L'annonce d'un événement du futur n'est pas toujours un élément établissant le prophétat (النبوّة) de celui qui a fait cette prédiction ; en effet, parfois cela constitue seulement de la divination (الكهانة) (laquelle est interdite) ; d'autres fois cela n'est exprimé que comme probabilité - احتمال -, et est seulement le résultat d'une analyse, ou d'une intuition (cela n'est alors pas interdit) ; enfin, d'autres fois encore, cela est le résultat d'une inspiration (إلهام), ce qui en fait quelque chose de seulement "présumé" (ظنّيّ) --- Par ailleurs : Qu'en est-il de consulter un devin (كاهن) pour connaître son avenir : est-ce systématiquement du Kufr Akbar ?

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– Abû Bakr (que Dieu l'agrée), à l'orée de la mort, dit à sa fille Aïcha (que Dieu l'agrée), que tel bien matériel qu'il laissait devra être partagé selon les prescriptions du Livre de Dieu, entre ses héritiers : il y avait elle, ses deux frères et ses deux sœurs. Aïcha lui fit alors remarquer qu'elle connaissait avoir Asmâ' pour sœur, ajoutant : "Qui donc est l'autre ?". Abû Bakr lui répondit, parlant de l'enfant que l'une de ses épouses attendait alors : "Je pense que c'est une fille" : "مالك عن ابن شهاب، عن عروة بن الزبير، عن عائشة زوج النبي صلى الله عليه وسلم أنها قالت: إن أبا بكر الصديق كان نحلها جاد عشرين وسقا من ماله بالغابة. فلما حضرته الوفاة، قال: "والله يا بنية، ما من الناس أحد أحب إليّ غنىً بعدي منك؛ ولا أعز عليّ فقرًا بعدي منك. وإني كنت نحلتك جادّ عشرين وسقا؛ فلو كنتِ جددتيه واحتزتيه، كان لك؛ وإنما هو اليوم مال وارث. وإنما هما أخواك وأختاك. فاقتسموه على كتاب الله". قالت عائشة: فقلت: "يا أبت، والله لو كان كذا وكذا، لتركته. إنما هي أسماء؛ فمن الأخرى؟" فقال: "ذو بطن بنت خارجة: أراها جارية" (Muwatta' Mâlik, 1512).

Comment Abû Bakr a-t-il pu dire ici qu'il pense que l'enfant sera une fille, alors que le Coran dit que Seul Dieu sait ce qui se trouve dans les utérus (Coran 31/34), chose que la Sunna a formulé en ces termes : "عن ابن عمر، قال: قال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "مفتاح الغيب خمس لا يعلمها إلا الله: لا يعلم أحد ما يكون في غد، ولا يعلم أحد ما يكون في الأرحام، ولا تعلم نفس ماذا تكسب غدا، وما تدري نفس بأي أرض تموت، وما يدري أحد متى يجيء المطر" (al-Bukhârî, 992) ?

En fait, ce que le verset évoque, c'est de connaître cela de façon certaine, et sans avoir recours à aucun moyen : Seul Dieu sait cela (en effet, la Sunna a dit que l'ange en charge de cette fonction le sait lui aussi ; mais lui en prend connaissance après avoir posé la question ; tandis que Dieu le sait directement ; c'est même Lui qui veut que l'enfant soit ainsi et pas autrement).
Pour sa part, Abû Bakr n'a pas dit qu'il le savait (il n'a pas dit : "أعلم أنها جارية"), mais qu'il pensait que les choses étaient ainsi (il a dit : "أراها جارية"). De plus :
--- soit il avait su cela par le biais d'un rêve (chose qui est désignée plus bas comme : "le type C.A") : "قال بعض فقهائنا: وذلك لرؤيا رآها أبو بكر" (Shar'h uz-Zurqânî) ;
--- soit il n'a exprimé là qu'une intuition humaine, zann, une probabilité (chose désignée ci-après comme : "le type A") : "فهذا منه - رضي الله عنه - ظن، لم يخطئه؛ فكانت ذو بطن بنت خارجة جارية أتت بعده؛ فسميت أم كلثوم" (Al-Istidhkâr, Ibn 'Abd il-Barr) (hads, comme l'expose Ibn Hajar dont nous allons citer l'écrit plus bas).

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– Il faut ici noter que si 'Alî ibn Abî Tâlib (que Dieu l'agrée) a vraiment dit (vu que certains spécialistes sont d'avis que la chaîne de narration en est dha'îf), lorsque passant près de Ninive (se rendant à Siffîn) : "Fais preuve d'abnégation, Abû Abdillâh ! Fais preuve d'abnégation, Abû Abdillâh ! Sur la berge de l'Euphrate !", annonçant ainsi plus de 20 années à l'avance, que son fils Abû Abdillâh al-Hussein serait martyrisé à Karbalâ', non loin du fleuve, alors cela est seulement dû au fait qu'il tenait cette information du Prophète (sur lui soit la paix), qui lui-même avait reçu cette information de l'ange Gabriel. En effet, l'ensemble de la narration le dit explicitement : "حدثنا محمد بن عبيد، حدثنا شرحبيل بن مدرك، عن عبد الله بن نجي، عن أبيه، أنه سار مع علي، وكان صاحب مطهرته. فلما حاذى نينوى وهو منطلق إلى صفين، فنادى علي: "اصبر أبا عبد الله، اصبر أبا عبد الله، بشط الفرات!" قلت: "وماذا؟" قال: "دخلت على النبي صلى الله عليه وسلم ذات يوم وعيناه تفيضان". قلت: "يا نبي الله، أغضبك أحد؟ ما شأن عينيك تفيضان؟" قال: "بل قام من عندي جبريل قبل، فحدثني أن الحسين يقتل بشط الفرات". قال: فقال: "هل لك إلى أن أشمك من تربته؟" قال: "قلت: نعم". فمد يده، فقبض قبضة من تراب فأعطانيها؛ فلم أملك عيني أن فاضتا" (Ahmad, 648). Al-Albânî écrit que même si cette relation est pour sa part dha'îf, d'autres relations existent dont l'ensemble établit le fait que le Prophète (sur lui soit la paix) avait informé certains de ses Compagnons que son petit-fils al-Hussein serait tué en le lieu où il fut tué (Silsilat ul-ahâdîth is-sahîha, 3/159-162 ; n° 1171).

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Introduction :

Il y a :
--- les capacités de l'homme ;
--- celles du djinn ;
--- celles des éléments naturels ;
--- celles de l'ange ;
--- enfin celles de Dieu (la Qud'ra d'Allah étant pour sa part infinie).

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En ce qui concerne le savoir :

Seul Dieu sait tout ce qui va se passer.

– Le fait de connaître quelque chose précis du futur, par réception d'information de la part de Dieu, cela relève de la capacité de certains anges. "عن أبي هريرة، يبلغ به النبي صلى الله عليه وسلم قال: "إذا قضى الله الأمر في السماء، ضربت الملائكة بأجنحتها خضعانا لقوله، كالسلسلة على صفوان - قال علي: وقال غيره: صفوان ينفذهم ذلك - فإذا فزع عن قلوبهم، قالوا: "ماذا قال ربكم؟" قالوا للذي قال: "الحق، وهو العلي الكبير." فيسمعها مسترقو السمع، ومسترقو السمع هكذا واحد فوق آخر - ووصف سفيان بيده، وفرج بين أصابع يده اليمنى، نصبها بعضها فوق بعض - فربما أدرك الشهاب المستمع قبل أن يرمي بها إلى صاحبه فيحرقه، وربما لم يدركه حتى يرمي بها إلى الذي يليه، إلى الذي هو أسفل منه، حتى يلقوها إلى الأرض - وربما قال سفيان: حتى تنتهي إلى الأرض - فتلقى على فم الساحر، فيكذب معها مائة كذبة، فيصدق فيقولون: "ألم يخبرنا يوم كذا وكذا، يكون كذا وكذا، فوجدناه حقا؟" للكلمة التي سمعت من السماء" (al-Bukhârî, 4424). 864
Exceptionnellement, Dieu le fait savoir à certains hommes :
--- par le biais d'une wah'y qat'î : D (ce qui peut prendre la forme d'un ilhâm qat'î) - cet homme est alors un prophète de Dieu - ;
--- ou par le biais d'un ilhâm zannî : C.B - cet homme est alors un pieux non-prophète ;
--- ou par le biais d'un rêve véridique : C.A - cela peut arriver même à un mushrik, à l'instar du roi d'Egypte de l'époque de Joseph (sur lui soit la paix), de même que de ses deux compagnons de prison.

– Le fait de connaître quelque chose du futur par dérobement d'information en écoutant des anges qui en discutent, cela relève de la capacité de certains djinns. "عن عائشة، رضي الله عنها قالت: سأل رسول الله صلى الله عليه وسلم ناس عن الكهان، فقال: "ليس بشيء". فقالوا: "يا رسول الله، إنهم يحدثونا أحيانا بشيء فيكون حقا". فقال رسول الله صلى الله عليه وسلم: "تلك الكلمة من الحق، يخطفها من الجني، فيقرها في أذن وليه، فيخلطون معها مائة كذبة" (al-Bukhârî, 5429) ; "عن عائشة رضي الله عنها، زوج النبي صلى الله عليه وسلم، أنها سمعت رسول الله صلى الله عليه وسلم، يقول: "إن الملائكة تنزل في العنان: وهو السحاب، فتذكر الأمر قضي في السماء، فتسترق الشياطين السمع فتسمعه، فتوحيه إلى الكهان، فيكذبون معها مائة كذبة من عند أنفسهم" (al-Bukhârî, 3038).

– Le fait de prédire quelque chose du futur par projection analytique, cela relève de la simple capacité humaine ; certains individus en sont dotés plus que d'autres (cela entre en compte dans certains points du Fiqh, dans ce qu'on appelle Fiqh ul-ma'âlât).

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Ibn Hajar a exposé différents types de "prédiction de l'avenir" :

"وكانت الكهانة في الجاهلية فاشية خصوصا في العرب لانقطاع النبوة فيهم. وهي على أصناف. منها ما يتلقونه من الجن فإن الجن كانوا يصعدون إلى جهة السماء فيركب بعضهم بعضا إلى أن يدنو الأعلى بحيث يسمع الكلام فيلقيه إلى الذي يليه إلى أن يتلقاه من يلقيه في أذن الكاهن فيزيد فيه فلما جاء الإسلام ونزل القرآن حرست السماء من الشياطين وأرسلت عليهم الشهب فبقي من استراقهم ما يتخطفه الأعلى فيلقيه إلى الأسفل قبل أن يصيبه الشهاب (...) ثانيها ما يخبر الجني به من يواليه بما غاب عن غيره مما لا يطلع عليه الإنسان غالبا أو يطلع عليه من قرب منه لا من بعد. ثالثها ما يستند إلى ظن وتخمين وحدس وهذا قد يجعل الله فيه لبعض الناس قوة، مع كثرة الكذب فيه. رابعها ما يستند إلى التجربة والعادة فيستدل على الحادث بما وقع. ومن هذا القسم الأخير ما يضاهي السحر؛ وقد يعتضد بعضهم في ذلك بالزجر والطرق والنجوم وكل ذلك مذموم شرعا" (Fath' ul-bârî 10/267).

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Extrait de mon article sur la Shahâda et le Ghayb :

Dans l'ensemble du Ghayb Haqîqî Muqayyad :

----- il y a des choses du Ghayb dont l'homme a l'aptitude (takwînî) à prendre connaissance, mais qu'il lui est interdit (tashrî'an) de chercher à savoir (ainsi en est-il des informations de ce qui va se passer dans le futur, que l'humain a l'aptitude à chercher à connaître, par exemple en se liant à un djinn capable de capter des informations auprès d'anges parlant de certains éléments allant se passer dans le futur ; cependant, cela lui a été interdit par Dieu) ;

----- et il y a des choses du Ghayb dont l'homme prend connaissance de façon agréée par Dieu : soit par le biais de son Qalb ; soit par le biais d'un Wah'y ; soit par le biais d'un Ilhâm (forcément zannî) ; soit par le biais d'un rêve véridique (zannî).

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De ce Ghayb Haqîqî Muqayyad dont la créature prend connaissance de façon agréée par Dieu, il y a :

------- ce dont la connaissance a été communiquée à certains Anges seulement ("Untel va mourir cette année" ; "Tel événement va se produire cette année") ;
------- ce dont la connaissance a été communiquée à certains humains seulement : il s'agit de certains prophètes ;
------- ce dont la connaissance a été communiquée à certains humains seulement : certains rêves véridiques donnent des informations individuelles sur certains événements allant se passer dans le futur (ainsi, le roi d'Egypte reçut en rêve l'information qu'il y aurait, dans son pays et la région, 7 années d'abondance, suivies de 7 années de sécheresse) ;
------- ce dont la connaissance a été communiquée à l'attention de tous les humains (certains y apportant foi, et d'autres pas, mais en tous cas Dieu l'a porté à leur connaissance).

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Et de ce Ghayb Haqîqî Muqayyad dont la connaissance a été communiquée à l'attention de tous les humains, il y a :

------- ce dont les humains peuvent et doivent prendre connaissance par le biais du 'Aql bi-l-Qalb,
------- ce dont ils peuvent et doivent prendre connaissance par le biais du Sam' ul-Wah'y.

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Type A) Soit le fait que la personne donne cette information, cela relève de l'expression de sa simple capacité d'analyse ou d'intuition (au sens non-religieux du terme) : cela relève de l'intelligence ou de la sagacité de la personne, et rien de plus :

Ibn ul-'Uthaymîn écrit que certaines personnes peuvent déduire globalement, à partir de certaines expressions du visage de celui-ci, ce que leur interlocuteur pense à l'instant présent ; cela ne relève nullement de la prétention à la connaissance du Ghayb : "لأن الكاهن: من يخبر عن المغيبات في المستقبل؛ وقيل: الذي يخبر عما في الضمير. وهو نوع من الكهانة في الواقع إذا لم يستند إلى فراسة ثاقبة؛ أما إذا كان يخبر عما في الضمير استنادا إلى فراسة، فإنه ليس من الكهانة في شيء، لأن بعض الناس قد يفهم ما في الإنسان اعتمادا على أسارير وجهه ولمحاته، وإن كان لا يعلمه على وجه التفصيل، لكن يعلمه على سبيل الإجمال" (Al-Qawl ul-mufîd, pp. 305-306). Cependant, cela ne concerne pas le futur.

– Un cas voisin (et qui ne concerne toujours pas le futur) : en voyage vers Tabûk, passant par Wâdi-l-Qurâ, le Prophète (sur lui soit la paix) dit à ses Compagnons, au sujet des dattiers d'un verger d'une dame : "Evaluez (la quantité de dattes que ces dattiers portent)" ; chacun évalua cela ; le Prophète (sur lui soit la paix) dit pour sa part : "10 Wasq". Au retour, la récolte ayant été faite, ils s'enquirent auprès de la dame de la quantité des dattes que son verger avait produites ; ce fut comme le Prophète l'avait évalué : "عن أبي حميد الساعدي، قال: غزونا مع النبي صلى الله عليه وسلم غزوة تبوك. فلما جاء وادي القرى إذا امرأة في حديقة لها، فقال النبي صلى الله عليه وسلم لأصحابه: "اخرصوا"، وخرص رسول الله صلى الله عليه وسلم عشرة أوسق. فقال لها: "أحصي ما يخرج منها". (...). وأهدى ملك أيلة للنبي صلى الله عليه وسلم بغلة بيضاء، وكساه بردا وكتب له ببحرهم. فلما أتى وادي القرى قال للمرأة: "كم جاء حديقتك؟"، قالت: "عشرة أوسق"، خرص رسول الله صلى الله عليه وسلم" (Muslim, 1392 ; al-Bukhârî, 1411).

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– Alors que 'Alî ibn Abî Tâlib (que Dieu l'agrée) trouvait pour sa part que le Prophète (sur lui soit la paix) allait mieux et était en voie de guérison, al-Abbâs (que Dieu l'agrée) lui prit la main et lui dit que le Prophète allait mourir avant que 3 jours s'écoulent. Cela concerne le futur.

Mais al-'Abbâs ne prédisait pas là l'avenir comme le fait un devin, il avait tout simplement reconnu sur le visage du Prophète (son neveu) les signes de la mort imminente que présentent les visages des fils de 'Abd ul-Muttalib, signes dont 'Alî n'avait pour sa part pas connaissance : "عن عبد الله بن عباس أن علي بن أبي طالب رضي الله عنه خرج من عند رسول الله صلى الله عليه وسلم في وجعه الذي توفي فيه، فقال الناس: "يا أبا حسن، كيف أصبح رسول الله صلى الله عليه وسلم؟" فقال: "أصبح بحمد الله بارئا". فأخذ بيده عباس بن عبد المطلب فقال له: "أنت والله بعد ثلاث عبد العصا، وإني والله لأرى رسول الله صلى الله عليه وسلم سوف يتوفى من وجعه هذا، إني لأعرف وجوه بني عبد المطلب عند الموت" (al-Bukhârî, 4182).

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– De même encore, des animaux ressentent l'imminence de certaines catastrophes naturelles telles que tremblement de terre ou tempête, quelque temps avant qu'elles se produisent : ils ne font en fait que déceler par leurs sens physiques très développés, certains signes matériels avant-coureurs se produisant avant la grande catastrophe, mais qui sont trop subtils pour pouvoir être décelés par les sens de l'homme : certains humains, ayant d'une part observé le comportement inhabituel de ces animaux et d'autre part assisté à l'arrivée de la catastrophe, ont établi le lien entre les deux, et déduisent du premier l'imminence du second. De même, le fait que toutes les hirondelles volent bas annonce l'imminence de la pluie ; c'est tout simplement que, avant qu'il pleuve, l'air se charge d'humidité, ce qui oblige les petits insectes à voler plus bas, leurs ailes étant alourdies par les molécules d'eau ; ce qui, à son tour, amène les hirondelles à voler plus bas, elles qui cherchent à becqueter ces bestioles.

– De même, par projection, certains hommes proposent une analyse (qu'ils disent bien : supposée) de l'avenir de telle société ou de tel pays : à condition qu'ils n'émettent qu'une prévision, et l'expriment sur le ton de ce qui est de l'ordre du possible et du probable, cela relève de la simple analyse sociologique, et est entièrement autorisé.

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Type B) Soit le fait que la personne donne cette information relève de l'a-normal : c'est le fait d'un djinn :

--- B.A) Et soit le fait, pour cette personne humaine, d'obtenir cette information du djinn est autorisé : pour cela : l'information ne doit pas concerner une prédiction du futur ; par ailleurs - et cela est valable pour toute relation avec un djinn - l'obtention de cette information de la part du djinn ne doit pas être en contrepartie de quelque chose que, shar'an, il est interdit de faire :

Ibn Taymiyya et Ibn ul-'Uthaymîn écrivent que prendre connaissance - en cherchant à le faire - de quelque chose relevant du Ghayb Nisbî et relatif au passé ou au présent (mais pas du futur), par le biais d'un djinn avec lequel on n'entretient pas une relation d'adoration ni de ma'siya, cela est autorisé. Il y a un hadîth qui dit ceci : "Celui qui se rend auprès d'un 'arrâf, le questionne au sujet de quelque chose puis le croit dans ce qu'il dit, celui-là Dieu n'acceptera aucune de ses prières pendant quarante jours" : "عن بعض أزواج النبي صلى الله عليه وسلم عن النبي صلى الله عليه وسلم قال: "من أتى عرافا فسأله عن شيء، لم تقبل له صلاة أربعين ليلة" (Muslim, 2230) / "عن بعض أزواج النبي صلى الله عليه وسلم، عن النبي صلى الله عليه وسلم قال: "من أتى عرافا فصدقه بما يقول، لم تقبل له صلاة أربعين يوما" (Ahmad, 16638).
D'après ces ulémas, c'est seulement chercher à prédire l'avenir qui est visé dans ce hadîth et interdit, tandis qu'employer les services d'un djinn avec qui on n'a pas une relation de servitude ('abdiyya) pour rechercher un objet égaré ou une personne portée disparue, cela n'est pas interdit. La raison semble en être que ce genre d'informations relève du Ghayb Nisbî ; or le djinn (disposant de certaines aptitudes plus grandes que celles que l'humain possède) a la capacité de rechercher (plus facilement qu'un humain) un objet égaré ou une personne disparue : cela est relaté par rapport à Omar ibn-ul-Khattâb (radhiyallâhu 'anh), que un jour les autres Compagnons ne savaient plus où il se trouvait. Pour le djinn il s'agit donc de Mushâhada.

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--- B.B) Soit le fait, pour cette personne humaine, d'obtenir cette information du djinn est interdit : c'est le cas (entre autres) de la divination (qui consiste à prédire quelque chose du futur) :

La connaissance de ce qui va se passer dans le futur relève du Ghayb Haqîqî : et on n'a pas le droit, tashrî'an, de chercher à le connaître ; ce n'est que Dieu qui choisit parfois d'en faire connaître un élément (soit par inspiration, soit par rêve, comme nous le verrons en C).

Dès lors :

----- Celui d'entre les devins qui prétend connaître le Ghayb Haqîqî Mutlaq commet du shirk akbar, vu que Seul Dieu connaît cela.

----- Quant à celui d'entre eux qui ne prétend pas cela mais reconnait recevoir des informations partielles, Ghayb Haqîqî Muqayyad, du djinn qui est avec lui, celui-là commet du shirk akbar dans la mesure où ce djinn qui va tenter de se saisir d'une information liée au futur en la dérobant auprès d'anges, ce djinn n'en informe que son walî, c'est-à-dire ici : celui qui est lié à lui par un pacte d'adoration, 'ibâda kub'râ.

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Type C) Soit le fait que la personne donne cette information relève de l'a-normal, mais la personne n'a rien fait d'interdit, au contraire ; cependant, cela ne va pas jusqu'à être un constituant de prophétat :

Il s'agit ici de prendre connaissance - sans avoir cherché à le faire - de quelque chose du futur, par le moyen du rêve, ou de l'inspiration reçue en état de veille.

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--- C.A) Par le rêve (ru'yâ manâmiyya), certains hommes prennent connaissance de certains événements précis allant se passer :

Ce fut le cas du roi d'Egypte de l'époque du prophète Joseph, ainsi que des deux compagnons de prison de ce dernier (Coran, sourate 12).
De même, Omar ibn ul-Khattâb (que Dieu l'agrée) a vu en rêve qu'un coq le becquetait par trois fois : il en déduisit que cela signifiait probablement que sa mort était devenue proche : "عن معدان بن أبي طلحة، أن عمر بن الخطاب، خطب يوم الجمعة، فذكر نبي الله صلى الله عليه وسلم، وذكر أبا بكر قال: "إني رأيت كأن ديكا نقرني ثلاث نقرات، وإني لا أراه إلا حضور أجلي. وإن أقواما" (Muslim, n° 567).

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--- C.B) L'inspiration reçue en état de veille (ilhâm) concernant des événements détaillés devant se passer dans le futur, de même que le dévoilement (kashf) par vision (taswîr) concernant des événements détaillés devant se passer dans le futur, ne sont pas propres aux prophètes, dit Ibn Taymiyya ; cependant, précise-t-il, s'il s'agit d'un non-prophète, cela est forcément un ilhâm qui est : zannî :

Il écrit : "والجواب أن يقال: أما الإخبار ببعض الأمور الغائبة، فمن هو دون عليٍ يخبر بمثل ذلك، فعليٌ أجل قدرا من ذلك. وفي أتباع أبي بكر وعمر وعثمان من يخبر بأضعاف ذلك، وليسوا ممن يصلح للإمامة، ولا هم أفضل أهل زمانهم. ومثل هذا موجود في زماننا وغير زماننا. وحذيفة بن اليمان وأبو هريرة وغيرهما من الصحابة كانوا يحدثون الناس بأضعاف ذلك؛ وأبو هريرة يسنده إلى النبي صلى الله عليه وسلم؛ وحذيفة تارة يسنده، وتارة لا يسنده، وإن كان في حكم المسند. وما أخبر به هو وغيره قد يكون مما سمعه من النبي صلى الله عليه وسلم؛ وقد يكون مما كوشف هو به. وعمر رضي الله عنه قد أخبر بأنواع من ذلك. والكتب المصنفة في كرامات الأولياء وأخبارهم، مثل ما في كتاب "الزهد" للإمام أحمد، و"حلية الأولياء" و"صفوة الصفوة" و"كرامات الأولياء" لأبي محمد الخلال وابن أبي الدنيا واللالكائي: فيها من الكرامات عن بعض أتباع أبي بكر وعمر، كالعلاء بن الحضرمي نائب أبي بكر، وأبي مسلم الخولاني وبعض أتباعهما، وأبي الصهباء، وعامر بن عبد قيس، وغير هؤلاء، ممن عليٌ أعظم منه؛ وليس في ذلك ما يدل على أنه يكون هو الأفضل من أحد من الصحابة، فضلا عن الخلفاء. وهذه الحكايات التي ذكرها عن عليٍ لم يذكر لشيء منها إسنادا؛ وفيها ما يعرف صحته؛ وفيها ما يعرف كذبه؛ وفيها ما لا يعرف هل هو صدق أم كذب. (...) ومعرفة بعض الصحابة والصالحين ببعض المستقبلات لا توجب أن يكون عالما بها كلها. والغلاة الذين يدعون علم عليٍ بالمستقبلات مطلقا كذب ظاهر. فالعلم ببعضها ليس من خصائصه؛ والعلم بها كلها لم يحصل له ولا لغيره" (MS 4/276-278).

Il est relaté que, avant la bataille de al-Qâdissiyya contre les Perses, le calife Omar ibn ul-Khattâb écrivit à Sa'd ibn Abî Waqqâs : "Il a été placé dans mon cœur que lorsque vous allez rencontrer (cet) ennemi, vous allez le défaire." : "كتب إلي السري، عن شعيب، عن سيف، عن القعقاع بإسناده، قال: وكتب عمر إلى سعد: "إني قد ألقي في روعي أنكم إذا لقيتم العدو هزمتموهم. فاطرحوا الشك، وآثروا التقية عليه. فإن لاعب أحد منكم أحدا من العجم بأمان أو قرفه باشارة او بلسان، فكان لا يدري الأعجمي ما كلمه به، وكان عندهم أمانا، فأجروا ذلك له مجرى الأمان. وإياكم والضحك. والوفاء الوفاء! فإن الخطأ بالوفاء بقية، وإن الخطا بالغدر الهلكة. وفيها وهنك، وقوة عدوكم، وذهاب ريحكم، وإقبال ريحهم. واعلموا أني أحذركم أن تكونوا شينا على المسلمين وسببا لتوهينهم" (Ta'rîkh ut-Tabarî).

Il y a ces événements, que Ibn ul-Qayyim relate au sujet de Ibn Taymiyya : certains concernent l'état intérieur de son vis-à-vis, d'autres concernent des événements allant se passer dans le futur :
"ولقد شاهدت من فراسة شيخ الإسلام ابن تيمية - رحمه الله - أمورا عجيبة. وما لم أشاهده منها أعظم وأعظم. ووقائع فراسته تستدعي سفرا ضخما.
أخبر أصحابه بدخول التتار الشام سنة تسع وتسعين وستمائة، وأن جيوش المسلمين تكسر، وأن دمشق لا يكون بها قتل عام ولا سبي عام، وأن كلب الجيش وحدته في الأموال؛ وهذا قبل أن يهم التتار بالحركة. ثم أخبر الناس والأمراء سنة اثنتين وسبعمائة لما تحرك التتار وقصدوا الشام أن الدائرة والهزيمة عليهم، وأن الظفر والنصر للمسلمين؛ وأقسم على ذلك أكثر من سبعين يمينا؛ فيقال له: "قل إن شاء الله"، فيقول: "إن شاء الله تحقيقا لا تعليقا"؛ وسمعته يقول ذلك. قال: "فلما أكثروا علي، قلت: لا تكثروا! كتب الله تعالى في اللوح المحفوظ أنهم مهزومون في هذه الكرة، وأن النصر لجيوش الإسلام"؛ قال: "وأطمعت بعض الأمراء والعسكر حلاوة النصر قبل خروجهم إلى لقاء العدو".
وكانت فراسته الجزئية في خلال هاتين الواقعتين مثل المطر.
ولما طُلِب إلى الديار المصرية، وأريدَ قتلُه - بعدما أنضجت له القدور، وقلبت له الأمور -، اجتمع أصحابه لوداعه، وقالوا: "قد تواترت الكتب بأن القوم عاملون على قتلك"؛ فقال: "والله لا يصلون إلى ذلك أبدا"؛ قالوا: "أفتحبس؟" قال: "نعم، ويطول حبسي؛ ثم أخرج وأتكلم بالسنة على رءوس الناس". سمعته يقول ذلك.
ولما تولى عدوه الملقب بالجاشنكير الملك، أخبروه بذلك، وقالوا: "الآن بلغ مراده منك". فسجد لله شكرا وأطال. فقيل له: "ما سبب هذه السجدة؟" فقال: "هذا بداية ذله ومفارقة عزه من الآن، وقرب زوال أمره". فقيل: "متى هذا؟" فقال: "لا تربط خيول الجند على القرط حتى تغلب دولته". فوقع الأمر مثل ما أخبر به. سمعت ذلك منه.
وقال مرة: "يدخل عليّ أصحابي وغيرهم، فأرى في وجوههم وأعينهم أمورا لا أذكرها لهم. فقلت له - أو غيري -: "لو أخبرتهم؟" فقال: "أتريدون أن أكون معرِّفا كمعرّف الولاة؟" وقلت له يوما: "لو عاملتنا بذلك لكان أدعى إلى الاستقامة والصلاح"؛ فقال: "لا تصبرون معي على ذلك جمعة"، أو قال: "شهرا.
وأخبرني غير مرة بأمور باطنة تختص بي مما عزمت عليه، ولم ينطق به لساني.
وأخبرني ببعض حوادث كبار تجري في المستقبل، ولم يعيّن أوقاتها. وقد رأيت بعضها، وأنا أنتظر بقيتها.
وما شاهده كبار أصحابه من ذلك أضعاف أضعاف ما شاهدته. والله أعلم" (Madârij us-sâlikîn, 2/510-511).

Il y a encore cet événement, que al-Bayhaqî rapporte comme relation de Ibrâhîm al-Khawwâs au sujet d'un personnage qu'il a rencontré ; néanmoins, cela concernait quelque chose du passé : "أخبرنا أبو عبد الرحمن محمد بن الحسين السلمي قال: سمعت الحسين بن يحيى يقول: سمعت جعفر الخلدي يقول: سمعت إبراهيم الخواص يقول: "كنت في جبل لكام، فرأيت رمانا، فاشتهيت، فدنوت، فأخذت منها واحدا فشققته، فوجدته حامضا. فمضيت وتركت الرمان. فرأيت رجلا مطروحا، قد اجتمع عليه الزنابير، فقلت: "السلام عليك". فقال: "وعليك السلام يا إبراهيم". قلت: "وكيف عرفتني؟" قال: "من عرف الله لا يخفى عليه شيء من دون الله". فقلت: "أرى لك حالا مع الله. فلو سألتَه أن يحميك ويقيك الأذى من هذه الزنابير". فقال لي: "أرى لك حالا مع الله. فلو سألتَه أن يقيك شهوة الرمان! فإن لدغ الرمان يجد الإنسان ألمه في الآخرة؛ ولدغ الزنابير يجد ألمه في الدنيا". وتركتُه ومضيتُ." قال الشيخ: وهذا عندي محمول على أنه يعرف في منامه من علم الغيب ما عسى يحتاج إليه، أو يحدث على لسانه ملك بشيء من ذلك، كما قال النبي صلى الله عليه وسلم: "قد كان يكون في الأمم محدثون، فإن يكن في أمتي منهم أحد كان عمر بن الخطاب منهم". وقد روي عن إبراهيم بن سعد أنه قال في هذا الحديث: يعني يلقى في روعه" (Shu'ab ul-îmân, 5350).

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Type D) Soit le fait que la personne donne cette information relève de l'a-normal et relève véritablement d'un miracle faisant de celui qui le produit : un prophète :

Cela c'est lorsque c'est de façon certaine (qat'î) que cela provient de Dieu (c'est ce qui fait la différence avec le type C, où ce n'est que de façon zannî que la personne peut établir que cela provient de Dieu).

Lire :
--- le point III dans l'article : La Révélation de Dieu (الوحي) - Les différents moyens par lesquels Dieu parle à un humain ;
--- Quelques-unes des prophéties faites par Muhammad ibn Abdillâh (صلى الله عليه وسلم).

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Quant au fait, pour une personne, de consulter un devin (B.B) :

----- La personne qui consulte un devin pour le confondre ne commet pas d'interdit.

----- La personne qui le consulte sans que ce soit pour le confondre, mais ensuite ne le croit pas, cette personne-là commet un acte interdit qui ne va pas jusqu'au kufr akbar.

----- La personne qui le consulte et croit ce qu'il dit :
--------- si cette personne croit que ce devin ne possède pas le Ghayb Haqîqî Mutlaq, n'ayant fait qu'obtenir cette information d'un esprit (djinn) l'ayant lui-même entendue d'anges, et elle croit (tasdîq) ce que ce devin lui dit là, alors, comme certains ulémas le disent, en allant consulter ce devin et en croyant ce qu'il dit, cette personne commet une action interdite qui ne va pas jusqu'au kufr akbar ;
--------- par contre, si cette personne croit que ce devin possède le Ghayb Haqîqî Mutlaq, elle a là une croyance de kufr akbar.

En fait le hadîth dit ceci : "Celui qui se rend auprès d'un kâhin puis le croit dans ce qu'il dit, ou vient à sa femme pendant sa période menstruelle, ou vient à sa femme par son anus, celui-là a désavoué ce qui a été révélé à Muhammad – que Dieu l'élève et le salue" : "حدثنا موسى بن إسماعيل، حدثنا حماد ح وحدثنا مسدد، حدثنا يحيى، عن حماد بن سلمة، عن حكيم الأثرم، عن أبي تميمة، عن أبي هريرة، أن رسول الله صلى الله عليه وسلم قال: "من أتى كاهنا" / قال موسى في حديثه "فصدقه بما يقول"، ثم اتفقا "أو أتى امرأة" / قال مسدد "امرأته حائضا أو أتى امرأة" / قال مسدد "امرأته في دبرها، فقد برئ مما أنزل على محمد" (Abû Dâoûd, 3904) (également cité dans Al-Qawl ul-mufîd, p. 536). Cependant, at-Tirmidhî (qui a lui aussi rapporté ce hadîth, avec quelques mots légèrement différents) a, en commentaire, écrit que le terme "kufr" n'y est pas en son sens de kufr akbar : "وإنما معنى هذا عند أهل العلم على التغليظ. وقد روي عن النبي صلى الله عليه وسلم قال: "من أتى حائضا فليتصدق بدينار"؛ فلو كان إتيان الحائض كفرا، لم يؤمر فيه بالكفارة" (Jâmi' ut-Tirmidhî sur 135).
Ce qui n'empêche pas que certaines circonstances en font du kufr akbar.

Wallâhu A'lam (Dieu sait mieux).

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