوا اللَّهَ يَا أُوْلِي الْأَلْبَابِ الَّذِينَ آمَنُوا قَدْ أَنزَلَ اللَّهُ إِلَيْكُمْ ذِكْرًا رَّسُولًا يَتْلُو عَلَيْكُمْ آيَاتِ اللَّهِ مُبَيِّنَاتٍ لِّيُخْرِجَ الَّذِينَ آمَنُوا وَعَمِلُوا الصَّالِحَاتِ مِنَ الظُّلُمَاتِ إِلَى النُّورِ" : "Un Messager qui récite devant eux les Signes de Dieu, clarifiant, afin qu'il fasse sortir des ténèbres jusqu'à la lumière ceux qui [choisiront] d'apporter foi [en ces Signes] et de pratiquer les bonnes oeuvres [selon la voie tracée par ces Signes]" (Coran 65/10-11).
Les versets du Coran sont, de par leur forme textuelle ainsi que leur contenu : des signes, des preuves de leur origine divine.
Le contenu de ces signes audibles (Sam'î) :
--- n'est parfois pas appuyé par des arguments, mais est donné tel quel (Sam'î Mujarrad) ("Dieu informe que... !" / "Dieu a décrété que..."). Le reste du Coran étant prouvé par d'autres signes, et ces versets faisant partie du même Livre, le contenu de ces versets aussi s'en retrouve ainsi prouvé ;
--- et est d'autres fois accompagné (dans les Textes mêmes) d'un ou plusieurs arguments (cet argument étant parfois lui-même appelé "un Âya", "Signe", et ce avec un sens encore plus particulier) :
----- soit d'un argument Naqlî ("Tous les prophètes antérieurs ont enseigné cela"),
----- soit d'un argument Aqla-Qalbî ou 'Aqlî.

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------- 2.1.2.B) Les Signes "extra-ordinaires extérieurs, et qui sont visibles" (cela correspond au type B qui sera cité plus bas) :

Il existe ici deux niveaux encore :

---------- 2.1.2.B.a) le niveau des miracles créés que le Prophète Muhammad (sur lui soit la paix) a réalisés : la grande bénédiction apparue dans une petite quantité de nourriture ou d'eau ; la guérison instantanée par simple passage de sa main ; etc. ;

---------- 2.1.2.B.b) un niveau plus éclatant encore, comme le fait de transformer le mont Safâ en or, ou de faire apparaître une chamelle pleine, sortant d'une montagne ; c'est ce type de Signes, réclamés par les Quraysh, qui est visé par le verset suivant : "وَمَا مَنَعَنَا أَن نُّرْسِلَ بِالآيَاتِ إِلاَّ أَن كَذَّبَ بِهَا الأَوَّلُونَ وَآتَيْنَا ثَمُودَ النَّاقَةَ مُبْصِرَةً فَظَلَمُواْ بِهَا وَمَا نُرْسِلُ بِالآيَاتِ إِلاَّ تَخْوِيفًا" : "Et ne Nous a empêché d'envoyer ces Signes que le fait que les Premiers les ont traités de mensonges. Et Nous avions donné aux Thamûd la Chamelle comme [Signe] clairvoyant, puis ils commirent injustice sur elle. Et Nous n'envoyons les Signes que pour faire craindre" (Coran 17/59). "عن ابن عباس، قال: سأل أهل مكة النبي صلى الله عليه وسلم، أن يجعل لهم الصفا ذهبا، وأن ينحي الجبال عنهم فيزرعوا. فقيل له: "إن شئت أن تستأني بهم، وإن شئت أن نؤتيهم الذي سألوا، فإن كفروا أهلكوا كما أهلكت من قبلهم". قال: "لا، بل أستأني بهم." فأنزل الله عز وجل هذه الآية: {وما منعنا أن نرسل بالآيات إلا أن كذب بها الأولون وآتينا ثمود الناقة مبصرة" (Ahmad, 2333). "وما منعنا أن نرسل بالآيات" التي سألها كفار قريش {إلا أن كذب بها الأولون} فأهلكناهم" (Tafsîr ul-Baghawî) ; "وما منعنا إرسال الآيات" التي سألوها {إلا} تكذيب الأولين، يعني أن هؤلاء سألوا الآيات التي استوجب بتكذيبها الأولون العذاب، فلم يرسلها لئلا يكذب بها هؤلاء، فيهلكوا كما هلك أولئك. وسنة الله في الأمم أنهم إذا سألوا الآيات ثم كذبوا بها عذبهم" (Zâd ul-massîr) ; "وقوله: {وَمَا نُرْسِلُ بِالْآيَاتِ إِلَّا تَخْوِيفًا} أي: لم يكن القصد بها أن تكون داعية وموجبة للإيمان الذي لا يحصل إلا بها. بل المقصود منها التخويف والترهيب، ليرتدعوا عن ما هم عليه" (Tafsîr us-Sa'dî).

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--- 2.2) Les Signes "extra-ordinaires, de niveau suprême" :

"هَلْ يَنظُرُونَ إِلاَّ أَن تَأْتِيهُمُ الْمَلآئِكَةُ أَوْ يَأْتِيَ رَبُّكَ أَوْ يَأْتِيَ بَعْضُ آيَاتِ رَبِّكَ يَوْمَ يَأْتِي بَعْضُ آيَاتِ رَبِّكَ لاَ يَنفَعُ نَفْسًا إِيمَانُهَا لَمْ تَكُنْ آمَنَتْ مِن قَبْلُ أَوْ كَسَبَتْ فِي إِيمَانِهَا خَيْرًا قُلِ انتَظِرُواْ إِنَّا مُنتَظِرُونَ" : "Attendent-ils (pour croire) que leur viennent les anges, que leur vienne ton Seigneur ou que leur viennent certains signes de Ton Seigneur ? Le jour où certains signes de ton Seigneur viendront, la foi ne sera plus utile à une âme qui n'avait pas apporté foi auparavant ou n'avait pas acquis du bien dans sa foi" (Coran 6/158). Il s'agit du lever du soleil à l'ouest.
"لَعَلَّكَ بَاخِعٌ نَّفْسَكَ أَلَّا يَكُونُوا مُؤْمِنِينَ إِن نَّشَأْ نُنَزِّلْ عَلَيْهِم مِّن السَّمَاء آيَةً فَظَلَّتْ أَعْنَاقُهُمْ لَهَا خَاضِعِينَ" : "(...) Si Nous le voulions, Nous ferions descendre sur eux un signe, et leur cou resterait alors courbé devant celui-ci" (Coran 26/3-4).

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Petit croquis exposant la plupart de ces catégories :

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Et les Signes Extérieurs à l'homme sont de 2 types, selon qu'ils sont créés ou incréés :

A) des Signes prononcés par Dieu, révélés et audibles (آيات كلاميّة وسَمْعيّة) (ils correspondent au type 2.1.2.A) ;
B) des Signes créés par Dieu et visibles (آيات مخلوقة ومَرْئيّة).

– Les signes qui sont prononcés par Dieu, révélés et audibles (A), ce sont les signes du Coran, c'est-à-dire ce qu'on appelle "les versets du Coran". "Ayah" désigne chaque verset du Coran. Or, ce terme signifiant "signe", est-ce à dire que chaque verset du Coran est Mu'jiz ? ou bien la quantité Mu'jiz est-elle plus grande qu'un seul verset ? Il y a divergence sur le sujet. Je penche vers l'avis suivant : "يقع الإعجاز بكل سورة (طويلة كانت أو قصيرة)، أو بقدرها من الكلام" (Al-Itqân, p. 1017).

Quant aux signes qui sont du type B et, en même temps, du type 2.1.2, ils sont de deux sous-types : car ils consistent :
----- soit à connaître quelque chose qui n'est pas accessible au commun des humains ;
----- soit à réaliser quelque chose qui n'est pas réalisable par le commun des humains :
"والآيات: إما من باب العلم والخبر والمكاشفة، وإما من باب القدرة والتأثير والتصرف" (Al-Jawâb us-sahîh, 4/112).
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Lire ici un premier puis un second articles exposant ce que sont les miracles réalisés ainsi par des prophètes de Dieu.

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Les Signes du niveau : 1.2 (les Signes "ordinaires" qui sont créés à l'extérieur de l'homme, et qu'il observe de ses yeux et analyse par sa raison), comme les signes du niveau 2.1.2 (les Signes "extra-ordinaires de niveau non-suprême), ces deux types de Signes sont des Preuves, qui sont à même de conférer la certitude quant à leur signifié : 

Cependant, ces signes constituent vraiment des "preuves" (et confèrent donc la certitude) uniquement pour la personne qui raisonne sans voiler son cœur.

"أَفَلَمْ يَسِيرُوا فِي الْأَرْضِ فَتَكُونَ لَهُمْ قُلُوبٌ يَعْقِلُونَ بِهَا أَوْ آذَانٌ يَسْمَعُونَ بِهَا. فَإِنَّهَا لَا تَعْمَى الْأَبْصَارُ وَلَكِن تَعْمَى الْقُلُوبُ الَّتِي فِي الصُّدُورِ" : "N'ont-ils pas parcouru la terre afin d'avoir un cœur avec lequel ils raisonnent, ou des oreilles par lesquelles ils entendent ? Car ce ne sont pas les vues qui s'aveuglent, mais s'aveuglent les cœurs qui sont dans les poitrines" (Coran 22/46).
C'est d'après une des deux possibilités qu'il est ici question d'entendre la Révélation (Tafsîr Abi-s-Sa'ûd). Le passage parle des cités ayant été châtiées par Dieu, et au sujet desquelles il est demandé aux Arabes de les regarder, mais de les regarder en réfléchissant. Ce que chacun peut constater sur place, de ses yeux, il lui est demandé de :
--- comprendre les signes s'y trouvant (1.2) grâce à la lumière des Signes du cœur (1.1) ;
--- et comprendre les signes s'y trouvant (1.2) grâce à la lumière des Signes de la Révélation (2.1.2.A) (à savoir que c'est bien Dieu qui a détruit ces cités, parce que ses habitants Lui désobéissaient).
L'un comme l'autre demandent cependant que le cœur (1.1) ne se ferme pas.
Ce verset est donc à comprendre ainsi : "أَفَلَمْ يَسِيرُوا فِي الْأَرْضِ فَتَكُونَ لَهُمْ قُلُوبٌ يَعْقِلُونَ بِهَا [ما رأوه بالأبصار فعلموه بها] أَوْ آذَانٌ يَسْمَعُونَ بِهَا [الوحي، فيعلمونه بالوحي، فيقبلونه بقلوبهم فيعقلون بها ما رأوه بالأبصار]. فَإِنَّهَا لَا تَعْمَى الْأَبْصَارُ وَلَكِن تَعْمَى الْقُلُوبُ الَّتِي فِي الصُّدُورِ".

Par contre, pour la personne qui les appréhende avec sa raison pure, il n'y a là que des "indices" : en effet, même par rapport à la raison pure, ce sont pas des choses neutres ; cependant, à la raison pure elles ne peuvent pas conférer la certitude.
Pourquoi ? Parce que cela s'adresse à al-'Aql bi-l-Qalb, et pas à la al-'Aql  ul-Mujarrad.
Pourquoi cela ? Parce que Dieu a fait que la foi ne se bâtit que sur l'Invisible. Et le jour où apparaîtront certains signes visibles extrêmes (du type 2.2), la foi ne sera plus valable, car n'en étant plus une : la foi est sur l'invisible, pas sur le visible.

La raison humaine et le "cœur" humain ne constituent pas une seule, mais deux facultés différentes. Lire à ce sujet mes deux articles :
--- Corps et Ame - Quelle différence y a-t-il entre les termes "Rûh" et "Nafs", si les deux désignent l'"Ame" ? - Et quelle différence entre "Rûh" et "Qalb" ? ;
--- Est-ce le cerveau, ou bien le cœur, qui est le siège de la raison ?.

"Il est le Premier, le Dernier, l'Apparent et le Caché..." (Coran 57/2) : les Signes que Dieu a mis en place font (pour qui ne ferme pas son cœur à eux) que Son Existence est évidente : Il est donc l'Apparent. Mais Son Etre n'est pas visible aux humains pendant cette vie terrestre, et Il est le Caché ; ceci d'autant plus que les Signes qu'Il a mis en place ne sont logiquement pas contraignants. (Ce commentaire est l'une des explications existant de ce verset : cf. Tafsîr ul-Jalâlayn. Ibn Taymiyya est d'un autre avis à propos du commentaire de ce verset.)

– Il s'agit ainsi de regarder le Livre de l'Univers et d'y découvrir les signes (1.2), mais de le faire à cœur ouvert (réceptif). "وَكَأَيِّن مِّن آيَةٍ فِي السَّمَاوَاتِ وَالأَرْضِ يَمُرُّونَ عَلَيْهَا وَهُمْ عَنْهَا مُعْرِضُونَ" : "Et combien y a-t-il de signe dans les cieux et sur la Terre, près duquel ils passent en en étant détournés !" (Coran 12/105). "Ils ont un cœur (mais) ne raisonnent pas avec lui" (Coran 7/179). "Ils ne connaissent que chose apparente de la vie de ce monde, et ils sont, eux, insouciants de la vie dernière" (Coran 30/7).

– Il s'agit également d'entendre le Livre de la Révélation et ses signes (2.1.2.A), mais, encore une fois, de le faire à cœur ouvert. "وَيْلٌ لِّكُلِّ أَفَّاكٍ أَثِيمٍ يَسْمَعُ آيَاتِ اللَّهِ تُتْلَى عَلَيْهِ ثُمَّ يُصِرُّ مُسْتَكْبِرًا كَأَن لَّمْ يَسْمَعْهَا فَبَشِّرْهُ بِعَذَابٍ أَلِيمٍ" : "Malheur à tout calomniateur fautif : il entend les Signes de Dieu être récités devant lui, ensuite il insiste à être orgueilleux, comme s'il ne les avait pas entendus" (Coran 45/7-8).

Cela car les signes que l'homme découvre et voit dans le Livre de l'Univers, comme ceux qu'il découvre et entend du Livre de la Révélation, ne feront d'effet sur lui que :
--- si, en même temps qu'il les appréhende par sa raison, il ne voile pas son cœur ;
--- en d'autres termes : s'il laisse ces signes de Dieu, présents à l'extérieur de lui – les signes présents dans le Livre de l'univers comme ceux présents dans le Livre de la révélation –, rencontrer l'aspiration vers Dieu, présente à l'intérieur de lui.

Si l'homme laisse son cœur s'ouvrir et lit ces signes, alors il peut ensuite, dans un phénomène d'aller-retour entre les signes extérieurs, trouver dans les signes du Livre de l'univers, qu'il découvre au fur et à mesure, confirmation de la véracité des signes qu'il a acceptés comme tels dans le Livre de la révélation : "سَنُرِيهِمْ آيَاتِنَا فِي الْآفَاقِ وَفِي أَنفُسِهِمْ حَتَّى يَتَبَيَّنَ لَهُمْ أَنَّهُ الْحَقُّ" : "Nous allons leur montrer Nos signes dans les horizons et en eux-mêmes, jusqu'à ce qu'il leur apparaisse que ceci [= ce Coran] est la vérité" (Coran 41/53).

Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

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