Dieu est Jaloux de Sa Grandeur, par rapport au fait qu'une créature la revendique pour elle aussi (إن الله غيور على عظمته أن ينازعه إياها أحد من خلقه). Et Il est Jaloux au sujet de Sa créature, quant au culte que celle-ci rend (والله غيور على مخلوقه أن يعبد غيره) - Qu'est-ce que la Ghayra (الغيرة) ? - Et entre époux, la Ghayra (la Jalousie) est-elle une bonne chose ? quelle Ghayra ?

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I) Que signifie le terme "Ghayra" ?

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"Ghayra" est un mot de la langue arabe qui signifie...

Le mot arabe Ghayra signifie : Jalousie ; mais, attention, cela reste différent de la Jalousie dite : Hassad (même si, comme nous le verrons au fil de l'article, certaines expressions de Ghayra correspondent à de la Hassad).

La Ghayra désigne en fait : la "Anafa" - la fierté - et la "Hamiyya" - l'ardeur - : "غيور": هو فعول، من الغيرة وهي الحمية والأنفة" (An-Nihâya, Ibn ul-Athîr). "وأصل الغيرة: الحمية والأنفة" (Rawdhat ul-muhibbîn, p. 264).

La Ghayra implique, en amont, la Mahabba : l'amour pour un être (Rawdhat ul-muhibbîn, p. 264) : soi-même, ou autre que soi...
Et la Ghayra implique, en aval, la Himâya / Man' / Sawn : le fait de préserver quelqu'un de quelque chose (Fath' ul-bârî, 2/684-685).

Cette Ghayra - Jalousie - consiste en fait en une Anafa - amour-propre, ou bien amour de fierté vis-à-vis d'un autre être -, lequel amour entraîne qu'on veut prémunir - Himâya / Man' / Sawn - soi-même, ou cet être aimé, de quelque chose qu'on estime gênant. "وأما في حق الله فقد جاء مفسرا في الحديث: "وغيرة الله تعالى أن يأتي المؤمن ما حرمه الله عليه" أي أن غيرته منعه وتحريمه" (Tuhfat ul-ahwadhî, 9/357).

Au cas où cette chose dont on cherchait à se prémunir (ou à prémunir cet être) se réalise malgré tout, par rapport à soi ou à cet être aimé, la Ghayra entraîne un mécontentement - Ghadhab - ; c'est pourquoi le terme "Ghayra" désigne parfois, par incidence, ce type de Ghadhab précis (Fath' ul-bârî, 9/397).
"Hamiyya" veut d'ailleurs dire justement : Ghadhab (Al-Muf'radât, al-Asfahânî).

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En français aussi...

En français aussi on trouve le mot "Jalousie" pour désigner à la fois :
la même chose (ou presque) que le mot arabe "
Hassad" ("dépit face à ce dont autrui jouit"),
– et la même chose (ou presque) que le mot arabe "
Ghayra" ("farouche attachement à quelque chose").

Le fait est que...
certes, aujourd'hui, en français, "Jalousie" veut le plus souvent dire : "Dépit ressenti vis-à-vis de ce dont autrui jouit" (comme dans : "Il est jaloux de ta réussite financière / sociale").

Cependant, le terme "Jalousie" a aussi d'autres sens :
--- "Vif désir pour quelque chose" ("Je suis jaloux d'acquérir votre estime") (emploi aujourd'hui vieilli) ;
--- "Farouche attachement à quelque chose" ("Il est jaloux de ses opinions" ; "Il est jaloux de sa liberté" ; "Il garde jalousement ce secret") ;
--- "Amour intense pour un être, qui entraîne un sentiment d'exclusivité, qui abhorre le fait que cet être aimé puisse tromper l'amoureux" ("C'est un mari jaloux au point qu'il ne supporte pas que son épouse réponde au téléphone fixe de la maison").

Voici ce qu'on lit en substance dans le Dictionnaire historique de la langue française (sous la direction de Alain Rey) :
A l'origine du mot "Jalousie" il y a le mot grec "zêlos", lequel a donné le latin "zelus", d'où provient le "zelosus" ayant donné en français ce fameux "jaloux".
Or "zêlos" signifie : "empressement, ardeur, rivalité, envie".
De là, son dérivé latin "zelus" a donné en français le mot "zèle" (où l'on retrouve les sens d'empressement et d'ardeur). Et c'est dans le mot "jaloux" d'après son sens le plus répandu qu'apparaît le sens "envie". Alors que dans ce mot "jaloux" d'après les autres sens, on retrouve le sens "ardeur" (cf. Dictionnaire historique de la langue française).

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Le terme arabe Ghayra s'emploie ainsi :
- "غار فلانٌ"
- "لـشيء"
- "على شيء"
- "في كيت",
- "من كيت".
Il s'emploie avec les particules :

"Li", qui introduit ce en faveur de quoi la Ghayra s'exerce : l'objet de son amour : soi-même, ou un autre être ;
"'Alâ", qui introduit ce au sujet de quoi la Ghayra s'exerce : ce, ou celui que, on désire prémunir, par rapport à ce qui gêne ;
parfois "", qui introduit le domaine qui est concerné, chez l'être que l'on désire préserver ;
"Min", qui introduit ce par rapport à quoi la Ghayra s'exerce : ce dont on désire se prémunir ou prémunir / celui qu'on perçoit comme un rival quant au domaine concerné par la Ghayra.

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J'ai cru distinguer 4 formes de Ghayra (والله أعلم) ; nous les verrons donc, plus bas, en II :

--- La "A" : "غيرة الشخص - أي أنفته - للمحبوب، من أن يؤذيه أحد" : "la Ghayra en faveur de quelqu'un d'aimé, par rapport au fait que quelque chose de mal l'atteigne".
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--- La "B" : "غيرة الشخص - أي أنفته - للمحبوب، فعليه، من أن يرتكب الفاحشة
" : "la Ghayra en faveur de quelqu'un d'aimé, par rapport au fait que lui-même puisse s'adonner à commettre des actions mauvaises et graves" (ici on trouve immédiatement la notion d'empêchement).
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--- La "C" : "غيرة الشخص - أي أنفته - لنفسه، على ما هو محبوب له - في نفسه أو في غيره -، من أن يحاول أحد مشاركته في ذلك الشيء المحبوب المختصّ به" :
"la Ghayra en faveur de soi-même, au sujet de ce que, chez soi-même, ou chez un autre être qu'on aime, on estime être réservé à soi, par rapport au fait que quelqu'un d'autre puisse nous le disputer".
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--- Et la "D" : "غيرة الشخص - أي أنفته - لنفسه، على من يدّعي أنه يُحبّه (وهو في الجملة محبوب أيضًا)، من أن يبذل ذلك المُحبّ لغير ذلك الشخص ما يظن ذلك الشخص أنه مختصّ به من ذلك المُحبّ" :
"la Ghayra en faveur de soi-même, au sujet de ce que, chez un être qui prétend nous aimer, on estime être réservé à soi, par rapport au fait que cet être puisse donner cela à autre que soi".

Voici les écrits de Ibn ul-Qayyim à partir desquels j'ai synthétisé ce que je viens d'exposer :

--- "والغيرة نوعان: غيرة للـمحبوب، وغيرة عليه" (Rawdhat ul-muhibbîn, p. 264).

A) "فأما الغيرة لـه [ألف]، فهي الحمية له والغضب له إذا استهين بحقه وانتقصت حرمته وناله مكروه من عدوه، فيغضب له المحب ويحمى، وتأخذه الغيرة له بالمبادرة إلى التغيير ومحاربة من آذاه؛ فهذه غيرة المحبين حقا. وهي من غيرة الرسل وأتباعهم لله مـمن أشرك به واستحل محارمه وعصى أمره" (Ibid., p. 264).

B)"ومن غيرته تعالى لـعبده وعليـه [ب يحميه مما يضره في آخرته كما في الترمذي وغيره مرفوعا إن الله يحمي عبده المؤمن من الدنيا كما يحمي أحدكم مريضه من الطعام والشراب وفي الصحيحين أن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال في خطبة الكسوف: "والله يا أمة محمد ما أحد أغير من الله أن يزني عبده أو تزني أمته" (Ibid., p. 265).

C) "وأما الغيرة على المحبوب [أي غيرة المحب على محبوبه]، فهي أنفة المحب وحميته أن يشاركه في محبوبه غيره. وهذه أيضا نوعان: غيرة المحب أن يشاركه غيره في محبوبه [ج" (Ibid., p. 264).
"الغيرة [أي غيرة المحب على محبوبه] ] غيرتان: غيرة على الشيء، وغيرة من الشيء. فالغيرة على المحبوب حرصك عليه. والغيرة من المكروه أن يزاحمك عليه. فالغيرة على المحبوب لا تتم إلا بالغيرة من المزاحم" (Al-Fawâ'ïd, p. 69).
الغيرة [أي غيرة المحب على محبوبه] ] نوعان: غيرة من الشيء، وغيرة على الشيء. والغيرة من الشيء هي كراهة مزاحمته ومشاركته لك في محبوبك. والغيرة على الشيء هي شدة حرصك على المحبوب أن يفوز به غيرك دونك أو يشاركك في الفوز به" (Madârij us-sâlikîn 3/45).

D) "وغيرة المحبوب على محبه [د] أن يحب معه غيره" (Rawdhat ul-muhibbîn, p. 264).

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On remarquera que :
--- dans ces 4 types de Ghayra (A, B, C et D), on retrouve la notion d'amour et proximité : d'après l'une des deux étymologies, le terme "ghayra" provient justement de "تغيّر" ("taghayyur"), pour : "changement dans son état suite à la Hamiyya et la Anafa" (FB 2/684) ;
--- et, dans les cas B et C, il y a également la notion d'exclusivité (ikhtissâs) ; d'après l'autre étymologie, le terme "ghayra" provient de "غير" ("ghayr"), "autre" : la ghayra est le sentiment qui survient par rapport à quelqu'un d'autre qui pourrait s'immiscer, ou être associé (même sans le vouloir), dans ce qui est exclusivement pour soi : "مزاحمة الغير" (Al-Istiqâma, 2/11) ; "الغيرة: كراهة شركة الغير في حقه" (At-Ta'rîfât, al-Jurjânî).

Par ailleurs, ci-après...
Le "1" désignera la question de la Ghayra de Dieu.
Le "2" désignera la question de la Ghayra de la créature en relation avec Dieu (soit pour Lui, soit à Son Sujet).
Et le "3" : la question de la Ghayra d'une créature en relation avec une autre créature (soit pour elle, soit à son sujet).

Enfin...
– Le petit "a" désignera le cas de fausse exclusivité : l'exclusivité que quelqu'un supposait, alors qu'il n'a en réalité pas d'exclusivité sur la chose aimée.
– Alors que le petit "b" désignera le cas de réelle exclusivité, reconnue telle ('aqlan aw shar'an).

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Parfois, cependant, différemment de tout ce qui précède, le verbe "Ghâra" ("avoir de la Ghayra") sous-entend  tadhmîn le verbe "Ghadhiba" ("être mécontent") aussi (ce Mécontentement étant, dans certains cas, la conséquence de la Ghayra : nous l'avons vu plus haut).
Alors, le verbe "Ghâra" s'emploie avec la particule :

"'Alâ", laquelle introduit cette fois : ce à l'encontre de qui le Ghadhab (pour cause de Ghayra) s'exerce.

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"Dieu a de la Ghayra" (إن الله يغار) : cela n'est pas à appréhender au sens figuré, mais bien au sens propre. Cependant, comme pour toutes les Sifât de Dieu, on ne cherche pas le "comment", car notre raison ne peut pas connaître la réalité (kun'h) de Dieu : rien ne ressemble à Dieu, ni en Son Etre, ni en Ses Attributs, ni en Ses Actes.

"والغيرة من صفات الرب جل جلاله. والأصل فيها قوله تعالى {قُلْ إِنَّمَا حَرَّمَ رَبِّيَ الْفَوَاحِشَ مَا ظَهَرَ مِنْهَا وَمَا بَطَنَ}" (Rawdhat ul-muhibbîn, pp. 264-265).

Les termes qualificatifs employés par Dieu à Son Sujet dans le Coran, ou par Son Messager dans la Sunna, il faut :
– les employer tels quels, sans penser qu'ils pourraient signifier autre chose que leur sens premier ;
– tout en se décentrant des créatures chez qui on voit la Réalité à laquelle ce sens correspond, pour ne pas imaginer cette même Réalité chez Dieu.

Ce petit exercice de la raison est ce qui ressort des célèbres propos de grands et anciens ulémas cités (entre autres) par at-Tirmidhî :
– "أمِرُّوها بلا كيف" ;
"يؤمن بها ولا يتوهم ولا يقال كيف".
(Lire : Les termes que Dieu a employés pour Se Qualifier, Dieu les a employés à Son Sujet avant même d'avoir créé l'homme. Ces termes sont à appréhender au sens propre.).

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On ne peut pas avoir de la Ghayra 'alallâh (soit les cas numérotés ci-après : B.2, C.2 et D.2) :

Ibn ul-Qayyim écrit ainsi :
"فـالغيرة على المحبوب لا تتم إلا بالغيرة من المزاحم؛ وهذه تحمد حيث يكون المحبوب تقبح المشاركة في حبه كالمخلوق. وأما من تحسن المشاركة في حبه كالرسول والعالم بل الحبيب القريب سبحانه، فلا يتصور غيرة المزاحمة عليه، بل هو حسد" (Al-Fawâ'ïd, p. 69).
"وأما الغيرة على المحبوب، فإنما تحمد حيث يحمد الاختصاص بالمحبوب ويذم الاشتراك فيه شرعا وعقلا، كغيرة الإنسان على زوجته وأمته والشيء الذي يختص هو به فيغار من تعرض غيره لذكره ومشاركته له فيه. وهذه الغيرة تختص بـالمخلوق، ولا تتصور في حق الخالق. بل المحب لربه يحب أن الناس كلهم يحبونه ويذكرونه ويعبدونه ويحمدونه؛ ولا شيء أقر لعينه من ذلك، بل هو يدعو إلى ذلك بقوله وعمله. ولما لم يميز كثير من الصوفية بين هاتين الغيرتين، وقع في كلامهم تخبيط قبيح، وأحسن أمره أن يكون من السعي المغفور لا المشكور. وكان بعض جهلتهم إذا رأى من يذكر الله أو يحبه يغار منه؛ وربما سكته إن أمكنه، ويقول: "غيرة الحب تحملني على هذا". وإنما ذلك حسد وبغي وعدوان ونوع معادة لله ومراغمة لطريق رسله أخرجوها في قالب الغيرة، وشبهوا محبة الله بمحبة الصور من المخلوقين" (Rawdhat ul-muhibbîn, p. 246).
"وأما الغيرة على الله: فأعظم الجهل وأبطل الباطل، وصاحبها من أعظم الناس جهلا؛ وربما أدت بصاحبها إلى معاداته وهو لا يشعر، وإلى انسلاخه من أصل الدين والإسلام؛ وربما كان صاحبها شرا على السالكين إلى الله من قطاع الطريق؛ بل هو من قطاع طريق السالكين حقيقة، وأخرج قطع الطريق في قالب الغيرة. وأين هذا من الغيرة لله، التي توجب تعظيم حقوقه وتصفية أعماله وأحواله لله؟ فالعارف يغار لله؛ والجاهل يغار على الله. فلا يقال: "أنا أغار على اللهولكن: "أنا أغار لله" (Madârij us-sâlikîn, 3/45-46).

Al-Qushayrî a lui aussi écrit que la Ghayra 'alallâh est interdite : "والواجب أن يقال: الغيرة غيرتان: غيرة الحق سبحانه على العبد؛ وهو أن لا يجعله للخلق فيضن به عليهم. وغيرة العبد للـحق؛ وهو أن لا يجعل شيئا من أحواله وأنفاسه لغير الحق تعالى. فلا يقال: "أنا أغار على الله تعالى ولكن يقال: "أنا أغار لله تعالى". فإذن الغيرة على الله جهل، وربما تؤدي إلى ترك الدين. والغيرة لله تعالى توجب تعظيم حقوقه وتصفية الأعمال له" (Ar-Rissâla al-qushayriyya) (également cité par Ibn ul-Qayyim : Rawdhat ul-muhibbîn, p. 278).

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II) Voici, en détail, les 4 formes sus-citées de Ghayra :

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A) "غيرة الشخص - أي أنفته - لما يظنّ (بحق أو بغير حق) أن له علاقة خاصة به، من أن يؤذيه أحد" : L'Affection qu'une personne éprouve pour un être ou une chose, et qui fait qu'elle désire le - ou la - préserver de ce qui l'offenserait. Par incidence, cela entraîne le Mécontentement de cette personne à l'encontre de qui agit mal envers l'être ou la chose aimé(e) : "غيرة الشخص - أي غضبه - على من يُسيء إلى ما يظن ذلك الشخص (بحق أو بغير حق) أن له علاقة خاصة به" :

L'homme qui agit injustement vis-à-vis de ce qui est considéré par cette personne comme lui étant cher, subit alors le mécontentement de cette personne.

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A.1) Ghayra de la part de Dieu en faveur d'une créature, par rapport au fait que quelqu'un lui fasse du mal (غيرة الله لعبده، من أن يؤذيه أحد) :

Le Prophète (sur lui la paix) a relaté que Dieu a dit :
"Celui qui se prend d'inimitié pour un ami à Moi, Je lui déclare la guerre.
Le serviteur ne peut se rapprocher de Moi par quelque chose qui Me soit plus aimé que (...) [lire la suite de cette phrase dans notre autre article].
Et Je n'hésite pas, au sujet de quelque chose que Je vais faire, autant que J'hésite au sujet de (reprendre) l'âme du croyant [= le pieux] : il n'aime pas la mort et Je n'aime pas lui faire du tort ; (mais) il n'y a pas pour lui d'alternative à la (mort)"
:
"عن أبي هريرة، قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "إن الله قال: "من عادى لي وليا فقد آذنته بالحرب. وما تقرب إلي عبدي بشيء أحب إلي مما افترضت عليه، وما يزال عبدي يتقرب إلي بالنوافل حتى أحبه، فإذا أحببته، كنت سمعه الذي يسمع به، وبصره الذي يبصر به، ويده التي يبطش بها، ورجله التي يمشي بها، وإن سألني لأعطينه، ولئن استعاذني لأعيذنه. وما ترددت عن شيء أنا فاعله ترددي عن نفس المؤمن: يكره الموت وأنا أكره مساءته" (al-Bukhârî, 6137). Ibn Hajar écrit : "زاد ابن مخلد عن ابن كرامة في آخره: "ولا بد له منه." ووقعت هذه الزيادة أيضا في حديث وهب" (Fat'h ul-bârî, 11/421).

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A.2) Ghayra de la part d'une créature en faveur de Dieu, de l'un de Ses prophètes ou de Son Dîn, par rapport au fait que quelqu'un en dise du mal ou le bafoue en pratique (غيرة العبد لله ولرسله ولدينه، من أن يسيء إليه أحد) :

–--- A.2') Par rapport au fait que quelqu'un en dise du mal :

La Ghayra est ici requise du Croyant.

Il faut ici d'une part que le propos tenu au sujet de Dieu, de Son Messager ou de Son Dîn, soit véritablement injuste (car parfois, l'ignorance de certains les fait réagir de façon épidermique à un propos figurant pourtant dans le Coran ou la Sunna). Et il faut d'autre part noter que, certes cette Ghayra est toujours requise en le Coeur, par contre, pour ce qui est de l'exprimer, il est nécessaire de savoir raison garder, afin de ne pas outrepasser en la matière ce que Dieu agrée en terme d'expression de cette Ghayra. Lire à ce sujet mon article : Face à un cas de dénigrement (Sabb) de Dieu, ou de l'un de Ses prophètes, cela nous fait de la peine au cœur, mais il faut savoir raison garder. Ainsi, en pays non-musulman, aucune sanction n'est applicable à qui a fait ainsi.

Par ailleurs, il est certes certaines expressions de cette Ghayra au sujet du Dîn qui sont réservées, parmi l'ensemble des Croyants, à seulement celui qui occupe telle fonction (par exemple le chef exécutif).
Cependant, il en est d'autres qui sont l'affaire de tous les croyants, ou de tous ceux des croyants qui possèdent les aptitudes requises ; ainsi, écrire pour défendre quelque chose du Dîn, cela ne peut pas être accaparé par un clan, lequel ne supporterait pas que ceux qui ne font pas partie de leur clan le fassent également, de leur côté (cela serait alors du hassad, interdit).

–--- A.2'') Par rapport au fait que le Dîn soit interprété de façon totalement erronée, ce qui constitue une falsification de ce Dîn :

La Ghayra est ici requise du Croyant.

Face à ceux qui prétendaient que la zakât n'était plus obligatoire depuis le décès du Prophète (sur lui soit la paix), Abû Bakr voulut ainsi empêcher cela. A Omar qui lui disait de temporiser, il lui est attribué la réponse suivante : "(Serais-tu quelqu'un qui était) fort dans la Jâhiliyya, (qui est devenu) mou dans l'Islam ? Le Prophète - que Dieu l'élève et le salue - a été repris et la révélation s'est interrompue" : "عن عمر بن الخطاب رضي الله عنه في قصة ذكرها قال: فقال عمر: والله لليلة من أبي بكر ويوم خير من عمر عمر، هل لك أن أحدثك بليلته ويومه؟ قال: قلت نعم يا أمير المؤمنين. قال: أما ليلته فلما خرج رسول الله صلى الله عليه وسلم هاربا من أهل مكة خرج ليلا فتبعه أبو بكر (...). وأما يومه فلما توفي رسول الله صلى الله عليه وسلم وارتدت العرب، فقال بعضهم: "نصلي ولا نزكي" وقال بعضهم: "لا نصلي ولا نزكي"، فأتيته ولا آلوه نصحا، فقلت: "يا خليفة رسول الله، تألف الناس وارفق بهم"، فقال: "جبار في الجاهلية خوار في الإسلام؟ فبماذا أتألفهم: أبشعر مفتعل أو بشعر مفترى؟ قبض النبي صلى الله عليه وسلم وارتفع الوحي، فوالله لو منعوني عقالا مما كانوا يعطون رسول الله صلى الله عليه وسلم لقاتلتهم عليه. قال: فقاتلنا معه، فكان والله رشيد الأمر. فهذا يومه" (Dalâ'ïl un-nubuwwa, al-Bayhaqî ; dha'îf jiddan d'après Zubayr Alî-za'ï) ; "(Serais-tu quelqu'un qui était) fort dans la Jâhiliyya, et (qui est devenu) mou dans l'Islam ? La révélation s'est terminée, et le Dîn est devenu complet ; sera-t-il (donc) diminué alors que je suis vivant ?" : "لي: "أجبار في الجاهلية وخوار في الإسلام؟ إنه قد انقطع الوحي وتم الدين، أينقص وأنا حي؟" (Mishkât ul-massâbîh, 6034).

–--- A.2''') Par rapport au fait que, dans la pratique, et de façon ouverte, le Dîn soit bafoué, dans le sens où le mal domine le bien :

Il y a ici 2 cas : غيرة العبد لـربه نوعان أيضا: غيرة من نفسه، وغيرة من غيره. فالتي من نفسه أن لا يجعل شيئا من أعماله وأقواله وأحواله وأوقاته وأنفاسه لغير ربه. والتي من غيره أن يغضب لمحارمه إذا انتهكها المنتهكون، ولحقوقه إذا تهاون بها المتهاونون" (Madârij us-sâlikîn, 3/45) :

–--- le cas du mal que sa propre personne commet ouvertement :

La Ghayra est ici requise du Croyant.
Cela est même requis prioritairement par rapport aux autres personnes : on devrait être soucieux que soi-même on ne commette pas d'offenses pratiques vis-à-vis de Dieu, davantage qu'on l'est quant à autrui... sauf si, sous couvert de Ghayra li Dîn-illâh, le souci pour le Dîn constitue en réalité le souci de s'élever au-dessus des autres en entretenant le sentiment d'être leur gardien. "وغيرة العبد من نفسه أهم من غيرته من غيره. فإنك إذا غرت من نفسك، صحت لك غيرتك لله من غيرك. وإذا غرت له من غيرك ولم تغر من نفسك، فالغيرة مدخولة معلولة ولا بد. فتأملها وحقق النظر فيها" (Madârij us-sâlikîn, 3/46).

–--- le cas du mal qu'autre que soi commet ouvertement :

La Ghayra est, ici aussi, requise du croyant.

En cas de commission d'une action bafouant le Dîn ullâh, le sentiment de peine face à la commission d'un tel acte est toujours requis en son coeur. Quant à exprimer alors sa désapprobation, il faut pour cela soupeser Maslaha et Mafsada ; lire à ce sujet mes articles :
--- au sujet du Nah'y 'an il-munkar ;
--- traitant du Inkâr 'ala-l-munkar ;
--- Dénoncer, ou bien garder le silence ? Inkâr, Mudârâh, Mudâhana.

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A.3) Ghayra de la part d'une créature en faveur d'une autre créature, par rapport au fait qu'une troisième créature agisse injustement envers elle (غيرة العبد للعبد، من أن يظلمه أحد) :

La Ghayra est requise du Croyant.

Quant au Mécontentement, cela est requis dès lors qu'il y a une véritable injustice. Cela est toujours requis dans le Coeur. Quant à l'exprimer, il faut pour cela que cela n'entraîne pas de Mafsada plus grande que celle qui existe.
Par ailleurs, il faut également mesure garder, car, parfois, celui qui subit l'injustice a (par exemple) un père qui prendra sa défense : il ne faut alors pas s'en mêler.

Lorsque Alî ibn Abî Tâlib (que Dieu l'agrée) voulut prendre comme seconde épouse la fille de Abû Jahl, ennemi acharné de l'islam, son épouse Fâtima la fille du Prophète - que Dieu l'agrée) vint voir son père et lui dit : "Les gens de ton clan prétendent que tu ne te mets pas en colère pour tes filles ! Voilà Alî qui veut se marier avec la fille de Abû Jahl." Le Prophète (sur lui soit la paix) fit alors un discours (...) : "عن المسور بن مخرمة، قال: إن عليا خطب بنت أبي جهل، فسمعت بذلك فاطمة، فأتت رسول الله صلى الله عليه وسلم، فقالت: "يزعم قومك أنك لا تغضب لبناتك! وهذا علي ناكح بنت أبي جهل. فقام رسول الله صلى الله عليه وسلم" (al-Bukhârî, 3523, Muslim 2449).
Ici, cette "Colère" réclamée par Fâtima de la part de son père, c'était de la Ghayra de la part de ce père (Al-Istiqâma, 2/9).

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B) "غيرة الشخص - أي أنفته - لمن يظن (بحق أو بغير حق) أنه من خاصّته، فعليه، من أن يرتكب الفاحشة" : Le sentiment de Proximité qu'une personne éprouve pour un être, qui fait que la première veut préserver la seconde de s'abaisser à commettre des actes mauvais. Par incidence, cela entraîne du Mécontentement à l'égard de cet être proche lorsqu'il s'adonne à de tels actes : "غيرة الشخص - أي غضبه - على من يظن (بحق أو بغير حق) أنه من خاصّته، إذا ارتكب الفاحشة" :

Le mécontentement de la personne est alors dirigé vers l'homme qui est son proche et qui s'adonne à des actions mauvaises (il ne s'agit pas, ici, du fait que son conjoint donne à autrui ce qui est réservé à soi, s'adonnant donc à l'adultère – comme ce sera le cas en D.3 – ; ici il s'agit du fait que son proche parent, ou son serviteur, bref un humain qu'on aime, s'adonne à des actes mauvais).

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B.1) Ghayra de la part de Dieu, en faveur de, et au sujet d'une créature, par rapport à des actes mauvais qu'elle pourrait commettre (غيرة الله لعبده، فعليه، من أن يرتكب الفاحشة) :

C'est cela qui est évoqué explicitement au sujet de Dieu dans les hadîths suivants (où il est question d'actions, souligne Ibn Taymiyya : Al-Istiqâma, 2/12) : Dieu aime globalement Ses créatures (du genre humain) et souhaite donc qu'elles se préservent de faire ce qui est mauvais (fâhisha). Le terme "fâhisha" peut désigner ici la fornication seulement, ou bien tous les grands péchés : ces deux commentaires existent au sujet de la formule présente dans le Coran - et que l'on retrouvera dans 2 des hadîths qui suivront plus bas - : "الْفَوَاحِشَ مَا ظَهَرَ مِنْهَا وَمَا بَطَنَ" : Coran 6/151, 7/33 : voir Tafsîr ut-Tabarî, Zâd ul-massîr, etc.) (il y a aussi la formule coranique suivante : "يَجْتَنِبُونَ كَبَائِرَ الْإِثْمِ وَالْفَوَاحِشَ" : Coran 42/37, 53/32 : "وقيل: الفواحش والكبائر بمعنى واحد، فكرر لتعدد اللفظ، أي يجتنبون المعاصي لأنها كبائر وفواحش" : Tafsîr ul-Qurtubî).

Ces actes ont été créés par Dieu : "mauvais pour l'homme" ; et c'est à cause de ce caractère intrinsèque que Dieu les a déclarés, dans Sa révélation faite à Ses Messagers : "interdits pour l'homme" : Il veut les préserver de faire ce qui est mauvais et grave.

Dans les hadîths ci-après, il s'agit en effet de Ghayra dans le sens de ce qui implique la Himâya / Man' / Sawn (prémunir) : parce qu'Il aime l'être humain en soi et qu'Il a de la Miséricorde pour lui, Dieu veut le prémunir de s'abaisser à commettre des actions mauvaises et graves, et Il les lui a donc interdites (Tashrî')...

- Hadîth avec Sa'd ibn 'Ubâda (le début de ce hadîth sera cité plus bas, en C.3) : "(...) Et Dieu a plus de Ghayra que moi ; c'est à cause de Sa Ghayra qu'Il a interdit (à l'homme) de faire les actions mauvaises, les extérieures et les intérieures. Personne n'aime plus enlever toute excuse que Dieu ; c'est à cause de cela qu'Il a dépêché les messagers et avertisseurs. Personne n'aime plus que l'on fasse ses éloges que Dieu ; c'est à cause de cela qu'Il a promis le Paradis" : "عن المغيرة، قال: قال سعد بن عبادة: "لو رأيت رجلا مع امرأتي لضربته بالسيف غير مصفح". فبلغ ذلك رسول الله صلى الله عليه وسلم فقال: "أتعجبون من غيرة سعد؟ والله لأنا أغير منه. والله أغير مني؛ ومن أجل غيرة الله حرم الفواحش ما ظهر منها وما بطن. ولا أحد أحب إليه العذر من الله؛ ومن أجل ذلك بعث المبشرين والمنذرين. ولا أحد أحب إليه المدحة من الله؛ ومن أجل ذلك وعد الله الجنة" (al-Bukhârî, 6980) ; "عن المغيرة بن شعبة، قال: قال سعد بن عبادة: "لو رأيت رجلا مع امرأتي لضربته بالسيف غير مصفح عنه". فبلغ ذلك رسول الله صلى الله عليه وسلم، فقال: "أتعجبون من غيرة سعد؟ فوالله لأنا أغير منه. والله أغير مني؛ من أجل غيرة الله حرم الفواحش، ما ظهر منها وما بطن؛ ولا شخص أغير من الله. ولا شخص أحب إليه العذر من الله؛ من أجل ذلك بعث الله المرسلين مبشرين ومنذرين. ولا شخص أحب إليه المدحة من الله؛ من أجل ذلك وعد الله الجنة" (Muslim, 1499).
- Hadîth relaté par Abdullâh : "Personne n'a davantage de Ghayra que Dieu ; c'est pourquoi Il a interdit (à l'homme) de faire les actions mauvaises, les extérieures et les intérieures. Et il n'y a rien qui aime plus les éloges que Dieu ; c'est pourquoi Il a fait les éloges de Lui-même" : "عن عبد الله رضي الله عنه، قال: "لا أحد أغير من الله؛ ولذلك حرم الفواحش ما ظهر منها وما بطن. ولا شيء أحب إليه المدح من الله؛ ولذلك مدح نفسه" (al-Bukhârî, 4358, Muslim, 2760).
- Hadîth relaté par Aïcha : "Ô Umma de Muhammad, par Dieu, personne n'a davantage de Ghayra que Dieu par rapport au fait que son serviteur ou sa servante commette la fornication" : "فخطب الناس، فحمد الله وأثنى عليه، ثم قال: "إن الشمس والقمر آيتان من آيات الله، لا يخسفان لموت أحد ولا لحياته، فإذا رأيتم ذلك، فادعوا الله، وكبروا وصلوا وتصدقوا". ثم قال: "يا أمة محمد، والله ما من أحد أغير من الله أن يزني عبده أو تزني أمته. يا أمة محمد والله لو تعلمون ما أعلم لضحكتم قليلا ولبكيتم كثيرا" (al-Bukhârî, 997, Muslim, 901).
- Hadîth relaté par Abû Hurayra : "Dieu a la Ghayra. Et la Ghayra de Dieu est (par rapport au fait) que le Croyant commette ce qui est interdit pour lui" : "عن أبي سلمة، أنه سمع أبا هريرة رضي الله عنه، عن النبي صلى الله عليه وسلم أنه قال: "إن الله يغار، وغيرة الله أن يأتي المؤمن ما حرم الله" (al-Bukhârî, 4925, Muslim, 2761) / "وغيرة الله أن لا يأتي المؤمن ما حرم الله" (FB 9/400).
- Hadîth relaté par Asmâ' bint Abî Bakr : "Et il n'y a rien qui ait davantage de Ghayra que Dieu" : "عن أسماء بنت أبي بكر حدثته أنها سمعت رسول الله صلى الله عليه وسلم يقول: "ليس شيء أغير من الله عز وجل" (Muslim, 2762).

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Dans une dimension plus poussée, Dieu, par Tawfîq et I'ânah (par Sa guidance et Son assistance), préserve concrètement (Takwînan) Son proche serviteur de s'éloigner de Lui et de tomber dans le shirk (akbar ou asghar) : Il le fait par Ghayra pour qui est proche de Lui et qu'Il aime particulièrement : "فأما غيرة الرب على عبده، فهي أن لا يجعله للخلق عبدا، بل يتخذه لنفسه عبدا، فلا يجعل له فيه شركاء متشاكسين، بل يفرده لنفسه ويضن به على غيره" (Madârij us-sâlikîn, 3/45). "غيرة الحق سبحانه على العبد؛ وهو أن لا يجعله للخلق، فيضن به عليهم" (Ar-Rissâla al-qushayriyya).

Un hadîth dit même : "Lorsque Dieu aime un serviteur, Il le préserve de ce monde comme l'un d'entre vous ne cesse de préserver de l'eau son (proche) malade" : "عن قتادة بن النعمان، أن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال: "إذا أحب الله عبدا حماه الدنيا كما يظل أحدكم يحمي سقيمه الماء" (at-Tirmidhî, 2036). Ibn ul-Qayyim a considéré cette Préservation comme relevant de la Ghayra de Dieu pour Son pieux serviteur (Rawdhat ul-muhibbîn, p. 265). "Le préserver de ce monde" ne signifie pas que les choses temporelles seraient mauvaises, mais que, Takwînan, Dieu fait en sorte que ce serviteur est préservé d'échouer dans la fitna-t-ud-dunyâ : l'épreuve que constituent les choses de ce monde ; Dieu le préserve de tomber dans l'attachement excessif aux choses de ce monde, pareil attachement constituant en soi du shirk asghar, et pouvant par ailleurs conduire à commettre des actions extérieures interdites.

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B.2) Ghayra de la part d'une créature, en faveur de, et au sujet de Dieu, par rapport à certains Actes que Dieu pourrait faire (غيرة العبد لله، فعليه، من أن يفعل بعض الأفعال) :

Cela est inimaginable, vu que tout ce que Dieu fait est parfait et est juste.

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B.3) Ghayra de la part d'une créature, en faveur de, et au sujet d'une autre créature, par rapport à des actes mauvais que celle-ci pourrait commettre (غيرة العبد لمحبوبه من المخلوقات، فعليه، من ارتكابه الفاحشة) :

Ce cas B.3 rejoint partiellement le cas A.2''', puisque commettre ce qui est mal (ici) revient à bafouer le Dîn de façon pratique (là-bas). Une subtile différence peut toutefois apparaître dans la mesure où, ici, il s'agirait davantage du cas où soi-même ou son proche commet une action interdite, mais pas de façon ouverte : l'action mauvaise est commise de façon sue (et pas en privé), mais ce n'est pas de façon ouverte ; et c'est en cela que ce cas B.3 diffère peut-être légèrement du cas A.2''' : là-bas était évoqué le cas où le Dîn est bafoué de façon ouverte.

–--- et cette "autre créature" est en fait... sa propre personne (il s'agit du fait que son constituant "'aql" reste attentif au sujet de son constituant "hawâ"  :

La Ghayra est ici requise du Croyant.
Elle est même requise prioritairement, en comparaison de la Ghayra pour et au sujet des proches. "وغيرة العبد من نفسه أهم من غيرته من غيره. فإنك إذا غرت من نفسك، صحت لك غيرتك لله من غيرك. وإذا غرت له من غيرك ولم تغر من نفسك، فالغيرة مدخولة معلولة ولا بد. فتأملها وحقق النظر فيها" (Madârij us-sâlikîn, 3/46).

A un niveau plus poussé, cette Ghayra du Croyant vis-à-vis de sa propre personne concerne le fait de ne pas vouloir qu'on se laisse aller à moment trop prolongé d'insouciance totale vis-à-vis de Dieu : "غيرة العبد من نفسه على نفسه: كغيرته من نفسه على قلبه، ومن تفرقته على جمعيته، ومن إعراضه على إقباله، ومن صفاته المذمومة على صفاته الممدوحة. وهذه الغيرة خاصية النفس الشريفة الزكية العلوية. وما للنفس الدنية المهينة فيها نصيب. وعلى قدر شرف النفس وعلو همتها تكون هذه الغيرة" (Madârij us-sâlikîn, 3/45). "والغيرة المحمودة في حقه أن يغار المحب على محبته له أن يصرفها إلى غيره، أو يغار عليها أن يطلع عليها الغير فيفسدها عليه، أو يغار على أعماله أن يكون فيها شيء لغير محبوبه، أو يغار عليها أن يشوبها ما يكره محبوبه من رياء أو إعجاب أو محبة لإشراف غيره عليها أو غيبته عن شهود منته عليه فيها" (Al-Fawâ'ïd, p. 69)

–--- et cette autre créature est autre que sa personne :

Cette Ghayra est requise du Croyant.
Il y a des degrés différents dans la proximité de cet autre, par rapport à ce Croyant : plus l'homme est proche de lui, plus il est attendu que ce Croyant a de la Ghayra à son égard, et veut que cet homme se préserve de commettre de tels actes ; et si cet homme en commet, c'est plus il est proche du Croyant que ce dernier en ressentira une Peine.

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C) "غيرة الشخص - أي أنفته - لنفسه، على ما هو محبوب له ويظن (بحق أو بغير حق) أنه خاصّ له، ممن يحاول مشاركته في ذلك الشيء المحبوب الخاصّ له". Le sentiment d'Exclusivité qu'une personne éprouve au sujet de ce dont elle pense que cela lui est propre, et dont elle ne veut pas qu'un autre être cherche à y prendre part. Par incidence, cela entraîne le Mécontentement de cette personne à l'encontre de celui qui cherche à prendre part dans ce qui lui est ainsi propre : "غيرة الشخص - أي غضبه - على من يحاول مشاركته في ما يظن (بحق أو بغير حق) أنه خاصّ له" :

Le mécontentement de la personne est alors dirigé vers l'humain qui essaie de prendre part dans ce qui est exclusivement réservé à elle.

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C.1) Ghayra de la part de Dieu, au sujet de ce qui Lui est propre (Sa Fierté, Sa Grandeur, Son caractère divin), par rapport à toute créature (غيرة الله على كبريائه، من أي مخلوق) :

Dieu a dit : "L'Extrême Puissance est Mon manteau, et l'(Extrême) Grandeur est Mon pagne : celui qui me dispute l'un des deux, Je le jetterai dans le Feu" : "عن أبي سعيد الخدري، وأبي هريرة قالا: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "العز إزاره، والكبرياء رداؤه؛ "فمن ينازعني، عذبته" (Muslim, 2620) ; "عن أبي هريرة - قال هناد: - قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: قال الله عز وجل: "الكبرياء ردائي، والعظمة إزاري؛ فمن نازعني واحدا منهما، قذفته في النار" (Abû Dâoûd, 4090) (الكبرياء هي الملك والسلطان والعزة). Dans ce hadîth, "manteau" et "pagne" ne sont évidemment pas à appréhender en leur sens propre, dans la mesure où Dieu ne revêt pas un manteau et un pagne ; et puis, si c'était ce que ce hadîth veut dire, il ne conclurait pas en disant qu'aucune créature ne doit disputer cela à Dieu, puisqu'il est évident qu'aucune créature ne pourrait disputer cela. Ici ce ne sont pas des mots recelant un sens qualificatif, comme c'était le cas pour Ghayra etc. En fait nous avons dans ce hadîth une formule à appréhender au sens figuré (c'est soit une tashbîh balîgh, soit une isti'âra tamthîliyya) : ce hadîth veut dire que l'Extrême Puissance et l'(Extrême) Grandeur sont deux Attributs que Seul Dieu possède et qu'Il ne permet à personne d'avoir. Et que la créature doit pour sa part faire preuve d'humilité (التواضع), car n'ayant pas une telle 'Azama. Quant à la créature qui se croit Kabîr (à ce niveau) et se croit 'Azîm (à ce niveau), c'est comme si elle disputait à Dieu ces deux Attributs ("معنى هذا الكلام أن الكبرياء والعظمة صفتان لله سبحانه اختص بهما، لا يشركه أحد فيهما، ولا ينبغي لمخلوق أن يتعاطاهما، لأن صفة المخلوق التواضع والتذلل. وضرب الرداء والإزار مثلاً في ذلك، يقول - والله أعلم -: كما لا يشرك الإنسان في ردائه وإزاره أحد، فكذلك لا يشركني في الكبرياء والعظمة مخلوق. والله أعلم" : Ma'âlim us-sunan). Exactement comme le hadîth qui dit que Khâlid ibn ul-Walîd "est une épée, parmi les épées de Dieu, que Dieu a dégainée contre les kâfir [qui sont en guerre]" : "عن عبد الله بن أبي أوفى، قال: شكى عبد الرحمن بن عوف خالد بن الوليد إلى رسول الله صلى الله عليه وسلم، فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "يا خالد، لم تؤذي رجلا من أهل بدر؟ لو أنفقت مثل أحد ذهبا لم تدرك عمله". فقال: "يا رسول الله، يقعون في، فأرد عليهم". فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "لا تؤذوا خالدا، فإنه سيف من سيوف الله صبه الله على الكفار" (Ibn Hibbân, 3091).

– Il est des attributs que Dieu n'a pas et que seules des créatures possèdent : ils impliquent une imperfection .
– Ensuite il est d'autres attributs qui sont tels que Dieu les possède au niveau de Perfection Absolue, et des créatures possèdent le même attribut, mais à leur échelle de créature : c'est le cas de l'existence, de la bonté, de la miséricorde, de la force, etc.
– Enfin, il est d'autres attributs que Seul Dieu possède ; la 'Azama ("العظمة") et la Kib'riyâ' ("الكبرياء") en font partie.

Cette 'Azama que certaines créatures revendiquent parfois de façon déplacée, cela est :
soit par rapport à Dieu Lui-même (تكبّر على الله), auquel cas ces créatures commettent du Kufr Akbar (il s'agit du Kufr ul-ibâ' wa-l-istikbâr) ;
soit par rapport à d'autres créatures (تكبّر على الخلق), auquel cas elle commettent du Kufr Asghar.

Iblîs s'enorgueillit par rapport à l'ordre de Dieu, se proclamant ainsi, dans Son Attribut de Décision Législative (Hukm Tashrî'î), Son égal, voire plus connaisseur que Lui. Il en devint Kâfir bi Kufr Akbar : il offensa Dieu, qui le rejeta. Dieu Lui dit : "قَالَ يَا إِبْلِيسُ مَا مَنَعَكَ أَن تَسْجُدَ لِمَا خَلَقْتُ بِيَدَيَّ أَسْتَكْبَرْتَ أَمْ كُنتَ مِنَ الْعَالِينَ" : "O Iblîs, qu'est-ce qui t'a empêché de te prosterner devant ce que J'ai créé de Mes deux Mains ? T'es-tu enorgueilli, ou bien (estimes-tu que) tu fais partie des hauts placés ?" (Coran 38/75-76). (Lire : Iblîs, le djinn qui s'est rebellé contre un ordre de Dieu relatif à l'homme.) : Dieu nous raconte : "إِلاَّ إِبْلِيسَ أَبَى وَاسْتَكْبَرَ وَكَانَ مِنَ الْكَافِرِينَ"  : "Il a refusé et s'est enorgueilli ; et il devint du nombre des kâfir" (Coran 2/34).

Dieu déteste que quelqu'un s'enorgueillisse par rapport à Lui : Dieu est Jaloux de Son Extrême Grandeur, par rapport à toute créature pouvant la réclamer pour elle aussi : "الله غيور على عظمته من أي مخلوق ينازعه إياها".

Nous parlons ici de s'enorgueillir par rapport à Dieu Lui-même. Réfuter Son Existence, ou Son Unicité, ou encore ce qu'Il a décidé takwînan ou tashrî'an, c'est s'enorgueillir par rapport à Lui, et donc réclamer quelque chose de Son Extrême Grandeur (si ce tashrî' est établi à un niveau dharûrî, s'enorgueillir par rapport à lui constitue du Kufr Akbar).

– Et puis il y a le fait de se croire trop Grand pour reconnaître ce qui est établi de la part d'une créature : cela constitue du Kufr Asghar : une Kabîra ghayru kufrin akbar. Cela lorsque que la personne s'enorgueillit par rapport à un droit d'autrui qui est dûment établi mais qu'elle refuse de reconnaître.

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Ces deux possibilités se retrouvent dans la compréhension de cet autre hadîth : "N'entrera pas au Paradis celui dans le coeur de qui il y aura une poussière d'orgueil. Et n'entrera pas [perpétuellement] dans le Feu celui dans le coeur de qui il y aura une poussière de foi" : "عن عبد الله، عن النبي صلى الله عليه وسلم قال: "لا يدخل الجنة من كان في قلبه مثقال ذرة من كبر، ولا يدخل النار ـ يعني ـ من كان في قلبه مثقال ذرة من إيمان". قال: فقال له رجل: "إنه يعجبني أن يكون ثوبي حسنا ونعلي حسنة"، قال: "إن الله يحب الجمال، ولكن الكبر من بطر الحق وغمص الناس". وقال بعض أهل العلم في تفسير هذا الحديث: "لا يدخل النار من كان في قلبه مثقال ذرة من إيمان"، إنما معناه لا يخلد في النار" (at-Tirmidhî, 1999). "عن عبد الله بن مسعود، عن النبي صلى الله عليه وسلم قال: "لا يدخل الجنة من كان في قلبه مثقال ذرة من كبر". قال رجل: "إن الرجل يحب أن يكون ثوبه حسنا ونعله حسنة"، قال: "إن الله جميل يحب الجمال، الكبر بطر الحق، وغمط الناس" (Muslim, 91).
– "Avoir dans son coeur une poussière d'orgueil", cela peut signifier : "avoir de l'orgueil par rapport à Dieu, donc du Kufr Akbar", auquel cas le "N'entrera pas au Paradis" sera perpétuel ("هذا يتأول على وجهين: أحدهما أن يكون أراد به كبر الكفر والشرك، ألا ترى أنه قد قابله في نقيضه بالإيمان، فقال: "لا يدخل النار من كان في قلبه مثقال خردلة من إيمان" : Ma'âlim us-sunan ; "فذكر الخطابي فيه وجهين: أحدهما أن المراد التكبر عن الإيمان، فصاحبه لا يدخل الجنة أصلا إذا مات عليه" : Shar'h Muslim).
– "Avoir dans son coeur une poussière d'orgueil" peut également signifier : "avoir du mépris pour d'autres hommes, et refuser de reconnaître un droit d'autrui pourtant établi", auquel cas le "N'entrera pas au Paradis" signifie : "N'entrera pas immédiatement au Paradis, sauf si Dieu le lui pardonne" ("فإن هذا الحديث ورد في سياق النهي عن الكبر المعروف وهو الارتفاع على الناس واحتقارهم ودفع الحق، فلا ينبغي أن يحمل على هذين التأويلين المخرجين له عن المطلوب" : Shar'h Muslim, an-Nawawî, 2/91).

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C.2) Ghayra de la part d'une créature, au sujet de ce qu'elle aime, par rapport à Dieu (غيرة العبد على ما يحب، من الله) :

Cela est interdit, et de toutes façons cela est inimaginable : tout appartient à Dieu.

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C.3) Ghayra de la part d'une créature, au sujet de ce qu'elle aime et en quoi elle estime avoir l'exclusivité, par rapport à toute autre créature (غيرة العبد على محبوبه من المخلوقات، من مخلوق آخر) :

–--- C.3.a) Dans le cas où ce que la première créature aime, cela n'est en réalité pas réservé à elle :

La Ghayra est ici interdite, et la Ghadhab qui en résulte constitue du Hassad.

Ainsi, acquérir des biens matériels qui sont licites pour soi, par un moyen qui est licite pour soi, et dans une mesure équilibrée, est ouvert à tout un chacun. Prendre ombrage du fait que quelqu'un d'autre que soi acquiert des biens et prospère, cela constitue du Hassad.

Plus grave encore : certains soufis ont exprimé ce genre de sentiment par rapport à la relation avec Dieu : ils ont exprimé vouloir établir une relation exclusiviste avec Dieu, prenant ombrage du fait que d'autres qu'eux évoquent eux aussi Dieu. Ce fut là une grave erreur de leur part, dont on espère que cela leur sera pardonné (من شطحاتهم) car ayant été prononcé sur la base d'une ignorance (للجهل) ou bien dans un moment d'ivresse (في حالة سكر). Le fait est que nul humain n'a d'exclusivité avec Dieu ; tout au contraire, le croyant doit vouloir et aimer que le maximum d'humains croient en Dieu, L'évoquent et L'adorent, comme tous les prophètes ont voulu et aimé cela : ils ont voulu relier le maximum d'humains avec Dieu. 

–--- C.3.b) Dans le cas où la personne que la première créature aime, ce dont il est question chez cette personne est réellement réservé à la première créature ('aqlan wa shar'an) :

La Ghayra est ici requise.
Et le mécontentement ici est chose bien dès lors qu'il y a réellement quelque chose, et que ce mécontentement s'exprime de façon raisonnable.

En rêve, le Prophète (sur lui soit la paix) était arrivé près d'un palais du Paradis, dont il apprit qu'il était destiné à Omar ibn ul-Khattâb (que Dieu l'agrée) ; il pensa y entrer pour le visiter, mais ensuite, s'étant souvenu de la grande Ghayra de Omar, il s'en abstint et revint sur ses pas : il a voulu éviter que Omar ressente un petit quelque chose à son égard, car il s'y trouvai(en)t probablement une ou des femme(s) lui étant promise(s). Mais quand il raconta cela, Omar pleura et s'exclama : "Que mon père et ma mère soient donnés pour toi, ô Messager de Dieu ! A ton encontre j'éprouverais de la Ghayra ?". "عن أبي هريرة رضي الله عنه قال: بينا نحن عند رسول الله صلى الله عليه وسلم، إذ قال: "بينا أنا نائم رأيتني في الجنة، فإذا امرأة تتوضأ إلى جانب قصر؛ فقلت: لمن هذا القصر؟ فقالوا: لعمر بن الخطاب. فذكرت غيرته، فوليت مدبرا". فبكى عمر وقال: "أعليك أغار يا رسول الله" (al-Bukhârî, 3070, Muslim, 2395). "عن جابر بن عبد الله رضي الله عنهما، قال: قال النبي صلى الله عليه وسلم: "رأيتني دخلت الجنة، فإذا أنا بالرميصاء، امرأة أبي طلحة؛ وسمعت خشفة، فقلت: من هذا؟ فقال: هذا بلال؛ ورأيت قصرا بفنائه جارية، فقلت: لمن هذا؟ فقال: لعمر، فأردت أن أدخله فأنظر إليه، فذكرت غيرتك." فقال عمر: "بأبي وأمي يا رسول الله أعليك أغار" (al-Bukhârî, 3476).
Ibn Hajar relate que certains commentateurs disent qu'il y a eu ici inversion, car la particule devait normalement être "Min" : "وقوله "أعليك أغار": معدود من القلب، والأصل: "أعليها أغار منك" (FB 7/57).
J'ajouterais : "أو يقال: فيه تضمين لمعنى "أغضب"، فلهذا عدّي بـ"على".

Sa'd ibn 'Ubâda (que Dieu l'agrée) dit un jour : "Messager de Dieu, dis-moi, si l'homme trouve avec sa femme un autre homme [= ayant des relations intimes avec elle], le tuera-t-il ?" Le Prophète lui dit : "Non". "Si je trouve avec ma femme un autre homme, je ne le toucherais pas, et irais (plutôt) chercher 4 témoins ?" Le Prophète lui dit : "Oui". Sa'd dit alors : "Jamais, par Celui qui t'a suscité avec la vérité ! Au contraire, je m'occuperai de lui avec mon sabre avant cela." Le Prophète dit alors : "Ecoutez ce que votre chef dit. Il a beaucoup de Ghayra. J'ai plus de Ghayra que lui. Et Dieu a plus de Ghayra que moi" : "عن أبي هريرة، أن سعد بن عبادة الأنصاري، قال: "يا رسول الله، أرأيت الرجل يجد مع امرأته رجلا أيقتله؟" قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "لا"، قال سعد: "بلى، والذي أكرمك بالحق"، فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "اسمعوا إلى ما يقول سيدكم" (Muslim, 1498/14) ; "عن أبي هريرة، قال: قال سعد بن عبادة: "يا رسول الله، لو وجدت مع أهلي رجلا لم أمسه حتى آتي بأربعة شهداء؟" قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "نعم". قال: "كلا والذي بعثك بالحق، إن كنت لأعاجله بالسيف قبل ذلك". قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "اسمعوا إلى ما يقول سيدكم، إنه لغيور، وأنا أغير منه، والله أغير مني" (Muslim, 1498/16). Le principe de base est qu'un mari se trouvant en pareille situation n'a juridiquement pas le droit de tuer cet homme : s'il trouve cet homme en train de faire cela, il ira chercher 4 témoins pour faire appliquer à cet homme le jugement d'un juge. L'une des interprétations ici est que le Prophète a subtilement désapprouvé la parole de Sa'd : il voulut d'une part excuser Sa'd devant les autres Compagnons pour sa parole semblant contredire ce que lui, le Prophète, venait de dire : cette parole était due au fait que Sa'd avait beaucoup de Ghayra ; en même temps, le Prophète rappela à Sa'd que la Ghayra est à garder sous contrôle, car lui-même, le Prophète en avait plus que Sa'd, et pourtant il venait de dire de ne pas tuer cet homme (Zâd ul-ma'âd, 5/408).
En tous cas, la Ghayra de Sa'd relevait de ce cas C.3, dans la mesure où un homme peut avoir forcé l'épouse de quelqu'un à avoir des relations intimes avec lui (voir Rawdhat ul-muhibbîn, p. 270) (par contre, au cas où l'épouse est consentante et trompe son mari, cela relèvera de ce cas C.3 à l'encontre de l'homme fornicateur, et du cas D.3 par rapport à l'épouse trompant ainsi son mari : Rawdhat ul-muhibbîn, p. 270 ; en pareille situation, le mari peut avoir recours au li'ân contre son épouse).
D'après un autre récit, le Prophète n'était pas présent quand Sa'd ibn 'Ubâda dit que s'il trouvait un homme en train d'avoir des relations intimes avec son épouse à lui, il tuerait cet homme : son propos fut seulement relaté au Prophète, qui dit alors : "Etes-vous étonné de la Ghayra de Sa'd ? J'ai plus de Ghayra que lui. Et Dieu a plus de Ghayra que moi (...)" : "عن المغيرة، قال: قال سعد بن عبادة: "لو رأيت رجلا مع امرأتي لضربته بالسيف غير مصفح". فبلغ ذلك رسول الله صلى الله عليه وسلم فقال: "أتعجبون من غيرة سعد؟ والله لأنا أغير منه. والله أغير مني. ومن أجل غيرة الله حرم الفواحش ما ظهر منها وما بطن. ولا أحد أحب إليه العذر من الله، ومن أجل ذلك بعث المبشرين والمنذرين. ولا أحد أحب إليه المدحة من الله، ومن أجل ذلك وعد الله الجنة" (al-Bukhârî, 6980) ; "عن المغيرة بن شعبة، قال: قال سعد بن عبادة: "لو رأيت رجلا مع امرأتي لضربته بالسيف غير مصفح عنه". فبلغ ذلك رسول الله صلى الله عليه وسلم، فقال: "أتعجبون من غيرة سعد؟ فوالله لأنا أغير منه. والله أغير مني. من أجل غيرة الله حرم الفواحش، ما ظهر منها، وما بطن، ولا شخص أغير من الله. ولا شخص أحب إليه العذر من الله، من أجل ذلك بعث الله المرسلين مبشرين ومنذرين. ولا شخص أحب إليه المدحة من الله، من أجل ذلك وعد الله الجنة" (Muslim, 1499).

L'épouse aussi peut ressentir de la Ghayra au sujet de son mari, par rapport à une autre femme précise ; l'épouse ne veut pas : soit que cette autre femme lui prenne son mari (et convainque celui-ci de divorcer d'elle, ce que le Prophète a interdit aux femmes de faire) ; soit que cette autre femme devienne la seconde épouse de son mari ; soit que cette autre femme, déjà co-épouse, gagne toute l'attention du mari (lire mon article sur la polygynie).

Ainsi, un jour que le Prophète était chez l'une de ses épouses, une autre de ses épouses envoya par le biais d'un serviteur un plat de nourriture au Prophète. Quand le serviteur entra, l'épouse chez qui le Prophète se trouvait lui donna un coup, ce qui eut pour effet de faire tomber le plat, qui se brisa. Ramassant les morceaux du plat brisé, le Prophète dit : "Votre mère a éprouvé de la Ghayra". Puis il fit demander un plat d'auprès de l'épouse chez qui il se trouvait, et l'envoya à celle dont le plat avait été brisé : "عن أنس، قال: كان النبي صلى الله عليه وسلم عند بعض نسائه، فأرسلت إحدى أمهات المؤمنين بصحفة فيها طعام، فضربت التي النبي صلى الله عليه وسلم في بيتها يد الخادم، فسقطت الصحفة فانفلقت، فجمع النبي صلى الله عليه وسلم فلق الصحفة، ثم جعل يجمع فيها الطعام الذي كان في الصحفة، ويقول: "غارت أمكم"، ثم حبس الخادم حتى أتي بصحفة من عند التي هو في بيتها، فدفع الصحفة الصحيحة إلى التي كسرت صحفتها، وأمسك المكسورة في بيت التي كسرت" (al-Bukhârî, 4927).
Ibn Taymiyya écrit que le Ghayra que l'épouse d'un homme éprouve à l'encontre d'une co-épouse, cela ne relève que du Tab'î, et pas du Shar'î : "واما غيرة النساء بعضهن من بعض، فتلك ليس مأمورا بها لكنها من امور الطباع، كالحزن على المصائب" (Al-Istiqâma, 2/8).

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D) "غيرة الشخص - أي أنفته - لنفسه، على من يدّعي أنه يُحبّه (وهو في الجملة محبوب أيضًا)، من أن يبذل ذلك المُحبّ لغير ذلك الشخص ما يظن ذلك الشخص (بحق أو بغير حق) أنه مختصّ به من ذلك المُحبّ" : Le Sentiment d'Exclusivité qu'une personne éprouve à l'égard d'un être qui prétend qu'il l'aime (et qu'elle aime aussi globalement), et dont elle ne veut donc pas qu'il donne à autre qu'elle ce qui lui est réservé. Par incidence, cela entraîne le Mécontentement de cette personne à l'égard de l'être prétendant l'aimer mais qui donne à autre qu'elle ce qu'elle estime lui être réservé : "غيرة الشخص - أي غضبه - على من يدّعي أنه يُحبّه (وهو في الجملة محبوب أيضًا)، إذا بذل المحبوب لغير ذلك الشخص ما يظن ذلك الشخص (بحق أو بغير حق) أنه مختصّ به" :

Le mécontentement de la personne est alors dirigé vers cet humain qui prétend l'aimer (et qu'elle aime aussi, globalement), qui recèle quelque chose qui est exclusivement réservé à elle, et qui, pourtant, donne à autre qu'elle ce quelque chose, ou une part de ce quelque chose.

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D.1) Ghayra de la part de Dieu, au sujet de Ses créatures quant au culte que ces créatures rendent à quelque chose (غيرة الله - أي أنفته - على عبده، في العبادة التي يباشرها العبد فطرةً) :

Le terme Ghayrat ullâh peut désigner le fait que Dieu est Jaloux au sujet de Sa créature quant au culte que Sa créature (djinn et humain) produit de façon naturelle : l'adresse-t-elle à Autre que Lui ?

(Quand le Prophète a employé le terme Ghayra au sujet de Dieu à l'égard de Son serviteur - comme nous l'avons vu plus haut, en B.1 -, ce n'est pas dans cette perspective de shirk billâh (akbar ou asghar), mais dans la perspective que l'action kabîra que ce serviteur commet comporte quelque chose en soi de gravement mauvais. Cependant, comme l'écrit Ibn Taymiyya, employer le terme "Ghayra" au sujet de Dieu par rapport au shirk [comme cela est fait ici en D.1], cela n'est pas faux : Al-Istiqâma 2/11/13.)

Ibn ul-Qayyim écrit ainsi : "والله سبحانه يغار أشد الغيرة على عبده أن يلتفت إلى سواه" : "Dieu - Pureté à Lui - a fortement de la Jalousie au sujet de Son serviteur, par rapport au fait qu'il puisse se tourne vers autre que Lui" (Madârij us-sâlikîn, 3/343).
Le cas de l'athée (
al-mu'attil) est à cet égard encore plus conséquent que celui de l'hénothéiste (al-mushrik billâh) : le second adore Dieu ainsi que d'autres que Lui, alors que le premier n'adore pas Dieu mais seulement d'autres que Lui : "إنما كان الشرك عنده ذنبا لا يغفر لتعلق قلب المشرك به وبغيره، فكيف بمن تعلق قلبه كله بغيره وأعرض عنه بكليته؟" (Ibid
., 3/344).
Al-Qushayrî avait formulé cela ainsi : "فقال ابو القاسم القشيري: "الغيرة كراهة مشاركة الغير. واذا وصف الحق بالغيرة، فمعناه انه لا يرضى بمشاركة الغير معه فيما هو حق له تعالى من طاعة عبده له" (cité dans
Al-Istiqâma, 2/11).

A la base, Dieu aime chaque humain, lequel naît sur la Fit'ra ; et, suite au développement psychique et intellectuel que l'humain connaît et qui l'oblige à faire des choix, Dieu souhaite pour chaque humain qu'il choisisse la voie droite.
Cependant, le choix que chaque individu fait en son âme et conscience entraîne que Dieu l'aime pour ce qu'il a choisi d'être et de faire, ou ne l'aime pas à cause de ce qu'il a choisi d'être et de faire.

Le Prophète (que Dieu l'élève et le salue) a dit à Mu'âdh : "Sais-tu quel est le droit de Dieu sur les hommes ? - Dieu et Son Messager savent mieux ! - Le droit de Dieu sur les hommes est que ceux-ci fassent Sa 'Ibâda et ne Lui fassent Shirk de rien" : "عن أنس، عن معاذ، قال: أنا رديف النبي صلى الله عليه وسلم فقال: "يا معاذ!" قلت: لبيك وسعديك! ثم قال مثله ثلاثا: "هل تدري ما حق الله على العباد؟" قلت: لا، قال: "حق الله على العباد أن يعبدوه ولا يشركوا به شيئا." ثم سار ساعة، فقال: "يا معاذ!" قلت: لبيك وسعديك! قال: "هل تدري ما حق العباد على الله إذا فعلوا ذلك؟ أن لا يعذبهم"" (al-Bukhârî, 5912, 5622, 2701, 6135 ; Muslim, 30).
Rendre le culte à un autre que Dieu, c'est donc faire une grande injustice vis-à-vis de Dieu, en manquant à Son Droit : Luqmân avait dit à son fils : "Le Shirk est une énorme injustice" : "وَإِذْ قَالَ لُقْمَانُ لِابْنِهِ وَهُوَ يَعِظُهُ يَا بُنَيَّ لَا تُشْرِكْ بِاللَّهِ إِنَّ الشِّرْكَ لَظُلْمٌ عَظِيمٌ" (Coran 31/13).

C'est pourquoi Dieu est Mécontent du fait que l'homme (ou le djinn) divinise quelque chose d'autre que Lui ("يغضب إذا خصص عبده غيره بما هو حق خاص له، أو أشرك عبده غيره، في ما هو حق خاص له: من العبادة التي يباشرها العبد") ; c'est-à-dire du fait que l'homme (ou le djinn) confère à autre que Lui ce qui Lui est réservé - le caractère divin -, et, ce faisant, se soumette volontairement et avec affection à cet autre que Lui.
Conférer à un être quoi que ce soit du caractère divin, c'est lui conférer (au moins) un attribut relevant de la Perfection Absolue.
Et conférer à un être quoi que ce soit de la Perfection Absolue, cela se fait par l'une des 2 catégories d'actions suivantes : ----- soit le développement, en son for intérieur, de la croyance que cet être possède quelque chose de la Perfection Absolue (cet être étant alors le sujet de cet état ; c'est là : "التأليه بالخبر") ; ------ soit le fait de pratiquer, à l'égard de cet être, une action particulière, laquelle action exprime sans nul doute possible qu'on a au sujet de cet être la croyance qu'il possède quelque chose de la Perfection Absolue (cet être étant alors l'objet de cette action humaine ; c'est là : "التأليه بالعمل").

La raison de ce Mécontentement de Dieu est que cet homme Lui appartient, c'est Lui qui l'a créé, c'est Lui qui lui a tout donné, et Il l'a créé pour qu'il puisse Le connaître, se rapprocher de Lui, et, ainsi, pouvoir contempler Sa Face dans un lieu privilégié : le Paradis. Cette action d'adoration consciente, c'est d'ailleurs ce qui fait la spécificité de l'homme par rapport à l'ange. Dès lors, le fait que l'homme se donne ainsi à autre que Dieu revient à trahir Celui-ci.

D'autre part, le fait que la Créature divinise autre que Dieu, cela revient à ce que cette Créature confère ce type de 'Azama, "العظمة" (Extrême Grandeur) à Autre que son Créateur, ce qui est faux (puisque la 'Azama, "العظمة" est propre à Dieu) :
--- soit que cet Autre n'est pas d'accord avec le fait que des gens le divinisent (c'est le cas de par exemple Jésus et de Marie) ;
--- soit que cet Autre est d'accord avec (ce qui, en sus, fait tomber cet Autre dans le cas C.1 ; c'est le cas de Iblîs et de ses légions).

La Créature qui confère ce type de 'Azama ("العظمة" ) à Autre que Dieu fait îdhâ' à Dieu, mais ne Lui fait ainsi aucun dharar : elle fait "une offense à Dieu", qui en est "offensé", mais cela ne Lui fait aucun "tort" : "عن أبي موسى، قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "لا أحد أصبر على أذى يسمعه من الله عز وجل؛ إنه يشرك به، ويجعل له الولد، ثم هو يعافيهم ويرزقهم" (Muslim, 2804 ; al-Bukhârî, 5748) ; "عن أبي هريرة رضي الله عنه، قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم قال الله عز وجل: "يؤذيني ابن آدم يسب الدهر؛ وأنا الدهر، بيدي الأمر أقلب الليل والنهار" (al-Bukhârî, 4549, Muslim, 2246). ("قوله: "يؤذيني ابن آدم": أي: يلحق بي الأذى؛ فالأذية لله ثابتة، ويجب علينا إثباتها، لأن الله أثبتها لنفسه، فلسنا أعلم من الله بالله؛ ولكنها ليست كأذية المخلوق، بدليل قوله تعالى: {لَيْسَ كَمِثْلِهِ شَيْءٌ وَهُوَ السَّمِيعُ الْبَصِيرُ}: وقدم النفي في هذه الآية على الإثبات لأجل أن يرد الإثبات على قلب خال من توهم المماثلة، ويكون الإثبات حينئذ على الوجه اللائق به تعالى، وأنه لا يماثل في صفاته كما لا يماثل في ذاته" : Al-Qawl ul-mufîd, p. 827 ; "قوله: "فقد آذى الله": لا يلزم من الأذية الضرر. فالإنسان يتأذى بسماع القبيح أو مشاهدته، ولكنه لا يتضرر بذلك؛ ويتأذى بالرائحة الكريهة كالبصل والثوم، ولا يتضرر بذلك. ولهذا أثبت الله الأذية في القرآن، قال تعالى: {إِنَّ الَّذِينَ يُؤْذُونَ اللَّهَ وَرَسُولَهُ لَعَنَهُمُ اللَّهُ فِي الدُّنْيَا وَالْآخِرَةِ وَأَعَدَّ لَهُمْ عَذَاباً مُهِيناً}، وفي الحديث القدسي: "يؤذيني ابن آدم، يسب الدهر وأنا الدهر، أقلب الليل والنهار"، ونفى عن نفسه أن يضره شيء، قال تعالى: {إِنَّهُمْ لَنْ يَضُرُّوا اللَّهَ شَيْئاً}، وفي الحديث القدسي: "يا عبادي! إنكم لن تبلغوا ضري فتضروني" رواه مسلم" : Al-Qawl ul-mufîd, pp. 823-824.)

Dieu pardonne n'importe quel péché s'Il le veut, même sans repentir de la part de celui qui l'a commis ; mais Dieu ne pardonne pas le Shirk [Akbar], sauf si celui qui l'a commis s'en repent : "إِنَّ اللّهَ لاَ يَغْفِرُ أَن يُشْرَكَ بِهِ وَيَغْفِرُ مَا دُونَ ذَلِكَ لِمَن يَشَاء" (Coran 4/116). (Cela vaut aussi pour le kufr akbar de façon générale : Bayân ul-qur'ân.)

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Ce que nous venons de voir là est relaté également dans le texte que nous avons actuellement de la Torah, comme parole de Dieu : "Tu ne te feras point d'image taillée, ni de représentation quelconque des choses qui sont en haut dans les cieux, qui sont en bas sur la terre, et qui sont dans les eaux plus bas que la terre. Tu ne te prosterneras point devant elles, et tu ne les serviras point ; car moi, l'Éternel, ton dieu, je suis un Dieu jaloux, qui punis l'iniquité des pères sur les enfants jusqu'à la troisième et la quatrième génération de ceux qui me haïssent, et qui fais miséricorde jusqu'en mille générations à ceux qui m'aiment et qui gardent mes commandements" (Exode 20/4-6 ; Deutéronome 5/8-10) (il s'agit seulement du fait qu'il arrive que les générations suivantes subissent encore, en ce monde, les conséquences de ce que leurs ancêtres ont commis de faute morale (l'associationnisme) qui a entraîné une sanction temporelle (dunyawî) généralisée infligée par Dieu à ces ancêtres ; et non pas que Dieu tiendrait responsable les générations suivantes de la faute morale que ce sont leurs ancêtres - et pas eux - qui l'ont commise).

Dans le texte actuel des Psaumes nous lisons aussi ceci : "(...) ils excitèrent Sa jalousie par leurs idoles" (Psaumes 78/58).

Dans le TaNak, la relation de fidélité de culte que le peuple de l'Alliance d'alors (les fils d'Israël) doivent à Dieu et à Lui seulement, est comparée à la relation de fidélité qu'une épouse doit à son mari : si elle lui demeure fidèle, Il la comblera ; si elle se donne à autre que Lui, Il se fâchera [ce qui rejoint le cas D.3]. D'où les nombreuses métaphores qu'on trouve dans le texte biblique, d'infidélité, de prostitution envers d'autres dieux, etc.

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Dieu veut que chacune de Ses créatures (des genres humain et djinn) Le divinise ('ibâda), et qu'elle ne divinise rien d'autre que Lui.
Il veut aussi que chacune de Ses créatures (des genres humain et djinn) L'adore de façon complémentaire ('ibâda) et ne commette rien de ce qu'Il lui a interdit (ce qui constitue du shirk asghar, vu que l'homme a alors voulu obéir à son envie dans la désobéissance à Dieu - "قَصَدَ إطاعة هواه في معصية ربه" - : par exemple il a satisfait son désir de nourriture en mangeant une nourriture que Dieu a rendue strictement interdite pour Lui ; etc. ; "وربما نقول على هذا التعريف: إن المعاصي كلها شرك أصغر، لأن الحامل عليها الهوى، وقد قال تعالى: {أفرأيت من اتخذ إلهه هواه وأضله الله على علم" : Al-Qawl ul-mufîd, p. 84 ; voir également : p. 36, p. 54, p. 198, etc.).
Cependant, ce culte complémentaire de Dieu, que l'homme doit faire, cela n'est pas constitué seulement des actions purement cultuelles (telles que les prières rituelles, le jeûne, etc.), mais :
--- de ces actions purement cultuelles, instituées pour l'objectif de rapprocher spirituellement avec Dieu celui qui les fait (actions telles que la prière rituelle, le jeûne, etc.) ;
--- des actions instituées qu'en tant que moyens de servir le Dîn ;
--- des actions instituées pour des objectifs temporels (Dunyawî) mais faisant l'objet d'un ordre de la part de Dieu : c'est alors l'obéissance à Dieu (en faisant l'action, en y faisant ce qui est obligatoire ou recommandé et en s'abstenant d'y faire ce qui est déconseillé et ce qui est interdit) qui constitue l'adoration de Lui. La même chose est valable en ce qui concerne les interdits : c'est l'obéissance à Dieu en la matière qui constitue Son Adoration. Il faut ici noter que l'intention d'obéissance à Dieu (نية التدين / نية التعبد) est ce qui rapproche de Dieu ; certes, dans ces normes il y a également de l'avantage d'ordre temporel - physique, mental, familial, social ou économique - ; mais c'est la considération d'obéissance à Dieu qui doit rester dominante pour que cela soit compté comme adoration de Dieu.

Et puis, il y a le domaine de ce qui demeure purement autorisé (mubâh), dans lequel l'homme est laissé libre par Dieu.

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Pareillement, aimer d'un amour de divinisation, cela doit être fait vis-à-vis de Dieu, et ne doit être fait vis-à-vis de nul autre que Lui.

Cependant, l'amour naturel (tab'î) pour quelque chose, Dieu a laissé liberté à l'homme de l'avoir et de l'entretenir vis-à-vis des choses autres que Lui, ces choses que Lui-même a naturellement rendues agréables pour l'homme : l'eau, les aliments délicieux, les beaux paysages, etc.

Entre ces deux degrés extrêmes, se trouvent différents autres degrés d'amour (un fort attachement pour son conjoint(e), ses enfants, ce qu'on a réalisé après des années de labeur), et Dieu veut de l'homme qu'il les entretienne, mais en les intégrant à l'amour pour Lui : les aimer d'un amour très accentué mais indépendant de l'amour pour Dieu constitue du shirk asghar.

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A un niveau plus poussé, lorsqu'un humain a acquis une grande proximité avec Lui (et fait partie des muqarrabûn), Dieu fait preuve de plus de Ghayra encore à son sujet qu'Il le fait au sujet des humains du commun : Dieu n'aime pas que ce proche de Lui aime quelqu'un d'autre que Lui d'un niveau accentué (khulla), même si cela est autorisé chez les humains du commun : "قرأ قارئ بين يدي السري: {وإذا قرأت القرآن جعلنا بينك وبين الذين لا يؤمنون بالآخرة حجابا مستورا}، فقال السري: "تدرون ما هذا الحجاب؟ هو حجاب الغيرة، ولا أحد أغير من الله؛ فمن عرفه وذاق حلاوة قربه ومحبته، ثم رجع عنه إلى مساكنة غيره، ثبط جوارحه عن طاعته، وعقل قلبه عن إرادته ومحبته، وأخره عن محل قربه، وولاه ما اختاره لنفسه". وقال بعضهم: "احذره، فإنه غيور، لا يحب أن يرى في قلب عبده سواه". ومن غيرته: أن صفيه آدم لما ساكن بقلبه الجنة، وحرص على الخلود فيها، أخرجه منها. ومن غيرته سبحانه أن إبراهيم خليله لما أخذ إسماعيل شعبة من قلبه، أمره بذبحه، حتى يخرج من قلبه ذلك المزاحم" (Madârij us-sâlikîn, 3/344). 
"قال صاحب المنازل: "باب الانفصال: قال الله تعالى: {ويحذركم الله نفسه} ليس في المقامات شيء فيه من التفاوت ما في الانفصال". وجه الإشارة بالآية أنه سبحانه المقرب المبعد؛ فليحذر القريب من الإبعاد والمتصل من الانفصال؛ فإن الحق جل جلاله غيور لا يرضى ممن عرفه ووجد حلاوة معرفته واتصل قلبه بمحبته والأنس به وتعلقت روحه بإرادة وجهه الأعلى، أن يكون له التفات إلى غيره ألبتة"
(Ibid., 3/342-343).
D'après l'un des deux commentaires (que Ibn Taymiyya ne partage cependant pas : MF 15/112-115), le verset suivant voudrait signifier un léger reproche ('itâb) de ce genre au sujet du prophète Joseph (sur lui soit la paix), pour avoir fait adresser sa demande au roi : "وَقَالَ لِلَّذِي ظَنَّ أَنَّهُ نَاجٍ مِّنْهُمَا اذْكُرْنِي عِندَ رَبِّكَ فَأَنسَاهُ الشَّيْطَانُ ذِكْرَ رَبِّهِ فَلَبِثَ فِي السِّجْنِ بِضْعَ سِنِينَ" (Coran 12/42) : ce que Joseph dit là ne constitua même pas un shirk asghar ; car il est seulement mieux (awlâ fî nafsihî) de demander l'aide de Dieu plutôt que l'aide des hommes : cela relève du kamâl ut-tawakkul al-mustahabb (cela à la différence d'avoir soi-même recours aux causes matérielles habituelles) ; plus encore : dans le cas où le prophète Joseph se trouvait (être injustement emprisonné, sans perspective autre que celle d'être oublié dans la prison), faire savoir au roi que dans les prisons de son pays, un homme subissait l'injustice, cela était : "mieux pour circonstance présente" : "awlâ li 'âridh". Cependant, le principe est bien connu : "بعض الأعمال التي تكون حسناتٍ للأبرار تكون سيئاتٍ للمقربين" : certaines actions qui sont en soi légèrement déconseillées (ghayr awlâ) mais que, par maslaha shar'iyya, il devient bien de faire, un très proche de Dieu peut encourir à cause d'elle un léger reproche ('itâb) de la part de son Créateur. C'est - d'après cette interprétation - ce qui se passa ici.
Par contre, cet "oubli" eut-il véritablement pour cause le diable, ou l'attribuer au diable a-t-il seulement été ici une façon de dire ? Je ne sais pas (لا أدري). En tous cas, pour ce qui est du hadith relaté sur le sujet ("لو لم يقل - يعني يوسف - الكلمة التي قال، ما لبث في السجن طول ما لبث حيث يبتغي الفرج من عند غير الله"), il est dha'îf jiddan d'après Ibn Kathîr (Tafsîr Ibn Kathîr).

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D.2) Ghayra de la part d'une créature, au sujet de Dieu quant à la proximité qu'Il entretient avec d'autres créatures qu'elle (غيرة العبد - أي أنفته - على الله، في التقرب منه تعالى) :

Cela est interdit. Cela reviendrait à ce qu'un humain (apparemment) pieux soit mécontent de Dieu au motif que Celui-ci aime également un autre humain que lui : il voudrait que Dieu ne soit que pour lui seul !

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D.3) Ghayra de la part d'une créature, au sujet d'une seconde créature quant à l'attention particulière que cette seconde créature porte à la créature en général (غيرة العبد - أي أنفته - على محبوبه المخلوق، في محبّة هذا المخلوقِ المحبوب للمخلوق) :

–--- C'est ce sentiment que l'époux ressent au sujet de son épouse quant à l'amour que celle-ci éprouve vis-à-vis de l'homme en général (je parle de l'amour d'attirance qui existe entre hommes et femmes).

Ce sentiment (Anafa) entraîne donc du mécontentement (Ghadhab) chez lui à l'encontre de son épouse (tab'an wa shar'an) par rapport à un autre homme : s'il découvre son épouse consentir à des relations intimes avec cet autre homme ; ou s'il l'entend faire des plaisanteries totalement déplacées avec cet autre homme (du genre des plaisanteries qui sont normalement réservées au mari seul) ; ou s'il la voit s'approcher de façon inappropriée de cet autre homme (celui-ci ne faisant pas partie de ses proches parents, mahârim) (il se peut, ici, que cet autre homme n'ait pour sa part rien fait et constate avec étonnement le comportement de cette dame ; comme il se peut que cet homme ait lui-même cherché à séduire cette dame).

Asmâ' bint Abî Bakr dit, dans le récit suivant, avoir décliné l'offre du Prophète de la faire monter en croupe sur son chameau, derrière lui, parce que, dit-elle : "J'ai pensé à la jalousie de az-Zubayr ; il était extrêmement jaloux" : Asmâ' a voulu éviter que son mari az-Zubayr ressente quelque chose à son encontre s'il apprenait qu'elle était montée sur le chameau du Prophète alors que d'autres hommes accompagnaient ce dernier dans son déplacement. "عن أسماء بنت أبي بكر رضي الله عنهما، قالت: تزوجني الزبير، وما له في الأرض من مال ولا مملوك ولا شيء غير ناضح وغير فرسه. فكنت أعلف فرسه وأستقي الماء وأخرز غربه وأعجن. ولم أكن أحسن أخبز، وكان يخبز جارات لي من الأنصار، وكن نسوة صدق. وكنت أنقل النوى من أرض الزبير التي أقطعه رسول الله صلى الله عليه وسلم على رأسي، وهي مني على ثلثي فرسخ. فجئت يوما والنوى على رأسي، فلقيت رسول الله صلى الله عليه وسلم ومعه نفر من الأنصار. فدعاني ثم قال: "إخ إخ" ليحملني خلفه. فاستحييت أن أسير مع الرجال، وذكرت الزبير وغيرته، وكان أغير الناس. فعرف رسول الله صلى الله عليه وسلم أني قد استحييت فمضى. فجئت الزبير فقلت: "لقيني رسول الله صلى الله عليه وسلم، وعلى رأسي النوى، ومعه نفر من أصحابه، فأناخ لأركب، فاستحييت منه وعرفت غيرتك". فقال: "والله لحملك النوى كان أشد علي من ركوبك معه". قالت: حتى أرسل إلي أبو بكر بعد ذلك بخادم تكفيني سياسة الفرس؛ فكأنما أعتقني" (al-Bukhârî, 4926, Muslim, 2182).

Aïcha dit qu'un jour, alors qu'elle avait reçu son frère de lait chez elle, le Prophète rentra. Voyant cet homme assis auprès de son épouse, le visage du Messager de Dieu changea, et Aïcha y vit du mécontentement ; le Prophète dit : "Aïcha, qui est-ce ? - Messager de Dieu, c'est mon frère de lait." Il dit alors : "Regardez bien qui sont vos frères de lait ; car l'allaitement ne s'établit qu'à (l'âge où l'enfant a) faim de (lait)" : "عن عائشة رضي الله عنها، قالت: دخل علي النبي صلى الله عليه وسلم وعندي رجل، قال: "يا عائشة من هذا؟"، قلت: "أخي من الرضاعة"، قال: "يا عائشة، انظرن من إخوانكن، فإنما الرضاعة من المجاعة" (al-Bukhârî, 2504) ; ""عن عائشة رضي الله عنها: أن النبي صلى الله عليه وسلم دخل عليها وعندها رجل، فكأنه تغير وجهه، كأنه كره ذلك، فقالت: "إنه أخي"، فقال: "انظرن من إخوانكن، فإنما الرضاعة من المجاعة" (al-Bukhârî, 4814) ; "عن عائشة: دخل علي رسول الله صلى الله عليه وسلم، وعندي رجل قاعد، فاشتد ذلك عليه ورأيت الغضب في وجهه. قالت: فقلت: "يا رسول الله، إنه أخي من الرضاعة"، قالت: فقال: "انظرن إخوتكن من الرضاعة، فإنما الرضاعة من المجاعة" (Muslim, 1455).

Par contre, ayant découvert que c'était bien son épouse qui cherchait à séduire Joseph (l'indice en étant que la tunique de celui-ci était déchirée par derrière), le mari de Zuleikha, "al-'azîz", manqua justement de ghayra : soit il n'en avait pas du tout, soit il n'en avait pas suffisamment, car, au lieu de prendre les mesures qui s'imposaient, il se contenta de dire au jeune prophète : "Joseph, détourne-toi de cela", et à son épouse : "Demande pardon pour ton péché, c'était toi la fautive" (MF 15/119).

–--- L'épouse aussi éprouve de la Ghayra au sujet de son mari quant à l'attention qu'il porte à la femme en général : l'épouse ne veut pas : soit que son mari lorgne vers une femme autre qu'elle (de façon illicite, ou de façon licite) ; soit que son mari exprime trop d'attention à l'égard de celle qui est déjà sa co-épouse (lire mon article sur la polygynie). Ce sentiment (Anafa) entraîne alors du mécontentement (Ghadhab) chez elle.

Ainsi, lors d'une nuit qui était réservée à Aïcha, alors que le Prophète s'était levé et était parti de la maison, Aïcha le suivit, pensant qu'il allait rencontrer une autre co-épouse. Mais le Prophète s'était en fait rendu au cimetière du Baqî', pour invoquer Dieu en faveur des défunts. Retourné et ayant vu quelqu'un devant lui, il finit par rentrer chez lui et trouver Aïcha tout essoufflée. Il comprit et lui dit : "Que t'arrive-t-il, Aïcha ? Tu as éprouvé de la Ghayra ?" Elle répondit : "Et comme se pourrait-il que quelqu'un comme moi n'éprouve pas de Ghayra vis-à-vis de quelqu'un comme toi ?". Ensuite il lui dit ce qui montre que la Ghayra qu'elle avait exprimée était déplacée : "عن عروة أن عائشة زوج النبي صلى الله عليه وسلم حدثته أن رسول الله صلى الله عليه وسلم خرج من عندها ليلا؛ قالت: فغرت عليه، فجاء فرأى ما أصنع، فقال: "ما لك يا عائشة، أغرت؟" فقلت: "وما لي لا يغار مثلي على مثلك؟" فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "أقد جاءك شيطانك؟" قالت: "يا رسول الله أو معي شيطان؟" قال: "نعم". قلت: "ومع كل إنسان؟" قال: "نعم". قلت: "ومعك يا رسول الله؟" قال: "نعم، ولكن ربي أعانني عليه حتى أسلم" (Muslim, 2815). La Ghayra que Aïcha ressentit alors fut due au fait qu'elle a pensé que le Prophète aurait donné à autre qu'elle ce qui relevait cette nuit-là de son droit exclusif. Cependant, cela aurait été une injustice, et le Prophète lui répondit justement en substance qu'elle ne devait pas craindre que le Messager de Dieu commette une injustice à son encontre : "أظننت أن يحيف الله عليك ورسوله؟" (Muslim, 974).

Un jour Hâla bint Khuwaylid, la soeur de la défunte Khadîja (que Dieu les agrée), vint rendre visite au Prophète et demanda donc l'autorisation d'entrer. Lorsqu'il l'entendit demander l'autorisation d'entrer, le Prophète reconnut là - à cause de leur proche parenté - la voix et/ou l'intonation de la défunte quand elle demandait elle aussi ce genre d'autorisation ; il fut alors pris par l'émotion et dit : "Mon Dieu, c'est Hâla !". Aïcha en prit alors ombrage : elle relate : "J'éprouvai alors de la Ghayra, et dis : "Que penses-tu à une vieille dame parmi les vieilles dames de Quraysh, dont les coins des lèvres étaient rouges, décédée il y a longtemps, et que Dieu a remplacée par meilleure"" : "عن علي بن مسهر، عن هشام، عن أبيه، عن عائشة رضي الله عنها، قالت: استأذنت هالة بنت خويلد، أخت خديجة، على رسول الله صلى الله عليه وسلم، فعرف استئذان خديجة فارتاع لذلك، فقال: "اللهم هالة". قالت: فغرت، فقلت: "ما تذكر من عجوز من عجائز قريش، حمراء الشدقين، هلكت في الدهر، قد أبدلك الله خيرا منها" (al-Bukhârî, 3610, Muslim, 2437) ; "Dieu ne m'a pas donné meilleure qu'elle : elle a cru en moi quand les hommes ont mécru en moi, elle m'a cru quand ils m'ont traité de menteur, et Dieu m'a donné par elle des enfants alors qu'Il m'a privé d'enfants des (autres) femmes" : "حدثنا علي بن إسحاق، أخبرنا عبد الله، قال: أخبرنا مجالد، عن الشعبي، عن مسروق، عن عائشة، قالت: كان النبي صلى الله عليه وسلم إذا ذكر خديجة أثنى عليها، فأحسن الثناء، قالت: فغرت يوما، فقلت: ما أكثر ما تذكرها حمراء الشدق، قد أبدلك الله عز وجل بها خيرا منها، قال: "ما أبدلني الله عز وجل خيرا منها. قد آمنت بي إذ كفر بي الناس، وصدقتني إذ كذبني الناس، وواستني بمالها إذ حرمني الناس، ورزقني الله عز وجل ولدها إذ حرمني أولاد النساء" (Ahmad, 24864).

Dans le récit suivant, on lit que, pendant un voyage, le Prophète dit de charger les bagages de Safiyya, une autre de ses épouses, sur le chameau de Aïcha, et de charger les bagages de Aïcha sur la chameau de Safiyya. En fait le chameau de Aïcha était plus robuste, et ses bagages plus légers, alors que le chameau de Safiyya était plus lent et ses bagages plus lourds. Et cela ralentissait toute la caravane. Mais Aïcha n'apprécia pas et le fit savoir en disant que le Prophète était dominé par (la volonté de plaire à) Safiyya. Le Prophète tenta de la calmer en lui expliquant qu'il n'avait ordonné cela que parce que le chameau de Safiyya était en train de ralentir toute la caravane. Mais Aïcha dit : "Ne prétends-tu pas que tu es Messager de Dieu ?" Le Prophète sourit et dit : "Es-tu dans un doute par rapport à cela, ô Ummu Abdillâh ? - Ne prétends-tu pas que tu es Messager de Dieu, eh bien pourquoi n'as-tu pas fait preuve de justice ?" Son père Abû Bakr l'entendit prononcer ces paroles, s'approcha et la gifla. Le Prophète dit : "Doucement, Abû Bakr !". Celui-ci fit : "Messager de Dieu, n'as-tu pas entendu ce qu'elle a dit ?" Le Prophète dit seulement : "La femme qui éprouve de la Ghayra ne distingue plus la partie basse du oued de sa partie haute" : "عن عائشة أنها قالت: "وكان متاعي فيه خف، وكان على جمل ناج، وكان متاع صفية فيه ثقل، وكان على جمل ثقال بطيء يتبطأ بالركب، فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "حولوا متاع عائشة على جمل صفية، وحولوا متاع صفية على جمل عائشة حتى يمضي الركب". قالت عائشة: فلما رأيت ذلك قلت: "يا لعباد الله، غلبتنا هذه اليهودية على رسول الله صلى الله عليه وسلم". قالت: فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "يا أم عبد الله، إن متاعك كان فيه خف وكان متاع صفية فيه ثقل، فأبطأ بالركب، فحولنا متاعها على بعيرك، وحولنا متاعك على بعيرها". قالت: فقلت: "ألست تزعم أنك رسول الله؟". قالت: فتبسم قال: "أو في شك أنت يا أم عبد الله؟". قالت: قلت: "ألست تزعم أنك رسول الله؟ أفلا عدلت؟"، وسمعني أبو بكر، وكان فيه غرب - أي حدة -، فأقبل علي فلطم وجهي؛ فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "مهلا يا أبا بكر"، فقال: "يا رسول الله أما سمعت ما قالت؟"، فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "إن الغيرى لا تبصر أسفل الوادي من أعلاه" (Musnadu Abî Ya'lâ, 4670). La chaîne de narration de ce hadîth est soit "lâ ba'ssa bihî" (Fat'h ul-Bârî 9/403), soit "dha'îf".

Ummu Salama, devenue veuve de Abû Salama, reçut une demande en mariage de la part du Prophète (sur lui soit la paix). Elle tint à le prévenir de deux choses, l'une étant : "Je suis une femme très jalouse". Le message lui ayant été transmis, le Prophète répondit : "(...) Et je prie Dieu qu'Il fasse disparaître [d'elle tout excès de] Ghayra" : "عن أم سلمة، أنها قالت: سمعت رسول الله صلى الله عليه وسلم، يقول: "ما من مسلم تصيبه مصيبة، فيقول ما أمره الله: "{إنا لله وإنا إليه راجعون}، اللهم أجرني في مصيبتي، وأخلف لي خيرا منها"، إلا أخلف الله له خيرا منها". قالت: فلما مات أبو سلمة، قلت: أي المسلمين خير من أبي سلمة؟ أول بيت هاجر إلى رسول الله صلى الله عليه وسلم. ثم إني قلتها. فأخلف الله لي رسول الله صلى الله عليه وسلم. قالت: أرسل إلي رسول الله صلى الله عليه وسلم حاطب بن أبي بلتعة يخطبني له، فقلت: "إن لي بنتا وأنا غيور". فقال: "أما ابنتها فندعو الله أن يغنيها عنها، وأدعو الله أن يذهب بالغيرة" (Muslim, 918).

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–--- Par contre, il peut exister chez certain(s)s époux(se) de la Ghayra excessive à l'égard de leur conjoint(e) (c'est la Ghayra qui outrepasse le cadre déterminé par la Shar') : l'époux est alors dit "possessif", ne supportant même plus parfois que son épouse plaisante avec ses frères à elle, ou se rende chez son père à elle, voire qu'elle témoigne d'une grande affection vis-à-vis de leur enfant commun. La même chose peut être dite de l'épouse, qui est atteinte d'une "jalousie maladive".
C'est pourquoi le Prophète (sur lui soit la paix) a dit de [ce genre de] Ghayra : "De la Ghayra il en est que Dieu aime, et il en est que Dieu déteste. Quant à celle que Dieu aime, c'est la Ghayra se produisant face à quelque chose qui constitue véritablement une situation problématique. Et quant à celle que Dieu déteste, c'est la Ghayra se produisant face à quelque chose qui ne constitue pas une situation problématique. (...)" : "عن جابر بن عتيك، أن نبي الله صلى الله عليه وسلم كان يقول: "من الغيرة ما يحب الله ومنها ما يبغض الله؛ فأما التي يحبها الله فالغيرة في الريبة؛ وأما الغيرة التي يبغضها الله فالغيرة في غير ريبة. وإن من الخيلاء ما يبغض الله، ومنها ما يحب الله؛ فأما الخيلاء التي يحب الله فاختيال الرجل نفسه عند القتال، واختياله عند الصدقة؛ وأما التي يبغض الله فاختياله في البغي" قال موسى: "والفخر" (Abû Dâoûd, 2659, an-Nassâ'ï, 2558).
Le Messager de Dieu (que Dieu l'élève et le salue) "a interdit que l'homme (rentrant de voyage) arrive la nuit auprès de sa famille [sans l'avoir prévenue], et ce afin qu'il ne cherche à prouver que celle-ci le trompe, ou qu'il ne recherche pas ses faux-pas" : "عن جابر، قال: نهى رسول الله صلى الله عليه وسلم أن يطرق الرجل أهله ليلا يتخونهم، أو يلتمس عثراتهم" (Muslim, 715).

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Aïcha dit : "Je n'ai pas été jalouse (d'une co-épouse) autant que je l'ai été de Khadîja ; je ne l'ai pas vue, mais le Prophète parlait souvent d'elle. (...)" : "عن عائشة رضي الله عنها، قالت: "ما غرت على أحد من نساء النبي صلى الله عليه وسلم، ما غرت على خديجة؛ وما رأيتها، ولكن كان النبي صلى الله عليه وسلم يكثر ذكرها، وربما ذبح الشاة ثم يقطعها أعضاء، ثم يبعثها في صدائق خديجة. فربما قلت له: "كأنه لم يكن في الدنيا امرأة إلا خديجة!" فيقول: "إنها كانت، وكانت، وكان لي منها ولد" (al-Bukhârî, 3607, Muslim, 2435).
Cela constituait une Ghayra de Aïcha à l'encontre du Prophète par rapport à Khadîja, soit ce cas D.3 ("غارت عائشة على محبها - النبي صلى الله عليه وسلم - من أن يحب خديجةَ أكثر منها").
Je me demande si cela ne pourrait pas avoir constitué une Ghayra de Aïcha à l'encontre du souvenir de Khadîja par rapport au Prophète (soit, alors, le cas C.3 : "غارت عائشة على محبوبها - النبي صلى الله عليه وسلم - من خديجة" : pourquoi le souvenir de Khadîja continuait-il à venir, ravissant en quelque sorte la place que - selon elle - seule Aïcha devait avoir dans l'amour que le Prophète a pour ses épouses ?).

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–--- Un père a de la Ghayra au sujet de son fils, par rapport à la demande que celui-ci adresse à autrui pour ses besoins ou pour régler un problème conséquent le touchant.

Cette Ghayra entraîne de la Ghadhab (Mécontentement) si le fils, pour ses besoins quotidiens, délaisse son père et va demander de l'argent au voisin ; ou si, face à un problème conséquent, il va demander l'aide de son ami et n'en parle même pas à son père.

Un tel agissement de la part de ce fils revient à trahir l'amour que ce père a pour lui, ainsi que toute la bienfaisance dont il a témoigné à son égard depuis sa naissance ; ou bien revient de sa part à considérer ce père désormais incapable et diminué.

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Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

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